Quarante EC1 complétées par les rocroyens Chap. 1 Quelles sont les sources de la croissance économique? Q1. Présentez le lien entre productivité globale des facteurs et progrès technique. En analysant l’apport des facteurs travail et capital à la croissance, Robert Solow (1956) remarque qu’il existe un résidu inexpliqué, qu’il attribue à un troisième facteur de production, le progrès technique. Celui-ci correspond à la somme des innovations, de produits (innovations majeures ou incrémentales) ou de procédés : nouvelle organisation du travail (fordisme, toyotisme,…), nouvelle organisation de la production (juste à temps, flux tendus, qualité totale,…), nouvelle organisation des relations interentreprises (sous-traitance,…); ou encore innovation dans l’organisation de la distribution (franchises), selon la typologie de J. Schumpeter. Solow complète donc l’analyse de la croissance en ajoutant le progrès technique à la classique fonction de production (Cobb-Douglas), qui associe travail et capital dans une combinaison qui peut être complémentaire ou substituable, en fonction de la contrainte technologique et du prix relatif des facteurs. Selon lui, le progrès technique permet d’améliorer la combinaison productive, en repoussant la contrainte technologique, ce qui permet de substituer du capital au travail, et de lutter contre la loi des rendements décroissants de David Ricardo (Principes de l’économie politique et de l’impôt, 1817), selon laquelle l’ajout de quantités de facteur supplémentaire se traduit par un rendement marginal moindre. De ce fait, les économies ne devraient pas se diriger vers l’ « état stationnaire » prophétisé par Ricardo, mais obtenir une croissance améliorée par le progrès technique, considéré comme exogène au modèle, imprévisible et inexpliqué. On parle pour ce résidu inexpliqué, de productivité globale des facteurs, qui peut se définir comme le rapport entre une production et les ressources mises en œuvre pour l’obtenir. Elle permet de mesurer l'efficacité de la combinaison productive. La croissance de la productivité globale des facteurs est la partie de la croissance de la production qui n'est expliquée ni par la croissance de l'emploi, ni par la croissance du stock de capital productif, mais par le progrès technique qui améliore l’efficacité de la combinaison productive. La mesure de la PGF permet de faire une distinction fondamentale entre deux régimes de croissance. On qualifie celle-ci d’extensive, lorsqu’elle provient principalement de l’augmentation de la quantité utilisée de facteurs (travail et capital), ou d’intensive, quand son origine réside surtout dans la productivité globale des facteurs. Q2. Comment mesure-t-on le PIB ? Le Produit Intérieur Brut mesure la richesse effectivement créée par une économie au cours d’une année. Son évolution au cours d’une période permet d’établir le taux de croissance de l’économie d’un pays. Trois approches sont possibles pour mesurer le PIB : On peut mesurer la production, c’est-à-dire faire la somme des valeurs ajoutées des unités de production résidant sur le territoire national (français ou étrangers). Le PIB comptabilise la production marchande des entreprises, mais aussi non-marchande (gratuite ou vendue à un prix inférieur à 50% du coût de production) des APU et des ISBLSM, qui est comptabilisée au coût de production. Il faut intégrer dans le calcul les impôts sur la production, qui faussent la mesure de la valeur ajoutée (la TVA est un prélèvement de l’Etat sur la valeur ajoutée), et retrancher les subventions qui permettent aux entreprises de diminuer artificiellement leurs prix de vente, donc leur valeur ajoutée. On peut également mesurer le PIB par les revenus : chaque richesse créée est aussi un revenu distribué aux agents économiques. Il faut alors additionner les rémunérations des salariés, l’excédent brut d’exploitation des entreprises (et les revenus mixtes des entrepreneurs individuels), les impôts sur la production et les importations, auxquels de nouveau il faut retrancher les subventions. On peut enfin aborder le PIB sous l’angle de la demande. En effet le PIB correspond à la somme des demandes adressées par les agents économiques aux unités de production résidentes. Il faut alors additionner les dépenses de consommation finale des ménages et des administrations publiques, la formation brute de capital fixe, la demande extérieure (exportations auxquelles il faut soustraire les importations), ainsi que les variations de stock. Cependant les variations du PIB peuvent résulter d’un effet prix ou d’un effet quantité. Pour mesurer la croissance réelle de la production, il faut donc annuler l’effet-prix ou déflater (PIB en valeur/ IPC x 100). On parle alors de PIB en volume. Enfin pour pouvoir utiliser le PIB dans les comparaisons internationales, il faut utiliser un taux de change fictif, la parité de pouvoir d’achat. En effet deux pays présentant un niveau de richesse comparables peuvent avoir des pouvoirs d’achat différents, car le coût de la vie n’y est pas le même. Il s’agit d’un taux de conversion monétaire qui permet d'exprimer dans une unité commune (le dollar PPA) les pouvoirs d'achat des différentes monnaies. Ce taux exprime le rapport entre la quantité d'unités monétaires nécessaire dans des pays différents pour se procurer le même « panier » de biens et de services. Q3. En quoi l'approche en termes d'IDH complète-t-elle celle en termes de PIB ? Le produit intérieur brut a été inventé par Simon Kuznets en 1934 afin de mesurer l'effet de la Grande Dépression sur l'économie. Il mesure la production économique réalisée à l’intérieur d'un pays donné par les agents économiques résidant à l’intérieur de ce territoire. Il peut se calculer de différentes manières, en mesurant la production, les revenus distribués ou les composantes de la demande globale. L’augmentation soutenue du PIB sur longue période correspond à la croissance économique. Le PIB est donc un indicateur quantitatif, qui néglige de nombreux aspects (production domestique, externalités, économie souterraine, ..) et ne permet pas de mesurer la qualité de vie et le développement, c’est-à-dire les transformations structurelles et qualitatives qui accompagnent la croissance. Par exemple, la richesse peut être accaparée par une minorité, ou ne pas profiter à la population si les services publics d’éducation et de santé ne sont pas performants. La richesse peut s’accompagner d’un niveau de pollution insoutenable. C’est pourquoi l'économiste indien Amartya Sen a créé en 1990 pour le PNUD (programme des Nations Unies pour le développement) l’Indice de Développement Humain. Celui-ci fait la moyenne géométrique de quatre indicateurs, mesurant le niveau de santé (espérance de vie à la naissance), d’éducation (durée moyenne de scolarisation et durée attendue de scolarisation), et le niveau de vie (revenu national brut par habitant en parité de pouvoir d’achat). La mesure du niveau de vie grâce au RNB permet de tenir compte des flux de revenus du pays avec l’extérieur, et la conversion en PPA de mesurer le pouvoir d’achat réel de la population en biens et services. Le niveau de santé permet de mesurer indirectement la satisfaction des besoins matériels essentiels tels que l'accès à une alimentation saine, à l'eau potable, à un logement décent, à une bonne hygiène et aux soins médicaux L'éducation a des effets directs sur le revenu et la productivité de chacun. Elle traduit la satisfaction des besoins immatériels tels que la capacité à participer aux prises de décision sur le lieu de travail ou dans la société, d'avoir une plus grande liberté de choix de vie. Enfin, les personnes les plus éduquées déclarent un plus grand bien-être subjectif, sont en meilleure santé et ont plus de liens sociaux. L’IDH a l’avantage d’introduire des éléments qualitatifs dans la mesure du développement et de montrer que la corrélation entre niveau de vie et développement n'est pas parfaite. Un pays peut avoir un niveau de vie moyen élevé mais un IDH inférieur à celui d'un pays moins riche en moyenne par habitant (ex : Arabie Saoudite). L’IDH complète donc utilement le PIB. Il peut lui-même être complété par d’autres indicateurs, comme l’Indice de développement humain ajusté aux inégalités (IDHI) qui a pour objectif de déflater l’IDH en tenant compte des inégalités dans la répartition de chaque dimension au sein de la population, ou encore par l’Indice des Inégalités de Genre. Q4. Montrez que la productivité globale des facteurs est source de croissance économique. La contribution des facteurs de production est mesurée par la fonction des néoclassiques CobbDouglas (1928) définie par la relation Y = f (K;L). C'est une combinaison productive qui peut être complémentaire ou substituable. Cependant, l'accumulation du capital se heurte à la loi des rendements décroissants et ne suffit pas à expliquer toute la croissance. Ricardo, dans sa théorie des rendements décroissants évoque le moment où l'on atteint la stagnation de la croissance appelée "Etat Stationnaire de l'Economie". Autrement dit, l'augmentation des facteurs de production entraîne un rendement marginal moindre. La Productivité Globale des Facteurs ou PGF est apparue avec Robert Solow dans son ouvrage "A Contribution to the Theory of Economic Growth" publié en 1956. Celle-ci fut tout d'abord dénommée "Résidu de Solow". En effet, en étudiant les sources de la croissance, il est apparu qu'une partie de la croissance n'était pas due à la production réalisée par les facteurs de production (travail et capital), contrairement à ce que montrait la fonction Cobb-Douglas créée en 1928. Le "résidu de Solow" est donc une part inexpliquée de la croissance économique, que Solow attribue au progrès technique, permettant de repousser les contraintes technologiques et d'améliorer l'efficacité globale et la productivité des facteurs. Ce troisième facteur de production entraîne une transformation des moyens et méthodes de production de l'organisation du travail et des structures de l'économie. Le progrès technique correspond à l’ensemble des innovations de produit ou de procédé (J. Schumpeter, Le cycle des affaires, 1939). Les innovations de produit permettent de créer un besoin nouveau chez les consommateurs, qui va alimenter la demande globale en suscitant des flux de consommation, d’investissement, ou d’exportations. Les innovations de procédé améliorent l’offre des entreprises : en effet elles permettent d’améliorer la qualité de la production, mais aussi de réaliser des gains de productivité, ce qui peut se traduire par des baisses de prix, des quantités produites plus importantes, ou des marges bénéficiaires améliorées sur chaque produit vendu. L’innovation permet d’améliorer les combinaisons productives en dépassant la contrainte technologique qui empêche de substituer du capital au travail, et repousse ainsi la loi des rendements décroissants (D. Ricardo, Principes de l’économie politique et de l’impôt, 1817). Le progrès technique est donc à l’origine d’une meilleure productivité globale des facteurs. Cependant, le Progrès technique est issu du fruit d'investissements ne se limitant plus au seul capital fixe: mais à la Recherche&Développement (K technologique), à la formation (K humain) et à l'amélioration de certaines infrastructures au travers de l'Etat (K public). La croissance est désormais endogène, résultant d'un processus continu (investissement permanent) où la croissance génère ellemême le progrès technique alimentant à son tour la croissance. C'est donc un phénomène continu et auto-entretenu. Q5. Comment l’accumulation du capital contribue-t-elle