De la prévention à la prise en charge de la douleur chronique non

suivante ne pouvant réellement se faire qu'après obtention des résul-
tats de la précédente. Si toutefois le bilan ne montrait pas de problème
de perte de mobilité ou de déséquilibre musculaire, il est possible de
passer à l'étape suivante :
libérer : il s'agit de libérer le patient de sa perte de mobilité et de sa
douleur, qu'elle soit locale ou à distance ;
maintenir : l'équilibre musculaire doit être retrouvé pour permet-
tre de maintenir l'équilibre économique notamment dans le plan
sagittal ;
entretenir : à travers l'éducation thérapeutique, les programmes
d'école du dos et l'ergonomie, il faut permettre au patient de conserver
durablement les bénéces apportés par la rééducation.
La thérapie manuelle trouve une place première dans la rééducation
des lombalgiques. Les dernières volontés de choix des techniques ne
doivent pas se faire en opposant les techniques mais en leur redon-
nant une place propre à chacune. Le traitement masso-kinésithéra-
pique est multiple, l'avenir de notre profession passe par ce type de
prise en charge.
Il faut noter que cette classication n'est pas la seule et actuellement
deux courants d'idées coexistent. Le modèle anatomo-pathologique
à la recherche de la structure concernée comme présenté ici, et le
modèle bio-psycho-social.
Pour en savoir plus
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http://dx.doi.org/10.1016/j.kine.2014.02.008
C8
De la prévention à la prise en charge de la
douleur chronique non spécique : les
phories verticales peuvent-elles être un
repère ?
Éric Matheron
Dijon, France
Adresse e-mail : [email protected]
Mots clés : Afférences ; Boucles sensorimotrices ; Contrôle moteur ;
cience posturale ; Douleur ; Douleur chronique non spécique ;
Oculomotricité ; Posturologie ; Prévention ; Vision
En dissociant les images rétiniennes par exemple avec le test de
Maddox, une orthophorie et une hétérophorie verticales (OV et HV)
correspondent respectivement à l'absence ou la présence d'une dévia-
tion de l'axe visuel verticalement, déviation annulée en vision binocu-
laire naturelle [1] (Fig. 1).
La recherche fondamentale montre que le contrôle de l'équilibre, de la
posture et du mouvement est complexe, le système nerveux central
(SNC) utilisant plusieurs sources à la fois : visuelle, vestibulaire et
somesthésique (i.e. y compris proprioceptive). Pour maintenir le corps
en équilibre, le SNC doit réaliser les transformations appropriées et
coordonnées de ces informations, et générer en permanence les
réponses musculaires adaptées [2,3]. Différentes investigations
expérimentales ont été menées an de contribuer à une meilleure
compréhension des mécanismes et interactions complexes entre
l'oculomotricité, la vision et l'efcience motrice, notamment les hété-
rophories verticales minimes (inférieures à environ ½ degré) et le
contrôle postural orthostatique, référence pour les activités dynami-
ques [4,5]. Chez des adultes jeunes et sains, elles rapportent :
Figure 2. Classication étiologique de la lombalgie permettant de
déterminer la structure qui souffre.
Congrès
38
qu'une HV expérimentale induite par un prisme vertical d'un degré
inuence la stabilité posturale [6]
1
;
que les sujets présentant une HV naturelle présentent un contrôle
moteur moins performant en termes de stabilité [7] ;
que l'annulation de l'HV à l'aide d'un prisme approprié renforce la
stabilité [7].
Chez des adultes jeunes présentant des rachialgies chroniques non
spéciques, et leur comorbidité associée connue (e.g. céphalées,
arthralgies périphériques, acouphènes, cinétoses, etc.- voir [8,9]), tous
présentant une HV, ce même comportement a été enregistré [10].
L'hypothèse selon laquelle de minimes HV puissent indiquer la pré-
sence de conits provenant de signaux somesthésiques (ou troubles
de réfraction [1,11]) requis dans les boucles sensorimotrices impli-
quées dans le contrôle postural, et l'intégration optimale de ces
signaux au niveau du SNC, a été avancée, suggérant des possibilités
de prévention (voir [7]). Des conits sensorimoteurs induits, notam-
ment entre vision et proprioception des membres, peuvent provoquer
des douleurs et modier la perception globale chez des sujets sains
[12] ou les exacerber chez des sujets souffrant de bromyalgie [13] ;
nous avons proposé que les rachialgies chroniques non spéciques
puissent résulter de tels conits prolongés dont l'HV en serait un signe,
avec de nouvelles implications théoriques et cliniques [10]
2
. En effet,
différentes études cliniques suggèrent que les phories verticales puis-
sent être utilisées comme un repère dans la prise en charge de
douleurs chroniques non spéciques. Par exemple, l'HV peut être liée
à des conits provenant du système stomatognathique, du pelvis ou
encore de piercings ; annuler le conit restaure la plupart du temps
immédiatement l'OV, diminue signicativement la douleur [14,15],
améliore la mobilité rachidienne et articulaire périphérique comme
des tests cliniques d'équilibre initialement perturbés, mais restent
à évaluer précisément [13,14,16] : des études sont en cours (Fig. 2).
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2011;2:64.http://dx.doi.org/10.3389/fphys.2011.00064.
Figure 2. Synthèse de la présentation.
Figure 1. Éric Matheron, chercheur associé groupe IRIS,
physiopathologie de la vision et motricité binoculaire, CNRS FR
3636, UFR biomédicale université Paris Descartes, Paris, et
masseur-kinésithérapeute libéral, docteur en neurosciences
(université Paris V).
