Dans ses Épîtres, l’Apôtre Pierre insiste sur cette réalité humaine et temporelle du
Seigneur, réalité qui est à la base même du mystère du salut.
«Le Christ mis à mort selon la chair, a été vivifié selon l’esprit. Le Christ donc, ayant
souffert dans la chair, vous aussi, armez-vous de cette pensée, à savoir : celui qui a
souffert dans la chair a rompu avec le péché, pour passer le temps qui reste à vivre
dans la chair, non pas selon les passions humaines, mais selon le vouloir divin» (I
Pierre, 2, 18).
L’emploi de l’expression est ici très significatif. La chair désigne le fait que le Christ a
pris notre condition humaine, notre humanité.
C’est à l’apôtre Jean qui, le dernier de tous en date, et avec une vigueur accrue par
l’hérésie docétiste (dont je reparlerai plus loin) qu’il revenait de marquer avec le plus de
réalisme que l’utilisation du terme chair loin d’être une concession à un langage
imparfait était intentionnellement un concept de la Révélation biblique.
Au début du 4e Évangile, saint Jean affirme : Et le Verbe s’est fait chair (lire : a pris
notre humanité). Quand Jean, dans son Évangile, nous dit que «La parole (le Verbe) s’est
fait chair et qu’elle est demeuré parmi nous», il veut sans doute répondre aux docètes
(groupe hérétique) qui ne voulaient voir dans le corps du Christ, qu’une apparence.
Plusieurs séducteurs sont apparus dans le monde de saint Jean et ils ne confessent que
Jésus n’est pas venu dans la chair, mais qu’il a pris l’apparence d’un corps humain.
Jean est cependant fort explicite :
«Ce qui était dès le commencement
Ce que nous avons entendu
Ce que nous avons vu de nos yeux
Ce que nous avons contemplé
Ce que nos mains ont touché
Du Verbe de vie;
Car la vie s’est manifestée
Nous l’avons vue et nous en rendons témoignage
Et nous annonçons cette vie éternelle
Qui était auprès du Père et qui nous est apparue» (Jean, IV, 3).
Saint Paul
L’utilisation du terme de chair dans la langue de saint Paul mérite cependant que nous
nous y attardions davantage. On a voulu remarquer dans l’anthropologie de Paul un
emprunt, plus ou moins heureux, à la philosophie grecque, lorsqu’il emploie le couple «
la chair et l’esprit ». Paul glisse sur les sens avancés d’un même vocable et passe
insensiblement de l’idée de chair signifiant l’organisme humain, à celle de chair
désignant la condition humaine, ou encore la faiblesse physique ou morale de la nature
humaine.