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Dans tous les temps et dans toutes les cultures, le mariage «est une sage institution du Créateur pour
réaliser dans l’humanité son dessein d’amour. Par le moyen de la donation personnelle réciproque, qui
leur est propre et exclusive, les époux tendent à la communion de leurs êtres en vue d’un mutuel
perfectionnement personnel pour collaborer avec Dieu à la génération et à l’éducation de nouvelles
vies »[10]. Dans la fécondité de l’amour conjugal, l’homme et la femme « mettent en évidence qu’à
l’origine de leur vie conjugale il y a un "oui" authentique qui est prononcé et réellement vécu dans la
réciprocité, en restant toujours ouvert à la vie. […] La loi naturelle, qui est à la base de la reconnaissance
de la véritable égalité entre les personnes et les peuples, mérite d’être reconnue comme la source à
laquelle doit s’inspirer également la relation entre les époux dans leur responsabilité d’engendrer de
nouveaux enfants. La transmission de la vie est inscrite dans la nature et ses lois demeurent comme une
norme non écrite à laquelle tous doivent se référer »[11].
7. L’Eglise est convaincue que ce qui est humain est non seulement accueilli et respecté par la foi, mais il
est aussi purifié, élevé et porté à la perfection. Après avoir créé l’homme à son image et à sa
ressemblance (cf. Gn 1, 26), Dieu a qualifié de « très bonne » sa création (Gn 1, 31), et l’a ensuite
assumée dans son Fils (cf. Jn 1, 14). Par le mystère de l’Incarnation, le Fils de Dieu a confirmé la dignité
du corps et de l’âme, constitutifs de l’être humain. Le Christ n’a pas dédaigné le corps ; il en a
pleinement révélé le sens et la valeur: « en réalité, le mystère de l’homme ne s’éclaire vraiment que dans
le mystère du Verbe Incarné »[12].
En devenant l’un de nous, le Fils atteste que nous pouvons devenir « fils de Dieu » (Jn 1, 12), «
participants de la nature divine » (2 P 1, 4). Cette nouvelle dimension n’est pas contradictoire de la
dignité de la créature, que par la raison tous les hommes peuvent reconnaître. Elle l’élève plutôt vers un
horizon ultérieur de vie qui est propre à Dieu, ce qui permet de réfléchir de manière plus adéquate sur la
vie humaine et sur les actes qui l’expriment[13].
À la lumière de ces données de la foi, le respect dû à l’être humain et requis par la raison, est encore plus
accentué et renforcé. C’est pourquoi il n’y a pas d’opposition entre l’affirmation de la dignité de la vie
humaine et son caractère sacré. « Les différentes manières dont Dieu veille sur le monde et sur l’homme
dans l’histoire non seulement ne s’excluent pas, mais, au contraire, se renforcent l’une l’autre et
s’interpénètrent. Toutes proviennent du dessein éternel de sagesse et d’amour par lequel Dieu prédestine
les hommes "à reproduire l’image de son Fils" (Rm 8, 29) »[14]
8. De ces deux dimensions, humaine et divine, on comprend mieux la raison d’être de la valeur inviolable
de l’homme: il a une vocation éternelle et est appelé à communier à l’amour trinitaire du Dieu vivant.
Cette valeur s’applique à tous sans distinction. Par le simple fait qu’il existe, chaque être humain doit
être pleinement respecté. En ce qui concerne la dignité, l’introduction de critères de discrimination, sur la
base du développement biologique, psychologique, culturel ou de l’état de santé, est à exclure. En
l’homme, créé à l’image de Dieu, se reflète, à chaque phase de son existence, « le visage de son Fils
unique […] Cet amour infini et presque incompréhensible de Dieu pour l’homme révèle jusqu’à quel
point la personne humaine est digne d’être aimée en elle-même, indépendamment de toute autre
considération - intelligence, beauté, santé, jeunesse, intégrité et ainsi de suite. En définitive, la vie
humaine est toujours un bien, car "elle est dans le monde une manifestation de Dieu, un signe de sa
présence, une trace de sa gloire" (cf. Evangelium vitae, n. 34) »[15].
9. Ces deux dimensions de la vie humaine, naturelle et surnaturelle, permettent aussi de mieux
comprendre en quel sens les actes qui permettent à l’être humain de naître et par lesquels l’homme et la
femme se donnent mutuellement l’un à l’autre, sont un reflet de l’amour trinitaire. « Dieu, qui est amour
et vie, a inscrit dans l’homme et la femme la vocation à une participation spéciale à son mystère de
communion personnelle et à son œuvre de Créateur et de Père »[16] .
Le mariage chrétien « plonge ses racines dans la complémentarité naturelle qui existe entre l’homme et la
femme, et se nourrit grâce à la volonté personnelle des époux de partager la totalité de leur projet de vie,
ce qu’ils ont et ce qu’ils sont: en cela, une telle communion est le fruit et le signe d’une exigence
profondément humaine. Mais dans le Christ Seigneur, Dieu prend cette exigence, il la confirme, la
purifie et l’élève, la menant à sa perfection par le sacrement de mariage: l’Esprit Saint répandu au cours
de la célébration sacramentelle remet aux époux chrétiens le don d’une communion nouvelle,
communion d’amour, image vivante et réelle de l’unité tout à fait singulière qui fait de l’Eglise
l’indivisible Corps mystique du Christ »[17].