Hugo Bouvard. 17/01/2012
Fiche de lecture de l’ouvrage : Michel Bozon, François Héran, La formation du couple. Textes essentiels
pour la sociologie de la famille, La Découverte, coll. « Grands Repères », 2006, 267 p.
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Si la sociologie s’attache à expliquer les comportements des agents sociaux en public, au
travail, au sein d’institutions, elle s’est aussi attelée à rendre compte de leurs comportements dans
les pans plus intimes de leur existence. Ainsi, la sociologie de la famille, à la suite de l’anthropologie,
s’est intéressée aux relations de parentés, aux recompositions familiales, etc. C’est bien dans cette
optique, mais en allant un cran plu loin, que Michel Bozon et François Héran s’inscrivent en
coécrivant La formation du couple : c’est sur le noyau de la famille, c’est à dire le couple, que leurs
analyses se concentrent, et plus précisément sur les moments de cristallisation de ce noyau, la
rencontre, puis la mise en couple. Quels sont les déterminants sociaux qui y président ? Qui “choisit”
qui et pour quelle raison ? Comment s’institutionnalise ce rapprochement et quelles conséquences
sociales entrainent-ils ? Autant de questions que les différents chapitres traitent, en dessinant de
grandes tendances qui ne négligent pour autant pas l’analyse de détail. Il convient tout d’abord de
s’intéresser à l’économie de l’ouvrage.
En effet, ce volume se distingue en premier lieu par sa composition : si l’introduction et les
différentes présentations de chapitres, ainsi que les questionnaires en annexe, ont été conçus pour le
présent ouvrage, ou sont inédits, les chapitres ont été publiés séparément, sous forme d’articles,
entre 1987 et 1991, principalement, par Michel Bozon, dans la revue Populations (INED). On peut
légitimement s’interroger alors sur la nature de ce conglomérat d’articles, et sur la dimension
fabriquée de l’unité de l’ouvrage. Cette interrogation est levée dès l’introduction. Ainsi, tous ces
articles reposent en fait sur une même enquête, menée entre 1983 et 1984 par les deux auteurs, et
qui fait suite à l’enquête conduite par Alain Girard, pour le compte de l’INED, en 1959 : Le choix du
conjoint. Seuls deux tiers des articles qu’ils ont tirés de cet enquête figurent dans La formation du
couple.
Après avoir retracé la filiation de l’étude de Girard dans le contexte universitaire de l’époque, Bozon
et Héran battent en brèche l’idée du caractère monopolistique d’un ancrage disciplinaire de type
“sociologie de la famille” dans leur propre enquête : ils l’inscrivent plutôt dans la tradition des
travaux de sociologie de la sociabilité, voire du travail (dressant le parallèle entre le “recrutement”
du conjoint et le recrutement salarial). Ils prennent également leurs distances avec la sociologie
historique, malgré les affinités évidentes de leur travail avec celle-ci, dans le chapitre 1, en raillant la
recherche d’une “rupture” ou d’une “inflexion” dans l’évolution des modes de rencontre.