Résultats de l’étude de l’Anses sur les expositions alimentaires aux substances chimiques des enfants de moins de trois ans (EATi) (Dossier de presse de l’Anses en PJ) 28 septembre 2016 Résumé de cette étude & Commentaires L’Anses publie la première photographie des expositions alimentaires à un très grand nombre de substances concernant les enfants de moins de trois ans. Cette étude de l’alimentation totale infantile (EATi) a été lancée en 2010 et représente 6 années de travail : plus de 200 000 résultats analytiques, 97 % du régime alimentaire des enfants de moins de 3 ans couvert, 5 484 produits achetés, 457 échantillons, 670 substances analysées ; exposition alimentaire évaluée pour 500 substances ; risque évalué pour 400 substances, dont 281 résidus de pesticides. Elle a ainsi passé au crible le régime alimentaire des enfants dans lequel près de 670 substances ont été analysées et le risque caractérisé pour 400 d’entre elles. Au plan international, il s’agit de la première étude d’une telle ampleur focalisée sur les moins de trois ans. Au total, le bilan de l’ANSES est favorable puisque cette étude confirme le bon niveau de maîtrise sanitaire au regard des valeurs toxicologiques de référence : pour la plupart des substances évaluées, le risque peut être écarté, mais quelques substances sont à surveiller. L’Anses recommande une surveillance accrue de 9 substances pour lesquelles un nombre non négligeable d’enfants présente une exposition supérieure aux valeurs toxicologiques de référence (à noter que depuis 2010, date de l’étude, différentes réglementations et mesures de prévention ont été mises en place) : 1/ Pour l’arsenic inorganique, le riz et les céréales infantiles (principalement celles à base de riz) apparaissent comme des contributeurs importants. Cependant depuis 2016 une nouvelle réglementation est entrée en vigueur avec des normes plus strictes sur cette substance pour les aliments infantiles (seuil 2 fois plus faible que pour les aliments courants). 2/ Pour le plomb, les légumes et l’eau apparaissent comme des contributeurs majeurs à l’exposition. Depuis 2013, la réglementation a abaissé la limite en plomb dans les eaux destinées à la consommation humaine (les échantillons d’eau analysés dans l’étude ont été prélevés avant 2013). Pour les légumes, les teneurs en plomb semblent difficiles à réduire compte tenu du caractère ubiquitaire du plomb. Des normes plus strictes concernant le plomb ont été mises en place pour les aliments infantiles depuis 2010. 3/ Pour le nickel, les produits à base de chocolat apparaissent être les contributeurs majeurs. Les efforts pour réduire les teneurs en nickel doivent se focaliser sur ces produits en priorité. 4/ Les teneurs en PCDD/F sont très faibles, ils sont présents dans le lait et les poissons. Il est actuellement recommandé de donner du poisson 2 fois par semaine (une fois du poisson gras, une fois du poisson maigre), mais pas davantage. 5/ Les teneurs en PCB, atteignent des niveaux très bas. Les poissons sont les aliments les plus contributeurs. Il est actuellement recommandé de donner du poisson 2 fois par semaine (une fois du poisson gras, une fois du poisson maigre), mais pas davantage. 6/ Les mycotoxines T-2 & HT-2 : actuellement il existe des valeurs indicatives pour les aliments pour bébés à base de céréales qui font l’objet d’une surveillance importante. 7/ L’acrylamide : elle fait l’objet de valeur indicative et suscite une surveillance particulière. A noter également la boite à outil européenne et la brochure française qui donne les outils qui permettent aux industriels de maîtriser la formation de cette substance, les informations font l’objet de mises à jour régulières selon l’évolution des connaissances. 8/ Pour la mycotoxine DON, les principaux contributeurs sont les boissons lactées à base de céréales, les pots de fruits et les pots à base de légumes avec ou sans viande, les biscuits salés/sucrés et le pain. La mycotoxine DON a été réglementée avec des seuils comparativement plus bas pour les aliments bébé que pour l’alimentation courante. 