à la croissance ? Au sens strict, l’accumulation de capital correspond à l’accroissement du stock de capital fixe. Celui-ci augmente grâce aux flux d’investissements mesurés par la FBCF, mais est diminué par l’usure du capital fixe (amortissement). C’est avec l’augmentation de la quantité de travail et le progrès technique, une des sources majeures de la croissance économique (augmentation soutenue sur longue période du PIB). En effet, il améliore l’offre et soutient la demande. Il agit sur la demande de deux façons : Tout d’abord, il augmente la demande de biens d’équipement adressée aux secteurs des machinesoutils, de la construction, des transports…ce qui va accroître la demande globale et obliger les entreprises de ces secteurs à augmenter leur production. Ensuite, cette production nouvelle va se traduire par l’embauche de nouveaux travailleurs et par la distribution de revenus supplémentaires. Les salariés vont accroître leur consommation de biens et de services ce qui multiplie la demande et accélère la croissance économique (phénomène du multiplicateur de Keynes). L’investissement agit également sur l’offre de produits de plusieurs façons : L’augmentation du stock de capital fixe, c’est-à-dire les capacités de production, va permettre aux entreprises de produire plus si la demande est au rendez-vous, et d’augmenter les biens et services à disposition des consommateurs. L’investissement de capacité correspond à des équipements supplémentaires (machines, bâtiments, outils..) qui nécessiteront par ailleurs l’embauche de travailleurs supplémentaires. Ensuite, un investissement se traduit souvent par l’achat de machines plus performantes parce qu’elles incorporent le progrès technique. L’investissement de productivité, qui substitue le capital au travail, permet d’augmenter les quantités produites et/ou de diminuer les coûts unitaires, que l’entreprise peut répercuter sur les prix, ce qui va rendre les entreprises plus compétitives sur le marché intérieur et sur les marchés extérieurs. La demande devrait augmenter et les entreprises devraient produire plus. Enfin, un investissement de remplacement rajeunit le stock de capital fixe, ce qui accroît son efficacité car les nouveaux équipements ont également incorporé le progrès technique, et ont un taux de panne plus faible. Ainsi, le remplacement d’un vieil ordinateur par un ordinateur de nouvelle génération améliore l’efficacité du système productif car ce dernier a plus puissance et de fonctionnalités. L’incorporation du progrès technique permet d’améliorer l’efficacité globale de la combinaison productive (PGF). L’accumulation de capital, prise au sens large, peut aussi concerner d’autres capitaux, et favoriser une croissance endogène, qui suscite en continu du progrès technique. L’interaction du capital humain (Lucas), du capital technologique (Romer), ou du capital public (Barro), dégagent des externalités positives et permettent des gains de productivité qui alimentent la croissance. Q6. Quel est l’apport des théories de la croissance endogène à la compréhension de la croissance ? Robert Solow considérait que le résidu, c’est-à-dire les gains de productivité globale des facteurs, ne pouvait être expliqué par son modèle. Il était exogène au modèle. Il attribuait donc ces gains de productivité au progrès technique qui « tombait du ciel » c’est-à-dire qu’il résultait de découvertes qui sont aléatoires. Les théories récentes de la croissance endogène cherchent à construire des modèles qui expliquent l’apparition du progrès technique. Ces modèles ont été développés à partir des années 1980, notamment par Paul Romer (1986), Robert Barro (1991), ou Robert Lucas (1988). Ils se fondent sur l'hypothèse que la croissance génère par elle-même le progrès technique. Le progrès technique est donc « endogène » à la croissance de la production. La croissance économique trouve donc sa source dans l’accumulation et l’interaction de différentes formes de capitaux (technologique, physique, humain, public) utilisés par les différents agents économiques. La croissance dépend donc de l’accumulation de capital au sens large. En effet ces différents investissements vont permettre d’obtenir des gains de productivité, mais aussi produire des « externalités positives » c’est-à-dire des avantages procurés aux autres agents économiques sans qu’ils en aient à payer le coût. Par exemple le capital public (Barro) qui correspond à l’ensemble des infrastructures publiques offertes par l’Etat et les collectivités locales (Ecole, universités, routes, canaux, aéroports,…), permet d’améliorer les réseaux de communication ou de transport, de former des étudiants (universités), ce qui permet aux entreprises d’améliorer leur productivité. Un capital humain élevé (Lucas), c’est-à-dire l’ensemble des capacités productives qu'un individu acquiert par l'accumulation de connaissances ou d’expériences, permet à la population d’innover, de s’approprier et de diffuser plus rapidement les nouvelles technologies, ou de se reconvertir plus rapidement. Les investissements dans le capital physique et technologique (Romer) vont permettre d’innover et d’incorporer ces innovations dans les méthodes de production, ce qui permet de faire des gains de productivité mais requiert une élévation du capital humain. Les capitaux sont donc en interaction. La croissance est donc un phénomène cumulatif et continu. Elle fournit des ressources financières et immatérielles qui vont soutenir les investissements dans les différents capitaux. Aussi les économies ne devraient donc pas tendre vers un état stationnaire. Elles ne sont pas soumises aux aléas d’un progrès technique qui « tomberait du ciel ». Chap. 2 Comment expliquer l'instabilité de la croissance? Q7. Comment les chocs d’offre et de demande permettent-ils d’expliquer les fluctuations économiques? Un choc économique est une modification brutale et imprévue de l’offre ou de la demande, qui provoque d’importantes fluctuations économiques (ensemble des variations du rythme de la croissance économique : expansion, récession, dépression, crise,…). Un choc d’offre négatif (diminution de l’offre) résulte généralement d’une augmentation brutale des coûts de production (ex. crise pétrolière). Cela se traduit par une diminution de la production, donc une récession, et s’accompagne de chômage et d’inflation. Un choc d’offre positif résulte généralement du progrès technique, qui permet de baisser les coûts de production et de stimuler la demande. Il en résulte expansion ou croissance. Un choc de demande négatif est une diminution brutale de la demande globale (ex. hausse importante des taux d’intérêts), qui peut conduire à un ralentissement ou une récession. Un choc de demande positif est une augmentation de la demande globale (ex. réunification de l’Allemagne), qui conduit à une phase d’expansion ou de croissance. Q8. Vous montrerez les mécanismes qui conduisent d'un choc de demande à une déflation. La déflation (baisse générale et durable des prix) a pour origine un choc de demande négatif, c’est-àdire un événement qui affecte le niveau de la demande globale à court terme (variation du niveau de consommation finale, d’investissement ou de la demande extérieure). La croissance effective devient inférieure à la croissance potentielle, entrainant baisse des prix et chômage. Dans l’exemple de la crise de 1929, le retrait des capitaux britanniques provoque une panique boursière, qui fait fondre le prix des actifs achetés à crédit. Cette baisse soudaine du niveau des patrimoines des investisseurs diminue l’investissement et les possibilités d’endettement. La diminution de la production qui s’ensuit, entraine un chômage massif, qui en l’absence de toute protection sociale, déprime la consommation. La crise des subprimes met en œuvre des mécanismes similaires. Le relèvement par la FED de ses taux directeurs pour lutter contre l’inflation, met en grande difficulté les agents économiques peu solvables qui se sont endettés à taux variables pour réaliser un achat immobilier. La mise en vente massive des actifs immobiliers qui s’ensuit, aboutit à la baisse des prix, la faillite d’établissements bancaires, et contamine le monde entier par la baisse de valeur des prêts titrisés. La production ralentit alors, faute de financements et de débouchés solvables, entrainant un chômage de masse. La déflation possède des mécanismes spécifiques qui peuvent conduire à une spirale déflationniste, un cercle vicieux dont il est difficile de sortir. En effet, constatant la baisse des prix, les agents économiques vont différer leur consommation et leurs investissements. Cet attentisme mène à la baisse de la demande globale adressée aux entreprises, qui doivent ralentir leur production faute de débouchés, baisser leurs prix et licencier pour conserver leur rentabilité. Elles distribuent ainsi moins de revenus, ce qui déprime davantage la consommation. D’autre part, les agents économiques cherchent à se désendetter pour diminuer le poids de leurs remboursements. Ils épargnent pour pouvoir rembourser, ou mettent en vente leurs actifs, mais cette mise en vente simultanée et massive a pour effet de faire baisser les prix des actifs, car la demande n’est pas au rendez-vous. Cela conduit à l’augmentation du poids de la dette en valeur relative : en effet la dette est fixe, alors que les revenus diminuent. De plus les prix peuvent baisser plus vite que les agents économiques n’arrivent à se désendetter (il faut plusieurs mois pour vendre une maison par exemple). C’est le mécanisme de la déflation par la dette (Irving Fisher). Q9. Comment le cycle du crédit permet-il d'expliquer les crises économiques? Selon l'économiste américain Hyman Minsky il se développe un "paradoxe de la tranquillité" en période de croissance : les crises de surendettement se préparent lorsque tout va bien et les agents économiques profitent de la croissance et des taux d'intérêts bas pour emprunter parfois au-delà du raisonnable. De même, pour Irving Fisher (1867-1947), le cycle du crédit est à l'origine des explications des fluctuations économiques qui sont liés au comportement des banques. En période d'expansion, les banques accordent plus facilement des crédits car les emprunteurs pourront les rembourser. En effet, plus la croissance est forte et plus les perspectives de remboursement augmentent. Cependant, les banques vont se créer des risques qui reposent sur une croissance de plus en plus optimiste : celles-ci assouplissent leurs conditions d'emprunts et surestiment la solvabilité de leurs clients. En période de ralentissement, les banques vont freiner brutalement "le robinet du crédit" en augmentant les taux d'intérêts car le risque d'un non-remboursement augmente. En adoptant cette politique, les banques alimentent la baisse et le ralentissement de l'économie. Elles vont freiner les investissements ce qui va prolonger la crise car le resserrement du crédit va faire diminuer la croissance. Ainsi moins d'entreprises financeront des investissements et les ménages consommeront moins. Notons que les banques accordent des crédits a des agents de moins en moins solvables ce qui augmente le risque de défaut. Lorsque trop d'agents font défaut les banques vont chercher à se prémunir contre le risque de non-remboursement, ce qui entraine une hausse des taux : l'activité ralentit. Par conséquent, la fin d'un cycle du crédit peut aggraver une récession, comme le décrit Irving Fisher dans le mécanisme de déflation par la dette. Pour se désendetter les emprunteurs en difficulté vont vendre leurs actifs au même moment. Cette vente massive amène un