LOMBOSTAT ET TROUBLES POSTURAUX CHEZ LES LOMBALGIQUES CHRONIQUES LUMBAR SUPPORT AND POSTURAL DISORDERS IN CHRONIC LOW BACK PAIN S. ESSEGHIR, J. CHRIFI, S. HAMDOUN, H. RAHALI KHACHLOUF, Service de rééducation et réadaptation fonctionnelle- Hôpital Militaire Principal de Tunis- Mont Fleury-CP 1008-Tunisie. Auteur correspondant: Dr Sarra Ességhir : service rééducation réadaptation fonctionnelle HMPIT ;Tél :00216 98 312 036 Email : [email protected] Résumé : Objectifs : Evaluer l’effet du port du lombostat sur les troubles posturaux chez les lombalgiques chroniques. Matériels et méthodes : Etude transversale incluant des patients adressés pour prise en charge de lombalgies et/ou de lombosciatalgies chroniques comprenant : -une évaluation clinique du trouble postural, -une évaluation stabilométrique statique de l’équilibre sur plateforme winposture dans quatre situations : yeux ouverts sans lombostat, yeux fermés sans lombostat, yeux ouverts avec lombostat, et yeux fermés avec lombostat. Résultats : Il s’agit de 50 patients d’âge moyen 40,86 ans, se répartissant en 23 femmes et 27 hommes souffrant de lombalgies / lombosciatalgies depuis une durée moyenne de 55,92 mois. L’évaluation stabilométrique sur plateforme winposture avait révélé un trouble postural chez 62% de ces patients. Après le port du lombostat, il y a eu amélioration des troubles dans 44% des cas. Cette amélioration était significative (p0,05) en ce qui concerne la surface S et le X moyen. Conclusion: Le port du lombostat contribue, en plus de ses autres fonctions, à la correction des troubles de l’équilibre postural chez les lombalgiques chroniques. Mots clés : équilibre postural, posture, lombostat. ABSTRACT : Objectives: To evaluate the effect of lumbar support on the postural disorders in chronic low back pain. Materials and methods: A cross-sectional study involving patients referred for management of chronic low back -Clinical pain and/or evaluation of lombosciatalgies including: postural disorders, -Stabilometric evaluation of the static balance on a winposture platform in four situations: eyes open without lumbar support , eyes closed without lumbar support , eyes open with lumbar support, and eyes closed with lumbar support. Results : There are 50 patients divided in to 23 women and 27 men, of mean age 40.86 years and suffering from low back pain / lombosciatalgies from an average of 55.92 months. The stabilometric evaluation on winposture platform revealed a postural disorder in 62% of these patients. After wearing the lumbar support, there was improvement in 44% of cases. This improvement was significant (p0,05) with regard to the surface S and the X means. Conclusion: Wearing a lumbar support helps, in addition to his other functions, the correction of postural disorders in chronic low back pain. Keywords: postural balance, posture, lumbar support. 1-INTRODUCTION : La lombalgie est une pathologie extrêmement fréquente. Seulement deux personnes sur dix passeront leur existence sans douleur rachidienne [20]. En France, 23,5 % des patients consultant un rhumatologue et 2 à 4,5 % des patients consultant un médecin généraliste souffrent de lombalgies [20]. Environ 7 % de ces patients resteront lombalgiques 6 mois après le début des symptômes. C’est ce petit groupe de patients, dont la symptomatologie passe à la chronicité, qui est responsable de la plus grande partie du coût entraîné par cette pathologie [22]. Les causes du mal de dos sont multiples. Nous en citons essentiellement les dérangements intervertébraux ou "vertèbres déplacées" qui sont à l'origine des lumbagos, les atteintes anatomiques des articulations et des disques inter vertébraux (hernie