ensuite que Judas ignorait complètement qui était son père et quelle était sa patrie. Pilate fit donc
mander Judas et lui dit : « J’ai un si grand désir de ces fruits que si j’en suis privé j’en mourrai. » Alors
Judas s’empressa de sauter dans l’enclos et cueillit des pommes au plus vite. Sur ces entrefaites, arrive
Ruben qui trouve Judas cueillant ses pommes. Alors voilà une vive dispute qui s’engage : ils se disent des
injures ; après les injures, viennent les coups, et ils se font beaucoup de mal ; enfin Judas frappe Ruben
avec une pierre à la jointure du cou, et le tue ; il prend ses pommes et vient raconter à Pilate l’accident
qui lui est arrivé. C’était au déclin du jour, et la nuit approchait, quand on trouva Ruben mort. On croit
qu’il est la victime d’une mort subite. Pilate concéda alors à Judas tous les biens de Ruben, de plus, il lui,
donna pour femme l’épouse de ce même Ruben. Or, un jour que Ciborée poussait de profonds soupirs et
que Judas son mari lui demandait avec intérêt ce qui l’agitait, elle répondit : « hélas ! je suis la plus
misérable des femmes, j’ai noyé mon petit enfant dans la mer et j’ai trouvé mon mari mort avant le
temps mais, de plus, voici que Pilate a ajouté malheureusement une douleur à ma douleur, en me faisant
marier au milieu de la plus grande tristesse, et en m’unissant à toi contre ma volonté. » Quand elle lui eut
raconté tout ce qui avait trait au petit enfant, et que Judas lui eut rapporté tous ses malheurs, il fut
reconnu que Judas avait épousé sa mère et qu’il avait tué son père. Touché de repentir, il alla, par le
conseil de Ciborée, trouver N. S. JÉSUS-CHRIST et lui demanda pardon de ses péchés. Jusqu’ici c’est le
récit de l’histoire apocryphe qui est laissée à l’appréciation du lecteur, quoiqu’elle soit plutôt à rejeter
qu’à admettre. Or, le Seigneur le fit son disciple ; de disciple il l’élut Apôtre, et il l’eut en telle confiance et
amitié qu’il fit son procureur de celui que peu de temps après il supporta comme traditeur : en effet, il
portait la bourse et il volait ce qu’on donnait à JÉSUS-CHRIST. Il fut marri, au temps de la Passion du
Seigneur, que le parfum, qui valait trois cents deniers, n’eût pas été vendu, pour les pouvoir encore ravir.
Alors il alla vendre son maître trente deniers, dont un valait dix des deniers courants, et il se compensa
ainsi de la perte des trois cents deniers du parfum, ou bien, d’après le rapport de quelques personnes, il
volait la dixième partie de tout ce qu’on donnait pour JÉSUS-CHRIST, et pour la dixième partie qu’il avait
perdue du parfum, c’est-à-dire pour trente deniers, il vendit le Seigneur. Il est vrai que touché de repentir
il les rapporta et qu’il alla se pendre avec un lacet, et s’étant pendu il a crevé par le milieu du ventre et
toutes ses entrailles se sont répandues, et il ne rejeta rien par la bouche car il n’était pas convenable
qu’elle fût souillée d’une façon si ignominieuse après avoir été touchée par la glorieuse bouche de JÉSUS-
CHRIST. Il était encore convenable que les entrailles qui avaient conçu la trahison fussent déchirées et
répandues, et que la gorge par où la parole de trahison avait passé fût étranglée avec un lacet. Il mourut
en l’air, afin qu’ayant offensé les anges dans le ciel et les hommes sur la terre, il fût placé ailleurs que
dans l’habitation des anges et des hommes, et qu’il fût associé avec les démons dans l’air(1).
(1) Papias, évêque d’Hiérapolis, disciple de saint Jean, affirme que Judas survécut à sa pendaison, mais que,
devenu affreusement hydropique, il fut écrasé par un char. Théophylacte et Euthyme l’assurent aussi. - Après avoir
rendu les 30 deniers, il passa chez Marie, la Mère de Jésus qui lui dit : ne fait pas ce que tu as préparé, mon Fils te
pardonnera. Mais lui ne voulant rien entendre, il alla se pendre. Jésus commente : "Si Judas s'était jeté aux pieds de
la Mère en disant : "Pitié", la Mère de la Pitié l'aurait recueilli comme un blessé." (Tome 9, chapitre 25).
Comme, entre l’Ascension et la Pentecôte, les Apôtres étaient réunis pour la première fois dans le
Cénacle, Pierre voyant que le nombre des douze Apôtres était diminué, nombre que le Seigneur avait
choisi lui-même pour annoncer la Trinité dans les quatre parties du monde, il se leva au milieu des frères
et dit : « Mes Frères, il faut que nous mettions quelqu’un à la place de Judas, pour qu’il témoigne avec
nous de la Résurrection de JÉSUS-CHRIST qui nous a dit : « Vous me serez des témoins à Jérusalem, en
toute la Judée, en Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre ; et parce qu’un témoin ne peut rendre
témoignage que de ce qu’il a vu, il nous faut choisir un de ces hommes qui ont toujours été avec nous, qui
ont vu les miracles du Seigneur, et qui ont ouï sa doctrine. » Et ils présentèrent deux des soixante-douze
disciples, Joseph, qui, pour sa sainteté, fut surnommé le Juste, frère de Jacques-Alphée, et Matthias, dont