déséquilibre de l'offre qui devient supérieure à la demande, ce qui entraine une baisse de prix. Cela va alimenter la récession et créer un cycle de déflation. Cette baisse de la valeur des actifs entraine une augmentation du taux d'endettement. Q10. Vous montrerez que la croissance économique est soumise à des fluctuations. Les fluctuations désignent l'ensemble des mouvements de ralentissement ou d'accélération du rythme de la croissance économique. La croissance économique ne constitue pas un phénomène linéaire, certes elle consiste en un accroissement sur le long terme des richesses produites sur un territoire, mais cette progression ne s'effectue pas toujours à un rythme identique d'une année à l'autre ou d'une période à l'autre. La croissance économique est un phénomène cyclique qui peut être affecté de chocs, positifs ou négatifs. L'économie est marquée par des tendances longues (mesurées par le TCAM, Taux de croissance Annuel Moyen) qui sont un phénomène de long terme qui peuvent être dues à l'augmentation de la population, l'accumulation de capital, le progrès technique (Robert Solow), l'arrivée des femmes sur le marché du travail, un changement de sources d'énergie... A l'intérieur de ces tendances à long terme, il y a des fluctuations importantes. Les mouvements de la croissance s'expliquent par les variations de prix, de la production, de l'emploi. La croissance varie donc à plus court terme avec des phases plus ou moins régulières. Il existe 4 types de phénomènes, lorsqu'il y a une hausse du PIB on parle à court terme d'expansion et à long terme de croissance. Lorsque le PIB est en baisse on parle à court terme de récession et à long terme de dépression L'analyse des fluctuations économiques repose notamment sur l'étude des différences entre la croissance effective et la croissance potentielle. La croissance effective désigne la croissance réelle mesurée par l'augmentation du PIB (elle dépend des variations de la demande globale composée de la consommation finale des ménages et des administrations, l'investissement en capital fixe des entreprises, des ménages et des administrations publiques, les exportations et la variation des stocks), la croissance potentielle correspond à la croissance maximale que peut obtenir un pays lorsqu'il mobilise tous ses facteurs de production (population active, capital, progrès technique) sans déclencher de tensions. L'écart entre le taux de croissance effective et potentielle est l'écart de production, aussi appelé l' "output gap", qui permet d'identifier la phase du cycle dans laquelle l'économie se trouve. En phase d'expansion, l'écart diminue et la croissance effective peut etre temporairement supérieure à la croissance potentielle, il y a alors inflation et comme toutes les capacités de travail sont employées, il y a hausse des salaires, et donc hausse des coûts de production. En revanche, en phase de récession, la croissance effective est inférieure à la croissance potentielle. On a alors un chômage important et une offre qui n'arrive pas à s'écouler, ce qui conduit à une baisse des prix. Enfin, pour Schumpeter, trois cycles se superposent et explique pour l'essentiel l'évolution de la conjoncture : -les cycles des stocks de Joseph Kitchin. Ce sont des cycles qui durent de 3 à 4ans et qui sont dus aux variations des stocks d'une entreprise. En période de croissance, les entreprises constituent des stocks pour faire face à l'augmentation de la demande. La production est alors supérieure aux besoins réels de l'entreprise, cela tire la croissance. L'inverse se produit quand la croissance diminue ; les entreprises produisent moins car elles ont déjà constitué leurs stocks, cela va donc déprimer la croissance. -Les cycles de l'investissement de Clément Juglar. Ce sont des cycles qui durent de 8 à 9 ans. La croissance engendre la croyance d'une croissance illimitée. Les individus sous estiment le risque, et font des placements spéculatifs. -les cycles de l'innovation, théorisé par Nikolai Kondratieff sont des cycles qui durent de 40 à 60 ans, ils sont caractérisés par une phase d'expansion et une phase de récession. La phase ascendante s’accompagne d’un excès d’investissements réalisé par les entreprises pour faire face à la concurrence, ce qui provoque une hausse des prix, les industriels répercutant leurs coûts de production sur les produits, et des taux d'intérêt qui augmentent face à une forte demande de la monnaie. Il s'ensuit donc un déclin de l’activité économique durant lequel les prix baissent, dû à un excès de l'offre et à une baisse de la demande, ainsi que les taux d'intérêts, une baisse de la consommation et des investissements. Chap. 3 Comment les pouvoirs publics peuvent-ils contribuer à la justice sociale ? Q11. Distinguez une logique d'assurance d'une logique d'assistance en matière de protection sociale. La protection sociale est l'ensemble des mécanismes qui permettent aux individus de faire face aux risques sociaux comme la maladie, la grossesse, la vieillesse ou les familles nombreuses (prestation monétaire ou en nature). La logique d'assurance est une logique horizontale mise en place par Otto von Bismarck : les actifs cotisent pour les inactifs et/ou les valides pour les invalides. Alors que la logique d'assistance (créée sous le régime de Beveridge) permet à l'individu dans le besoin de recevoir une protection sociale minimale sans avoir cotisé au préalable, on parle de redistribution verticale (financée par l'impôt). En France, le système de protection sociale est à la fois bismarckien et beveridgien. Il repose sur un principe simple : les individus cotisent à une caisse commune, ce qui permet de mutualiser les risques, et ils reçoivent des prestations selon l'importance des droits et de leurs cotisations sociales mais le système offre également, sans cotisation préalable mais avec des conditions de revenus, des prestations universelles financées par l'impôt. Si la logique d'assistance permet de réduire les inégalités, ce n'est pas le cas de la logique d'assurance. Q12. Comment les services collectifs peuvent-ils contribuer à la justice sociale ? Les services collectifs sont les activités d’intérêt général dont les pouvoirs publics assurent la mise en œuvre car considérés comme indispensables à la cohésion sociale. Ils reposent sur le principe de "non-exclusivité" (ne bénéficient pas seulement à ceux qui l'on payé) mais aussi sur le principe de "non-rivalité" (l'usage pas une personne ne prive pas pour autant les autres). C’est une forme de redistribution rendue gratuitement à tous mais pas financée de la même façon. Ils participent à la justice sociale car cela aide les ménages à accéder à différents services comme la santé ou encore l’école. En matière de santé cela peut donc permettre une meilleure équité face à la mort, par exemple grâce à la CMU (couverture maladie universelle) qui protège les personnes qui ne sont plus/pas couvertes par la sécurité sociale. De plus, au niveau de l'éducation, l'école est théoriquement censée mettre en place l'égalité des chances. En effet, l'école est gratuite, laïque et obligatoire, permettant aux enfants de tous milieux sociaux de s'instruire. Q13. Montrez par quels mécanismes les pouvoirs publics peuvent réduire les inégalités de revenus. On parle d’inégalité lorsqu’une différence entre deux individus induit un avantage ou un désavantage. L'Etat providence français dispose de plusieurs mécanismes pour réduire les inégalités de revenus contribuant à une meilleure justice sociale. Un des outils de l’Etat Providence est la protection sociale. Elle se divise en 2 mécanismes : une logique verticale, et une logique horizontale. La première est un système d’assistance, instauré par Lord Beveridge dans Social Insurance and allied Services. Il s’agit de donner une compensation monétaire aux ménages les plus démunis, via des prestations sociales, et ceci sans contrepartie. La seconde est un système d’assurance, créé par Bismarck. Il consiste à protéger les individus des risques sociaux, sous réserve qu’ils cotisent. Il est financé par les cotisations sociales et les prélèvements obligatoires par exemple. Cette logique est cependant moins redistributive que la logique d’assistance. La fiscalité est un autre outil de l'Etat providence. En effet, elle constitue un outil redistributif au travers de l'impôt. Il existe trois sortes d'impôts : l’impôt proportionnel : tous les ménages subissent le même taux d'imposition (ex : Tva); l'impôt progressif : les plus aisés payent une part plus grande que les moins aisés, le taux d'imposition varie alors selon le revenu. De plus, il est celui qui corrige le mieux les inégalités économiques ; et enfin l'impôt forfaitaire (redevance audiovisuelle). Enfin, les services collectifs sont le troisième et dernier outil de l’Etat Providence. Ils regroupent toutes les activités d'intérêt général considérées comme indispensables pour la cohésion sociale et que l'Etat met en place. Ils permettent de redistribuer la richesse et de lutter contre l'inégalité des chances. On peut aussi évoquer la discrimination positive. Elle consiste à accorder un traitement préférentiel à une population désavantagée. Q14. Vous montrerez le caractère cumulatif des inégalités économiques et sociales. Les inégalités sont des différences entre individus ou groupes sociaux qui se traduisent en termes d'avantages et de désavantages et qui fondent une hiérarchie entre ces individus ou groupes. Les inégalités économiques sont des accès différenciés aux ressources économiques à l'intérieur d'une société. Elles sont alors divisées en deux types d'inégalités. Celles de revenu sont mesurées par le niveau de vie par unité de consommation. Les inégalités de patrimoine, elles, reflètent un partage plus inégalitaire que les inégalités de revenu car l'acquisition d'un patrimoine nécessite une épargne élevée ou l'obtention d'un héritage. Les inégalités sociales représentent les différences dans l'accès aux ressources valorisées. Ainsi ces inégalités prennent différentes formes. Les inégalités devant la mort, les inégalités face au chômage, les inégalités de fréquentation culturelle, les inégalités devant la politique, les inégalités scolaires ou encore les inégalités des sexes, sont les différentes formes d'inégalités sociales. Les inégalités sont donc multidimensionnelles. Les inégalités de revenu et de patrimoine sont cumulatives, tout comme les différentes formes d'inégalités sociales. Le patrimoine génère des flux de revenus qui permettent d’augmenter le patrimoine. Ces inégalités de revenu et de patrimoine donnent naissance à des inégalités d’accès au logement, d’accès à la santé, etc. Les inégalités économiques expliquent alors les inégalités sociales. En effet les individus ayant de faibles revenus vivent dans des milieux généralement défavorisés, ne partent pas en vacances et ne peuvent pas prétendre aux bonnes écoles couteuses. C'est pourquoi leur statut social se dégrade. Les inégalités sociales elles aussi alimentent les inégalités économiques. L'échec scolaire entraine un manque de qualification donnant alors lieu à un emploi souvent mal rémunéré et une forte vulnérabilité sur le marché du travail. Les individus concernés ne peuvent devenir propriétaires et il est donc impossible d'obtenir du patrimoine. Cela nous montre donc que les milieux défavorisés cumulent les désavantages qui se renforcent mutuellement (cercle vicieux), alors que les milieux supérieurs voient leurs avantages renforcés. Ce phénomène se nomme la polarisation. Les inégalités sont donc interactives et liées par des processus cumulatifs alimentant