discale) par des traumatismes graves ou par le vieillissement et l'usure (arthrose) et enfin les troubles posturaux permanents entraînant des contractures et des inflammations locales. En effet, il a déjà été démontré que la modification d'une ligne, le blocage d'une ou de plusieurs articulations vertébrales entraînent un trouble postural et une limitation de la mobilité vertébrale qui devient douloureuse. Par ailleurs, nous avons remarqué que les lombalgiques sont souvent améliorés par le port de ceinture lombaire. Nous nous proposons ainsi dans cette étude d’évaluer l’influence du port du lombostat sur les troubles de l’équilibre postural chez les lombalgiques chroniques. 2-PATIENTS ET METHODES : 2.1. PATIENTS : Ont été inclus dans cette étude, après obtention de consentement éclairé pour une évaluation clinique, instrumentale et radiologique, des patients suivis à notre consultation pour prise en charge rééducative de lombalgies chroniques. 2.1.1. Critères d’inclusion : *lombalgie chronique (évoluant depuis au moins trois mois selon la société française de rhumatologie) commune, mécanique avec ou sans radiculalgies. 2.1.2. Critères d’exclusion : *lombalgie symptomatique d’une pathologie inflammatoire chronique, *radiculalgies hyperalgiques au moment de l’évaluation. *pathologie neurologique et/ou musculaire, *atteintes orthopédiques sévères du tronc et des membres inférieurs (inégalité de longueur des membres inférieurs, scoliose. . .), *antécédents otorhinolaryngologiques (ORL) avec troubles de la marche et de l’équilibre, *antécédents de fracture ou de chirurgie rachidienne, *désordres psychiatriques graves, * refus de participer à l’étude. 2.2 METHODES : 2.2.1. Sources de données: Chaque patient a eu : * un interrogatoire précisant : - les caractéristiques sociodémographiques : âge, sexe, niveau éducationnel, statut familial, - les antécédents personnels médicaux, chirurgicaux et gynécoobstétricaux ; -le type ainsi que l’ancienneté de la symptomatologie. * un examen clinique comprenant : -la recherche d’un éventuel trouble postural dans le plan frontal - l’appréciation du profil rachidien statique dans le plan sagittal en mesurant les courbures physiologiques grâce au fil à plomb positionné de façon tangente à la cyphose dorsale et laissé tomber dans le plan de la raie des fesses. On mesure avec une règle graduée en millimètres la distance séparant le fil à plomb des épineuses C7, D7, L3 et S2. Sont ainsi évaluées la lordose cervicale, la cyphose dorsale et la lordose lombaire. Pour un profil sagittal normal, le fil à plomb serait tangent en D7 et S2, les flèches sagittales en C7 (flèche cervicale) et L3 (flèche lombaire) sont environ de 30 à 40 mm; - un éventuel syndrome rachidien (la mesure de l’indice de shöber) ou radiculaire (signe de Lasègue), - la présence ou non de rétraction des plans sous pelviens aussi bien antérieur (rétraction du droit antérieur par la mesure de la distance talon fesse) que postérieur (les ischio-jambiers par la mesure de l’angle poplité). -Les éventuelles anomalies de l’examen neurologique ont été également notées (troubles vésico-sphinctériens ou sensitivo-moteurs ) . *une exploration radiologique comprenant une radiographie du rachis lombaire de face et de profil et/ou une radiographie D1-S1 et/ou une TDM et/ou IRM lombaire. Ont été recherchés à travers ce bilan une attitude scoliotique ou une éventuelle scoliose constituée, une discopathie ou un vrai pincement discal,une anomalie transitionnelle telle qu’une lombalisation de S1 ou une sacralisation de L5, une anomalie des courbures rachidiennes, une éventuelle hernie ou simple protrusion discale avec ou sans conflit disco-radiculaire et