La Profession de foi du vicaire savoyard, insérée au cœur du livre IV d’Emile ou De
l’éducation sert à l’éducation morale et religieuse du jeune Emile, parvenu à « l’âge de raison
et des passions ». Elle constitue également une œuvre à part entière que Rousseau a souhaité
publier indépendamment. La profession de foi a reçu de nombreuses critiques tant de la part
des religieux que des philosophes et a valu a Rousseau quelques années d’exil. C’est dans
cette œuvre qu’il développe sa pensée sur la religion, à l’occasion de la profession de foi que
fait le vicaire savoyard au narrateur. Il y remet non seulement en cause les religions révélées
mais aussi la recherche à tout prix de la rationalité par les philosophes de son époque. On aura
donc beaucoup reproché à Rousseau de rompre à travers cette œuvre avec sa philosophie, au
profit d’une conversion pour la religion naturelle.
La Profession de foi prise comme une œuvre à part entière est pourtant bien une œuvre
de philosophie religieuse, pour Rousseau qui a été croyant « par sentiment » dans sa jeunesse.
Loin de critiquer toute religion, il y critique les religions révélées, au profit d’une religion
naturelle qui naît tant du cœur que de la raison. Si Rousseau pouvait donc en apparence
chercher à discuter, comme tous les penseurs des Lumières, l’opposition entre la religion et la
raison, il aborde avant tout un thème fondamental, celui de la morale, de ses visées pratiques
qui dirigent la conduite, en établissant par là même un lien entre religion et raison.
Si le vicaire fait ici sa profession de foi c’est qu’il tente de montrer le droit chemin au
narrateur en faisant une introspection sur lui même ; et c’est en cherchant à lui montrer la voie
dans laquelle conduire sa vie qu’ils en arrivent à traiter de Dieu. En effet pour Rousseau ce
qui importe de la religion c’est le chemin qu’elle nous indique pour réaliser des actions justes.
Autrement dit, il considère la religion comme une morale qui guide notre conduite. Il s’agit
donc ici avant tout de philosophie morale puisque comme le disait Rousseau : « le dogme
n’est rien, la morale est tout ».
En quoi cette réflexion sur la conduite de la vie amène t-elle Rousseau à parler de
religion naturelle et à récuser les religions révélées ? Comment cela construit-il une
philosophie morale de l’action, et que nous permet-elle de comprendre de la pensée
rousseauiste ou de sa philosophie comme système ? Quels sont alors les fondements de la
philosophie morale que construit ici Rousseau et quels sont ses liens avec la religion ?
La profession de foi du vicaire est l’occasion de remettre en cause ce qu’il a tenu pour
vrai afin de pouvoir avancer plus sûrement dans la vie et faire des choix justes ; c’est ce qui le
conduit à remettre en cause ses connaissances et à découvrir une foi naturelle. En agissant
ainsi, Rousseau dévoile sa philosophie morale, fondée sur le cœur et la conscience de chacun
montrant ainsi que chaque homme est capable d’agir moralement. La religion naturelle est