Politiques de gestion et politiques réglementaires visant à améliorer les conditions d’utilisation des médicaments Document pour les participants POLITIQUES DE GESTION ET POLITIQUES RÉGLEMENTAIRES Politiques de gestion et politiques réglementaires visant à améliorer les conditions d’utilisation des médicaments DOCUMENT POUR LES PARTICIPANTS OBJET ET CONTENU Les méthodes d’éducation visant à promouvoir un usage des médicaments qui respecte à la fois les conditions d’efficacité, de sécurité et de rentabilité économique présentent beaucoup d’avantages et sont souvent couronnées de succès. Toutefois, il arrive que les décideurs politiques, les responsables de la santé ou d’autres officiels soient convaincus que le recours aux seuls programmes d’éducation ne permet pas d’atteindre le résultat souhaité. Les stratégies de gestion et de type réglementaires peuvent constituer un complément important aux approches éducatives. Les politiques de gestion cherchent à structurer l’information, le flux d’information et le processus de décision dans le but de parvenir à une utilisation plus rentable (costeffective) des ressources pharmaceutiques. Leur mise en œuvre implique, à certains moments, la participation des décideurs compétents. Les politiques de gestion peuvent demander beaucoup d’efforts, mais elles sont aussi les interventions dotées des plus fortes probabilités de succès et des plus longues durées de vie. Les politiques réglementaires ont généralement pour but d’économiser de l’argent ou de prévenir un mauvais usage des médicaments. Les mesures réglementaires tendent à être précises et plutôt rigides. Parce que les possibilités d’ajustement sont limitées une fois l’action engagée, il est important de bien concevoir et de bien tester les politiques réglementaires envisagées avant de les appliquer à grande échelle. Elles peuvent, en effet, avoir des effets indésirables. Il convient donc d’attacher suffisamment d’importance à la façon dont on planifiera, dont on mettra en œuvre et dont on suivra les effets attendus mais aussi les effets indésirables liés aux mesures réglementaires. OBJECTIFS Ce module permettra de développer votre capacité à : 1. Identifier et comprendre les différentes politiques de gestion et politiques réglementaires qui pourraient être utilisées pour améliorer les conditions d’usage des médicaments. 2. Choisir, dans le but de les tester et peut-être de les mettre en œuvre, les politiques qui semblent les plus adaptées aux besoins, aux circonstances et aux ressources de votre programme, en considérant l’importance de l’impact espéré, les chances de succès, la faisabilité politique et culturelle, la faisabilité technique et les coûts 1 POLITIQUES DE GESTION ET POLITIQUES RÉGLEMENTAIRES (faisabilité économique). 3. Développer et mettre en œuvre les politiques choisies de la façon la plus efficace possible au vu des contraintes de votre programme et du contexte. PRÉPARATION Lire les notes de cours. LECTURES COMPLÉMENTAIRES Managing Drug Supply 2e édition, Chapitre 31, "Promoting Rational Prescribing," 1996, pp. 472-479. RÉFÉRENCES SUR INTERNET http://www.who.ch/programmes/dap/icium/posters/4A1_Text.html http://www.who.ch/programmes/dap/icium/posters/4A4_Text.html http://www.who.ch/programmes/dap/icium/posters/4B1_Text.html http://www.who.ch/programmes/dap/icium/posters/4B2_Text.html 2 POLITIQUES DE GESTION ET POLITIQUES RÉGLEMENTAIRES NOTES DE COURS A - GENERALITES Les méthodes d’éducation visant à promouvoir un usage des médicaments qui respecte à la fois les conditions d’efficacité, de sécurité et de rentabilité économique présentent beaucoup d’avantages et sont souvent couronnées de succès. Toutefois, il peut arriver que les responsables de la santé et des programmes publics sur les médicaments essentiels soient convaincus que le recours aux seuls programmes d’éducation ne permette pas d’atteindre le résultat souhaité. Les politiques de gestion et politiques réglementaires peuvent constituer un complément important aux approches éducatives. B – POLITIQUES DE GESTION Les politiques