Seance_3

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Séance 3.
Les années 1920 : universalisme ou régionalisme.
Restauration d’un système européen libéral ?
Universalisme de la SDN ou régionalisme européen ?
Dans quelle mesure a-t-on voulu et réussi à fonder un système européen après 1914 ?
Le règlement de 1919 avait été fondé sur les décisions de Wilson : la démocratie libérale
comme horizon de la politique internationale. Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ne
fut que partiellement respecté. Les vaincus n’ont pas accepté le règlement.
Devant l’échec de l’universalisme moralisateur de Wilson, on a tenté de reconstruire un
système international européen fondé sur le régionalisme.
I) Les défauts du règlement de 1919 et l’échec du wilsonisme.
Les Etats-Unis ont refusé de ratifier les traités de 1919. Wilson n’a pas pu assouplir le traité.
Le Sénat a refusé de ratifier le Traité de Versailles et le traité de garantie envers la France. La
Grande-Bretagne a aussi abandonné son traité de garantie.
Les Etats-Unis ne sont plus isolationnistes mais unilatéralistes. En 1921, les Etats-Unis
concluent un traité de paix particulier avec l’Allemagne. En 1926, ils concluent des accords
de remboursement avec la France et la Grande-Bretagne qui font quelques concessions. Les
Etats-Unis vont utiliser l’arme de pression que sont les accords de remboursement des dettes
pour pousser la France à réduire son armement.
Les Etats-Unis élèvent leur droit de douanes. En 1921, a lieu une conférence sur la question
du Pacifique et du désarmement naval. À la conférence de Washington, on reconnaît la parité
navale pour les Etats-Unis avec la Grande-Bretagne. C’est le point de départ de la relation
spéciale Washington-Londres. Cet accord voit le triomphe de la doctrine de la porte ouverte :
libre accès du marché chinois pour le commerce extérieur.
Dans l’ordre d’après-guerre, les Etats-Unis prennent ce qui les intéressent sans donner de
garanties à ses anciens alliés. La Grande-Bretagne va se rallier aux positions américaines et
administrer l’Europe avec les Etats-Unis. La Grande-Bretagne adopte clairement l’atlantisme
et s’appuie surtout sur l’Empire.
En Russie, il y avait eu une tentative des alliés de reconstruire un front oriental. Après
l’armistice, les interventions alliées continuent mais pour renverser le régime de Lénine. Mais
Wilson estime que les Russes sont libres de choisir leur système politique. La tentative de
réconcilier les factions échouera de toute façon au final et le Traité de Versailles se négocie
sans elle.
En mars 1919, avec la révolution spartakiste en Allemagne, l’arrivé au pouvoir des
communistes en Hongrie, les Alliés se retirent de la Russie. Ils établissent un cordon sanitaire
avec les pays voisins de la Russie pour qu’ils ne cèdent pas à celle-ci. Mais en 1920, les
Polonais attaquent la Russie pour prendre le contrôle de l’Ukraine. L’armée rouge contre-
attaque et arrive aux portes de Varsovie. En France, Alexandre Millerand prend l’affaire au
sérieux et aide les Polonais par l’envoi de matériel militaire ce qui permet à la Pologne
d’échapper à la défaite. Paris organise ensuite une vaste coalition regroupant les blancs des
pays voisins de la Russie pour établir un gouvernement russe qui reprendrait les liens d’avantguerre avec la France. Au final, les blancs sont battus en 1920. La Grande-Bretagne
s’accommode de Lénine et en mars 1921, la Pologne conclut avec la Russie la paix de Riga.
La France reconnaît le régime soviétique en 1924.
L’Europe de Versailles n’est pas fondée sur un antisoviétisme mais sur une défensive
prudente face à la Russie bolchevique. Wilson pense qu’en commerçant avec la Russie on
organisera de l’intérieur la libéralisation du régime. Lorsque Edouard Herriot reconnaît la
Russie, il pense pouvoir réintroduire celle-ci dans un système européen pour l’utiliser contre
l’Allemagne.