9/ Pour le furane, que l’on retrouve dans les aliments conditionnés sous forme de pots ou conserves. Un plan de surveillance a été mis en place depuis plusieurs années, demandé par l’Europe, et les fabricants d’aliments infantiles participent à l’appel de données lancé par l’EFSA afin de mieux caractériser les produits et d’envisager des mesures si nécessaires. L’Anses recommande une surveillance accrue pour 7 substances ou le risque pour la santé n’est pas écarté : 1. L’aluminium : recommandations pour la maîtrise des sources de pollution, les recherches associées sur les origines des contaminations et leur maîtrise par la réglementation et les contrôles ; il faut varier les légumes consommés. 2. Le cobalt : poursuivre les efforts afin de réduire l’exposition alimentaire. 3. Le strontium : les eaux minérales fortement minéralisées ne doivent être utilisées chez le nourrisson que sur avis médical et sur un temps limité. 4. Le sélénium : dépassements de la limite de sécurité en lien notamment avec une forte consommation de poissons. Il est actuellement recommandé de donner du poisson 2 fois par semaine (une fois du poisson gras, une fois du poisson maigre), mais pas davantage. 5. Le méthylmercure : risque lié à de fortes consommations de poissons. Limiter la consommation de poissons prédateurs sauvages (lotte ou baudroie, loup ou bar, bonite, anguille, empereur, grenadier, flétan, brochet, dorade, raie, sabre, thon...), et d’éviter, à titre de précaution, celle d’espadon, marlin, siki, requin et lamproie 6. Le cadmium : limiter les contributeurs (pommes de terre et légumes), par une réflexion sur les apports agricoles. 7. La génistéine : limiter la consommation de produits à base de soja pour les enfants de moins de 3 ans. Les apports en minéraux sont en adéquation satisfaisante avec les besoins nutritionnels chez les enfants de moins de 3 ans. Cependant il existe : - des insuffisances d’apports en calcium, magnésium et cuivre chez les 13-36 mois, en fer et en zinc chez les 7-36 mois, - des dépassements de limites supérieures de sécurité sont observés pour le calcium chez les moins de six mois (consommation de lait courant, plus riche en calcium que les préparations infantiles). Enfin, pour le zinc, des dépassements sont observés pour toutes les classes d’âge (jusqu’à 75% des enfants pour les moins de 6 mois). Un risque lié à l’apport excessif de ces minéraux ne peut pas être exclu pour certains groupes de consommateurs. L’Agence préconise donc, à ce jour, de suivre les recommandations émises dans le cadre du Programme national nutrition santé, et de commencer la diversification alimentaire à partir de 6 mois de façon optimale et dans tous les cas, jamais avant 4 mois révolus. L’Agence rappelle que seuls le lait maternel ou les préparations infantiles permettent de couvrir les besoins du nourrisson (est considéré comme nourrisson un enfant de moins de 2 ans). En outre, le lait courant, quelle que soit l’espèce animale productrice, n’est pas adapté aux besoins nutritionnels des enfants de moins d’un an. La consommation de lait courant entraîne des niveaux d’exposition nettement plus élevés notamment pour les contaminants vectorisés par les produits lactés, à savoir en premier lieu, les polluants organiques persistants (notamment les PCB et les PCDD/F). Les perspectives L’EATi et ses résultats identifient un certain nombre de perspectives pour l’Agence, en particulier des travaux d’évaluation complémentaires : - étude CONTA-LAIT : étudier des contaminants dans le lait maternel, et évaluer les bénéfices / risques associés à l’allaitement maternel en France. travail d’évaluation des risques concernant les nanomatériaux présents dans l’alimentation, chez l’enfant comme chez l’adulte travail d’acquisition de données sur le caractère perturbateur endocrinien de certaines substances. On peut regretter le grand nombre de reprises presses (dont l’AFP) au sujet des résultats de cette EATi qui ne retiennent pas le bon niveau de maîtrise sanitaire au regard des valeurs toxicologiques de référence et les niveaux satisfaisants d’apports en minéraux, mais qui favorisent les angoisses parentales en se focalisent sur les 9 substances nécessitant une vigilance particulière, sans tenir compte des évolutions qui se sont produite depuis 2010, et mettent en doute la qualité des aliments spécifiques destinés aux enfants de moins de 3 ans, qui garantissent pourtant un bon niveau de sécurité.