1
« Dans quelles circonstances et dans quelle mesure la réglementation devrait-elle
imposer une obligation positive de délivrance d’informations aux annonceurs ? »
Rapport pour la Ligue internationale du droit de la concurrence en vue du Congrès de Hambourg, 25-
28 septembre 2008
Christophe RAPIN*, Lic. Iur., DEA, avocat aux barreaux de Bruxelles et Genève
Christophe PÉTERMANN**, Lic. Iur, LL. M. Europarecht, LL.M. Legal Theory, avocat aux
barreaux de Bruxelles et Genève
1. Obligation positive générale de délivrance d’informations imposée aux
annonceurs par la loi
En droit suisse, les obligations générales en matière de publicité relèvent essentiellement de la
Loi fédérale contre la concurrence déloyale (LCD)
1
, de l’Ordonnance fédérale sur l’indication
des prix (OIP)
2
ou de la Loi fédérale sur l’information des consommatrices et des
consommateurs (LIC)
3
. Elles sont cependant généralement de nature négative.
L’information des consommateurs sur les biens et services n’est actuellement pas glée de
manière générale pour tous les produits, mais de manière sectorielle. Les fournisseurs de biens
et de services ne sont pas tenus d’assurer la transparence du marché pour les consommateurs
de manière générale.
1.1 LCD
La LCD prévoit à son article 2 qu’est déloyal et illicite tout comportement ou pratique
commercial qui est trompeur ou qui contrevient de toute autre manière aux règles de la bonne
foi et qui influe sur les rapports entre concurrents ou entre fournisseurs et clients.
En matière de publicité, l’art. 3 LCD contient une liste énumérative de méthodes déloyales de
publicité qui reposent sur l’un des trois éléments fondamentaux suivants : (i) le caractère
inexact des indications ou allégations, (ii) le caractère fallacieux de ces indications ou encore
(iii) leur caractère inutilement blessant.
4
Sur la base de la LCD, le droit suisse ne connaît pas à proprement parler de clause générale
positive de délivrance d’informations. Ce n’est que lorsque la publicité contient un certain
nombre d’informations et d’indications que le droit de la concurrence déloyale viendra
sanctionner un défaut d’informations comme constituant le cas échéant une méthode déloyale
de publicité.
* Christophe RAPIN est associé de l’Etude PESTALOZZI LACHENAL PATRY à Genève et responsable du
bureau de Bruxelles de cette Etude.
** Christophe PETERMANN est collaborateur de l’Etude PESTALOZZI LACHENAL PATRY à Bruxelles.
1
RS 241.
2
RS 942.211.
3
RS 944.0.
4
Cf. PUGATSCH, Werberecht für die Praxis, 2e éd., 2007, p. 20.
2
1.2 OIP
L’OIP ne contient aucune obligation générale d’indication des prix. En revanche, lorsque,
dans la publicité, des prix sont mentionnés ou des échelons de prix ou des limites de prix sont
donnés en chiffres, il y a lieu d’indiquer les prix à payer effectivement (art. 13 al. 1 OIP).
L’OIP ne s’applique cependant que lorsque les biens ou services offerts s’adressent aux
consommateurs, à savoir toute personne qui achète une marchandise ou une prestation de
service à des fins qui sont sans rapport avec son activité commerciale ou professionnelle (art.
2 al. 2 OIP).
Selon l’art. 14 OIP, les indications des prix doivent mettre clairement en évidence la
marchandise et l’unité de vente ou le genre et l’unité des prestations de services et les tarifs
auxquels le prix se rapporte. Les marchandises doivent être désignées selon la marque, le
type, la qualité et les caractéristiques. L’indication des prix doit correspondre à l’illustration
ou au texte se rapportant à la marchandise désignée.
Enfin, les taxes publiques mises à la charge du client doivent être incluses dans le prix (art. 10
al. 2 OIP).
Le Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) élabore, en partenariat avec des associations
professionnelles et des organisations de consommateurs, diverses feuilles d’information pour
la mise en oeuvre et l’exécution de l’OIP.