En août 1920, on conclut avec la Turquie le Traité de Sèvres. Elle perd ses derniers territoires
en Europe et tout le Moyen-Orient. Syrie et Liban deviennent des protectorats français. Iran et
Irak deviennent des mandats britanniques de la SDN. Les mandats doivent préparer les
peuples vers l’indépendance le moment venu. La Turquie doit accepter la création d’un Etat
kurde et d’un Etat arménien. Les Anglais et les Français occupent les détroits et Istanbul et
contrôlent les finances. C’est un mélange de wilsonisme et d’impérialisme franco-anglais. La
grande bénéficiaire c’est la Grande-Bretagne alliée à la Grèce. La France conclut une alliance
en 1921 avec Kemal qui est l’adversaire du Sultan. Les Alliés négocient avec Kemal en 1923
un accord qui est plus favorable pour les Turcs que le Traité de Sèvres. Le pays retrouve sa
pleine souveraineté (occupation et contrôle disparaissant).
Les minorités ne bénéficient pas tous du principe du droits des peuples à disposer d’eux
mêmes car d’une part des considérations géopolitiques sont intervenues, d’autre part dans
certaines régions les populations sont tellement mélangées qu’il est difficile de tracer une
frontière qui satisfasse tout le monde. Lors de la création de la Hongrie, on laisse de côté 25%
des populations hongroises dans d’autres pays. Dans la nouvelle Pologne, il y a 1 à 2 millions
d’allemands. Pour les minorités, les droits devaient être gardés par la SDN. Mais ce ne sont
que des droits individuels et non pas des droits collectifs.
La SDN n’a en fait qu’aucun pouvoir réel. Elle ne peut pas désigner l’agresseur tant qu’il n’y
a pas unanimité du conseil. Chaque nation peut conserver sa liberté d’action. Même si on se
met d’accord pour désigner l’agresseur, seules deviennent obligatoires les sanctions
économiques et financières. La SDN est plutôt un forum de discussion. En 1919 et 1924, les
Français ont essayé de donner à la SDN plus de contenu : un système d’arbitrage obligatoire.
Tout conflit devrait être porté devant la SDN et désigné un agresseur. En outre, tout pays qui
refuserait l’arbitrage serait désigné comme agresseur. L’intervention pourra être alors
militaire sous commandement de la SDN. C’est néanmoins le début d’une éducation
internationale (« l’esprit de Genève »). Pourtant, lla SDN n’a pas réglé un seul problème
important.
II) La tentative de la France de faire fonctionner à son profit le système de
Versailles et son échec (1920-1924).
Le malentendu fondamental entre la France et la Grande-Bretagne : la Grande-Bretagne pense
que la paix ne peut être maintenu qu’avec un retour à la prospérité économique de
l’Allemagne, la France souhaite des accords stratégiques contre l’Allemagne. Pour contrôler
l’Allemagne, les Français vont adopter des positions géopolitiques : une ferme application du
traité appuyée par la force (« la main au collet ») mais en limitant aussi cette fermeté à l’égard
de l’Allemagne pour ne pas froisser les Britanniques.
Poincaré décide ensuite de passer à l’action unilatérale en rompant les relations avec la
Grande-Bretagne. En 1923, les Français occupent la Ruhr. Les Allemands réagissent par la
résistance passive : les ouvriers ne travaillent plus. C’est un énorme conflit franco-allemand
qui a alimenté en Allemagne une ambiance nationaliste.
La France voulait obtenir un régime d’occupation permanente pour la Rhénanie et pousser à
la transformation de l’Allemagne en une vague confédération.
La France s’allie avec la Pologne en 1924.
Enfin l’opinion française s’est retournée sur la question de l’occupation de la Ruhr. En 1924,
le Carte des gauches bat la droite. Poincaré est remplacé par Herriot. Dès la conférence de
Londres de 1924, Paris renonce a ses projets mais obtient un règlement provisoire des dettes
la part de Berlin. C’est une victoire de la Grande-Bretagne. C’est la fin de la prédominance
française en Europe.
