B – NATURE-CULTURE ET SOCIETE
1) Principes rousseauistes
Rousseau est révolutionnaire puisqu’il nie l’homme comme animal social. Ainsi explique-t-il,
c’est trop facile de présupposer les relations sociales en l’homme : Il faut les expliquer et on se rendra
compte qu’elles ne sont pas si innées. En fait l’homme accède à l’état social par ses seules forces. Il
convient de se demander si ce retour extrémiste vers l’état de nature n’est pas précisément contre nature.
2) Les lois naturelles
Mais la nature est-elle autant absence de règles que l’on voudrait bien le croire ? Serait-elle
inorganisation ? Indifférenciation donc ?
Force est de constater qu’il y a une organisation et un ordre dans la nature, sans quoi ce serait
le chaos permanent : Les saisons et les jours passent ont peut même les calculer (cf. la précision avec
laquelle on a pu prévoir le moment de l’éclipse), les espèces animales illustrent elles-mêmes fort bien
cette régularité de la nature. Dans la nature il n’y a pas d’élan individuel et incontrôlé : ce monde
indépendamment de la volonté humaine est organisée. Cependant la société animale n’est aucunement
comparable à la société humaine, car si la première est rudimentaire la seconde est complexe, elle a une
histoire, elle a une culture. Dès lors le rapport animal/nature n’apparaît pas équivalent au rapport
homme/société.
3) La nature vue par la société
Toute la question est de savoir si la société est un fait naturel. Il faut se pencher sur la naturalité
de la société. Est-ce que l’homme est, comme le disait Aristote, un animal social ?
Il est intéressant de constater qu’aucune société ne veut laisser son corps dans l’état initial. Le
donné biologique disparaît dans les marques d’acculturation. Le fonctionnement du corps est lui-même
modifié par l’environnement culturel : nourriture, comportement familiaux, gestes quotidiens, etc… En
anthropologie et en ethnologie ces différences culturelles sont fort nombreuses et très importantes, aussi
est-ce là un point qui permet aux anthropologues de dire que cette faculté de diversification permet de
distinguer l’homme de l’animal. Une telle conclusion laisse donc entendre que la culture n’est pas le
fruit d’une évolution d’espèces biologiques.
Il est un point que Claude Lévy-Strauss évoqua et qui est depuis repris très fréquemment en
philosophie moderne : c’est le cas de l’inceste. Pour le célèbre anthropologue, cette question illustre
parfaitement un passage de l’état de nature à l’état de culture. En effet cet acte est naturellement banni
de toutes les sociétés, mais les interdits sont modulés différemment selon les cultures.
4) Le danger ethnocentrique
a. L’exclusivisme culturel
La philosophie moderne tient à faire remarquer qu’ici se situe une clé d’interprétation
à la question du racisme ? Ce danger ethnocentrique touche tous les groupes sociaux qui ont eu
une position historique dominante et qui considérait tout ce qui était hors d’elle comme une
société barbare ou sauvage. Uns considération qui horrifie la philosophie moderne pour
laquelle il n’y a pas de société inculte, mais des civilisations différentes.
Ainsi l’ethnocentrisme provient de ce que chaque société a toujours tendu à confondre
« sa » civilisation avec « la » civilisation, ce qui conduirait ainsi à rejeter en dehors de la sphère
de l’humanité tout ce qui relèverait d’une autre civilisation. Ce phénomène ne serait que le
refus, la négation d’admettre la diversité culturelle.
S’il faut admettre qu’il y a une unité de l’espèce humaine, peut-on raisonnablement
affirmer que toute civilisation se vaut ? Peut-on accepter un total relativisme des civilisations ?
Qui pourrait supporter d’entendre que l’esclavage, le travail ou la prostitution des enfants ne
sont que des valeurs culturelles différentes des nôtres, et qu’en tant que telles, très
respectables ?
Le racisme lui-même, ne serait-il qu’un donné culturel, tyranniquement exclu par les valeurs
culturelles des ‘droits de l’homme’ ?
C’est ce qui pousse Sartre et Merleau-Ponty à récuser toute notion de nature humaine pour la
substituer par une sorte d’universalité de la condition humaine. Pour ces philosophes