enfin une arthrose rachidienne. *une évaluation instrumentale de la posture sur une plate-forme statique type Winposture® (fig.1). Il s’agit d’une plate-forme électronique extra-plate, de gestion 16 bits, munie de 3 capteurs disposés en triangle, enregistrant la résultante des forces d’appui d’un sujet debout, durant une période de 51 secondes. Elle analyse, de 5 à 40 fois par seconde, la position du centre de pression. Ce dernier est assimilable à la projection du centre de gravité lors d’une station debout habituelle. Elle permet des enregistrements fiables à 40 Hertz. Toute l’électronique miniaturisée de traitement du signal est intégrée dans l’épaisseur de la plate-forme. La connexion de la plate-forme se fait directement sur le port série ou USB d’un ordinateur. Elle est normalisée suivant les normes de l’Association Française de Posturologie 85. La plate-forme comporte également une schématisation de la position de référence des pieds, et au besoin, des cales de positionnement sont utilisés. Le protocole d’évaluation a été fait sujet debout sur la plate-forme, face à une cible à hauteur du regard, les pieds étant en position de référence indiquée sur la plate forme. Il a inclus quatre épreuves : une épreuve yeux ouverts sans lombostat (YOSL), une épreuve yeux fermés sans lombostat (YFSL), une épreuve yeux ouverts avec lombostat (YOAL) et une épreuve yeux fermés avec lombostat (YFAL) . Les variables dépendantes, ont été mesurées pour chacun des tests sur un enregistrement de 51,2 secondes à la fréquence de 5 hertz, elles ont intéressé : La surface de l’ellipse de confiance (fig.2): Elle comprend 90 % des positions échantillonnées du centre des pressions (CP). Elle est la mesure statistique la plus rigoureuse de la dispersion de ces positions et donne une idée sur la stabilité du sujet. La valeur normale de cette surface pour un adulte sain est en moyenne de 91mm2 YO (39-210mm2) et de 225mm2 YF (79638mm2) [14]. Une étude de la désaxation latérale du centre de pression (CP) représentée par la projection de celui-ci selon l’axe frontal (latéro-latéral) ou axe des X (X moyen). La valeur normale pour un adulte sain de cet X moyen est de 1.1 YO ((-9.6)-11.7) et de 0.3 ((-10.6)-11.1) YF. Elle donne une idée sur la symétrie du tonus postural [14]. Une étude de la projection moyenne du CP du sujet sur l’axe antéropostérieur ou axe des Y (Y moyen). La valeur normale de cet Y moyen pour un adulte sain est de -29 ((-1)-(-57)) YO et -27 ((-3)-(-51)) YF. Elle donne une idée sur l’existence d’une éventuelle anté ou rétroprojection du CP [14]. Le Quotient du Romberg (QRBG), qui représente le quotient de la surface de l’ellipse de confiance Yeux Fermés par celle Yeux Ouverts multiplié par 100. Sa valeur normale pour un adulte sain est en moyenne de 249 (112-677). Un quotient égal à 100 signifie que le sujet ne se sert pas de sa vision pour tenir debout, ce qui est totalement anormal. Un quotient nettement inférieur à 100 pourrait signifier que l'information visuelle perturbe le contrôle postural (conflit visuo-plantaire) [6]. La variation de la vitesse moyenne d’oscillation. L'amplitude normalisée dans la bande de fréquence 0,2 Hz dans le plan frontal et dans le plan sagittal (ANO2 X et ANO2 Y) : il s’agit d’un paramètre étudiant les oscillations à la fréquence de 0,2 Hz, qui correspond à la fréquence des cycles respiratoires chez un individu normal [14] . La longueur en fonction de la surface (LFS): elle mesure le chemin que parcourt le CP par unité de surface. Il donne une idée sur l’énergie dépensée pour contrôler l’équilibre. Sa valeur moyenne chez un sujet adulte sain est de 1 (0.72-1.39) YO et de 1 (0.7-1.44) YF. Une valeur du LFS augmentée signifie que le sujet consacre beaucoup d'énergie à assurer sa posture. A l'inverse, abaissée, c’est que le patient ne réagit pas à son instabilité [14]. 