compromettant la succession dynastique. Ce crime contre le « sang du prophète » va accroitre
la haine anti-berbère. Quelques heures plus tard, le sultan est lui-même capturé, convoyé par
un anonyme berbère, il passe trois jours dans un pauvre campement d’altitude avant d’être
raccompagné à Meknès. Cet évènement, connu sous le nom « d’affaire de Zayane », provoqua
un séisme politique et plongea le pays dans l’anarchie.
L’anarchie à Fès
Les Abids, ulcérés par la fatigue, les morts et le manque de paie assassinent leur général, le
bon Ben Mbarek. Apprenant ces deux nouvelles, à Fès, la population se souleve contre son
gouverneur As-Saffar (il est connu pour son ambassade à Paris de 1846). Le Sultan marche
sur Fès pour rétablir l’ordre au sein du Conseil de Ville, attaqué par des cavaliers berbère sur
la route, il arrive furieux et laisse libre court à la hargne vengeresse de ses soldats contre les
bourgeois et immigrés berbères. Ce véritable pogrom est vertement critiqué par les historiens
maghrébins. Désormais, berbères et arabes seront irréconciliables, et les Hadaris (citadins
arabophones), jusque là épargnés par la question, sont sommés de choisir leur camps. Moulay
Slimane parcours la moitié du pays en tous sens pour étouffer les contestations, arrivé dans le
Houz, il parvient à se réconcilier les Rehamna et citadins Marrakchis. C’est alors qu’il
apprend le repli félon des Abids sur Meknès et le soulèvement des Oudaya dans une Fès
assiégée par les berbères. Ils mettent le Mellah juif à sac et s’y livrent à des actes d’une rare
violence. Ils dérobent les marchandises, sans épargner celles de la bonne société musulmane,
ce qui ajoute naturellement à leur réprobation.
La révolution… et la réaction
Les notables tiennent conseil, sous la pression populaire, ils optent pour le parti berbère des
qaids des Idrasen et des Zemmour (Ou Aziz et El-Ghazi). Contre les ravages des Oudayas ils
soutiennent la motion d’un certain Benslimane et repoussent Moulay Ali, Khalifa et prince
héritier, et élisent Moulay Brahim Ben Yazid, neveu du Sultan, à l’Emirat des Croyants. En
1819, l’armée berbère, devenue garde prétorienne de l’anti-sultan, évacue Fès comme
convenu, mais c’est pour mieux se jeter sur Tetouan, la rivale du nord, où d’autres pogroms
s’abattent sur le Mellah. Informé de la félonie de son neveu, Moulay Slimane se précipite à
Rabat, puis dans le Gharb, avant d’apprendre que, terrorisé à l’idée de l’affronter, Ben
Yazid, Benslimane et les berbères se sont repliés à Fès. C’est la course poursuite, et les deux
troupes se rencontrent à la porte de la capitale, au « Pont du Sebou ». Ben Yazid se replie en
ville tandis que Moulay Slimane occupe Fès Jdid et laisse aux Oudayas la charge du siège. Le
Sultan décide de récupérer Tetouan, et lance ses généraux à son assaut. Devant l’enlisement
d’un double siège, Moulay Slimane, convaincu de la faiblesse de son fils Moulay Ali qui s’est
soumis sans coup férir au coup d’Etat de Benslimane, se résout à appeler Moulay
Abderrahmane ben Hicham, le fils de son ancien rival, qu’il a nommé chef de sa famille au
Tafilalt, et qui siége comme Wali du sud-ouest, à Essaouira.
L’isolement des derniers mois :
En 1820, le Sultan et son neveu signent un accord secret qui stipule peut être déjà le lègue de
l’Emirat. Moulay Abderrahmane est le fils que Moulay Slimane n’a jamais eu : droit, pieux,
courageux, modeste et sans son soutien, le Sultan n’aurait sans doute pas pu reprendre les
villes rebelles. Il lui délègue en tout cas la Vice-Royauté de Fès dont le jeune prince obtient
rapidement la rédition. En 1821, accordant son pardon à une Tétouan repentante, Moulay
Slimane descend à Marrakech soumettre la tribu arabe Cherarda de Chichaoua. Abandonné
par ses troupes, il est capturé et à nouveau reconduit sain et sauf à Marrakech, mais sa
puissance et son prestige se sont définitivement évaporés ! Au cours de l’année qui suit, le
pays Haha est ravagé par les Sahraouies Ida Ou Blal avec la complicité des Chiadma de Safi