des célèbres seigneurs de Beuil, qui règneront sur la cité pendant 300 ans. C’était en 1315. On verra alors les
assassinats succéder aux intrigues, les alliances se faire et se défaire avec l’Anjou et la Savoie.
En 1353, Barnabé Grimaldi agresse son voisin Caïs dans des conditions épouvantables.
En 1388, habile calculateur, le comte de Beuil, Jean Grimaldi, se rallia aux Durassiens ; ralliement qui lui
vaudra d'être nommé gouverneur de Nice et sénéchal de la Baillie d'outre-Var (Grasse). Ainsi pourvu, il envoie son
frère négocier avec le comte de Savoie ; négociation conclue, il décide les consuls de Nice à se placer sous la
protection du comte savoyard qui promet de respecter les franchises traditionnelles de la ville. Accords signés, le
1er octobre 1388, le « Comte Rouge » entre à Nice parmi le peuple en fête.
En 1508, la conjuration de Georges Grimaldi, gendre du gouverneur de Provence, et de son cousin Jean,
seigneur de Levens, prétendant livrer le pays à Louis XII en échange de quelques villages, n'aboutit point. Sommé
de venir s'expliquer à Nice par le sire de La Pallud, refusa, pour finir assassiné, avant l'instruction de son procès
par le sénateur Salmatoris.
Le 5 janvier 1508, dans sa forteresse inexpugnable de Beuil, son barbier Esprit Testoris (de Bonson), peut-
être soudoyé par le gouverneur de Nice, lui trancha la gorge. Le frère cadet de Georges, Honoré 1er, seigneur du
lieu d'Ascros tout proche, nouveau baron de Beuil, jouissait de la faveur du prince. Il devint gouverneur de Nice.
Malgré sa francophilie, ce guerrier couvert de gloire, habile diplomate, maintint de son mieux le pays dans la
mouvance de Savoie contre les appétits du trop puissant voisin, François Ier, ceci malgré l'âge, une santé
chancelante, la haine des voisins contre qui a trop bien réussi, et surtout deux fils chez qui bouillonnait ardemment
le sang des Grimaldi.
En avril-mai 1525, les Français, toujours aussi ravageurs malgré le désastre de Pavie, bordaient encore la
frontière du Var et de l'Estéron. Et l'on retrouve en cette guerre les fils d'Honoré Grimaldi, Jean-Baptiste d'Ascros et
René de Massoins, son aîné, qui s'engageaient comme leur oncle à livrer Nice à la France. Ils furent dénoncés par
Honoré Laugier des Ferres, seigneur de Gilette.
Bien sûr, les manants allaient trinquer car les frères Grimaldi ayant vainement protesté de leur innocence
(alors que dans le même temps ils menaçaient le Val de Blore), incendièrent La Roquette et Levens et coururent
sus au dénonciateur. En 1561, la seigneurie est érigée en comté en faveur d'Honoré Il Grimaldi. Les Grimaldi de
Beuil étaient des princes batailleurs, rebelles à toute vassalité. Annibal, qui fut le dernier de la dynastie, prétendait
ne relever que de Dieu et de son épée. C'était un féodal d'un autre âge, d'une fierté sauvage et d'une
indépendance qui ne souffrait aucune atteinte. En 1617, il avait négocié à la fois avec la cour d Espagne et avec
celle de France, trompant l'une et l'autre dans le but d'échapper par une vassalité vis-à-vis d'un prince éloigné à la
vassalité plus immédiate et, pourtant plus lourde, du duc de Savoie, Charles-Emmanuel.
Il avait fait représenter à Louis XIII « qu'il était seigneur libre et souverain du comté de Beuil et des terres
et seigneuries y enclavées, joignant et contiguës au comté de Provence ; pour raison de quoi, il ne tenait et relevait
de ce seul prince que de l'empire ».
Par lettres patentes entérinées au parlement de Provence le 6 juin 1617, Louis XIII plaça « sous sa
protection Annibal de Grimaldi, baron et seigneur souverain de Beuil, sa famille, ses biens » avec promesse d'une
pension annuelle de vingt mille livres.
Le 22 mai 1617, Annibal jura fidélité au roi de France et a ses successeurs.
Avec la fin de la guerre de Montferrat, les intrigues du baron de Beuil devaient s'effondrer, car l'Espagne
n'avait plus besoin d'un allié compromettant, et la France, indisposée par les tractations d'Annibal avec les
Espagnols, allait l'abandonner à son sort.
Sur une information ouverte par le sénat de Nice, Annibal fut condamné à mort.
Il se réfugia alors dans son château de Tourette-Revest, avec quelques vassaux fidèles ; en 1621, ceux-ci
effrayés par les menaces ducales capturent leur maître et le ligotent sur un siège. Deux esclaves turcs l'étranglent
avec un lacet pour que se réalise sa boutade de défi, comme quoi il aimerait mieux périr de la main d'un infidèle
plutôt que de se soumettre au duc de Savoie.
Les châteaux de Grimaldi furent démantelés en 1622 sur ordre du duc de Savoie.
Tous ses fiefs furent confisqués. Ils comprenaient Beuil, Péone, Sauze, Rigaud, Touët, Malausséna,
Tourette-Revest, Toudon, Ascros, Sigale, La Roche, Lieucia, Massoins, Tournefort, La Torre, Maria, Roza, llonza,
Thieri, Pierlas, Auvare, Villars, Robion, Bairols, Puget-Théniers, Aloz, Châteauneuf-d'Entraunes, Villeneuve.
d'Entraunes, Entraunes et deux terres nommées Saint-Jean et Chesio, qui n'existent plus.
« Je suis comte de Beuil, je fais ce que je veux », telle était la devise des comtes de Beuil. Beuil fut ensuite
donné au comte Cavalca de Parme en 1623, puis passa par mariage au baron Le long de Chenillac.
Il y avait à Beuil 595 habitants en 1901, 334 au recensement 1999, il en compte 338 en 2005.
Les habitants sont les Beuillois.
Le village, présente de hautes maisons anciennes de type alpin, serrées autour de l'église. Les habitations
formaient enceinte contre les brigands et les loups. On verra des linteaux sculptés dont l'un, surmonté d'une
Vierge, est daté 1700 (bd Pourchier Marcel).
Le Pré de Foire : depuis le XVIème siècle, en mai et septembre, on rassemblait ici les troupeaux et les
bovins. Les lentilles de Beuil étaient troquées contre l'huile d'olive et les fruits impossibles à obtenir ici du fait de
l'altitude : châtaignes de Roure, figues de Rigaud, pommes de Péone. Ce troc, mode d'échange entre
communautés rurales, s'est pratiqué jusqu'au milieu de notre siècle et l'argent ne fit son entrée dans certains
foyers qu'après 1945, avec la perception des premières allocations familiales.