cette polarisation de la structure sociale Chap 4. Comment analyser la structure sociale ? Q15. Distinguez classes sociales et groupes de statut dans l'approche weberienne En sociologie, une classe sociale est un groupe social qui rassemble des individus ayant des conditions économiques relativement proches, ce qui influence leur mode de vie. Un groupe de statut est un groupe social qui partage le même niveau de prestige social, qui a un style de vie commun ou des valeurs communes (sans forcément avoir de ressources économiques communes). Concrètement, l'analyse de Weber est dite pluridimensionnelle. Il existe en effet selon lui trois grandes hiérarchies qui ne se regroupent pas forcément. Elles correspondent aux trois sphères que sont l’ordre économique (qui est à l’origine de classes, dans cet ordre, la différenciation s’opère en fonction de la façon dont les biens sont distribués et la chance d’accéder aux biens), l’ordre social (où le prestige des positions occupées hiérarchise des groupes de statut) et l’ordre politique (où les partis s’affrontent pour la conquête du pouvoir). Ainsi pour Weber, on peut avoir une position élevée sur un axe (être un riche industriel par exemple) et basse sur un autre (être en même temps peu cultivé). Les classes ne constituent qu’une unique dimension de la stratification sociale et elles ont avant tout une signification économique, même si elles sont souvent liées (argent et pouvoir, relations et pouvoir...). Weber rejette également l’idée marxiste que la lutte des classes serait le seul principe de la dynamique sociale. Les classes ne sont pas des entités homogènes mais elles se transforment. Weber développe ainsi une vision nominaliste et individualiste des classes selon laquelle celles-ci auraient une existence objective sans pour autant exister subjectivement dans la conscience de leurs membres. En fait, Weber considère (à l’inverse de Marx) que «les classes ne sont pas des communautés» c'est à dire que la multiplicité des positions sociales pour un individu rend la conscience (et donc la lutte) des classes problématique. On peut ainsi faire partie objectivement d’un groupe social (groupe d’appartenance) défini par le revenu ou le mode de vie tout en se sentant appartenir, de façon subjective, à un autre groupe (appelé groupe de référence). Le statut est un lien de nature extra-économique fondé sur le prestige social qui sert de principe de hiérarchisation. Ainsi la classe sociale est lié à l'ordre économique tandis que le groupe de statut est lié à l'ordre social. Q16. Les catégories socioprofessionnelles sont-elles des classes sociales ? Les PCS (professions et catégories socioprofessionnelles) - ou CSP, sont un système de classification de la population française mis en place par l'INSEE en 1954 : elles vont classer la population en un nombre restreint de catégories assez homogènes; ces catégories sont déterminées par le type de travail, le niveau de qualification, le statut professionnel, la classe hiérarchique et le secteur d'activité. Il en existe 8 au total dont 6 pour la population active. Ainsi, elles sont utiles pour avoir une vision fine de la société, afin de comprendre ses évolutions, étudier les pratiques sociales, les comportements politiques, les inégalités… Les classes sociales sont déterminées, selon Marx (qui fut le premier à utiliser le terme), par les rapports de production entre patronat. Pour Weber les classes sont multidimensionnelles (économique, politique, prestige) et pas nécessairement conflictuelles. Cependant, si les CSP sont un indice fiable de l’appartenance de classe, elles ne peuvent pas être considérées comme des classes sociales à part entière. En effet, certaines CSP peuvent être très hétérogènes à l'intérieur même (un chef de PME et un commerçant, pourtant dans la même CSP n'ont pas les mêmes revenus et caractéristiques). Ces CSP sont aussi parfois caractérisés par une absence de sentiment d'appartenance. On ne peut donc pas utiliser ces CSP pour identifier les classes sociales à cause de son hétérogénéité. La profession n’est pas un indice suffisant de l’appartenance de classe. Ainsi, il ne suffit pas d’être un chef d’entreprise pour être "bourgeois", il faut en outre posséder un capital culturel d’une certaine ampleur, d’une certaine ancienneté ; il faut de plus assimiler les manières de vivre, de penser, de la bourgeoisie, son "habitus" de classe (Bourdieu). De plus, les PCS contrairement aux Classes sociales ont une approche scientifique de la structure de la société. Concrètement, les PCS permettent d'avoir une approche plus moderne de la société que les classes sociales. Ce sont deux outils différents correspondent à deux types d'analyse différentes. Chap. 5 Quels sont les fondements du commerce international et de l'internationalisation de la production ? Q17. Quels sont les déterminants de l'offre de devises sur le marché des changes ? Une devise est une monnaie convertible en monnaie étrangère sur le marché des changes, qui est un lieu dématérialisé où son offre et sa demande se rencontrent, la valeur d'une monnaie étrangère par rapport à une autre est nommée taux de change. Il existe plusieurs déterminants des variations du taux de change. Des déterminants réels concernent la balance commerciale: lorsque l'on importe plus que l'on exporte (déficit commercial) cela revient à acheter beaucoup de devises étrangères pour ensuite pouvoir acheter des produits étrangers: la monnaie va alors se déprécier car l'on va vendre notre monnaie pour obtenir une monnaie étrangère. Au contraire si nous somme en excédent commercial, c'est à dire que l'on exporte plus que l'on importe, notre monnaie s'apprécie car la demande de monnaie par les non-résidents est supérieure à celle des résidents. Les variations du taux de change dépendent aussi de la rentabilité des investissements : un pays dynamique, en forte croissance, attire les investissements ce qui conduit à une appréciation de la monnaie, et inversement. Les déterminants financiers correspondent à la variation de l'offre en fonction des taux d'intérêts. Si la Banque Centrale fixe un taux d'intérêt directeur élevé, le pays va attirer des fonds de la part des détenteurs de liquidités qui cherchent à placer cet argent; d'où une entrée de capitaux et une forte demande de la monnaie nationale, ce qui conduit à une appréciation des taux de change. En général, lorsqu’une Banque Centrale réduit ses taux directeurs ou injecte des liquidités, le taux de change de sa monnaie a tendance se déprécier immédiatement. Les détenteurs de capitaux vendent la monnaie nationale pour acheter de la monnaie de pays où leurs placements seront mieux rémunérés. Ainsi les décisions des Banques centrales influencent beaucoup le marché des changes. Q18. Quels sont les avantages du commerce international pour le consommateur? Les effets bénéfiques du commerce international ont été théorisés par les économistes classiques dès le 18e siècle. Adam Smith (Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, 1776) et David Ricardo (Principes de l’économie politique et de l’impôt, 1817), ont montré les avantages d’une spécialisation sur les avantages absolus ou comparatifs, pour les producteurs comme les consommateurs. Le commerce international désigne l'ensemble des échanges de biens et services internationaux. Il s’organise sur le principe (promu par le GATT ou l’UE) du libre-échange, selon lequel l'ouverture des nations au commerce international, par l'abolition de toutes les barrières aux échanges, serait source d'une allocation optimale des ressources à l’échelle mondiale. Si l'internationalisation de la production représente selon les libéraux un gain à l'échange pour les firmes qui s'imposent à l'étranger, il peut être également bénéfique pour le consommateur : les entreprises en augmentant leurs débouchés peuvent réaliser des économies d’échelles (effet de dimension). Les prix tendent à diminuer et renforcent le pouvoir d'achat du consommateur. Aussi, les stratégies des entreprises en terme de compétitivité-prix bénéficient aux consommateurs : par le processus concurrentiel engendré par le libre-échange, les entreprises cherche à atteindre les consommateurs par des prix inférieurs, on parle alors d'un effet de concurrence. De plus, la variété des prix et des produits permet au consommateur de satisfaire des besoins précis, celui-ci peut choisir parmi des produits provenant du monde entier et ce pour une gamme de prix donnée, c'est l'effet de diversification. En effet, le mécanisme de la concurrence étant actionné, les entreprises cherchent à diversifier leurs produits et à les différencier de ceux des concurrents. En ouvrant ses frontières au commerce international, un pays permet à ses consommateurs d'accéder à des biens étrangers dont les caractéristiques sont souvent différentes des biens produits localement (qualité, design, performances, etc.) Q19. En quoi la délocalisation améliore-t-elle la compétitivité des entreprises ? La délocalisation est un déplacement d'unité de production d'un pays vers un autre lié à la recherche d'un coût de production plus bas et d'une compétitivité importante. On distingue la compétitivité prix de la compétitivité hors-prix. La première désigne la capacité pour une entreprise à produire des biens/services à des prix inférieurs à ceux de ses concurrents. La seconde désigne la capacité à conquérir des parts de marché indépendamment du niveau de prix grâce à l'adaptation à la demande du consommateur, au service après-vente, à l'image de marque, aux délais de livraison, etc. Les FTN s'implantent à l'étranger pour améliorer leur compétitivité (capacité d'une entreprise à acquérir des parts de marché), soit pour conquérir de nouveaux marchés, soit pour diminuer les coûts de production en transférant l'activité productive nécessitant beaucoup de facteur travail dans un pays où la main d’œuvre est abondante et peu coûteuse. La délocalisation permet également de diminuer les coûts des consommations intermédiaires avec la diminution du coût des matières premières en s'implantant directement dans les pays les produisant. Elle permet à l'entreprise de vendre directement ses produits aux consommateurs sans devoir faire face au taux de change. Cela permet ainsi d'améliorer leur compétitivité-prix : baisse des coûts de transports, baisse des taux de changes, coûts de transaction (même si ils peuvent rester élevés, posant la question de la rentabilité de la délocalisation), fiscalité plus avantageuse et règlementations plus souples. Chap. 6 Quelle est la place de l'Union européenne dans l'économie globale ? Q20. Dans le cadre de l'Union européenne, présentez les avantages attendus de l'union économique et monétaire. L'union économique et monétaire est la cinquième étape d'un processus d'intégration défini par Bela Belassa dans The theory of economic intégration (1961). Son apport vis à vis de l'union économique est l'instauration d'une monnaie et d'une banque centrale communes. Plusieurs avantages sont attendus de l'union économique et monétaire, notamment une plus grande concurrence entre les producteurs, ce qui les pousseraient à innover. On attend également de cette union plus de débouchés, pour ainsi faire des économies d'échelle et des gains de productivité. Cela permet dans le même temps d'améliorer la compétitivité prix et hors prix. Autre avantage attendu, la suppression des frais de change ce qui facilite les échanges et IDE (Investissements Directs à l’Etranger) intra-régionaux. On s’attend aussi à une baisse de l'inflation, sa maitrise étant nécessaire pour adopter l'euro, ainsi que