Kinesither Rev 2014;14(148):3150 Congrès
39
[16] Matheron E. Hétérophories verticales et normalisation myoto-
nique. Kinesither Sci 2000;34:238.
1
Prix de recherche APE/Société francophone posture équilibre locomotion (SOF-
PEL) 2006 http://www.posture-equilibre.asso.fr/.
2
Primés par l'International Society for Posture & Gait Research (ISPGR) 2009
http://ispgr.org/.
http://dx.doi.org/10.1016/j.kine.2014.02.009
C9
Passer de la règle de la non-douleur à celle
de la « bonne douleur » : intérêt de
l'utilisation de l'examen MDT (méthode
McKenzie) pour mettre en évidence une
préférence directionnelle pour les patients
lombalgiques
Jacky Otero
a*
, Gabor Sagi
b
a
Eybens, France
b
Blagnac, France
*Auteur correspondant.
Adresse e-mail : jacky[email protected] (J. Otero)
Mots clés : Bonne douleur ; Centralisation ; Classication ; Lombal-
gie ; McKenzie ; MDT ; Préférence directionnelle
Pendant des années la règle de la non-douleur a été (et reste très
souvent) une injonction pour le Kinésithérapeute dans l'évaluation et le
traitement des rachialgies. À aucun moment le bilan ou le traitement ne
devait produire de symptômes. Il se pourrait cependant qu'avoir peur de la
douleur soit une erreur dans l'évaluation et le traitement des patients qui
souffrent de douleurs vertébrales, et de lombalgies en particulier (Fig. 1).
Premièrement, éviter tous les mouvements qui produisent de la dou-
leur est un obstacle majeur pour identier l'occurrence d'une « pré-
férence directionnelle » tel que la décrit Robin McKenzie. Ce dernier
est surtout connu pour avoir identié l'existence d'un groupe important
de patients lombaires qui répond à des stratégies de traitement en
lordose et en extension. Il a aussi et surtout développé un processus
d'évaluation qui vise à déterminer si les symptômes du patient sont
aggravés par une (ou plusieurs) direction(s) de mouvement alors que la
direction opposée les améliore signicativement et durablement. Ce
phénomène, nommé préférence directionnelle (PD) s'avère souvent
contre-intuitif pour le patient. Par exemple, beaucoup de patients sont
soulagés par l'extension lombaire, alors que cette direction est initiale-
ment la plus limitée et la plus douloureuse (réponse paradoxale). Mais si
la douleur est de plus en plus loin dans l'amplitude, si elle diminue ou si
elle devient plus proche de la ligne médiane (phénomène de centralisa-
tion), le thérapeute peut être certain que la direction de mouvement est
bénéque pour le patient. Il arrive que la PD soulage d'emblée les
symptômes et soit indolore. Mais le kinésithérapeute qui ne test aucun
mouvement douloureux passera souvent à côté. L'occurrence clinique
d'une PD a fait l'objet de nombreuses études scientiques de qualité
ayant conclu à sa pertinence. Elle bécie aujourd'hui d'une recom-
mandation de Grade A (Delitto 2012, Surkitt 2012).
Deuxièmement, il est maintenant établi qu'un des enjeux majeur de la
rééducation est la prévention du syndrome de déconditionnement du
rachis si bien décrit par Tom Mayer. En effet, une proportion des patients
lombalgiques chroniques s'enferment dans une spirale vicieuse dans
laquelle la peur de la douleur et celle de la récidive induisent une
kinésiophobie, suivie d'enraidissement, de perte de force et d'endurance
musculaires, et d'une sensibilisation centrale et périphérique de leur
système nerveux. À ce stade, l'issue de la rééducation est incertaine, et
nécessite parfois des séjours en centre de rééducation avec une équipe
multidisciplinaire pour restaurer la fonction et essayer de sortir les
patients de cette impasse. Le kinésithérapeute doit par conséquent être
très vigilant au message qu'il communique au patient pendant sa réédu-
cation. Le patient doit apprendre à reconnaître quels symptômes sont
véritablement le signe qu'il aggrave son statut, et quelles douleurs
accompagnent temporairement le déblocage de ses segments mobiles
et la « remise en route » de son rachis. Lui dire d'éviter tout mouvement
qui produit de la douleur pendant et en dehors de la séance pourrait
fortement contribuer à induire ce que l'on cherche à éviter par-dessus
tout : la chronicisation des symptômes.
Ne pas évaluer et traiter la colonne vertébrale comme une entité fragile,
ne pas avoir peur de la « bonne douleur », celle qui permet d'identier
une préférence directionnelle, devrait par conséquent faire partie des
règles de base dans le bilan et dans le traitement des patients souffrant
de lombalgies et de rachialgies en général (Encadré 1).
http://dx.doi.org/10.1016/j.kine.2014.02.010
Figure 1. Jaccky Otero, masseur-kinésithérapeute, certié MDT
méthode McKenzie, président de l'Association française McKenzie,
lors de son intervention.
Encadré 1
À retenir
Il faut abandonner la règle de la non-douleur qui a
très certainement contribuée à générer du décondition-
nement et de l'invalidité.
La règle de la « bonne » douleur peut lui être
substituée.
Ce qui constitue la « bonne » douleur dépend du
syndrome que l'on traite.
Dans un syndrome de dérangement, la « bonne »
douleur est une douleur qui est de plus en plus loin dans
l'amplitude, qui centralise ou qui diminue pendant les
mobilisations actives ou passives. Cette douleursigne la
réduction d'un dérangement.
Dans un syndrome de dysfonction, la « bonne »
douleur est une douleur de n d'amplitude qui ne per-
siste pas au retour en position neutre. Cette douleur est
indispensable pour remodeler les tissus rétractés/bro-
sés/adhérents.
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