de gestion cherchent à structurer l’information, le flux d’information et le processus de décision dans le but de parvenir à une utilisation plus rentable (costeffective) des ressources pharmaceutiques. Leur mise en œuvre implique, à certains moments du processus, la participation des décideurs compétents. TABLEAU 1 Exemples de politiques de gestion qui permettent de structurer les processus de décisions dans le but d’améliorer les conditions d’utilisation des médicaments Sélection et approvisionnement • Listes de médicaments essentiels / formulaires nationaux • Evaluation fondée sur la morbidité • Examen des approvisionnements en médicaments et retour d’information vers les décideurs Distribution • Processus d’examen des circuits de distribution • Systèmes de commandes fixes (kit supply) Prescription et dispensation • Formulaires d’ordonnances structurées • Recommandations en matière de diagnostic et de traitements de référence • Ordonnances à arrêt automatique • Emballages correspondant à une durée standard de traitement • Etiquetages adaptés • Audits et retours d’information vers les professionnels de santé • Consultations ou justificatifs obligatoires Financement • Fixation du prix des médicaments en fonction du service médical rendu • Participation des patients aux frais ($0,20 par prescription, par exemple) 3 POLITIQUES DE GESTION ET POLITIQUES RÉGLEMENTAIRES Le Tableau 1 dresse la liste des politiques de gestion envisageables pour améliorer les conditions d’usage des médicaments. Le fait qu’une mesure soit présente dans cette liste ne signifie pas forcément qu’elle soit recommandée ou qu’elle ait montré son efficacité pour améliorer les conditions d’usage des médicaments. On constate par exemple que les fonds publics pour le remboursement des médicaments ajustent souvent les prix des médicaments en fonction du service médical rendu (d’où un prix bas pour les antipaludéens, par exemple) ; cette stratégie est donc présentée dans le Tableau 1. 1. Sélection et approvisionnement Les listes de médicaments essentiels (LME) peuvent être utilisées pour fixer les priorités en matière d’approvisionnement en médicaments pour un pays ou un programme qui établit et met en pratique ce type de liste. Cette liste devrait donc être constituée des médicaments qui ont montré qu’ils étaient les plus sûrs, les plus efficaces, les plus adaptés localement et les plus économiques. Dans la mesure où le mauvais usage des médicaments apparaît comme une conséquence involontaire d’une évaluation insuffisante des besoins en médicaments, leurs conditions d’utilisation pourraient être améliorées par une meilleure prévision des besoins. Une approche de ces derniers fondée sur une estimation de la morbidité et des traitements standard pourrait améliorer la situation. Souvent, les médecins et les autres professionnels de santé responsables n’accordent que peu d’intérêt à la question des approvisionnements en médicaments (qu’il s’agisse des approvisionnements en amont ou à l’extérieur du pays) alors qu’ils sont les mieux à même de porter un jugement sur l’efficacité et la rentabilité de certains choix spécifiques. Le résultat de ceci est que les personnels concernés qui agissent en étant insuffisamment informés ou avec des préjugés pourraient prendre de mauvaises décisions en matière d’approvisionnement. L’examen systématique des bordereaux de commandes de médicaments en fonction des dépenses par classe thérapeutique et des dépenses à l’intérieur de chaque classe, et la transmission de cette information aux décideurs compétents à montré son efficacité en matière d’amélioration des approvisionnements en médicaments, l’amélioration étant évaluée par le bénéfice thérapeutique sous contrainte d’un budget pharmaceutique limité. 