totalement restauré étant un des facteurs essentiels de la nouvelle politique. Elle met en place
une ambitieuse politique culturelle de diffusion de l'hispanisme et de l'enseignement de
l'espagnol dans le monde. Elle renforce ses liens économiques avec l'Amérique et réalise
enfin d'une façon moins rhétorique mais plus efficace, parce que plus ciblée et mieux définie,
des aspirations qui n'étaient qu'ébauchées autrefois de façon confuse. Avant d'envisager ces
nouvelles orientations en matière géopolitique, et de tenter de définir en quoi consiste le lien
qui unit l'Espagne et les pays latino-américains, il convient de préciser sommairement les
grandes déterminations qui ont marqué l'histoire mouvementée des relations ibéro-
américaines et de définir les concepts qui ont été utilisés pour en rendre compte.
2. L'Espagne qui est avec le Portugal la plus ancienne puissance coloniale européenne, s'est
vu contestée dès le XVIème siècle par les Hollandais, les Français et les Anglais la possession
de l'immense empire qu'elle avait découvert puis conquis à partir de 1492. Les Anglais
devinrent rapidement les principaux rivaux de la grande puissance maritime qu'était alors
l'Espagne ; ils recherchèrent systématiquement à étendre leur maîtrise des mers et à supplanter
les Français, éliminés définitivement d'Amérique du Nord en 1763. Les Espagnols, désormais
seuls face aux britanniques, se voient alors contraints, malgré une politique très prudente, à la
guerre et à la rénovation de l'alliance française dans le cadre des Pactes de Famille. Les
Espagnols alliés aux Français réussissent à vaincre le Royaume-Uni, victoire entérinée en
1783 par le traité de Versailles, permettant ainsi l'indépendance des treize colonies
britanniques. Mais le précédent fait tache d'huile dans les possessions espagnoles où les
criollos (blancs d'origine espagnole) écartés du pouvoir désirent secouer le joug de la
métropole. Les États-Unis et l'Angleterre les aident activement, et la sécession est inéluctable
à la suite du désastre de Trafalgar où les flottes espagnole et française sont défaites en 1805
par Nelson. Le blocus continental décidé par Napoléon, l'invasion consécutive du Portugal et
de l'Espagne par les armées impériales, la Guerre de l'Indépendance qui dure de 1808 à 1814,
les destructions provoquées à cette occasion et le marasme économique qui caractérise le
règne réactionnaire de Ferdinand VII(1814-1833), expliquent l'impossibilité de conserver les
colonies américaines qui deviennent indépendantes de fait. Sans flotte et sans argent,
l'Espagne est incapable de s'opposer aux mouvements des libertadores.
Contrairement à la Grande Bretagne qui avait rapidement reconnu l'indépendance des
États-Unis, l'Espagne ne se résout pas à renoncer à la reconquête de ses anciennes colonies
dont elle ne conserve que Cuba et Porto Rico en Amérique. Ce n'est qu'après la mort de
Ferdinand VII en 1833 que les premiers pas sont effectués en 1834, par Martínez de la Rosa,
Premier Ministre de l'époque. Libéral modéré, il prend l'initiative de consultations aboutissant
en 1836 à l'établissement d'un cadre légal qui permettra la reconnaissance des républiques
hispano-américaines. Celle-ci sera longue et laborieuse et se fera grâce à l'établissement de
traités de reconnaissance, paix et amitié. Le premier pays reconnu est le Mexique en 1836,
suivi par l'Équateur en 1841, le Venezuela en 1846, la Bolivie dont le traité ne sera ratifié
qu'en 1861, le Costa Rica en 1850 et le Nicaragua en 1851. Ce processus extrêmement lent au
départ s'accélère légèrement à partir de 1855 jusqu'à 1875, date du début de la Restauration
des Bourbons. Des relations sont établies avec la République Dominicaine en 1855,
l'Argentine en 1859 seulement, le Guatemala en 1863, le Salvador en 1865, le Pérou en 1879.
Le processus s'achève à la fin du siècle avec la reconnaissance du Paraguay en 1880, celle de
l'Uruguay en 1882 et de la Colombie en 1881. Le Honduras quant à lui n'est reconnu qu'en
1896. Quinze États américains entretiennent alors des relations diplomatiques avec l'Espagne,
sans compter le Brésil à partir de 1863. La reconnaissance de Cuba suit de très près la perte de
cette colonie en 1898, puisqu'elle a lieu dès 1903
. Le Panama détaché de la Colombie en
. Pour plus de détails voir l'article de Carlos PEREIRA CASTAÑARES, in Portugal, España
y América. Pasado y presente de un proyecto (S. XIX-XX), Hipólito de la Torre Coord.,