2.2.2 Méthodologie statistique : Les données ont été saisies au moyen du logiciel Excel et analysées au moyen du logiciel SPSS version 17.0. 2.2.2.1 Etude descriptive : Nous avons calculé les fréquences simples et les fréquences relatives (pourcentages) pour les variables qualitatives, les moyennes et les écarts-types (déviations standard) et déterminé l’étendue (valeurs extrêmes : minimum et maximum) pour les variables quantitatives. 2.2.2.2 Etude analytique : Etude des liaisons entre deux variables quantitatives : Les liaisons entre deux variables quantitatives ont été étudiées par le coefficient de corrélation de Pearson. Etude des liaisons entre deux variables qualitatives : Les liaisons entre deux variables qualitatives ont été étudiées par le test du chi-deux. 3.RESULTATS : 3.1Données épidémiologiques : Notre étude a inclus 50 patients (23 femmes et 27 hommes), lombalgiques chroniques, d’âge moyen 40,86 ans (25ans69ans) avec une médiane à 42 ans. La symptomatologie évoluait depuis une durée moyenne de 55,92 mois (3mois-20 ans), avec une médiane à 7 ans. Vingt deux pour cent des patients pratiquaient une activité physique de façon régulière. 3.2 Données cliniques : Les tableaux 1 et 2 résument les résultats de l’examen postural et du rachis de nos patients. Parmi les 20 patients qui avaient un syndrome rachidien, 33,3% avaient une DDS>20cm, 62% avaient un indice de Schober >3,5cm et 76% avaient un indice de MacRae>5,5cm. 3 .3.Données Radiologiques : Le tableau 3 résume les anomalies retrouvées sur les examens radiologiques de nos patients. 3.4.Données stabilometriques : L’évaluation instrumentale de l’équilibre sur plate-forme Winposture a trouvé : Concernant la surface S :(tableau4) Le port du lombostat a permis de normaliser de façon significative (p0,05) la surface S chez 6% des patients dont la surface S était altérée sans lombostat aussi bien YO que YF. Concernant l’X Moyen : (tableau 5) Sur les 10 patients ayant une déviation frontale du CP sans lombostat Yeux ouverts, 2 patients ont eu une normalisation significative (p0 ,05) de leur X moyen après le port du lombostat. Le port du lombostat a permis un recentrage du X moyen Yeux fermés chez 5 des 12 patients dont le X moyen était altéré. Le port du lombostat a permis un recentrage du CP dans le plan frontal chez 4% des patients YO et 10% des patients YF. Tous ces résultats étaient significatifs. Concernant l’Y Moyen : (Tableau 6) Pas de variation de l’Y moyen Yeux Ouverts après port du lombostat. Il y a eu une amélioration de la projection du CP dans le plan sagittal chez 4% des patients YF sans être significatif (p>0,05). Concernant la LFS : (Tableau 7) Une diminution significative (p0,05) de la valeur moyenne de la LFS a été notée chez 25% des patients après port du lombostat aussi bien yeux ouverts que yeux fermés. Par ailleurs, le port du lombostat a permis une normalisation de la LFS chez 4% des patients YO et 12% des patients YF sans être significative (p>0,05). Concernant la variation de la vitesse moyenne des oscillations : (Tableau 8) Le port du lombostat a permis de normaliser la variation de la vitesse moyenne d’oscillation pour la situation yeux ouverts (p>0,05). Concernant le trouble de l’équilibre dans sa globalité : (Tableau 9) Soixante deux pour cent des lombalgiques présentaient un trouble de l’équilibre objectivé sur la plateforme winposture. Après le port du lombostat,il y a eu stabilisation dans 30% des cas, amélioration dans 44% des cas et aggravation du trouble dans 26% des