la libre circulation des travailleurs et des capitaux devrait permettre d'aboutir à une allocation optimale des ressources. En effet, en cas de choc asymétrique par exemple, les travailleurs et capitaux se déplacent là où l'offre est la meilleure. L’homogénéisation des politiques économiques devrait faciliter la convergence des économies vers un même modèle, et la mise en place d'une monnaie commune devrait faire baisser le risque de change qui pesait auparavant sur les entreprises. Si les économies ayant adopté la même monnaie convergent, cela permet aux banques (et à la banque centrale) de diminuer les taux d'intérêt et faire ainsi face à l'endettement. On peut également espérer la stabilité de cette monnaie qui faciliterait alors le commerce extra-zone. Les pays possédant la même monnaie, cela accroit la compétition pour les marchés extérieurs et facilite également le commerce intra-zone. Enfin, l'union économique et monétaire (UEM) devrait redonner du pouvoir d'achat aux consommateurs. Les comparaisons de prix entre les différents pays de la zone seront facilitées, ce qui accroitra la concurrence et les fera donc baisser. L'Euro, monnaie stable dans un contexte d'inflation maîtrisée, est attractive pour les investisseurs mondiaux, ce qui lui a permis de bénéficier de taux d'intérêts plus bas. L'Euro, adopté par 19 pays, est aujourd'hui une monnaie forte, signe de sa puissance, et a pris une place importante dans les taux de change mondiales. Enfin, l’UEM permet de dépasser le triangle d'incompatibilité de Mundell : en faisant le choix des changes fixes puis de la libre circulation des capitaux, les monnaies de la zone ont perdu l’autonomie de leur politique monétaire. La création de la monnaie unique, en supprimant la contrainte des taux de change fixes, permet de retrouver une autonomie de la politique monétaire, pilotée par la BCE. Q21. Vous montrerez que l'Union Européenne mène une politique originale d'intégration de son économie. Ce processus débute en 1951 avec la création de la CECA, puis de la CEE en 1957 avec le traité de Rome. Les fondateurs de l'UE ont adopté une stratégie dite des "petits pas" (élargissement progressif) qui consiste en la mise en place de projets communs pour approfondir peu à peu les relations entre les membres. Bela Belassa, économiste hongrois, décrit dans The theory of economic integration (1961) les étapes du processus d’intégration : 1. Zone de libre-échange : les barrières douanières à l’intérieur de la zone sont supprimées mais les pays restent indépendants vis à vis de l’extérieur. 2. Union douanière : harmonisation des barrières douanières extérieures. 3. Marché commun : harmonisation douanière et libre circulation des facteurs de productions (travail et capital). 4. Union économique : harmonisation des politiques économiques et communes. 5. Union économique et monétaire : mise en place d’une monnaie commune (euro) et d’une banque centrale commune (BCE). Le projet européen est avant tout politique ce qui suppose dès le départ le refus d’être une simple zone de libre-échange ainsi que la mise en œuvre de politiques communes. Cette conception ne correspond pas aux étapes décrites par Bela Belassa ce qui en fait l’originalité. Q22. Vous montrerez les difficultés de la coordination des politiques économiques dans l'Union européenne. Les politiques économiques désignent l'ensemble des mesures pouvant être prises dans les domaines budgétaire et monétaire. Elles peuvent être : · Conjoncturelles : menées sur le court terme, elles ont pour but de rétablir les grands déséquilibres macro-économiques. Pour cela, il existe deux outils qui sont la politique monétaire (via la banque centrale qui joue sur la masse monétaire) et la politique budgétaire (via l’Etat qui joue sur les stabilisateurs automatiques, c’est-à-dire les recettes et les dépenses). · Structurelles : menées sur le long terme, elles visent à transformer le système économique en profondeur. Au sein de l'union Européenne, subsistent des difficultés de coordinations entre les politiques économiques des différents pays membres, à savoir : · La remise en question du Pacte de Stabilité et de Croissance (contrainte budgétaire) · La divergence des économies, due en partie au non-respect initial de certains critères du PSC ainsi que l’économie archaïque (agriculture) & le sous-développement des nouveaux entrants. · Politiques non coopératives (recours grandissant à l’externalisation, dumping fiscal, réformes Hartz dans l’Allemagne de Schröder…) qui accentuent la compétition entre pays, les poussant à rechercher une plus grande compétitivité. · Flexibilisation du marché du travail qui accroit la compétition. Chap. 7 Comment rendre compte de la mobilité sociale ? Q23. Distinguez la mobilité observée de la fluidité sociale. La mobilité observée correspond à un changement de position dans la structure sociale qui peut-être ascendant, en obtenant un statut supérieur ou descendant c'est-à-dire en obtenant une position sociale inférieure à celle de ses parents. Il existe également différents types de mobilité: celle-ci peut-être intergénérationnelle, mobilité sociale entre plusieurs générations ou intragénérationnelle, changement de position au sein de la vie professionnelle d'un individu. Ces deux types de mobilités peuvent se diviser en deux catégories : on oppose la mobilité structurelle qui est la conséquence de l’évolution des structures sociales, à la mobilité nette qui est la différence entre la mobilité totale et la mobilité structurelle. C’est la plus conforme à l’idéal de mobilité puisqu’elle ne résulte pas des transformations des structures économiques et sociales (Mobilité nette= Mobilité totale – Mobilité structurelle). Pour évaluer la mobilité sociale, on utilise des tables de mobilité qui s'appuient sur un échantillon représentatif des hommes de plus de quarante ans: on étudie alors la position du fils au moment de l'enquête par rapport à celle de son père qui montrent ce que ce sont devenus les fils des membres d'une catégorie sociale. La fluidité sociale, en revanche, permet d'évaluer l'égalité des chances en rendant compte de la viscosité sociale, on peut la définir comme la situation où la position sociale des individus n'est pas définie par leurs origines sociales. Elle se mesure avec l'odd-ratio qui permet d'évaluer les chances d'un groupe social d'atteindre une position donnée par rapport aux chances d'un autre groupe d'atteindre cette même position : (probabilité qu'un fil de cadre devienne cadre/ probabilité qu'un fils de cadre devienne ouvrier)/ (probabilité qu'un fils d'ouvrier devienne cadre/ probabilité qu'un fils d'ouvrier devienne ouvrier). Dans une société complètement fluide, ce rapport serait de 1. Selon Louis André Vallet, la mobilité sociale a largement augmenté quand la fluidité augmente de manière plus lente. Actuellement la fluidité tend à augmenter avec un odd-ratio en baisse passant de 51 dans les années 1950 à 26 en 2003. Q24. Quelle relation peut-on établir entre déclassement et paradoxe d'Anderson ? Le déclassement est un phénomène de dégradation qui peut affecter la valeur sociale du diplôme, la situation professionnelle d'un individu au cours de sa vie ou par rapport à celle de ses parents. Prenons l'exemple du déclassement scolaire qui appréhende ce phénomène. L'idée, ici est de considérer que la valeur des diplômes s'est dégradée au cours du temps. On l'observe surtout en haut de la structure sociale, dans les classes supérieures quand pour les catégories populaires, c'est la reproduction sociale ou une ascension sociale plus faible qui prédominent. Ce phénomène est particulièrement mis en évidence par le paradoxe d'Anderson (1907-1990). Selon ce sociologue américain, les titres scolaires perdent de leur valeur sociale, c'est à dire de leur capacité à s'échanger contre des positions sociales enviables. Ainsi, il n'est pas rare d'observer des enfants disposant de titres scolaires bien supérieur à ceux de leurs parents et occupant pourtant une position sociale inférieure. Ce paradoxe s'expliquerait avec une plus grande concurrence sociale, avec notamment la hausse de la demande scolaire, ainsi que la crise mènent à un accroissement du nombre de diplômés, qui augmente plus vite que le nombre d’emplois. Par ailleurs, les individus ayant des qualifications vont être amenés à occuper des postes peu qualifiés étant donné l'inaccessibilité des postes les plus élevés, ce qui rend l’ascension pour les individus moins qualifiés plus difficile, et peut conduire de fait à un déclassement. Cependant, l’individu a toujours intérêt à faire des études longues, c’est un objectif parfaitement rationnel car il permet de maximiser ses chances d’améliorer sa position sociale. Le diplôme reste une obligation sociale afin de connaitre une mobilité et son absence peut mener à d'autres formes de déclassement comme la montée des formes atypique au travail. Q25. Montrez qu'une partie de la mobilité sociale peut s'expliquer par l'évolution de la structure socio-professionnelle. La mobilité sociale correspond au déplacement des individus dans l'espace social. Il existe plusieurs types de mobilité comme la mobilité spatiale qui est le déplacement géographique des individus ou la mobilité professionnelle qui est le changement de profession ou de statut professionnel d'un individu. On peut distinguer la mobilité intergénérationnelle (changement de position au cours de la carrière de l'individu) de la mobilité intragénérationnelle (de père en fils d'une génération a une autre). Les enquêtes de l'INSEE montrent que depuis 1953 (début des "30 Glorieuses"), la reproduction sociale (posséder un statut identique à celui de son père) a diminué au profit de la mobilité. Cette diminution de la reproduction sociale peut s'expliquer par l'évolution de la structure des emplois. Par exemple, la mobilité a été favorisée par la diminution des emplois agricoles qui a conduit les fils d'agriculteurs à changer de voie. En effet, les exploitations agricoles sont de nos jours moins nombreuses et les agriculteurs qui représentaient 16% des actifs ne représentent plus que 4%. De plus, la croissance du nombre d'emplois dans le tertiaire (principe de destruction créatrice, par Joseph Schumpeter) a attiré de nombreux enfants issus des secteurs primaires puis secondaires, à partir des années 70, ou on a pu assister à l'éclatement de la classe ouvrière: les grands bastions industriels ont disparu et la classe ouvrière s'est segmentée. D'un côté, les ouvriers aisés se sont intégrés à la société de consommation de l'autre, on retrouve des individus qui ont un emploi précaire. Le déclin des professions indépendantes (artisans-commerçants) a aussi réduit les possibilités de reproduction des statuts sociaux par la transmission de l'entreprise familiale. Cette partie de la mobilité est nommée la "mobilité structurelle" car elle s'explique par les évolutions de la structure sociale et représente environ 40% de la mobilité observée. En conclusion, la mobilité structurelle peut donc bien s'expliquer en partie par l'évolution de la structure socio-professionnelle. Chap 8. Quels liens sociaux dans des sociétés où s'affirme le primat de l'individu ? Q26. Comment le travail contribue-t-il à l'intégration sociale ? L'intégration sociale (Emile Durkheim) désigne le fait d'adopter le comportement, les normes et les valeurs d'un groupe afin d'être reconnu comme appartenant à ce groupe. L'intégration implique d'être à la fois reconnu par les membres du groupe mais aussi reconnu par l'extérieur comme appartenant à ce groupe. L'intégration sociale peut être effectuée