CONFÉRENCE BIBLIQUE 20.11.2008 L’ALLIANCE (3) PROLOGUE HISTORIQUE — DIEU APPELLE, ISRAËL RÉPOND — (suite) V. — L'ÉTHIQUE DE L'ALLIANCE EST UNE ÉTHIQUE DE RÉPONSE 1) ISRAËL EST OBLIGÉ DE SE SOUMETTRE On ne saurait exagérer le rôle de l'histoire passée dans le formulaire d'alliance et dans les genres qui en dérivent, surtout les rîbs prophétiques. C'est elle, en effet, qui ôte à la Seigneurie de Dieu tout caractère arbitraire, en démontrant que les prétentions de Dieu à la suzeraineté sur Israël sont parfaitement justifiées. De plus, ces mêmes bienfaits — essentiellement ceux de l'Exode —, personne ne peut les effacer, et ils définissent les commandements de Dieu comme des impératifs, et la réponse positive d'Israël comme une obligation morale. A l'assentiment du peuple, pas d'autre alternative que la révolte. 2) BIENFAITS PASSÉS ET STIPULATION GÉNÉRALE DE L'ALLIANCE Les formulations de la stipulation de base peuvent varier considérablement ; toujours cependant elles visent à affirmer la Seigneurie absolue et exclusive du Seigneur. C'est là le sens fondamental de la réponse d'Israël qui se définit immédiatement comme une éthique d'obéissance. VI. — L'ÉTHIQUE DE L'ALLIANCE EST UNE ÉTHIQUE DE DIALOGUE L'initiative historique de Yahvé exprimée dans le prologue du formulaire de l'Alliance appelle une réponse de la part d'Israël, et les relations ainsi créées entre les deux partenaires s'inscrivent dans un cadre de dialogue. Plusieurs éléments à l'intérieur même des textes d'alliance soulignent cette réciprocité. 1) « JE SERAI TON DIEU ET TU SERAS MON PEUPLE » 2) STYLE DIRECT « Je - Tu » 3) RÉCIPROCITÉ DES COMPORTEMENTS 4) LA RÉPONSE D'ISRAËL EST LIBRE VII. — LA VOLONTÉ DE DIEU EST UNE VOLONTÉ D'HISTOIRE Il convient d’examiner l'histoire passée plus en détail et montrer ainsi qu'à une intelligence de plus en plus déliée de sa nature, correspond un approfondissement de la réponse morale d'Israël. Le peuple élu saisira peu à peu que sa vie présente est plus que le produit statique, acquis une fois pour toutes, d'un événement passé ; elle est cet événement continué, mais cette fois avec la coopération d'Israël. 1) L'EXODE, NORME DE L'HISTOIRE ET DE L'AGIR D'ISRAËL 2) ÉLARGISSEMENTS APPORTÉS À L'HISTOIRE Le prologue historique a connu divers développements au cours de l'histoire de l'Alliance ; à cet élargissement de la volonté d'histoire de Yahvé correspond un approfondissement de la conscience d'Israël dans sa réponse. a) Promesse et Élection b) La Création Quelle conséquence pour la réponse d'Israël aura cet élargissement de l'histoire passée ? Puisque celle-ci est norme exemplaire pour l'agir du peuple de l'Alliance, comment l'événement de la Création s'y reflète-t-il ? I) Soumission absolue II) Israël témoin de Yahvé auprès des nations III) Le précepte du sabbat suivant la tradition Sacerdotale Partant de la fonction juridique du prologue historique dans le formulaire d'alliance et dans les autres genres qui en dépendent — rîbs, parénèse deutéronomique, DeutéroEsaïe —, on a pu déterminer les points suivants concernant l'éthique de l'Alliance : par le fait même que Yahvé fait connaître ses œuvres à Israël, il le promeut comme sujet moral dont il attend une réponse. L'éthique se définira essentiellement comme une réponse aux avances de Dieu, sous la forme d'obéissance : Israël doit — c'est pour lui une obligation — reconnaître, accepter