Ces feuilles d’informations concernent :
Médicaments
Offres de leasing d’automobiles, publicité
Services bancaires et analogues
Fleurs et plantes
Etablissements de nettoyage chimique
Salons de coiffure
Services à valeur ajoutée payants
Services de télécommunication
Garages
Tapis d’Orient noués à la main, publicité
Electronique domestique
Hôtellerie et restauration
Pneus de voitures particulières, publicité
Réductions de prix pour des téléphones mobiles
Offres de voyage
Taxis
Contributions anticipées à l’élimination
Prestations médico-dentaires
3
1.3 LIC
La LIC prévoit que dans la mesure l’intérêt des consommateurs le justifie, les
caractéristiques essentielles des biens mis en vente ou dont l’usage est proposé à des tiers,
ainsi que les éléments essentiels des services désignés par le Conseil fédéral (gouvernement
fédéral) doivent être indiqués sous une forme permettant les comparaisons (art. 2 al. 1).
Cette loi, entrée en vigueur en 1992, est cependant restée pour ainsi dire lettre morte : les
associations de consommateurs et les organisations économiques ne se sont guères entendues
sur la liste des biens pour lesquels des indications devaient être fournies et le gouvernement
fédéral n’a fait aucun usage de sa compétence résiduelle en la matière (cf. art. 3 et 4 LIC).
5
Seuls deux accords portant sur la déclaration des biens et des services ont été conclus entre les
milieux économiques concernés et les organisations de protection des consommateurs, à
savoir un accord ayant pour but d’informer les consommateurs sur la méthode de production
des légumes frais et des baies fraîches et un autre entre les importateurs automobiles et le
Touring Club suisse sur l’utilisation des carburants.
6
Un projet de révision partielle de la LIC a été abandonné par le gouvernement fédéral en date
du 21.12.2005.
1.4 Ordonnance sur le mesurage et la déclaration de quantité des marchandises mesurables
dans les transactions commerciales (Ordonnance sur les déclarations)
7
Cette ordonnance règle l’information sur les quantités et les prix des marchandises, mais dans
le cas de la vente et non de la publicité proprement dite.
2 Obligations positives spécifiques de délivrance d’informations imposée aux
annonceurs par la loi
Sous chiffres 2.1 à 2.10, nous allons examiner un certain nombre de réglementations
sectorielles prévoyant des obligations positives d’information. Il conviendrait d’y ajouter
encore la Loi fédérale sur les voyages à forfait
8
ou la Loi fédérale sur la protection contre les
substances et les préparations dangereuses
9
, par exemple.
2.1 Denrées alimentaires et objets usuels
L’art. 2 al. 1 lit. i de l’Ordonnance fédérale sur les denrées alimentaires et les objets usuels
(ODAlOUs)
10
définit la publicité Anpreisung ») comme « les inscriptions dans les
5
EUPOLD/WÜGER, 15 Jahre Internetnutzung der Stand der Dingei m Schuld-, Kollisions- und
Datenschutzrecht, SIC ! 2008, pp. 181-199, p. 185.
6
Rapport explicatif du 14 juillet 2005 sur le projet de la Loi sur l’information des consommatrices et des
consommateurs (révision partielle de la LIC).
7
RS 941.281.
8
RS 944.3.
9
RS 813.1.
10
RS 817.02.
4
magasins, la présentation du conditionnement ou de l’emballage, la publicité au sens propre,
toute forme de réclame, ainsi que la publicité directe. »
Selon l’ODAlOUs, les denrées alimentaires préemballées doivent indiquer la dénomination
spécifique (art. 26 al. 1 lit. a). La dénomination spécifique doit correspondre à la nature, au
genre, à l’espèce, à la sorte, aux propriétés de la denrée alimentaire ou aux matières premières
utilisées pour sa fabrication (art. 3 al. 1 de l’Ordonnance du Département fédéral de l’Intérieur
sur l’étiquetage et la publicité des denrées alimentaires, OEDAl)
11
.
Par dénomination spécifique, on entend la désignation spécialement prévue pour la denrée
alimentaire considérée ou utilisée dans la définition des différentes denrées alimentaires. Cette
dénomination spécifique doit figurer sur l’emballage et l’étiquette du produit, mais aussi dans
la publicité à un endroit bien visible.