grâce à différentes instances de socialisation qui inculquent des normes et des valeurs tels que la famille ou le travail (instance de socialisation). Il permet d'obtenir un revenu, de ce fait il permet de s'intégrer pleinement à la société de consommation. Le travail est essentiel dans la société parce qu'il permet de bénéficier de la protection sociale, de s'autonomiser (fonder une famille), dans le cas des femmes, de s'émanciper dans le couple, de développer des liens civiques (participer à la vie politique), de s'ancrer dans des normes collectives. Il conduit à partager le même rythme de vie (horaires journaliers, weekend, vacances)... Le travail permet à l'individu de bénéficier d'un statut social, l'individu existe au sein de la société notamment grâce à la profession qu'il exerce. Ce statut obtenu par l'intermédiaire du travail facilite les relations sociales car les individus peuvent tisser un réseau relationnel qui au fil du temps devient un réseau amical. Le travail est donc source de sociabilité et de reconnaissance. La perte de l'emploi mène à la désaffiliation selon Robert Castel qui souligne l'idée que le travail fournit reconnaissance et légitimité. Q27. Montrez que, selon Durkheim, dans les sociétés où s'affirme le primat de l'individu la solidarité ne faiblit pas. Les sociologues comme Weber ou Durkheim constatent, qu'après la Révolution Française de 1789, des transformations néfastes de la société sont apparues. On a cassé les structures villageoises qui encadraient et prenaient soin de l’individu au profit d’une société ouvrière où le travail à moins de sens pour les ouvriers, d’anciens paysans ayant connu l’exode rurale et alors séparés de l’Eglise et de leur famille, et du controle social que toutes deux exercent sur l'individu. Les sociétés, modernes, vont alors être marquées par l'individualisme (processus d’autonomisation où l’individu se constitue comme sujet, en s’affranchissant des institutions sociales traditionnelles, de leurs normes, valeurs, contrôle social). L'individualisme a pour causes non seulement le libéralisme qui place l'individu au centre de la société mais également l'entrée massive des femmes sur le marché du travail qui ont pu acquérir indépendance et autonomie. Qui plus est, l'extension de l'Etat providence substitue ou complète les solidarités familiales. Cette émergence de la société individualiste a pu être vu comme néfaste pour les liens de solidarité de l’individu, puisque les différents groupes auxquels il appartient (religion, famille, travail, amis…) ne sont plus liés, ils sont clairement séparés. Le contrôle social exercé sur l’individu serait alors moins fort, et ses liens seront plus contractuels (du fait de la taille de la société) Toutefois, selon Tocqueville, les liens de solidarité ne sont pas supprimés. Au contraires, ils sont renforcés : l’individu va se créer sa propre « petite société », avec des liens plus forts, gardant auprès de lui sa famille et ses amis. Ces sociétés sont plus denses et les individus y sont complémentaires et interdépendants (solidarité organique), c'est une société plus complexe où la division du travail est très importante. Ces éléments changent la nature des liens sociaux qui deviennent hétérogènes alors qu'auparavant ils étaient homogènes, ce sont des liens sociétaires de complémentarité. La solidarité ne disparait donc pas, elle subit simplement une mutation. Q28. Montrez que la solidarité mécanique demeure dans une société où s'affirme le primat de l'individu. A la fin du XIXe siècle, on assiste à l'affaiblissement de l’emprise de la religion, baisse de l’influence de la famille sur les destinées, recul du pouvoir des autorités traditionnelles. Durkheim met ainsi en évidence deux types de sociétés : les sociétés traditionnelles qui sont caractérisées par une solidarité mécanique, dans laquelle l'intégration des individus et leur attachement au groupe reposent sur leur similitude. Les fonctions sociales et économiques sont peu différenciées et la « division du travail social » est donc faible. L'uniformité des statuts, des valeurs et des croyances fait que l'individu n'existe qu'à travers l'être collectif que constitue le groupe. La conscience individuelle est recouverte, submergée par la conscience collective, et la cohésion naît de la soumission des comportements individuels aux normes sociales dominantes. Elle se traduit par un esprit de groupe. Le contrôle social est très fort, l'individu avait peu de marge de manœuvre avec un système judiciaire répressif. Et les sociétés modernes, qui se traduisent par l'apparition d'une nouvelle solidarité, appelée "solidarité organique ". Elle transforme l'individu. Il devient interdépendant et s'individualise. Le processus de division du travail provoque une différenciation des individus et modifie la base de la cohésion sociale. Aujourd'hui, cette solidarité est quasiment omniprésente dans notre société. Cependant, Durkheim, n'écarte pas l'idée que des formes de solidarité mécanique puissent persister. On observe que nombre de liens sociaux contemporains entretenus par des groupes des mouvements ou des institutions, fondés sur la similitude et la proximité d’origine (ethnie), le lieu (régionalisme et coutumes), de croyance (groupes religieux ou spirituels), de culture (styles de vie) ou de valeur (causes à défendre), apparaissent caractéristiques de la solidarité mécanique: c'est le communautarisme. Serge Paugam insiste, lui aussi sur un désir certains de revenir à une société traditionnelle et une solidarité mécanique. Il l'explique par l'existence de regroupements communautaire. C'est à dire une affirmation des identités ethniques et régionales. On peut avoir deux visions du communautarisme : une vision négative (repli identitaire) et positive (pour les immigrés, il représente du capital social et leur fournit des ressources). Les deux sociétés ne s'excluent donc pas. On a des regroupements communautaires sur de différentes bases (lieux, croyance, etc…). C'est regroupements illustre la solidarité mécanique qui demeure dans une société où s'affirme le primat de l'individu. Chap. 9 La conflictualité sociale: pathologie, facteur de cohésion ou moteur du changement social ? Q29. Quelles sont les principales mutations des conflits sociaux ? Selon Ralf Dahrendorf, (Classes et conflits de classes dans la société industrielle, 1973), les conflits se sont progressivement institutionnalisés par la mise en place de règles plus ou moins explicites et acceptées par l’ensemble des acteurs, ayant pour objectif d’encadrer et de réguler les conflits et leur déroulement. Cette régulation passe par l'institutionnalisation des acteurs (la reconnaissance d’institutions représentatives des acteurs en conflit, les syndicats) ; l'institutionnalisation des formes (la mise en place de règles ritualisées pour l’action et la négociation), et l'institutionnalisation des objets : elle correspond à la mise en place du droit du travail et des conventions collectives. Ronald Inglehart (La révolution silencieuse, 1977) montre que, dans les sociétés occidentales, la satisfaction des besoins matériels de base pour l'essentiel de la population déplace les demandes vers des revendications plus qualitatives. Les nouvelles générations, qui ont bénéficié de la croissance économique des Trente Glorieuses, privilégient la satisfaction des besoins supérieurs et valorisent d'autres valeurs comme la qualité de vie, la liberté d'expression ou la participation politique des citoyens. Le passage de valeurs matérialistes à des valeurs post-matérialistes expliquerait l'existence de nouveaux mouvements sociaux, qui utilisent davantage des formes d’actions non-conventionnelles (sit-in, happening, utilisation des réseaux sociaux,…) Les conflits du travail cependant n’ont pas disparus mais changent de forme, le nombre de grèves longues diminue mais de nouvelles formes de conflit se développent : hausse des grèves courtes mais surtout des débrayages (cessation de travail pendant moins d'une journée) qui réduisent le coût du conflit pour les salariés et ne sont pas comptabilisés dans les journées de grève ; montée des situations conflictuelles sans arrêt de travail : manifestations, pétitions, refus des heures supplémentaires. Historiquement, les conflits sociaux étaient offensifs, car leur objectif était la conquête de nouveaux droits ou d'avantages sociaux (ex : pour la réduction du temps de travail). Désormais, la plupart des conflits sont plutôt défensifs : ils prennent pour enjeu la résistance au changement et visent à s'opposer à des transformations sociales jugées défavorables ou peu souhaitables (ex : contre la fermeture d'une usine, contre la réforme des retraites). Enfin, certains mouvements se battent au nom de la défense d’intérêts individuels (NIMBY), pour préserver un cadre de vie par exemple. Q30. En quoi les conflits sociaux peuvent-ils être considérés comme une forme de pathologie ? Deux principales écoles de sociologues se divisent à propos de la question des fonctions du conflit social. D'une part, certains considèrent l'antagonisme existant entre des individus de groupes différents à intérêts divergents comme une source de progrès social. En effet, en cherchant à modifier les rapports de force, la société peut progresser. Parmi eux, Max Weber ou Georg Simmel, défendent la fonction socialisatrice du conflit, qui renforcerait la cohésion sociale et conduirait à des compromis (mouvements concernant le droit du travail) : « l’ordre social repose sur des conflits résolus » (H. Mendras). D’autres sociologues vont cependant voir les conflits sociaux comme une forme de pathologie sociale. Emile Durkheim, sociologue français, va dans son étude intitulée De la division du travail social (1893), établir que l'ordre social demeure la "situation normale" et que le conflit est la conséquence d’une forme anormale de la division du travail (par exemple excès de bureaucratie, travail en miettes, anomie, inégalité des chances). Les conflits seraient donc liés à une situation de d’instabilité, d'anomie et de remise en cause de la cohésion sociale. Durkheim va défendre cette idée en mettant en évidence deux types de solidarités, chacune propre a un type de société. La solidarité mécanique correspond à la solidarité propre aux sociétés traditionnelles relativement homogènes, dont la cohésion repose sur une conformité aux normes et valeurs et aux rôles sociaux traditionnels. La solidarité organique repose sur l’interdépendance forte des individus et une individualisation croissante. Cela est dû au fonctionnement des sociétés complexes, où la division du travail a provoqué une différenciation des individus et la modification des bases de la cohésion sociale. Talcott Parsons, fonctionnaliste américain, va aller plus loin dans l’analyse de Durkheim ; selon lui la société actuelle ressemblerait à un corps humain, où chaque individu est un organe qui a à remplir une fonction. S’il y a conflit, donc dysfonctionnement d’un organe, le système est mis à mal, et donc le conflit social serait vu comme étant une pathologie. Q31. Montrez que les conflits sociaux peuvent être considérés comme un facteur de cohésion sociale. Le conflit social représente un antagonisme entre groupes sociaux aux intérêts matériaux ou symboliques divergents. Les conflits sociaux sont selon les sociologues perçus de différents manières ; soit négativement (les conflits sociaux sont en fait une forme de pathologie sociale) ou positivement, car le conflit serait facteur de cohésion sociale. En effet, dans Le Conflit (1908), Georg Simmel soutient que le conflit social