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QUELLE ANTHROPOLOGIE POUR CROIRE DIGNEMENT ?
réflexivement les nécessités constitutives de l’être en tant
qu’être. Cette deuxième formulation montre que la recherche des
conditions a priori de possibilité est aussi applicable à Dieu. Ce
que Kant n’avait pas vu. Et dans cette recherche je devais
m’efforcer de satisfaire les exigences qui se dégagent
réflexivement de la conscience questionnante en tant que
questionnante, à savoir les exigences d’intelligibilité que sont
l’évidence, l’intégralité, l’unité de cohésion et l’universalité,
selon les différents modes d’interrogations qu’elle peut prendre.
Parmi les philosophes personnalistes et les philosophes de
l’altérité qui vinrent nourrir mes réflexions, je retiens les noms
de Martin Buber, d’Emmanuel Levinas, de Maurice Nédoncelle.
Pourtant, c’est chez Thomas d’Aquin que j’ai trouvé le
principe positif qui me permettrait de construire une méta-
physique sur d’autres bases que celles d’Aristote. Je le lisais dans
le « de potentia » : « Le propre de l’acte d’être est de se
communiquer dans toute la mesure de son pouvoir ».
Je rédigeai donc un premier mémoire sur « Le lien de l’un et
du plusieurs dans l’être chez Thomas d’Aquin ». Mon directeur
de thèse accepta toute la partie historique, mais n’eut pas le
courage de s’engager sur la partie philosophique novatrice.
Pendant que je travaillais à mon mémoire, que mon esprit
était en grande effervescence, je saisis un jour, en une sorte
d’intuition synthétique exaltante, l’ensemble des idées que j’ai
développées par la suite dans mon enseignement, dans ma thèse
de doctorat sur « la relationnalité de l’être » et dans mes livres.
C’est toujours à cette intuition que je me réfère lorsque je dois
étudier une nouvelle question de philosophie, question qui vient
toujours s’inscrire dans cette vision d’ensemble. Et dans cette
vision d’ensemble, ma foi au Christ et au Dieu vivant en l’unité
de ses trois personnes prenait et prend toujours toute sa
signification.
J’en remercie Dieu et chaque jour je me réjouis que Dieu
soit une Trinité de personnes. Aujourd’hui, je n’hésite plus à dire
« Dieu est en lui-même une famille ». Tout se comprend et
s’éclaire à partir de cette intelligibilité rationnelle d’un Dieu en
trois personnes. C’est là une réalité, non pas incompréhensible
pour la raison, mais source inépuisable d’intelligibilité
rationnelle. Dans la foi, j’accueille cette Trinité ontologique
comme une Trinité salvatrice et divinisatrice selon sa révélation
en Jésus. Je crois en Dieu qui révèle en Jésus son engagement