et vouloir librement la dépendance dans laquelle il se trouve en fait ; il n'a de choix qu'entre la « crainte » et la révolte. Un dialogue est ainsi institué par l'Alliance, mais sans faire de celle-ci un contrat entre égaux. Cette réciprocité d'appel et de réponse est parfaitement exprimée par la formule « Vous serez mon peuple et je serai votre Dieu ». Israël est ainsi associé au plan du Salut, plan dont il prend une conscience de plus en plus profonde à mesure que s'élargit le prologue historique. Celui-ci, en effet, a pour but, non seulement d'établir l'autorité de Yahvé, mais de définir sa volonté d'histoire et donc aussi le sens de la réponse d'Israël. Josué dit : « Et maintenant craignez le Seigneur et servez-le en perfection et vérité, et éloignez les dieux qu'ont servis vos pères au-delà du Fleuve et en Egypte, et servez Dieu. Mais s'il vous paraît dur de servir le Seigneur, choisissez aujourd'hui qui vous servirez, soit les dieux qu'ont servis vos pères qui étaient au-delà du Fleuve, soit les dieux des Amorites dont vous habitez la terre ; quant à moi et à ma maison, nous servirons le Seigneur » (Josué 24/14-15). « Observe le jour du sabbat en le sanctifiant, comme te l'a commandé Yahvé ton Dieu. Pendant six jours tu travailleras et tu vaqueras à toutes tes affaires ; mais le septième jour sera sabbat pour Yahvé ton Dieu : tu cesseras toute besogne, toi, ton fils, ta fille, ton serviteur, ta servante, ton bœuf, ton âne et toutes tes bêtes, et ton métèque qui demeure dans tes portes, afin que ton serviteur et ta servante se reposent tout comme toi-même. Et tu te souviendras que tu fus esclave au pays d'Egypte, et que Yahvé ton Dieu t'en a fait sortir à main forte et à bras étendu ; c'est pourquoi Yahvé ton Dieu t'a commandé de pratiquer le jour du sabbat » (Deutéronome 5/12-15). Le Code deutéronomique Beaucoup plus récent dans sa forme actuelle est le code deutéronomique dont la composition a probablement vu le jour au VII° siècle, à Jérusalem. Œuvre de prêtres lévitiques d'origine septentrionale, il groupe quelques unités très anciennes, tandis que, pour une part, il s'attache aussi à réadapter le vieux Code de l'Alliance, d'origine également nordique. « Un Dieu, un Peuple, un Sanctuaire », telles sont les caractéristiques de cette législation : c'est le principe de l'unité qui régit tout, et les lois diverses se définissent très clairement comme les stipulations d'une Alliance unique. Le caractère humanitaire de ce « code » est plus accentué que dans le Code de l'Alliance. D'autre part, moins individualiste que ce dernier, il manifeste un sens beaucoup plus aigu de la communauté. Ceci apparaît notamment dans l'ensemble de lois réglant les affaires criminelles et se terminant sur l'injonction : « et tu feras disparaître le mal de ton sein ». On sait que le Deutéronome veut opérer un sauvetage « in extremis » d'Israël qui semble menacé dans son existence même. Pour survivre, Israël doit avant tout redevenir lui-même, en rejetant tout ce qui, de près ou de loin, menace le Yahvisme. La réaction anti-étrangère parcourt toute la législation, et c'est elle qui commande la pièce maîtresse du code, à savoir la loi de l'unité de sanctuaire (chapitre 12). Parmi les nouveautés de cette législation, il faut signaler la création d'un domaine profane dans l'existence d'Israël, avec la loi instituant l'abattage privé pour