renforcerait les liens au sein d’un groupe à travers la sociabilité militante. Il créé davantage d’interactions entre les groupes car il y aurait une reconnaissance mutuelle. Les acteurs deviennent des “partenaires sociaux” : des négociations régulières sont mises en place entre les syndicats et patronats. Ainsi les conventions collectives aboutissent à des compromis. Pour Henri Mendras, “l’ordre social est fondé sur des conflits résolus”. Ces conflits peuvent renforcer l’ordre social avec des nouvelles règles collectives qui vont figurer dans le droit du travail. Le conflit renforce la cohésion et les liens sociaux au sein du groupe comme le montre la forte syndicalisation pendant le mouvement de 1936. Le sentiment d’appartenance des membres du groupe est renforcé. Enfin l’objet des conflits s’est également institutionnalisé (droit du travail) avec la triple institutionnalisation du conflit de Ralf Dahrendorf: institutionnalisation des acteurs, institutionnalisation des formes que prend le conflit, institutionnalisation des objets (ce sur quoi porte le conflit). Le conflit produit donc des règles et renforce l’ordre social. Chap. 10 La croissance économique est-elle compatible avec la préservation de l'environnement ? Q32. Présentez les trois types d'instruments d'une politique climatique. La France, comme l’ensemble des pays de l’UE fait partie des signataires du protocole de Kyoto de 1997 qui prévoyait la réduction des émissions de gaz à effet de serre de 8% par rapport à leur niveau de 1990. La question des instruments à mettre en œuvre pour atteindre ces objectifs devient alors centrale. On considère 3 outils pour y parvenir : - La Réglementation : Il s'agit pour les pouvoirs publics d'établir des règles ainsi que les sanctions nécessaires à leur respect par les agents économiques. Plusieurs types de normes environnementales sont utilisés. Il y a 4 catégories : Les normes d'émissions ou de rejet qui fixent une quantité maximale d'émission de produits polluants Les normes de procédé ou de processus cherchent à imposer l'utilisation de technologies moins polluantes afin de produire "plus proprement". Les normes de produit imposent certaines caractéristiques aux produits. Les normes de qualité (de l'air, de l'eau) qui doivent faire l'objet de contrôles et de mesures appropriées en cas de dépassement de la norme. - Le marché des quotas d’émission : marché sur lequel les entreprises peuvent acheter et vendre des « crédits carbone » c’est-à-dire des permis d’émettre du CO2. En 1960, dans Le Problème du coût social, Ronald Coase montre qu’il serait possible de neutraliser les inefficiences découlant des externalités, sans recourir à une réglementation des taxes mais au moyen de transactions entre les parties concernées. L’Etat fixe une quantité maximale de pollution et attribue aux firmes des permis d’émission. Ces permis sont négociables : chaque firme peut vendre ses droits à polluer à une autre firme. Plus le prix s’élève, plus le coût de la pollution s’accroît et incite les entreprises à modifier leurs comportements. Depuis 2005 ce marché fonctionne au niveau européen. C’est le système d’échange de quotas d’émissions qui concerne près de 12000 installations industrielles. - La fiscalité (taxes ou subventions) : Dans le cadre des externalités négatives (les externalités sont les effets positifs ou négatifs que subit un agent économique du fait de l’action d’un autre agent, sans qu’il y ait compensation monétaire), il s'agit de faire en sorte que les coûts privés supportés par les producteurs d'externalités incluent les coûts sociaux. Pour rémunérer les externalités positives, il s'agit de récompenser par une baisse du prix celui qui fournit gratuitement un avantage aux autres. La subvention consiste, pour l'Etat, à prendre à sa charge une partie du coût de production afin de rendre l'utilisation du produit moins cher et de le rendre compétitif par rapport à l'utilisation d'autres produits plus polluants. Elle doit inciter les agents économiques à s'orienter vers une solution plus respectueuse de l'environnement (bonus/malus sur les prix d'achat d'une automobile en France). A l’inverse, la taxation permet de dissuader les comportements polluants en en augmentant le prix selon le principe pollueur-payeur (A. C. Pigou), par exemple en instaurant une taxe carbone. Q33. Montrez que le PIB ne mesure pas la soutenabilité de la croissance. Le PIB (produit intérieur brut) mesure la somme des valeurs ajoutées des unités productives résidentes d’un pays. La soutenabilité, héritée du développement durable (rapport Brundtland), est le maintien d'une capacité constante de la société à produire du bien-être. Une croissance soutenable désigne une stratégie de développement économique compatible avec l’environnement, qui assure la conservation de la qualité et de la diversité de la nature. Le PIB mesure mal la soutenabilité de la croissance. En effet, les externalités positives et les externalités négatives ne sont pas comptabilisées négativement mais plutôt positivement. Elles génèrent de la croissance, car les activités de production vont créer de la valeur ajoutée comme la dépollution des sols. Une externalité est la conséquence d'une action économique d'un agent économique sur un autre sans qu'il y ait une compensation monétaire. De plus, le PIB ne mesure pas la destruction du capital naturel. Par exemple, une firme qui produit des pesticides et pollue la rivière avoisinante avec ses rejets nuit aux riverains alors même que ces derniers ne sont pas dédommagés pour cette nuisance (externalité négative). C'est pour cela qu’il existe des indicateurs alternatifs comme la mesure de l'empreinte écologique, qui mesure la surface dont un individu a besoin pour produire ce qu'il consomme et s'occuper de ses déchets. Chaque individu dispose de 1.5 hectare. Q34. Vous présenterez les limites écologiques auxquelles se heurte la croissance. La croissance est l'augmentation durable de la production dans une économie. Cette croissance peut être soumise à plusieurs limites écologiques. La première limite à la croissance économique est celle qui touche à la destruction du capital naturel de la planète, c’est à dire l‘épuisement des ressources. On distingue deux types de ressources : les ressources non renouvelables et renouvelables. Les ressources non renouvelables sont principalement les énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon..), les réserves mondiales de minerais (or, uranium, cuivre..) dont l’exploitation s’est considérablement intensifiée depuis un siècle. Les scientifiques envisagent même l’épuisement définitif de certaines d’entre elles dans un futur proche Cet épuisement guette également les ressources renouvelables comme les ressources halieutiques (produits de la pêche) ou les ressources forestières. Ainsi, un rapport de l’ONU indique que 30% des espèces marines sont victimes de la surpêche et menacées à terme de disparition. La forêt amazonienne est elle aussi emblématique de cette situation et plusieurs essences semblent en danger. Une autre limite écologique à la croissance économique est celle liée aux rejets polluants en particulier de dioxyde de carbone. Les rejets de CO2, méthane ou de protoxyde d’azote dans l’atmosphère ont connu une croissance exponentielle et renforce l’effet de serre ce qui aboutit à d’importants dérèglements climatiques. Les catastrophes écologiques sont la dernière limite à la croissance économique. Elles ont pour conséquence de gravement perturber les écosystèmes (industrie, surexploitation, réchauffement climatique). C’est une véritable atteinte à la biodiversité (industrie, surexploitation, réchauffement climatique) qui met en péril certaines espèces vivantes. Ainsi, l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICL) a constitué une liste rouge des espèces en danger. Par ailleurs, les accidents pétroliers, chimiques ou nucléaires se sont multipliés. Les accidents nucléaires de Tchernobyl en 1986 ou de Fukushima en 2011 ont entraînés des milliers de décès, les marées noire (Erika 1999, Prestige 2002) ont détruit des écosystèmes entiers. Ces catastrophes naturelles ont de plus un coût financier élevé, il s’élevait à près de 75 milliards par an dans les années 1990. La croissance se heurte donc à de multiples limites, principalement la destruction du capital naturel, le rejet de gaz à effets de serre, les catastrophes écologiques qui ont de lourdes répercussions sur l’équilibre climatique et le bien-être des populations. Chap. 11 Comment s'articulent marché du travail et gestion de l'emploi ? Q35. Montrez que le salaire n'est pas seulement déterminé par la rencontre entre l'offre et la demande de travail. L’offre de travail désigne le volume d’heures de travail susceptibles d’être vendues par des actifs pour un salaire donnée. La demande de travail représente le volume d’heures de travail susceptibles d’être achetées par des employeurs à un taux de salaire donné. Le travail peut être modélisé par un marché avec confrontation de l'offre et de la demande et aboutissement à un prix d'équilibre: le salaire. Selon les néo-classiques, la fixation du salaire ne se fait qu'en fonction de l'offre et de la demande. Dans cette situation, le marché est donc guidé grâce aux prix à l'allocation optimale des ressources. En effet, un travailleur avec des attentes de salaire trop élevées par rapport au salaire d'équilibre, sera conduit à baisser ses prétentions et sera donc plus facilement embauché. Lorsque la concurrence sur le marché est pure et parfaite, cela conduit alors à une situation de plein emploi: tous les travailleurs qui cherchent du travail sont embauchés. Cette théorie possède des limites. En effet, la segmentation du marché du travail invalide l’homogénéité sur le marché du travail. Il existe deux types de marché du travail : le marché primaire est celui des emplois typiques, stables, bien rémunérés, bénéficiant d'une protection sociale. Le marché secondaire est lui celui, à l'inverse, des emplois atypiques, précaires ou à temps partiel. Or, ces 2 marchés ne peuvent pas être confondus. Le marché n'étant pas uniforme, il est normal que seuls l'offre et la demande ne suffisent pas à la fixation du salaire. De plus, la relation salariale présente des asymétries d’information, puisque les employeurs n’observent pas directement l’effort fourni par les travailleurs, il n’y pas de transparence sur le marché. Selon la théorie du salaire d’efficience, il existe une relation positive entre le salaire et la productivité du salarié : plus on est payé, plus on est motivé et productif. En proposant un taux de salaire réel plus élevé que le salaire d’équilibre, les employeurs diminuent la rotation des effectifs et fidélisent leurs salariés, attirent les meilleurs, et augmentent la productivité. Q36. Quelle est l'influence du salaire d'efficience sur le fonctionnement du marché du travail ? L’analyse néo-keynésienne du marché du travail montre que ce dernier est marqué par une asymétrie informationnelle et non par l’hypothèse de transparence élaboré par les néo-classiques. Cette situation peut alors conduire à une fixation d’un taux de salaire assez éloigné de ce que produiraient les conditions habituelles de la concurrence. Certains employeurs proposent ainsi un salaire supérieur au salaire normal qui devrait résulter de la confrontation de l’offre et de la demande, c’est le salaire d’efficience. Ce salaire, qui vise à inciter les salariés à accroitre leur degré de productivité est une stratégie qui possède plusieurs avantages. Tout d’abord, le salaire d’efficience permet d’attirer les meilleurs