
Robert Lodimus :
M. Gérard Pierre Charles, dans un discours prononcé au Kremlin le 14 février
1975, au cours du déjeuner offert en l'honneur du Premier Ministre
britannique, M. Harold Wilson, le président Brejnev déclarait:
« Les peuples du monde espèrent que la détente internationale se traduira aussi vite que
possible par des actes concrets qui contribueront à améliorer la vie de millions de gens.
Ralentissement de la course aux armements, limitation des préparatifs militaires des
États et réduction des dépenses militaires et extension de la coopération économique
pacifique et de toutes autres formes de coopération entre eux. Nous pensons
qu'aujourd'hui, alors que de nombreux pays occidentaux se heurtent à des difficultés
économiques sérieuses, progresser dans ce domaine, aux yeux de l'opinion publique,
devient une tâche encore plus urgente. »
Mais, selon ce que nous constatons, le centre ne fait aucun effort pour
faciliter l’amélioration des conditions de l'existence humaine au niveau de la
périphérie. Finalement, il revient aux peuples des pays en voie de
développement de se donner les moyens d'atteindre un niveau de
développement économique qui se situerait, au moins, dans les normes de
la décence sociale. En Haïti, comment cela pourrait-il se faire?
Gérard Pierre Charles:
1975 se situe dans une époque qui a un sens historique. C'est l'époque où
le Tiers Monde avait une très grande place dans l'histoire de la planète,
parce qu'il existait un monde socialiste puissant. Époque où l'affirmation du
Tiers Monde comme puissance, comme espace de pouvoir mondial se
manifestait par la crise du pétrole. En 1973, comme vous le savez, les prix
du pétrole ont augmenté, passant de 3 à 12 dollars le baril. Le Tiers Monde
se trouvait avec une très grande capacité d'influer sur les processus
internationaux. C'est le moment où, par exemple, le Vénézuela, le Mexique
sont parvenus à des niveaux de ressources financières extraordinaires. C'est
le moment aussi où la dette de ces pays a commencé à augmenter de façon
exagérée sous l'effet des grandes illusions créées par la hausse du prix du
pétrole. C'est encore l'époque où l'Union Soviétique a commencé à perdre
son hégémonie du point de vue technologique et du point de vue de
l'accumulation de capital à l'échelle mondiale. Dans une volée d'illusions,
beaucoup de peuples parlaient d'un "nouvel ordre économique