1981, lorsqu’Israël avait attaqué la centrale nucléaire irakienne, les estimations militaires
prévoyaient comme résultat un délai d’un ou deux ans dans le calendrier du programme
nucléaire d’Irak. Or, à ce jour, l’Irak n’avait toujours pas l’arme nucléaire.
Jeudi 16 août, la polémique a atteint son apogée lorsque le président Shimon Pérès a
rompu son silence médiatique sur le dossier iranien. Lors d’interviews accordées à plusieurs
quotidiens et chaînes de télévision à l’occasion de son 89ème anniversaire, il a exprimé son
opposition catégorique à une attaque israélienne unilatérale : « il est évident que nous ne
pouvons pas le faire tout seuls. Si Israël attaque l’Iran tout seul, il restera isolé, sans amis.
Pourquoi attaquer seuls alors que nous avons un partenaire ? ». M. Pérès a également
exprimé sa confiance dans l’engagement de Barack Obama à empêcher la nucléarisation de
l’Iran, laissant entendre qu’il était convaincu que les États-Unis lanceraient leur propre
opération dans un avenir proche, après les présidentielles. Cette intervention inédite du
président a entraîné un déluge de réactions, notamment de la part de proches du Premier
ministre Netanyahu, qui s’en sont pris au président de l’État l’accusant d’avoir outrepassé
son rôle protocolaire en s’exprimant sur un sujet politique. Les proches de Netanyahu se sont
empressés de rappeler les « multiples erreurs historiques » de Shimon Pérès en matière
d’analyse stratégique, et notamment son opposition à l’attaque contre la centrale irakienne
en 1981.
D’anciens responsables israéliens de la Défense ont eux aussi multiplié les
déclarations publiques. Si jusqu’alors on entendait surtout la voix des opposants à l’attaque
autonome, cette semaine ce sont deux hautes figures sécuritaires qui se sont exprimées en sa
faveur. Shabtaï Shavit, ancien chef du Mossad, a ainsi appelé lors d’une interview à la chaîne
2 à ne pas faire confiance aux États-Unis car les Américains pourraient vivre avec un Iran
nucléaire contrairement à Israël; le général Giora Eiland, ancien président du Conseil
National de Sécurité, s’est exprimé lui aussi dans le même sens dans la presse (article ci-
dessous) et lors d’une interview à Galeï Tsahal, l’une des deux radios nationales.
La nomination d’Avi Dichter (Kadima) comme ministre de la Défense civile, en
remplacement de Matan Vilanï, nommé ambassadeur en Chine, a également été interprété
par les médias comme un signe supplémentaire des intentions belliqueuses du Premier
Ministre. Avi Dichter, ancien ministre, ancien chef du Shin Beth (service de sécurité intérieure)
et spécialiste hautement estimé de la Défense, a été également invité par Netanyahu à
rejoindre le « Forum des Huit », désormais baptisé « Forum des Neuf » (forum des 8 ministres
concernés par les questions stratégiques et de défense). La presse estime en effet que M.
Dichter est favorable à l’attaque unilatérale en Iran, et que son adhésion au Forum bouscule
l’équilibre qui y prévalait : il y aurait désormais 5 ministres favorables à une attaque contre 4
ministres opposés. Bien que ce Forum ait un statut uniquement consultatif, le soutien d’Avi
Dichter pourrait jouer en faveur des partisans de l’attaque si le Premier ministre devait
soumettre cette décision au gouvernement.
Diagramme : les rapports de force au sein du Forum des Neuf
Pour l’attaque :
Binyamin Netanyahu, Ehud Barak, Avigdor Liberman, Yuval Steinitz, Avi Dichter