postulants et de les pousser à donner le meilleur d’eux-mêmes. Ils sont motivés par la perspective de toucher un salaire plus élevé que celui du marché. Ce n’est alors plus la productivité qui termine le salaire mais bien le salaire qui influence la productivité. Le salaire d’efficience a également un impact sur les salariés déjà en place. Ils vont en effet être plus stable dans l’entreprise puisqu’en la quittant ils auraient peu de chances de trouver un emploi aussi bien rémunéré. Cela évite à l’entreprise des couts liés aux départs des salariés, à la formation des nouveaux venus, autrement dit des coûts de rotation (turn-over). Le salaire d’efficience peut donc conduire à une fixation des salaires au-dessus du salaire d’équilibre et éviter une baisse des salaires alors même que le chômage se développe. Q37. Comment les partenaires sociaux contribuent-ils à la détermination des salaires ? Au XXème siècle, les relations professionnelles se sont institutionnalisées par la reconnaissance légale des partenaires sociaux. Les partenaires sociaux représentent l'ensemble des acteurs économiques qui participent aux négociations sociales : les représentants des syndicats de salariés et des organisations patronales. Le concept est essentiellement utilisé en France où les « partenaires sociaux » sont responsables de la gestion de certains organismes paritaires, comme l'Unedic ou l'assurance retraite. Au début de la révolution industrielle, n'existait aucun droit du travail, il y avait une libre fixation des modalités du travail entre employeur et salarié. Le mouvement ouvrier du 19ème siècle a engendré une institutionnalisation de la relation salariale : l’Etat encadre légalement la relation employeur-salarié. Les relations professionnelles en France se caractérisent dans l’aprèsguerre par une forte intervention de l’Etat qui impose en particulier des négociations collectives entre les partenaires sociaux. Ainsi, la négociation collective s'est développée. Cette dernière étant une discussion organisée entre employeurs et représentants des salariés dans la perspective d'un accord. Cet accord peut prendre la forme d'une convention collective, qui désigne un accord résultant de la négociation entre employeurs et syndicats, portant sur les conditions de travail (rémunérations, durée de travail...). Ainsi le salaire n'est pas seulement fixé par la rencontre de l'offre et de la demande de travail (analyse néoclassique), il est aussi fixé par les négociations entre partenaires sociaux. L’évolution des rapports de force entre les partenaires sociaux, l’essor et les transformations des syndicats affectent la relation salariale et le rythme de croissance des salaires. La relation salariale s’est donc construite à la fois par la coopération des partenaires sociaux et par le conflit entre les partenaires sociaux. Chap. 12 Quelles politiques pour l'emploi ? Q38. Comment la flexibilité du marché du travail peut-elle réduire le chômage ? Le chômage désigne la situation d’un actif sans emploi, disponible et recherchant activement un emploi. Depuis les années 1980, les économies industrialisées, et particulièrement la France, connaissent un chômage de masse. Une des solutions pour réduire les composantes classiques (liée au coût du travail) et structurelles du chômage (lié à l’inadéquation de la formation aux besoins des entreprises, ou à des rigidités institutionnelles sur le marché du travail) est, selon la thèse libérale, de rendre plus flexible le marché du travail. La flexibilité est une politique de gestion de la main d'œuvre mise en place dans les entreprises pour adapter la production et l'emploi correspondant aux fluctuations rapides de la demande. Cela signifie que les entreprises peuvent adapter la quantité de travail et/ou le coût du travail aux évolutions de la conjoncture économique. Elle peut revêtir de multiples aspects : variation des horaires, des salaires, des effectifs. La flexibilité quantitative externe se réalise par le recours au marché du travail. Elle consiste à faire varier les effectifs de l'entreprise en fonction des besoins par le recours aux contrats de travail précaires (par exemple les CDD) et des licenciements facilités. La flexibilité qualitative externe consiste à remplacer le contrat de travail par un contrat commercial plus facile à rompre. On peut citer le recours aux travailleurs intérimaires (ceux-ci sont bien salariés mais de l'entreprise de travail temporaire, et le contrat entre l'entreprise et l'entreprise de travail temporaire est un contrat commercial), ou à l'externalisation des activités annexes à la production (gardiennage, restauration, transport, nettoyage, etc.). La flexibilité quantitative interne s'obtient par la variation de la durée de l'activité en fonction de la production : variation des horaires de travail, utilisation de temps partiels, annualisation de la durée du travail (les "creux " dans l'activité de l'entreprise sont compensés par les périodes de "boom" ce qui évite le recours aux heures supplémentaires plus onéreuses). Dans la flexibilité qualitative interne, encore appelée flexibilité fonctionnelle, les travailleurs polyvalents sont utilisés en fonction des besoins de la production, sur les postes ou dans les ateliers ou bureaux où il y a le plus de travail. La persistance du chômage dans les pays industrialisés et notamment en France est mise par les économistes néoclassiques sur le compte de trop fortes rigidités sur le marché du travail (intervention de l'Etat et des syndicats). En période de chômage élevé, la flexibilité à la baisse des salaires et du coût salarial devrait permettre une reprise de l'embauche. Les économistes néoclassiques préconisent donc la suppression de ces réglementations ou entraves à la libre détermination des salaires par le jeu du marché. Selon eux, l'Etat doit, dans le cadre des politiques de l'emploi, assouplir la réglementation du travail : supprimer l'autorisation administrative de licenciements, par exemple, ou favoriser l'embauche de salariés à temps partiel (subi le plus souvent), ou contraindre les chômeurs à exercer une activité sous payée (en Allemagne par exemple). Q39. Montrez qu'une politique de soutien à la demande globale peut être un instrument de lutte contre le chômage. Selon Keynes, la quantité de biens/services produits par l'entreprise dépend de la demande effective (ou anticipée). Cette dernière consiste, pour une entreprise, à évaluer ce qu'elle doit produire pour correspondre à la demande. Ainsi, si l'entreprise estime que le niveau de demande globale est inférieur à leur production, l'entreprise aura intérêt à réduire sa masse salariale afin de retrouver un niveau de production pertinent quant à la réalité de la demande globale. En résumé, plus la demande effective est faible, plus la masse salariale diminue, plus le chômage augmente. Selon Keynes, l'Etat doit intervenir pour relancer le pouvoir d'achat des individus. Pour cela, il peut avoir recours à différentes politiques : monétaire (baisse des taux d'intérêts directeurs pour favoriser le crédit et donc la consommation), budgétaire, en jouant sur les recettes (les faire diminuer en abaissant les montants des prélèvements obligatoires) et/ou sur les dépenses (les faire augmenter en versant des prestations sociales plus généreuses, en créant des emplois aidés, en augmentant les revenus...). Enfin, l'Etat peut également utiliser des politiques réglementaires (jouer sur le niveau du SMIC par exemple). En creusant un déficit public, et donc une dette publique, les Etats soutiennent le pouvoir d'achat des individus afin que ces derniers consomment davantage. Grâce à cette consommation plus importante, la production sera plus importante pour répondre à la demande : les entreprises vont donc pouvoir embaucher, ce qui va réduire le chômage. Q40. Vous présenterez les différentes analyses du chômage. Nous pouvons distinguer 3 analyses du chômage: l'analyse néoclassique, l'analyse keynésienne et l'analyse en termes de chômage structurel. Tout d'abord, l'analyse néoclassique du chômage considère que c'est l'insuffisance de rentabilité et non l'absence de débouchés potentiels qui freine l'embauche : on parle de chômage classique pour désigner une situation dans laquelle le chômage s'explique par le coût du travail. En effet si le taux de salaire réel est supérieure à la productivité, cela entraine une désincitation des entreprises à embaucher préférant substituer la main d'œuvre par d'autres facteurs comme le capital technique ou même dans certain cas à délocaliser dans l'optique de trouver une main d'œuvre moins coûteuse. D'après les néo-classiques, il faudrait baisser le coût du travail, voire même supprimer le salaire minimum (SMIC). Ils justifient cette analyse en expliquant que le marché du travail est autorégulateur et que le salaire minimum entrave le fonctionnement de celui-ci. En effet les entreprises ne peuvent pas descendre en dessous d'un certain seuil de salaire (les prix plancher) les désincitant ainsi à embaucher entrainant la hausse du chômage. Selon l'analyse classique, il existe deux autres formes de chômage : le chômage frictionnel qui est dû aux ajustements sur le marché et le chômage volontaire, dû aux individus qui ne veulent pas travailler sur le marché du travail (salaire inférieur à leurs attentes par exemple). Cependant, John Maynard Keynes va contester cette analyse néoclassique en émettant 2 critiques. Pour, lui, le salaire n'est pas un prix comme les autres. Il ne fluctue pas librement sur le marché du travail et est rigide à la baisse car il est socialement encadré. Il ajoute que le chômage n'est pas lié au salaire mais à une insuffisance de la demande effective. La demande effective va déterminer le niveau de production, donc le niveau de l'emploi nécessaire. Si les salaires sont insuffisants, la demande effective (ou anticipée) sera faible, et il en sera de même pour le niveau de production et l'emploi. Le chômage est donc dû à la faiblesse des salaires, contrairement à ce que disent les néoclassiques. Pour Keynes, l'équilibre de marché des biens et services ne se traduit pas forcément par l'équilibre de marché du travail. On peut alors parler de l'équilibre de sous-emploi, c'est-à-dire que le niveau d'emploi déterminé par l'équilibre de l'offre et la demande globale ne correspond pas forcément au plein-emploi. Pour le résorber, il faudrait relancer la demande et soutenir l'activité. Si la théorie Keynésienne s’attaque essentiellement au chômage conjoncturel, lié aux variations de court terme de l'activité économique, certains économistes ont essayé plus récemment de mesurer le chômage qui ne relève pas d'une demande insuffisante. Ils parlent de chômage structurel qui est donc durable. L'analyse du chômage structurel donne lieu à plusieurs interprétations. Tout d'abord, le chômage frictionnel qui correspond à la situation d'un salarié en transition entre deux emplois et recherchant les meilleurs conditions d'embauche. Le chômage structurel peut aussi être dû à une inadéquation entre l'offre de travail des salariés et la demande de travail des entreprises car les qualifications des candidats peuvent ne pas correspondre à celle demandées par les entreprises qui embauchent. Cette inadéquation peut provenir du progrès technique : les emplois se transforment, les besoins des entreprises changent, il y a une recomposition permanente des emplois. Enfin le chômage structurel peut résulter de rigidités institutionnelles (droit du travail trop strict qui dissuaderait d’embaucher, revenus de remplacement trop élevés qui favorisent les trappes à inactivité,…).