Description des symptômes de la « nouvelle » maladie du hêtre1 Introduction La mortalités qui frappe actuellement les hêtraies au Grand-Duché, en Rhénanie-Palatinat et surtout en Wallonnie, est apparue essentiellement au printemps - été 2000. Il convient de distinguer le phénomène de mortalités brutales que nous connaissons actuellement du dépérissement " classique " qui affecte les hêtraies depuis de nombreuses années, et dont l’origine complexe fait notamment intervenir des facteurs pédologiques (pauvreté chimique des sols, déséquilibres minéraux, carences nutritives) et climatiques (déficits hydriques répétés, déstabilisation des arbres par les tempêtes), ainsi que des retombées atmosphériques polluantes. Principaux symptômes observables sur arbres debouts La localisation initiale des symptômes sur une seule face du fût, fréquemment en hauteur, ainsi que l’aspect des autres faces du tronc et du houppier qui peut apparaître " normal " exigent une observation minutieuse de l’arbre sous toutes ses faces, en intensifiant particulièrement les observations aux orientations NE à NO, en s’aidant de préférence de jumelles à fort grossissement. Galeries d’insectes xylophages Période d’observation : sciure : printemps, été, automne orifices de galeries : toute l’année. Localisations potentielles : au stade initial d’attaque, sur les faces NE à NO du tronc surtout en hauteur, puis toutes faces et hauteurs possibles. Agents causals : surtout scolytes (P. ex. Trypodendron domesticum et T. signatum) et lymexylons (Hylecoetus dermestoides) 1 Ce document s’inspire de la publication « Mortalité du hêtre en forêt wallonne » de Monsieur Olivier HUART et Professeur Jacques RONDEUX de la Faculté universitaire des Sciences agronomiques de Gembloux 1 Service de l’Aménagement des Bois Jean-Pierre AREND Remarques : Galeries pénétrantes : <15 cm pour Trypodendron, jusqu’au cœur de l’arbre pour Hylecoetus dermestoides. Sciure lessivée par fortes pluies : disparition brusque du symptôme possible. Insectes cités : ravageurs secondaires attirés par les zones sous-corticales en fermentation (éthanol). Symbiose avec des champignons qu’ils inoculent. galerie de trypodendron Hylecoetus dermestoides : stade larvaire Carpophores de champignons Période d’observation : principalement en fin d’été, automne, début d’hiver, sauf pour les carpophores à consistance coriace, pérennes et observables toute l’année (p. ex. Fomes fomentarius – l’amadouvier). Localisations potentielles : au stade initial d’attaque, systématiquement en faces NE à NO du tronc, surtout en hauteur, puis toutes faces et hauteurs possibles. 2 Service de l’Aménagement des Bois Jean-Pierre AREND Champignons concernés : Bjerkandera adusta ; Fomes fomentarius ; Stereum hirsutum ; Trametes versicolor ; Bulgaria inquinans Remarques : il s’agit essentiellement de pathogènes de blessures nécessitant une porte d’entrée (lésion d’écorce, galeries d’insectes, …) pour coloniser l’arbre. La plupart d’entre eux sont des agents actifs de pourriture blanche (dégradation préférentielle de la lignine). Décollements d’écorce Période d’observation : faciès apparaissant à partir de l’hiver, du printemps ou de l’été suivant l’attaque du tronc par des insectes et champignons. Localisations potentielles : au stade initial de l’attaque, faces NE à NO du tronc, surtout en hauteur, puis toutes faces et hauteurs possibles. Agents causals : mort de l’écorce (et du cambium), attaques entomologiques et fongiques, décollements facilités par l’alternance gel/dégel. 3 Service de l’Aménagement des Bois Jean-Pierre AREND Remarques : en période de végétation, selon les conditions climatiques et la taille relative de la lésion sous-corticale par rapport à la circonférence de l’arbre, le houppier peut garder un aspect sain malgré d’importants décollements d’écorce. Le décollement d’écorce peut être limitée de part et d’autre par un bourrelet cicatriciel. Roussissement du feuillage Période d’observation : principalement en été lorsque un stress hydrique apparaît. Localisations potentielles : feuillage de la cime (fréquemment affecté de manière asymétrique – seule une partie de houppier est atteinte) ; feuillage de fines branches basses, sous le houppier, en orientation NE à NO. Agents causals : flux de sève interrompu par atteinte des tissus conducteurs et importante perturbation physiologique de l’arbre. Remarques : symptôme sur fines branches basses à ne pas confondre avec ceux provoqués par des champignons [anthracnose du hêtre (Apiognomonia errabunda) et chancre du hêtre (Nectria ditissima) ] ou par un manque de lumière. à noter que la cime peut rester bien verte malgré d’importants décollements d’écorce, 1 an après une attaque d’insectes xylophages. Taches noires sur écorce Période d’observation : toute l’année. 4 Service de l’Aménagement des Bois Jean-Pierre AREND Localisations potentielles : apparition possible sur tout le tronc, variable en fonction des causes. Agents causals : symptôme non spécifique du phénomène de mortalité brutale ; les causes peuvent être multiples : abiotiques, entomologiques, fongiques. Dans le cas de hêtres " scolytés ", un orifice de galerie d’insecte xylophage est fréquemment identifiable au centre des taches noires. Remarques : les taches noires sont éventuellement accompagnées de suintements liés à un décollement localisé de l’écorce provoquant la formation d’une poche de sève qui s’oxyde (couleur noirâtre) et finit par suinter à travers l’écorce. Mousse d’aspect noirâtre et dépérissant Période d’observation : toute l’année. Localisations potentielles : fréquemment sur les faces NE à NO du tronc, mais toutes faces moussues et toutes hauteurs possibles. 5 Service de l’Aménagement des Bois Jean-Pierre AREND Agents causals : causes précises à déterminer. Sur arbres atteints, la mort des mousses peut s’expliquer par des suintements toxiques de l’écorce. Remarques : l’aspect noirâtre de la mousse se renforce par temps pluvieux. Hypothèse explicative L’hypothèse de développement de la maladie suivante peut actuellement être avancée. 1. Un incident ponctuel d’origine climatique ou des attaques permanentes de cochenilles auraient provoqué des lésions au niveau des tissus corticaux et sous-corticaux, localisées de manière préférentielle sur les faces nord-est à nord-ouest du fût. 2. A la suite de la fermentation des nécroses, et de l’émanation de substances attractives pour des insectes xylophages (notamment l’éthanol), des attaques de diverses espèces d’insectes et de champignons se sont produites. 3. En cours de processus de dégradation du bois, différentes escouades d’insectes et de champignons interviennent et contribuent à la décomposition progressive du bois mort. Remarque : Les principaux insectes en cause sont rigoureusement secondaires et ne portent leurs attaques que sur des arbres fortement dépérissants ou présentant des lésions corticales nécrotiques. Ils ne font en réalité que révéler un problème sous-jacent. Ils se singularisent également par leur association symbiotique avec des champignons indispensables à la nourriture des larves, et inoculés dans les galeries par les insectes eux-mêmes. A ce stade, certaines hypothèses doivent encore être mieux étayées par des travaux complémentaires. Il est donc probable que les informations précédentes devront être complétées ou ajustées par la suite. 6 Service de l’Aménagement des Bois Jean-Pierre AREND