situation alors que d’autres, qui travaillent et touchent à peine le SMIC, ont du mal à joindre
les deux bouts. On imagine facilement que le faible écart entre ces deux situations pourrait en
tenter plus d’un de choisir le chômage plutôt que le travail. Cette situation a été théorisée et
porte le nom de trappe à inactivité. L’idée est que le chômeur touche des revenus de
remplacement : ce sont toutes les aides financières… mais il faut aussi ajouter qu’ils
bénéficient de 35 heures de loisirs en plus que le travailleur. Si ces revenus de remplacement
sont trop élevés par rapport aux petits salaires, alors, en bon agent économique rationnel,
l’individu opte pour le chômage plutôt que pour le travail. Pour réduire cette situation sur le
marché du travail, on pourrait dire qu’il suffit aux entrepreneurs d’augmenter les salaires afin
d’encourager à travailler. Oui, mais dans ce cas, d’autres employeurs emploieront moins et
nous retrouverons quand même le problème du chômage.
On a donc ici une théorie du chômage volontaire, dû à des revenus de remplacement trop
élevés qui engendrent un salaire réel trop élevé et donc du chômage.
L’autre citation elle nous explique que de toute façon, même si tous les chômeurs voulaient
travailler, ils ne le pourraient pas car il n’y a pas assez d’emploi. Aussi le chômage est-il
involontaire et on ne peut pas laisser ces gens sans rien car ils n’ont pas choisi leur sort.
On rejoint ici les thèses du chômage involontaire développées par Keynes dans théorie
générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie en 1936. Le chômage là aussi se caractérise
par un salaire réel trop élevé mais cela n’en est pas la cause. Les travailleurs n’ont aucun
moyen d’influencer le niveau de salaire réel car celui-ci se fixe sur le marché des biens et des
services en fonction de l’offre et de la demande de biens que les entreprises tentent d’ajuster
au niveau d’emploi et de production. Si le salaire réel est trop élevé c’est que la demande
effective est insuffisante pour assurer le plein emploi et donc le salaire réel se fixe à un niveau
supérieur à celui qui assure le plein emploi, mais qui permet aux entrepreneurs de réaliser leur
pari. Il n’existe qu’un seul niveau qui le permet, c’est celui de la demande effective, et il
n’assure pas forcément le plein-emploi : le chômage est donc involontaire
Cette controverse sur la question du chômage reflète des oppositions bien plus importantes
entre néoclassiques et keynésiens. Notamment sur la nature de l’économie dans laquelle nous
vivons. Pour les néoclassiques, nous vivons dans une économie de marché caractérisée par
l’équilibre général et la coordination des agents économiques. Tous les marchés sont en
équilibre y compris donc celui du travail. Pour Keynes, nous vivons dans une économie
capitaliste où le problème central est la réalisation des projets de l’entrepreneur. Il est possible
que la réalisation de ces paris n’entraîne pas le plein-emploi car les entrepreneurs n’ont
besoin d’être en équilibre qu’avec eux-mêmes. Ils ajustent le niveau de l’emploi et de la
production de manière à égaliser l’offre d’épargne des ménages et leur demande
d’investissement afin d’être assuré que toute leur production trouvera des débouchés au prix
voulu. Le niveau de production se fixe au niveau qui équilibre la demande effective. Pour
Keynes, il n’existe qu’un seul niveau qui le permet car il n’existe pas un marché des fonds
prêtables qui égalise l’offre et la demande d’épargne. Cette théorie de la demande effective
s’oppose à celle de la loi de Say qui régule tout le système néoclassique.. Dans ce système, le
marché des fonds prêtables assure par l’ajustement du taux d’intérêt l’égalisation de l’offre et
de la demande d’épargne si bien que ce qui n’est pas consommé est investi et qu’il ne peut
donc pas y avoir de problèmes de débouchés : l’équilibre est atteint pour chaque niveau de
prix ou de l’activité économique, ce qui n’est pas le cas chez Keynes. On peut se demander
pourquoi il n’y a pas de marché des fonds prêtables chez Keynes : c’est parce qu’il réfléchit
dans une économie monétaire. Une fois les revenus et profits versés, le consommateur et
l’entrepreneur en font ce qu’ils veulent. Pas besoin de coordination sur un quelconque marché
de fonds prêtables comme le pensent les néoclassiques. Chacun décide librement de ce qu’il