cas. 4.DISCUSSION Les lombalgies sont le plus souvent transitoires. Seulement 8 % des patients continuent à souffrir 3 mois après le début d’une lombalgie aiguë ou subaiguë et ce chiffre tombe à 7% au bout de 6 mois. Cependant cette population est responsable de 85 % du coût de la lombalgie en termes de jours de travail perdus et de compensation [20]. Il devient alors important de mettre au point une stratégie thérapeutique minimisant ce handicap. Par ailleurs, il faut garder à l’esprit que le diagnostic lésionnel d’une lombalgie chronique est difficile. Plusieurs études ont prouvé un déficit du contrôle postural chez les lombalgiques chroniques [1, 3, 9,14, 15,16, 17,18, 21]. Parmi les explications fournies, figurent des modifications très voisines de celles décrites pendant le processus de vieillissement physiologique, notamment une modification des courbures rachidiennes dans le plan frontal et surtout sagittal [2,11,16, 13 ,19 ]. Dans notre population, nous remarquons qu’il y a plus de patients avec une hyperlordose lombaire objectivée d’une part par une flèche lombaire >4cm à l’examen clinique et d’autre part par une plus grande fréquence Cependant, de l’horizontalisation contrairement à sacrée une idée sur les radiographies. communément admise, l’hyperlordose ne constitue pas un facteur de risque pour les lombalgies [20]. Au contraire, il semble qu’une absence de lordose ou une inversion de courbure lombaire soient fréquemment associées aux lombalgies. L’inversion de courbure lombaire haute est généralement associée à une lordose basse à court rayon au-dessous de L3. Ce trouble statique caractéristique favorise surmenage des articulaires postérieures. vraisemblablement un Les lombalgies ont d’ailleurs été l'objet de plusieurs études stabilométriques dont certaines sont déjà publiées (Gagey et al., 1986; Guillemot & Duplan, 1995; Liebenson C., 1996) [4,5 ,7]. Connaître la position de la verticale de gravité d'un lombalgique permet de mieux apprécier le type de contraintes auxquelles son rachis est soumis, permettant ainsi d’ouvrir des perspectives thérapeutiques nouvelles. Plusieurs études ont montré que parmi les paramètres posturographiques mesurés sur la plate-forme de force, la vitesse de déplacement (ou d’oscillation) du centre de pression(VO), est le paramètre le plus reproductible et sensible pour la mesure de la stabilité posturale [14]. Un sujet normal oscille avec une vitesse constante aussi bien dans le plan frontal que dans le plan sagittal. Les oscillations antéro-postérieures (oscillations autour des chevilles) sont de plus grande amplitude que les oscillations droite-gauche (oscillations autour des hanches) [6]. Ces oscillations reflètent les contractions musculaires de rattrapage de la position d'équilibre. Au cours de certaines affections, comme les lombalgies par exemple, le jeu de ces contractions musculaires est bloqué, vraisemblablement par un phénomène tonique postural. Ce paramètre présente donc une forte corrélation avec la douleur et l’incapacité chez les lombalgiques chroniques [8] et plusieurs auteurs ont prouvé une augmentation des vitesses d’oscillation en position debout dans différentes conditions d’examen [18]. Pour certains, cette augmentation peut être considérée comme un mécanisme compensateur en essayant de vaincre les plus grands seuils sensoriels causés par les lésions du rachis lombaire, ce qui va mener à une amélioration du contrôle postural du rachis et du corps entier [1,16, 21]. Dans notre série, il y avait 10% des patients qui avaient une augmentation de la vitesse moyenne des oscillations dans la situation YO sans lombostat contre 8% après le port du lombostat. Cette amélioration