empires mondes », levier essentiel de la structuration du système économique mondial dans les
années 1890-1950 et dont l’application extrême fut la Grande-Bretagne. Ce courant de recherche a
défini des pistes de travail concernant surtout le jeu de la concurrence économique inter-
européenne autour de la quête de matières premières industrielles, la recherche de nouveaux
marchés pour vendre cette production industrielle et l’ouverture de nouveaux champs
d’investissement. Les historiens ont débattu du poids respectif des considérations de puissance
géopolitique et diplomatique et des considérations de puissance économique ; la Conférence
internationale de Berlin (1884-1885) avait une rencontre politique et diplomatique débouchant sur
des accords économiques (sphères d’influence, chasses gardées) qui furent complétées notamment
par l’accord franco-britannique sur la politique de « porte ouverte » dans l’aire du Niger (entre
1898 et 1936) et, plus tard, avec l’accord d’Algésiras, par l’affirmation là aussi de « la porte
ouverte » à propos du protectorat marocain.
Le poids respectif de l’impérialisme colonial et de l’impérialisme économique a fait débat, car on
s’interrogeait sur la variété des formes prises par l’impérialisme
pour asseoir sa puissance, et
comment le capitalisme européen continental s’insérait dans ce mouvement impérialiste,
notamment pour se confronter au capitalisme britannique alors encore dominant ou pour attiser
les contradictions internes au monde capitalisme européen, stimulées par l’émergence de
l’Allemagne comme grande puissance industrielle (dans le sillage des États-Unis) ; les collègues
français ont été rejoints par leurs homologues nord-américains qui avaient rassemblé un dossier
pertinent à propos de la cristallisation d’un « parti colonial »
au Parlement. Faut-il rappeler
aujourd’hui l’intense débat
qui tournait autour du lien entre l’accélération de la conquête
coloniale et l’accentuation de la grande dépression
des années 1870/1880-1890 – dans le sillage
des réflexions de Paul Leroy-Beaulieu au tournant du XXe siècle ? Un deuxième débat a porté sur ce
que l’empire « rapportait » ; J. Marseille a par exemple établi
que, dans la première phase
Immanuel Wallerstein, « L’économie monde », in Connaissance du Tiers-Monde (publication du
laboratoire de même titre, Université Paris-7), Paris, 10/18, pp. 97-112.
Cf. Jean Bouvier, qui a joué un rôle clé dans la réflexion marxiste historienne rénovatrice de l’époque, avec,
entre autres, Jean Bouvier & René Girault, L’impérialisme français d’avant 1914, Paris, Mouton, 1976. David
Kenneth Fieldhouse, The Theory of Capitalist Imperialism, Londres, Longman, 1967. Jean Stengers,
« L’impérialisme colonial à la fin du XIXe siècle : mythe ou réalité », Journal of African History, volume 3,
1962, pp. 469-491. Richard Koerner & G.D. Schmidt, Imperialism. The Story and Significance of a Political
Word, 1940-1960, Cambridge University Press, 1964. Henri Brunschwig, « Empires et impérialismes »,
Revue historique, n°475, juillet-septembre 1965, pp. 111-122.
Henri Brunschwig, « Le parti colonial français », Revue française d’histoire d’outre-mer, tome XLVI, 1959,
pp. 49-83. Bernard Schnapper, La politique et le commerce français dans le golfe de Guinée, de 1838 à 1871,
Paris, Mouton, 1961. Charles-Robert Ageron, France coloniale ou parti colonial ?, Paris, Armand Colin, 1970.
Christopher-M. Andrew & A. Sydney Kanya-Forstner, « The French “Colonial Party”: Its composition, aims,
and influence, 1885-1914 », The Historical Journal, volume XIV, 1971, pp. 99-128. Christopher-M. Andrew &
Sydney Kanya-Forstner, « The “Groupe colonial” in the French Chamber of Deputies, 1832-1932 », The
Historical Journal, volume XVII, n°4, 1974, pp. 837-866. Christopher-M. Andrew & A. Sydney Kanya-
Forstner, « French business and the French colonialists », Historical Journal, XIX, 1976, pp. 981-
1000.Christopher-M. Andrew, « The French colonialist movement during the Third Republic », Royal
Historical Society Transactions, XXVI, 1976, pp. 143-166. L. Abrams & D. J. Miller, « Who were the French
colonialists? A reassessment of the Parti colonial », The Historical Journal (Cambridge University Press),
XIX, 1976, n°3, pp. 685-725. Christopher-M. Andrew & Sydney Kanya-Forstner, « The French colonial party:
Its composition, aims, and influence, 1885-1914 », The Historical Journal, Cambridge, volume 19, n°3, 1976,
pp. 685-725. Jacques Binoche-Guerda, « La représentation parlementaire coloniale (1871-1940) », Revue
historique, 1988, n°586, pp. 521-535. Marc Lagana, Le Parti colonial français. Éléments d’histoire, Montréal,
Presses universitaires du Québec, 1990. Charles-Robert Ageron, « Le “parti colonial” face à la question
tunisienne (1945-1951) », in La Tunisie de l’après-guerre, Tunis, 1991, pp. 183-207.
Cf. C. Coquery-Vidrovitch, « De l'impérialisme britannique à l'impérialisme contemporain : l’avatar
colonial », L'Homme et la Société, n° 18, 1970, pp. 61-90. Réédité in Michel Margairaz (dir.), Histoire
économique, XVIII°-XX° siècles, collection Textes essentiels, Paris, Larousse, 1992, pp. 783-799.
Cf. Marie-Hélène Gillman ; « L’empire colonial et la longue stagnation », in Yves Breton, Albert Broder &
Michel Lutfalla, La longue stagnation en France. L’autre grande dépression, 1873-1897, Paris, Economica,
1997, pp. 382-420.
Jacques Marseille, Empire colonial et capitalisme français, histoire d'un divorce, Paris, Albin Michel,
1984.