2. Distribution De la même manière, l’analyse rétrospective des médicaments distribués dans différents établissements peut fournir des informations intéressantes. On peut citer l’exemple d’un petit pays où les commandes de médicaments de chaque district sont régulièrement examinées. Les moyennes de chaque district sont comparées entre elles et lorsque des écarts significatifs sont constatés, les districts concernés en sont informés. Cette politique a permis de réduire la surconsommation observée dans 4 POLITIQUES DE GESTION ET POLITIQUES RÉGLEMENTAIRES certains districts de médicaments comme les vitamines B injectables. On a utilisé par le passé des systèmes de commandes fixes (kit supply) dans le but de garantir la distribution de certains médicaments dans des structures sanitaires éloignées. Bien que ces commandes entraînent presque toujours des phénomènes de pénuries et de sur-stockage, il arrive néanmoins que l’on parvienne de cette manière à rendre le coût des médicaments compétitif et à améliorer la sécurité sanitaire. Lorsque la mise en place de ce système de commandes fixes est accompagnée de formations et de recommandations en matière de traitements de référence, il arrive que l’on observe une amélioration des pratiques de prescription. Cependant, ce système de commandes fixes est plus adapté aux situations d’urgence qu’à la fourniture de médicaments à long terme. (Voir le Chapitre 27 de Managing Drug Supply, 2e édition, p. 408 à 418.) 3. Prescription et dispensation Un certain nombre de techniques de gestion ciblent directement les pratiques de prescription et de dispensation des médicaments. La technique qui consiste à développer et à mettre en œuvre des traitements de référence constitue peut-être la technique la plus efficace. Les traitements de référence, en particulier lorsqu’ils se concentrent sur une sélection de problèmes de santé prioritaires, peuvent permettre de faire la synthèse entre la liste des médicaments essentiels et la formation (initiale et continue), le suivi et la supervision des personnels de santé. Les recommandations en matière de traitements standard sont souvent délivrées dans le cadre des formations au bon diagnostic. Ces traitements de références peuvent également être utilisés dans le cadre des examens universitaires, des évaluations sur la qualité des soins et des audits de performance. Avec les formulaires d’ordonnances structurées, les prescripteurs ont à leur disposition une feuille d’ordonnance sur laquelle est apposée une liste pré-établie de médicaments prioritaires et de posologies usuelles pour un certain nombre de médicaments clés (les antibiotiques, généralement). Il a été montré aux État-Unis que ces ordonnances amélioraient la rentabilité économique des pratiques de prescription chez les patients hospitalisés. Cependant, ces formulaires d’ordonnances structurées peuvent aussi bien être utilisés en ambulatoire qu’à l’hôpital. Les ordonnances à arrêt automatique peuvent s’avérer particulièrement utiles en milieu hospitalier. Dans un tel système, la prescription d’un médicament s’accompagne d’une révision périodique automatique. Si le médicament n’est pas prescrit à nouveau, il est arrêté. Dans certaines maisons de retraites médicalisées, par exemple, il peut arriver que des sédatifs soient sur-utilisés. Il serait donc tout à fait légitime dans ce cas de réexaminer régulièrement les prescriptions. Il arrive aussi que certains médicaments (diazepam, par exemple) perdent de leur efficacité au cours du temps. Leur utilisation continue devrait donc être découragée. La constitution d’un système d’emballage correspondant à une durée standard de traitement favorise l’adhésion des prescripteurs à la durée moyenne de traitement 5 POLITIQUES DE GESTION ET POLITIQUES RÉGLEMENTAIRES jugée la plus rentable pour les médicaments les plus couramment utilisés – et avec un peu de chance permettra d’éviter les phénomènes de surdosage et de sous-dosage. Un tel système augmente aussi la probabilité que le traitement arrive à son terme. Il facilite également la dispensation des produits au patient. Lorsque les étiquetages ou les notices des médicaments délivrés aux patients sont absents, incomplets ou illisibles, on réduit la probabilité que les médicaments soient correctement utilisés une fois qu’ils sont entre les mains du patient. Il peut s’avérer