L’année 1987 constitue un tournant important dans l’histoire économique vietnamienne,
avec la politique de réorientation du pays. L’ouverture vers l’économie de marché a
transformé le paysage économique vietnamien, qui commence à évoluer vers une société de
consommation (Shultz II & Ardrey IV, 1997 [30], Le & Jolibert 2001 [16]). En effet,
l’arrivée des investisseurs étrangers, l’invasion des marchandises importées, ont confronté
les Vietnamiens à une nouvelle réalité, qui ne fut pas simple à intégrer. Les vestiges d’un
passé difficile restent profondément ancrés dans la mentalité de la population. Ils coexistent
avec les nouvelles tendances de vie, de consommation, en provenance des pays développés.
Avec l’évolution économique surprenante du pays, la société vietnamienne actuelle se trouve
dans une étape changeante où la mentalité des consommateurs semble partagée entre les
principes rigides acquis lors d’une époque de privations, et les aspirations à la nouveauté
inspirées des modèles occidentaux (Shultz II & Ardrey IV 1997 [30]). Parallèlement à un
côté pratique qui fait que les Vietnamiens considèrent toujours les produits sous un angle
rationnel et fonctionnel, ils laissent percevoir également un côté émotionnel, qui les fait
s’intéresser aux valeurs symboliques, imaginaires, de la consommation, à l’apparence du
produit. L’élément marque du produit commence à avoir un statut dans la perception des
consommateurs vietnamiens et son importance est de plus en plus prise en compte par les
entreprises, sous la pression de la concurrence des compagnies étrangères et du
développement des médias.
Cependant, le développement de la marque au Vietnam n’est pas simple. En effet, les
changements s’opèrent à un rythme très rapide. Si les consommateurs occidentaux ont eu
plus de cinquante ans pour s’habituer à la marque et aux techniques de promotion de celle-ci,
les activités de marketing, comme elles existent dans le monde occidental, ne commencent à
être présentes sur le marché vietnamien que depuis une dizaine d’années (James, 2002 [12])
et restent encore à un niveau très basique (Miller 1994 [21]). Ceci peut créer des différences
importantes entre des catégories de gens plus ou moins exposées aux effets de l’ouverture du
pays, par exemple entre les villes et les campagnes, entre les générations… Des étrangers
peuvent éprouver au Vietnam en quelque sorte une impression de désordre, de chantier en
construction. On peut constater par exemple la présence paradoxale d’une société moderne et
d’une société arriérée. Des boissons de marques internationales comme Coca Cola ou Pepsi
Cola se vendent dans des « Quan Giai Khat » (petites échoppes proposant
des rafraîchissements) à côté des bouteilles de jus de fruit locales sans marque. De grands
centres commerciaux luxueux cohabitent avec des petits marchés populaires « mouvants ».
Des banderoles publicitaires de Coca Cola ou d’Unilever peuvent se trouver chez des
commerçants minuscules de type bazar au coin d’un quartier... Par ailleurs, le développement
des infrastructures économiques du pays, loin d’être suffisant et équilibré, présente encore
des lacunes, par exemple dans les circuits de distribution, les réglementations commerciales,
les médias, les systèmes de statistiques et d’échange d’information, les agences
publicitaires… ce qui ne rend pas facile le développement de la marque et son management.
La situation actuelle de développement économique du pays fait que la gestion de la marque
ne rencontre pas les mêmes problématiques que dans d’autres pays. Par exemple, le
problème des marques de distributeur ne se pose pas encore, car la distribution moderne n’est
pas encore vraiment installée dans le pays. Par contre le manque d’efficacité des
réglementations de protection des droits d’auteur aggrave les phénomènes d’imitation (Geib
1999 [9], Icongroupedition.com 2000 [11]). Dans ce panorama général de la marque au