Travail d’évaluation de la qualité de l’acte
Le diagnostic et le traitement des infections urinaires non compliquées au CSSS Baie-
des-Chaleurs
Par Marie-Claude Moore R2
Présenté à Dr Martin Potter
Université de Montréal
UMF Baie-des-Chaleurs
1er mai 2014
Introduction et mise en contexte
L’infection urinaire est l’infection bactérienne la plus commune dans les milieux de soins
ambulatoires. L’incidence annuelle auto-rapportée d’infection urinaire chez les femmes
est de 12%¹. Le diagnostic de cette infection est assez simple lorsque les symptômes
classiques (dysurie, pollakiurie, hématurie, urgence mictionnelle) sont présents.
Cependant, le diagnostic différentiel doit toujours être considéré, c’est-à-dire
principalement la pyélonéphrite aigüe et les infections vulvo-vaginales, incluant les
infections transmissibles sexuellement.
Diagnostic
Le diagnostic de l’infection urinaire aigüe est principalement clinique. Chez les femmes
en âge de procréer, la probabilité pré-test de bactériurie asymptomatique est de 5%.
Plusieurs études ont démontré que la probabilité pré-test d’infection urinaire chez les
femmes qui consultent pour des symptômes urinaires s’élève à 50%⁴. Chez celles qui
présentent une combinaison de brûlure mictionnelle et pollakiurie, cette probabilité
s’élève à 90%¹. Cependant, les femmes qui présentent également une leucorrhée ou
une irritation vulvaire ont un risque nettement diminué d’infection urinaire.
Une revue systématique parue en 2010⁴ a démontré que la combinaison dysurie-
pollakiurie-urgence mictionnelle était très sensible mais peu spécifique. C’est donc
plutôt l’absence de ces symptômes qui est utile pour éliminer le diagnostic. Cependant,
l’hématurie est beaucoup plus spécifique que sensible, et est donc plus utile pour
confirmer le diagnostic.
Le plus souvent, c’est l’analyse d’urine qui aide le médecin dans sa démarche
diagnostique. Ce test est rapide, peu coûteux et donne plusieurs informations. Parmi
toutes les données fournies par l’analyse, ce sont la présence de nitrites qui ont le
meilleur pouvoir de discrimination. La combinaison d’hématurie et de nitrites positifs
augmente la probabilité post-test d’infection urinaire de 75,8% à 93,3%. De la même
façon, chez une patiente présentant de la dysurie, la présence de nitrites augmente la
probabilité d’infection de 51,1% à 82,2%.⁴
Même si plusieurs auteurs affirment qu’il est tout à fait sécuritaire et adéquat et
diagnostiquer l’infection urinaire non compliquée sur la base unique des symptômes
¹(par exemple lors d’une consultation téléphonique), tous s’entendent pour dire qu’une
analyse d’urine perturbée, particulièrement par la présence de nitrites, vient appuyer
fortement le diagnostic.
Une culture d’urine n’est nécessaire que lorsqu’un diagnostic de pyélonéphrite est
suspecté¹. Autrement, elle est peu utile, surtout que son résultat prend quelques jours
pour être disponible. Traditionnellement, un seuil de 10⁵ CFU/mL était considéré
comme positif. En bas de ce seuil, le laboratoire va souvent fournir le résultat «aucune
croissance» ou «croissance non-significative». Or, plusieurs études ont démontré que
ce seuil n’est pas suffisamment sensible.⁴ Des femmes peuvent donc bel et bien souffrir
d’une infection même si le résultat de la culture revient négatif.
Traitement
Bien que très incommodante, l’infection urinaire n’est pas dangereuse en soi. Il est
assez rare qu’une infection non traitée se complique d’une pyélonéphrite, et encore plus
rare que celle-ci progresse vers le sepsis. L’objectif du traitement est donc
principalement de soulager les symptômes.
