méthodes s’accordent sur un réchauffement au cours du 21ème siècle, qui s’accompagne d’une
baisse importante des précipitations estivales. Si le signe d'évolution des précipitations hivernal
n'est pas certain, les cumuls annuels baissent d’ici à 2100, de 11% en moyenne sur l'ensemble des
scénarios considérés.
Ces changements climatiques régionaux entraînent un assèchement prononcé des bassins
étudiés au cours du 21ème siècle, selon l’ensemble des modèles hydrologiques. Cet assèchement
se traduit par une baisse des nappes phréatiques, qui contribue à la baisse les débits. Nos analyses
indiquent ainsi une baisse de 150 m3/s du débit moyen de la Seine à son exutoire (Poses) entre le
temps présent et l'horizon 2100, soit 28% du débit moyen actuel. Les incertitudes autour de cette
valeur sont d’environ 50 m3/s, et proviennent d'abord des modèles climatiques, puis des modèles
hydrologiques. Cette baisse relative du débit est assez uniforme à l’échelle saisonnière, et se
répercute donc sur les hautes et les basses eaux. La réponse des valeurs extrêmes des débits est un
peu plus contrastée, puisque les débits des étiages les plus sévères
baisseraient fortement, alors que
les pointes de crue les plus rares
ne changeraient pas significativement. A cette exception près, tous
les changements ci-dessus, qu’ils concernent le climat régional ou ses conséquences hydrologiques,
sont robustes face aux incertitudes analysées.
Nous avons aussi étudié les conséquences du changement climatiques sur l’irrigation des
cultures. Les besoins en irrigation et leurs conséquences sur les débits et les niveaux des nappes
peuvent être simulés dans le bassin de la Seine grâce au modèle couplé STICS/MODCOU. Nous
avons pu montrer que le modèle agronomique STICS simule des doses d’irrigation assez réalistes
dans les régions irriguées, mais qu’il est insuffisant pour prédire les zones effectivement irriguées, qui
ne couvrent actuellement que 2.7% de la surface agricole utile. Les irrigations potentielles simulées
par STICS sous changement climatique ne peuvent donc pas être utilisées comme une image de
l’irrigation future.
L’augmentation relative des doses potentielles d’irrigation simulées par STICS – de 50 à 60%
selon les deux scénarios de changement climatique examinés – peut néanmoins être utilisée pour
modifier l’irrigation actuelle, sous l’hypothèse que les systèmes de cultures restent inchangés. La
question qui se pose alors est de savoir si cette demande en eau accrue pour l’irrigation reste
compatible avec les autres usages de l’eau. En d’autres termes, une augmentation des débits prélevés
en nappe à des fins d’irrigation (passant éventuellement par la création de nouveaux forages) ne risque-
t-elle pas de déprimer les formations aquifères et de limiter ainsi le débit de base des rivières ?
De fait, ces besoins supplémentaires pour l’irrigation s’ajouteront aux importants déficits
d’alimentation des nappes aquifères calculés sous changement climatique, et qui expliquent la
baisse des niveaux des nappes indiquée précédemment. Le recharge des nappes calculée par le
modèle hydrodynamique MODCOU dans le bassin de la Seine baisse de 1/3 en moyenne entre le
temps présent et l'horizon 2100, ce qui correspond à un déficit d'alimentation supérieur à 2500 Mm3/an,
et approche les volumes actuellement prélevés tous usages confondus
. Au vu des premiers résultats
acquis sur la Beauce, où l’irrigation est la plus intense, nous pouvons d’ores et déjà nous demander si
l’irrigation des grandes cultures restera viable au regard des autres usages de l’eau sur le bassin.
La sévérité des impacts simulés résulte de la conjonction du réchauffement et de la baisse des
précipitations annuelles. Celle-ci constitue un changement notable par rapport à d’autres analyses
(e.g. Ducharne et al., 2007 ; Dankers and Feyen, 2008) postulant une stabilité des cumuls annuels de
précipitation sous changement climatique, dans cette zone de transition entre l’Europe du Nord, où les
précipitations annuelles devraient augmenter, et celles du Sud, où elles devraient diminuer.
L’évolution des précipitations est certainement l’élément le plus incertain des projections du
changement climatique, mais la baisse des précipitations annuelles que nous anticipons dans les
bassins de la Seine et de la Somme représente la meilleure projection actuellement disponible, car
convergente pour de nombreux scénarios de changement climatique correspondant à l’état de l’art
(IPCC, 2007), et pour deux méthodes de régionalisation totalement différentes mais validées en climat
récent sur le domaine.
Débit mensuel minimal annuel de fréquence quinquennale (ayant une probabilité 1/5 chaque année de
ne pas être sous-passé, et noté QMNA5)
Débit journalier maximal annuel de fréquence décennale (ayant une probabilité 1/10 chaque année
d’être surpassé, et noté QJXA10)
Prélèvements globaux de 3025 Mm3 dans le bassin de la Seine en 2001 pour les usages domestiques,
industriels et agricoles , dont 60 % en eaux de surface et 40% en eaux souterraines (source : Agence de l’Eau
Seine-Normandie)