n’était pas significativement importante, probablement à cause du faible pourcentage de départ. Par contre, l’amélioration était significative en ce qui concerne la surface S qui est le paramètre qui reflète le plus fidèlement la stabilité du sujet. Une diminution de la valeur moyenne de la LFS a été également notée signifiant une diminution de l’énergie dépensée pour se maintenir en équilibre. En effet, le lombostat, par son action de restriction de la mobilité, permet de diminuer la surface d’oscillation et par son action de rappel de la posture permet d’économiser l’énergie dépensée dans ce but. En fait, aucours de notre recherche bibliographique, nous avons trouvé très peu d’études antérieures qui ont abordé cette question. Nous citerons une étude française menée en 1996 au sein du groupe hospitalier Bichat Claude à Paris qui a démontré par des méthodes radiologiques et invasives que le port du lombostat diminuait de façon significative la mobilité globale du rachis lombaire dans le plan sagittal ce qui a été également constaté dans notre étude pour la situation Yeux Fermés, situation où, comme nous l’avons déjà rappelé, les afférences visuelles sont annulées. Il a été démontré que le lombostat diminuait l’angle de flexion maximale ainsi que l’angle d’extension maximale et surtout la lordose lombaire en position orthostatique proportionnellement au degrés d’hyper lordose lombaire de chaque individu[23]. En réalité, trois modes d’actions théoriques peuvent être recherchés dans une orthèse lombaire : une action de restriction de mobilité qui est généralement obtenue avec les orthèses rigides en plâtre, résine ou thermoformable et avec les corsets en coutil baleiné à cage fermée ou semi-ouverte. Cette limitation de la mobilité lombaire est plus obtenue par une action dissuasive que par une vraie contention mécanique. La seule façon d’immobiliser les deux derniers disques lombaires est de prolonger l’orthèse par une pièce de cuisse (hémibermuda) mais cette orthèse est très inconfortable et elle n’est utilisée que comme test prédictif dans le cadre de l’indication d’une arthrodèse rachidienne; une action de suppléance de la sangle abdominale est obtenue par toutes les orthèses apportant un effet de compression sur la paroi abdomino-lombaire une action de rappel de posture est obtenue enfin par toutes les orthèses qui comportent un tuteur lombaire [20] Nous rajoutons à toutes ces actions l’effet antalgique rapporté d’une part à l’interrogatoire et dont témoigne probablement la diminution de l’énergie dépensée pour se maintenir en position d’équilibre(LFS). Dans notre pratique quotidienne nous avons remarqué que de nombreux lombalgiques se voient prescrire un lombostat devant une lombalgie qu’elle soit chronique ou aigue. L’action thérapeutique du lombostat n’a cependant jamais été démontrée auparavant et elle reste discutée. Jellema, dans une revue systématique, a conclu à l’absence de preuve scientifique permettant de démontrer l’efficacité d’un lombostat dans la prise en charge d’une lombalgie et souligne le manque d’études méthodologiquement correctes permettant d’en évaluer l’efficacité, que ce soit dans la lombalgie ou la lombosciatique [10]. Cependant, les résultats de notre étude plaident en faveur d’une amélioration des troubles posturaux dans 44% des cas et donc indirectement une amélioration de la lombalgie chronique puisque les troubles posturaux ont déjà été incriminés dans cette pathologie [16]. En effet, tous nos patients ont rapporté une sensation de meilleur confort et une moindre douleur avec le lombostat. Le lombostat permet dans certains cas d’éviter le repos au lit et de permettre au patient de rester