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football où se disputait un grand match. Les américains ont tapé dessus et massacré pas mal de
matcheurs (footballeurs) et spectateurs. On ignore un peu trop que c’est la guerre.
Aujourd’hui est jour de deuil national, mais il n’y a pas eu de deuil national quant on a enterré les 50
et même 100 otages fusillés par les boches à Nantes, à Bordeaux, Paris et ailleurs.
De Jean du 28-03-1943
« Pas de lettre de vous cette semaine-mauvais temps- le parrain est venu ces jours-ci et aussi le
pasteur du stalag (1ère depuis 3 ans. Avons pu parler des choses sérieuses, il reviendra tous les 2 mois.
Il est pasteur dans la Drôme. J’ai beaucoup de travail, ai dû y aller aujourd’hui ».
Voici des extraits de la longue lettre qui était dans la caisse :
« Aujourd’hui c’est 5’ dimanche du mois donc pas de lettre à vous envoyer mais j’en envoie une quand
même et une lame au marché noir. J’espère que cette caisse vous arrivera sans encombre comme la
1ère.
J’aurais voulu pouvoir finir le tonneau mais vu les événements (relâchement dans les sanctions) je
vais vite faire mon expédition. La tirelire arrivera après Noël mais le cœur y est quant même. J’envoie
un rasoir pour Jacques et un pour mon cher père.
Je vous renvoie toutes mes correspondances. J’aurais aimé les garder pour les relire de temps en
temps mais on quittera peut-être ce bled plus tôt et plus vite qu’on croît. Je vois venir l’hiver confiant.
Au garage, si je ne suis pas le maître, le singe (le patron du garage où il est employé) ne l’est pas non plus. Il ne
me fait pas faire ce qu’il veut. Je suis au stalag VI D. le VI A est pour les Russes. Oh ceux-là ! C’est une
abomination qui dépasse toute imagination. Tous les jours il en arrive par milliers en Allemagne.
Femmes, enfants, vieillards… et le marché commence. Les industriels sont là qui attendent ce bétail
humain. Les maris sont déparés de leurs femmes, les enfants de leurs parents sans aucun égard et
avec de la musique. Pas de colis pour ces pauvres. Jamais de lettre. Paye nulle.
Pour nous, prisonniers, c’est presque normal, mais les civils c’est atroce. Excusez mon écriture, c’est
que j’écris dans l’ombre. Il faut que je me cache bien pour écrire ceci. Ce serait la cellule ou partir en
représailles sur le front russe.
Je crois que le ménage de la Guite a déjà des nuages. Son mari parti ici ! … en ce moment il cuit un
bon plat de nouilles pour le souper du dimanche. Ce matin j’ai fait pour la chambre un bon chocolat
au lait. C’est idéal après une grasse matinée au lit. Voyez comme nous sommes bien et surtout
toujours unis. Nos gardes doivent dire : les Français ils sont mieux que nous.
Quant au singe, la guerre peut durer 10 ans pour lui elle sera encore trop courte. Jamais il n’a tant
gagné, et il y en a beaucoup comme lui sur la terre. Que Dieu soit avec vous tous en cette fin d’année
et au cours de l’autre. J’espère bien être des votre pendant son cours (en 1945). J’ai reçu une bible du
stalag et de temps en temps des brochures.
Ah ! Que je voudrais pouvoir partir dans cette caisse ! Dire qu’elle, elle va vers vous. Je voudrais vous
voir au déballage.
J’ai essayé de passer dedans avant de mettre les fonds, la tête et un bras y a passé. Vous allé rire.
L’oncle et le parrain (les Américains et les Anglais qui bombardent) en mettent un coup… je crois que le fabricant
de macaroni va bientôt filer du mauvais coton (les Italiens). Quant ça va mal pour le cousin (les Allemands ,
les sanctions pleuvent sur nous… quant les colis arrivent ils sont ouvert devant nous, les conserves
sont mises en réserve dans une armoire. On nous les donne à mesure que nous les demandons, ils
devraient nous ouvrir les boites mais ils les donnent, telles que, et je ramasse les miennes sous le