
Michael Oakeshott, Tory Dandy et philosophe :  
 
 La sortie d’une étude sur Michael Oakeshott (1901-1990) va peut être enfin permettre 
au public français, et particulièrement au public royaliste, de se familiariser avec la pensée 
d’un auteur central dans le débat philosophique contemporain. Historien, philosophe, politiste, 
spécialiste internationalement reconnu de Thomas Hobbes, seuls deux de ses textes les plus 
importants ont été traduit
 dans la quasi indifférence générale. On aurait peut-être dû prêter 
une  oreille  un  peu  plus  attentive  à  un  philosophe  qui  se  proclamait  sans  ambages 
« conservateur »,  non  par  idéologie  ou  par  esprit  partisan,  mais  par  disposition  naturelle, 
caractérisée par « une propension à utiliser ce qui marche plutôt que de désirer ou rechercher 
quelque  chose  d’autre
 »,  par  attachement  naturel  aux  traditions  qui  règlent  l’ensemble  des 
conduites  humaines  concrètes.  Quentin  Perret  a  préféré  insister  dans  son  ouvrage  sur 
l’influence profonde qu’a exercé le scepticisme de Montaigne sur la formation de sa pensée, 
qui a informé tous ses domaines de recherches, que ce soit sa critique radicale du rationalisme 
en politique, sa redéfinition des ambitions de la philosophie et de l’histoire politique moderne, 
ou encore plus généralement ses travaux sur les différents modes de l’expérience humaine.  
 
Recherche de la connaissance valide 
 
La philosophie proprement analytique de Oakeshott n’a pas l’ambition, très moderne, de bâtir 
des systèmes ou des idéologies ready made, mais plutôt, dans la veine de Wittgenstein, de 
s’orienter clairement dans la pensée, ce qu’il appelait la recherche de la connaissance valide : 
« le but de la philosophie est de clarifier la pensée, en débarrassant le vocabulaire de ses 
impuretés ou de  ses  incohérences
 ».  C’est  avec  cet esprit  intellectuellement  exigeant  que 
Oakeshott condamnait toute transposition trop rapide de la philosophie, activité qui relève de 
la  théorie,  dans  le  domaine  de  la  politique  concrète,  lieu  de  la  sagesse  pratique.  Cette 
transposition  pour  Oakeshott  donna  naissance  aux  idéologies  modernes,  dont  la  matrice 
commune demeure la prétention au rationalisme scientifique sans le secours ni de la foi, ni de 
la tradition.  
 
On  regrettera  quand  même  que  l’ouvrage  de  M.  Perret,  qui  n’a  certes  que  la  prétention  à 
introduire  à  la  pensée  du  philosophe  anglais,  nous  donne  une  vision  parfois  un  peu 
caricaturale, et souvent aseptisée d’une pensée antimoderne vivante et radicale. On a parfois 
l’impression  que  l’auteur  entend  la  rendre  acceptable  à  un  public  social-démocrate habitué 
aux  lectures  opiacées  du  Monde.  Quand Perret  fait  de Oakeshott  une  influence du  « néo-
libéralisme » parce que celui-ci  étend  son  scepticisme  jusqu’aux interférences arbitraires  de 
l’état dans tous les domaines de l’existence humaine, il néglige toute la critique qu’il a adressé 
aux philosophes et aux économistes néoclassiques (Hayek en tête), et la réticence qu’il avait à 
endosser l’étiquette libérale. 
 FM 
 
Quentin Perret, Oakeshott. Le scepticisme en politique, Paris, Michalon, 2004, 124 pages. 
 
 De la conduite humaine, PUF, 1995 et « Le rationalisme en politique », in revue Cités, numéro 14, 2000, pp. 
121-157.  
 « On Being Conservative », in Rationalism in Politics and Others Essays, Liberty Fund, 1991, p. 408.  
 Perret (Quentin), Oakeshott. Le Scepticisme en politique, Paris, Michalon, p. 28.