actif [12]. CONCLUSION : Notre étude permet ainsi de confirmer l’action bénéfique à court terme du lombostat sur les troubles posturaux chez les lombalgiques chroniques. Cependant, il s’agit d’une étude transversale qui n’évalue que l’effet instantané du lombostat sur les troubles posturaux. D’autres études longitudinales évaluant ces effets à plus long terme, en réévaluant par exemple les patients après un port permanent du lombostat pendant une durée déterminée, seraient probablement nécessaires pour confirmer la durée de cette action dans le temps. REFERENCES : 1] Cholewicky J, McGill SM. Mechanical stability of the in vivo lumbar spine: Implications for injury and chronic low back pain. Clin Biomech 1996;11:1–15. 2] Dietz V, ZijlstraW, Assaiente C, Trippel M, BergerW. Balance control in Parkinson’s disease. Gait Posture 1993;1:77–84. 3] Farfan H. Form and function of the musculoskeletol system as revealed by mathematical analysis of the lumbar spine: An essay. 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Trouble Trouble postural plan postural frontal Syndrome Syndrome TVS rachidien radiculaire DSM ou ROT plan sagittal effectif % eff % eff % eff % eff % Nx 92% oui 49 78 28 56 20 40 26 52 2 4 faibles 4% non 11 22 22 44 30 60 24 48 48 96 vifs 4% total 50 100 50 100 50 100 50 100 50 100 total 100% TVS: trouble vésico-sphinctérien. DSM: deficit sensitive-moteur. ROT: réflexes ostéo-tendineux. Tableau 2 : Mesure des flèches cervicale et lombaire : flèche cervicale flèche lombaire Moyenne 3,396 4,728 Médiane 3,000 5,000 Ecart-type 1,2705 1,5179 Minimum 1,0 1,5 Maximum 6,0 8,0 Tableau 3 : Anomalies radiologiques. Anomalie radiologique Nombre de patients % Verticalisation sacrée 3 6 Horizontalisation sacrée 18 36 Anomalie de la charnière 9 18 lombo-sacrée Hernie discale 17 34 Canal lombaire étroit 10 20 zygarthrose 24 48 Tableau 4 : Surface S YO et YF avec et sans lombostat résultat Surface S Yeux Ouverts Surface S Yeux Fermés Sans lombostat Avec lombostat Sans lombostat Avec lombostat Normale 31 (62%) 34 (68%) 40 (80%) 43 (86%) Augmentée 19 (38%) 16 (32%) 10 (20%) 7 (14%) Total 50 50 50 50 p 0,031 0,028 Tableau 5 : X moyen YO et YF avec et sans lombostat résultat X moyen Yeux Ouverts X moyen Yeux Fermés Sans lombostat Avec Sans Avec lombostat lombostat lombostat Normal 40 (80%) 42 (84%) 38 (76%) 43 (86%) Dévié 10 (20%) 8 (16%) 12 (24%) 7 (14%) Total 50 50 50 50 p 0,045 0,049 Tableau 6 : Y moyen YO et YF avec et sans lombostat résultat Y moyen Yeux Ouverts Y moyen Yeux Fermés Sans lombostat Avec lombostat Sans lombostat Avec lombostat Normal 47 (94%) 47 (94%) 45 (90%) 47 (94%) Dévié 3 3 5 (10%) 3 (6%) Total 50 50 50 p (6%) 50 (6%) 0,083 Tableau 7 : LFS YO et YF avec et sans lombostat résultat LFS Yeux Ouverts LFS Yeux Fermés Sans lombostat Avec lombostat Sans lombostat Avec lombostat Normal 35 (70%) 33 (66%) 34 (68%) 28 (56%) Diminué 15 (30%) 17 (34%) 16 (32%) 22 (44%) Total 50 50 50 50 p 0,189 0,07 Tableau 8 : Variation de la VO YO et YF avec et sans lombostat résultat Variation de la VO Ouverts Yeux Variation de la VO Fermés Sans Avec Sans Avec lombostat lombostat lombostat lombostat Normale 45 (90%) 46 (92%) 42 (84%) 42 (84%) Augmentée 5 4 (8%) 8 (16%) 8 (16%) Total 50 50 50 50 p 0,45 (10%) VO: vitesse d’oscillation Yeux Tableau9 : Trouble de l’équilibre dans sa globalité Profil statique avec lombostat aggravation stabilisation amélioration Total Trouble oui 13% 4 16% statique non 47,4% 9 52,6% 5 71% 22 62% 31 38% 19 10 0 sans lombostat Total 26% 13 30% 15 44% 22 100% 50 Fig.1 :Plateforme Winposture Fig.2 : Projection du centre du pression durant le test et étude selon l’axe antéro-posterieur et l’axe latero-latéral.