12
On peut renoncer à la dénomination spécifique si la nature, le genre, l’espèce, la sorte et les
propriétés de la denrée alimentaire sont clairement identifiables.
2.2 Médicaments et dispositifs médicaux
2.2.1 Base légale
Selon la Loi fédérale sur les médicaments et les dispositifs médicaux (Loi sur les produits
thérapeutiques, LPTh
13
), (i) la publicité pour tous les types de médicaments, pour autant
qu’elle s’adresse exclusivement aux personnes qui les prescrivent ou qui les remettent ainsi
que (ii) la publicité destinée au public pour les médicaments non soumis à ordonnance, sont
licites.
Sur cette base, l’Ordonnance sur la publicité pour les médicaments (OPMéd)
14
distingue entre
la publicité destinée au public, à savoir toute publicité pour les médicaments qui s’adresse au
public et la publicité destinée aux professionnels, à savoir toute publicité qui s’adresse aux
personnes habilitées à prescrire, à remettre ou à utiliser des médicaments à titre professionnel
et sous leur propre responsabilité.
2.2.2 Publicité destinée au public (art. 14 ss OPMéd)
Toutes les données figurant dans la publicité destinée au public doivent être conformes à la
dernière information sur le médicament telle qu’elle a été approuvée par Swissmedic; la
publicité doit en particulier se limiter aux indications et aux possibilités d’emploi reconnues
par Swissmedic. Pour les médicaments sans notice d’emballage, le dernier texte approuvé
pour l’emballage fait foi.
La publicité doit présenter le médicament de façon véridique et sans exagération, que ce soit
par l’image, le son ou la parole.
11
RS 817.022.21.
12
Cf. PUGATSCH, op. cit., p. 116.
13
RS 812.21.
14
RS 812.212.5.
5
La publicité doit être identifiable en tant que telle. Les textes rédactionnels et les annonces
publicitaires doivent être clairement séparés.
Les médicaments, indications, dosages, formes galéniques et emballages ne peuvent être
qualifiés de «nouveauté» que durant la première année de leur autorisation en Suisse. La
publicité doit clairement exprimer en quoi consiste la nouveauté.
S’agissant des médicaments non soumis à ordonnance (catégorie C : médicaments achetés en
pharmacie sans ordonnance médicale et catégorie D : médicaments achetés en pharmacie et
droguerie sans ordonnance médicale), la publicité doit clairement caractériser en tant que tels
ces médicaments et doit comporter au moins les données suivantes:
a. le nom de la préparation (marque) et le nom du titulaire de l’autorisation;
b. au moins une indication ou une possibilité d’emploi;
c. une invitation expresse et bien lisible à lire la notice d’emballage (ou, pour les médicaments
sans notice, le texte de l’emballage extérieur);
d. les délais d’attente pour les médicaments destinés à des animaux servant à la production de
denrées alimentaires.
2.2.3 Publicité de marque (art. 18 OPMéd)
Lorsque la publicité a pour seule fonction de rappeler une marque, on indiquera
exclusivement le nom de la préparation, avec mention ou non du titulaire de l’autorisation.
2.2.4 Remise d’échantillons (art. 19 OPMéd)
Les échantillons remis au public doivent être clairement et durablement désignés comme
«échantillon gratuit». Ils doivent correspondre aux exigences de l’institut en ce qui concerne
les textes et les données devant figurer sur les récipients et le matériel d’emballage.
Les échantillons de médicaments à usage humain ne doivent pas dépasser la dose journalière
recommandée.
Les échantillons de médicaments des catégories de remise C et D ne doivent être remis au
public que par les points de remise autorisés. Il est interdit de les offrir en libre-service.
La vente d’échantillons est interdite.
2.2.5 Publicité destinée aux professionnels (art. 3 ss OPMéd)
Toutes les données figurant dans la publicité destinée aux professionnels doivent être
conformes à la dernière information sur le dicament telle qu’elle a été approuvée par
Swissmedic; la publicité doit en particulier se limiter aux indications et aux possibilités
d’emploi reconnues par Swissmedic.
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