Les stages mettent ainsi les étudiants en concurrence – concurrence d’autant plus exacerbée que le taux
de chômage est important comme aujourd’hui – les uns par rapport aux autres. La concurrence est
l’arme des capitalistes pour diviser les travailleurs et les empêcher de s’unir comme classe contre les
intérêts du capital. Le syndicat doit donc s’opposer aux stages comme à tous les dispositifs qui exacerbent
la concurrence entre travailleurs. Il défend les intérêts collectifs des étudiants.
Enfin, les stages, en se substituant à de vrais emplois, accroissent le taux de chômage.
3. Il faut revendiquer la suppression des stages dans les cursus, et non leur
‘encadrement’.
A– Il serait schizophrène de lutter simultanément pour un ‘encadrement’ des stages dans les cursus où ils
existent déjà, et contre leur introduction là où ils n’existent pas encore. En effet, les étudiants privés de
stages sont – à niveaux de connaissance égaux – défavorisés sur le marché du travail. Nous ne défendrions
pas les intérêts des étudiants en essayant de préserver à tout prix certaines filières des stages, sans s’attaquer
la logique concurrentielle des stages.
B– Une autre approche pourrait être d’accepter les stages dans tous les cursus à condition qu’ils soient
‘encadrés’.
On ne peut pas, comme l’UNEF, réclamer la mise en place d’une charte pédagogique des stages De façon
générale, il faut s’opposer à la revendication d’un meilleur encadrement pédagogique : les patrons n’ont rien
à nous transmettre. Si nous combattons l’emprise du patronat sur le contenu des formations dispensées à
l’université, ce n’est pas pour supplier le patronat de nous transmettre des connaissances à l’extérieur de
l’université.
C– Que nous reste-t-il à revendiquer en dehors de l’interdiction des stages dans les cursus ? On pourrait
penser à réclamer de meilleures conditions de travail et de meilleures rémunérations pour les stagiaires.
Certains avancent que si nous obtenions satisfaction sur ces revendications, les patrons n’auraient alors plus
aucun intérêt à embaucher des stagiaires. Ainsi, nous obtiendrions satisfaction sur notre revendication
commune : la disparition des stages non par interdiction légale mais par manque d’intérêt pour les
capitalistes.
Ce raisonnement est tout à fait juste, mais on doit se poser la question suivante : pensons-nous qu’il soit plus
facile de faire disparaître les stages de cette façon là ? Nous répondons sans ambiguïté : NON. En effet, en
refusant de mettre en avant l’interdiction des stages, nous nous plaçons dans une logique concurrentielle –
où chacun essaie de valoriser mieux que son voisin son ‘capital humain’ – qui rentre en contradiction avec
une logique militante qui vise à conquérir des droits collectifs. Ainsi, même si ce raisonnement tient la route
abstraitement, il ne peut se réaliser concrètement.
L’histoire du mouvement ouvrier confirme le caractère illusoire d’un tel raisonnement. A-t-on obtenu
l’interdiction du travail des enfants en le rendant plus coûteux ?
En outre, si le but de la rémunération des stages est d’élever le niveau de vie des étudiants (en contrepartie
d’un travail exploité), nous préférons mobiliser notre énergie militante d’une autre façon pour élever ce
niveau de vie : en militant pour un système d’aide sociale inconditionnel fondé sur la justice sociale.
D– Il faut avoir conscience qu’en refusant de mettre en avant la revendication d’interdiction des stages, nous
accepterions l’existence d’une forme nouvelle de travail précaire, en mettant en avant des revendications qui
visent à ‘humaniser’ le travail précaire. Revendications qui sont soit dangereuses – comme la revendication
d’une charte pédagogique des stages –, soit vaines – comme la revendication d’un alignement progressif des
stages sur les contrats de travail les plus favorables pour les salariés.