Les médecins du Québec se fient principalement aux lignes directrices de l’INESS pour
le traitement de infections urinaires. Celles-ci, publiées en octobre 2009, recommandent
le TMP-SMX comme première ligne de traitement, lorsque la résistance locale ne
dépasse pas 20%. Les auteurs ne recommandent cependant pas clairement d’éviter la
ciprofloxacine en première intention. Plus récemment, l’Infectious Diseases Society of
America a publié en 2011 ses lignes directrices pour le traitement de l’infection
urinaire.²
Le meilleur choix de traitement dépend toujours du profil local de résistance,
principalement à E. coli, cette bactérie étant responsable de 75 à 95% des infections.²
Bien que la résistance aux fluoroquinolones soit encore inférieure à 10% dans la
majorité des régions de l’Amérique du Nord, les auteurs des lignes directrices notent
une constante augmentation. Les effets secondaires écologiques, aussi appelés
dommages collatéraux, de l’utilisation d’antibiotiques à large spectre comme les
fluoroquinolones, sont de plus en plus considérés. L’utilisation des fluoroquinolones a
été associée à des infections à SARM et à un taux sans cesse grandissant de
Pseudomonas aeruginosa résistants. Ces dommages collatéraux n’impliquent ainsi pas
uniquement les pathogènes urinaires mais aussi d’autres bactéries. À l’inverse, très peu
de résistance au nitrofurantoin a été notée.
La première ligne de traitement recommandée est donc le nitrofurantoin pour 5 à 7 jours
ou le TMP-SMX pour 3 jours, si la résistance locale ne dépasse pas 20%. Les
fluoroquinolones devraient être réservées pour des infections plus graves que l’infection
urinaire.
Méthode
Les dossiers révisés ont été obtenus à partir des archives du centre hospitalier de Maria
(CSSS Baie-des-Chaleurs). Les critères étaient les suivants:
- Diagnostic de cystite ou d’infection urinaire non compliquée reçu lors d’une visite à
l’urgence
- Femmes de 18 à 65 ans
Quarante-trois dossiers ont été visés. De ce nombre, 13 ont été exclus,
principalement parce qu’il s’agissait de patients avec infections urinaires compliquées
(diabète, grossesse, hommes, anomalie de l’arbre urinaire, etc). Les données ont donc
été extraites de 30 dossiers. Les diagnostics ont tous été posés pour la période allant
de juillet à septembre 2013. Les informations suivantes ont été analysées: âge,
présence de symptômes de pyélonéphrite aigüe, analyse d’urine, culture, germe
identifié, profil de résistance, antibiotique et durée de traitement prescrits, reconsultation
à l’urgence pour les même symptômes dans le mois suivant. Les données ont ensuite
été compilées à l’aide d’Excel.
Pour être considérée «positive» une analyse d’urine devait avoir une ou plusieurs des
caractéristiques suivantes: nitrites positifs, présence de globules rouges, de leucocytes,
de pus ou de bactéries. Les analyses considérées comme «équivoques» avait la
plupart du temps une seule anomalie, qui ne comprenait pas la présence de nitrites (par
exemple, seulement des leucocytes, ou 3 à 5 globules rouges par champ).
Les données de résistance aux antibiotiques ont été obtenues à l’aide du logiciel
NosoCos.
La formulation des recommandations a été basée sur les plus récentes lignes
directrices de l’INESS et de l’Infectious Diseases Society of America.
Résultats
Chez toutes les patientes, une analyse d’urine a été faite. La culture a été faite chez 27
patientes. Toutes les patientes sans exception ont reçu une prescription d’antibiotiques,
même lorsque l’analyse d’urine était normale.
Tableau 1. Résultats des analyses d’urine
Résultat de l’analyse
Nombre de patientes
%
Anormale
19
63,33 %
Équivoque
7
23,33 %
Normale
4
13,33 %
Tableau 2. Germes identifiés
Germe
Nombre de cultures
%
Staphylocoque saprophyticus
4
13,33
Escherichia coli
12
40
Lactobacillus (contaminant
vaginal probable)
1
3,33
Croissance non significative
5
16,66
Aucune croissance
5
16,66
Aucune culture
3
10
Tableau 3. Profil de résistance des principaux pathogènes urinaires de juillet à
septembre 2013
Antibiotique / Bactérie
Staphylococcus
saprophyticus
Escherichia coli
Ciprofloxacine
0 %
9,5 %
TMP-SMX
non-disponible
11,7 %
Nitrofurantoin
0 %
2,6 %
1 / 8 100%
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