III)Les Accords de Locarno d’octobre
résurrection du concert européen.
de 1925 : sécurité collective ou
Après la crise de la Ruhr, on ressort un projet de 1921 : un pacte régional ouest-européen
incluant l’Allemagne et reposant sur la notion de sécurité collective. La sécurité collective
reposait sur des traités tournés contre l’adversaire potentiel avant 1914. En 1925, il y a
changement : c’est la sécurité avec l’adversaire. Les Accords de Locarno incluent
l’Allemagne. Un tel pacte mettrait la Grande-Bretagne en position d’arbitre sans l’engager en
Europe de l’Est. Londres accepte néanmoins de s’engager à l’Europe de l’Ouest, c’était le
seul moyen de dépasser l’antagonisme franco-allemand.
L’Allemagne, la France, la Belgique s’engagent à respecter leurs frontières communes.
L’Italie et la Grande-Bretagne garantissent le pacte rhénan en promettant une intervention
contre les pays qui auraient violé les frontières occidentales. Les frontières orientales ne sont
pas évoquées. Si l’opinion allemande peut accepter le statu quo à l’ouest, c’est plus dur à
l’est. Locarno a été possible car Briand et Stresemann se sont ralliés à l’idée anglaise.
L’idée de sécurité collective devenait de plus en plus populaire en France surtout à gauche où
on reprochait à Poincaré sa politique d’avant-guerre. Briand avait compris que si on rejetait
l’Allemagne, on risquait d’abord que le République de Weimar soit remplacé par une
restauration royale ; ensuite, l’Allemagne se serait alliée à la Russie.
Si la République allemande accepte les valeurs libérales, elle ne renonce pas à une révision
pour rétablir la situation d’avant-guerre. En 1921, l’Allemagne conclut des accords avec
l’URSS. À Locarno, Stresemann obtient l’entrée de l’Allemagne dans la société des nations.
Locarno est nouveau puisque c’est le premier traité de sécurité collective incluant l’ennemi
virtuel mais il présente aussi le retour à un équilibre européen de type classique. Les accords
de Locarno rétablissent un semblant d’ordre européen ainsi que les concertations entre les
puissances.
IV)1925-1930 : vers un ensemble européen régional à côté des Etats-Unis et de
l’URSS ?
Les Accords de Locarno ont donné lieu au « locarnisme » ? Sur le plan politique, c’est l’esprit
de la concertation qui se développe à Genève.
Tout le monde est bien conscient que l’enjeu est la consolidation de l’Allemagne. Il y a une
orientation politique générale vers la démocratie libérale après 1919.
Dans le cas de Locarno, on va régler des problèmes hérités de Versailles : l’occupation de la
Rhénanie et les réparations. La Rhénanie est évacuée dès 1930 et non pas en 1935 comme
prévu à l’origine, en échange l’Allemagne a accepté un plan provisoire de payement
rééchelonné jusqu’en 1988.
On a essayé de régler le problème de la Sarre. Briand et Stresemann ont aussi envisagé lors de
la conférence de Touari de réviser la frontière germano-polonaise (corridor de Dantzig).
L’idée de Stresemann est d’aider économiquement la Pologne en échange des territoires
allemands. (Le Traité de Versailles autorise les révisions de frontières.)
Dans les années 1920, l’Europe connaît une période de prospérité économique qui facilite la
détente internationale. À partir de 1927, les gouvernements européens concluent des traités de
commerce. En 1926, on constitue un cartel international de l’acier. On voit apparaître un
espace économique européen.
On développe aussi un projet politique européen. On voit apparaître la notion d’intérêt
commun de l’Europe. Il s’agit de réaffirmer l’Europe face aux Etats-Unis et à l’URSS.
En 1930, le plan européen de Briand est le premier grand projet de l’histoire de l’union
européenne : zone de libre-échange et organe de consultation politique permanente avec tous
les membres. L’idée de Briand est de dépasser les révisionnismes, de contrebalancer la
domination américaine et de résister à l’URSS.
La Grande-Bretagne n’est pas intéressée. L’Allemagne a parfaitement compris que c’est un
projet qui vise à la limiter.
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