la consommation journalière : Deutéronome 12/20-25. Il est significatif que ce soit précisément le Deutéronome, si soucieux de garder les valeurs de l'Alliance, qui ait ainsi fait la première brèche dans la conception sacrale de la vie d'Israël. Il a sans doute compris que la forme sacrale de l'existence n'est pas nécessairement liée à sa valeur religieuse et que, dans certains cas, religion et éthique peuvent être mieux servies dans le profane que dans le sacral. Un traité de vassalité Retrouvé à Ras Shamra, site de l'ancienne Ougarit, ce traité passé vers 1310 av. J.-C. par le roi hittite Mursili II (ou Murshil) avec son vassal Niqmepa, roi d'Ougarit, est organisé en six points : « (PRÉAMBULE) Ainsi parle le Soleil Murshil, grand roi, roi du pays de Hatti. (PROLOGUE HISTORIQUE) En ce qui te concerne, Niqmepa, en ton pays je t'ai ramené, et moi, le roi, roi sur le trône de ton père, je t'ai fait asseoir. (STIPULATION PRINCIPALE) Le pays où moi je t'ai ramené, et toi, Niqmepa, avec ton pays, vous êtes mes serviteurs. Ainsi toi, Niqmepa, à dater d'aujourd'hui et pour la suite des jours, au roi de Hatti, ton maître, et au Hatti tu seras fidèle[...]. (CLAUSES PARTICULIÈRES) Donc, toi, Niqmepa, rends-toi chez le roi et au temps fixé que moi, le roi, je te ferai connaître, alors tu viendras chez le roi. [...] Avec mon ami, sois ami ; avec mon ennemi, ennemi ! Si le roi du Hatti sort en Hanigalbat, Egypte, Karduniash (Babylonie) ou Alshe, tous pays qui sont proches des abords de ton pays et sont ennemis du roi de Hatti [...] si toi, Niqmepa, de tout ton cœur tu n'entres pas en campagne avec tes soldats et tes chars [...], alors tu transgresses le serment. [...] (PRISE À TÉMOIN DES DIEUX) [...] Que mille dieux s'assemblent, qu'ils prêtent attention et qu'ils soient témoins : le Soleil du ciel, le Soleil d'Arinna, l'Adad du ciel, l'Adad de Hatti, [...] le dieu Enlil, la déesse Ninlil, la montagne, les fleuves, les sources, l'Océan, Sin (dieu-lune) et Shamash (dieu-soleil) à leur lever et à leur coucher ; à ce traité et à ce serment ils sont témoins. (MALÉDICTION ET BÉNÉDICTION) À toute parole de ce traité et de ce serment, inscrite sur cette tablette, si Niqmepa n'est pas fidèle, que ces dieux, par leur vie, fassent disparaître Niqmepa, sa personne, ses femmes, ses fils, sa ville et son pays et tout ce qu'il possède. Et si Niqmepa est fidèle [...], alors que par leur vie, ces dieux gardent Niqmepa, sa personne, ses femmes, ses fils, sa ville, son pays et tout ce qu'il possède ». « Traités et serments dans le Proche-Orient ancien », Supplément au Cahier Evangile n° 81, 1992, Trad. René Lebrun, p. 43-47. Cité par Bernard RENAUD, L’Alliance au cœur de la Torah, Cahier Evangile n° 143, mars 2008, p. 5. Pour prier Chaque fois que nous nous laissons aller à la résignation, c'est la mort que nous choisissons. Chaque fois que nous nous enfermons dans nos habitudes, c'est la mort que nous choisissons. Chaque fois que nous oublions ton Evangile, c'est la mort que nous choisissons. Mais, Seigneur, tu nous appelles à la vie, à être des fils et des filles de la résurrection. Alors, nous t'en prions : Christ vivant, fais grandir en nous ta vie ! Christ vivant, accorde-nous ton Esprit ! Christ vivant, apaise nos peurs ! Christ vivant, réveille nos cœurs ! Christ vivant, donne-nous ta joie ! Christ vivant, ressuscite notre foi ! (Antoine NOUIS)