très important de pouvoir disposer d’étiquetages adaptés, par exemple en ayant la possibilité d’utiliser des codes couleur ou des symboles. Il peut également être nécessaire de prévoir des étiquetages ou des notices pour personnes illettrées afin que les personnels de santé en zone rurale puissent délivrer des médicaments, ne serait-ce qu’en nombre réduit. Il a été montré que l’audit suivi d’un retour d’information vers les professionnels de santé est une technique très efficace pour changer les comportements de prescription. « L’audit » consiste en une analyse systématique des pratiques de prescription individuelles. Il peut révéler, par exemple, qu’un certain prescripteur préfère utiliser le chloramphenicol à tout autre antibiotique, alors que d’autres utilisent principalement les ampicilines ou le cotrimoxazole. Cette information est retransmise aux professionnels de santé. Comme d’habitude, les analyses fondées sur les pratiques individuelles et leurs comparaisons avec les pratiques des pairs sont des stimulants efficaces au changement. Le processus d’audit et de retour d’information peut s’avérer coûteux, mais pour un hôpital qui consomme de grandes quantités de médicaments, il peut être rentable, c’est-à-dire qu’il peut générer plus d’économies que de dépenses liées à sa mise en œuvre. 6 POLITIQUES DE GESTION ET POLITIQUES RÉGLEMENTAIRES Etude de cas en Ouganda En Ouganda, le paludisme et les maladies infectieuses sont une des premières causes de mortalité et de morbidité, mais les unités de santé y sont confrontées à une pénurie d’antipaludéens et d’agents antimicrobiens. On pense que les mauvaises prescriptions en sont la principale cause. On a mis en place une intervention qui visait à : (1) réduire l’utilisation des injections de chloroquine et à augmenter l’utilisation de chloroquine orale dans les cas de paludisme non compliqué ; (2) réduire l’utilisation d’antimicrobiens dans le traitement du paludisme et des infections banales ; (3) réduire l’utilisation concomitante de plusieurs agents antimicrobiens pour un seul patient ; (4) encourager le recours aux génériques dans les prescriptions. Une étude a été menée dans six hôpitaux (sélectionnés pour leur qualité de centre référent ou de centre de formation au niveau régional pour différents cadres médicaux) et à Mulago, le centre hospitalier référent national et universitaire. Les centres ont été distribués de façon aléatoire afin de pouvoir les contrôler et les étudier. A chaque phase de l’étude, on a recueilli et analysé cent prescriptions de chaque hôpital. Fig 1. Recours aux injections de chloroquine Séries 1 % Séries 2 Séries 3 Fig 1. Recours aux comprimés de chloroquine Séries 1 Séries 2 Séries 3 Hôpital 7 Un retour d’information concernant les résultats de la première étude a été réalisé dans trois hôpitaux participants sous la forme d’un entretien individuel avec les prescripteurs. Les résultats concernant l’hôpital de Mulago ont été présentés au directeur qui a ensuite fait passer une circulaire, ce qui constitue une réponse réglementaire. Une deuxième étude a été menée trois mois plus tard et, de la même façon, un retour d’information a été opéré auprès de six hôpitaux régionaux. Encore trois mois plus tard, on a réalisé une évaluation auprès de la POLITIQUES DE GESTION ET POLITIQUES RÉGLEMENTAIRES totalité des sept hôpitaux participants. Les résultats de l'étude (Figures 1 et 2) montrent une diminution significative des prescriptions d’injections de chloroquine et, en parallèle, une augmentation des prescriptions de comprimés de chloroquine pour les cas de paludisme non compliqué dans les hôpitaux ayant participé à l’étude. On a également observé une diminution du recours aux agents antimicrobiens dans le traitement du paludisme. Au Centre Hospitalier Universitaire de Mulago, où le directeur avait opté pour une réponse administrative, l’impact positif sur les pratiques de prescription a été spectaculaire, mais de courte durée. Les auteurs de l’étude ont conclu qu’un retour d’information des résultats sous la forme d’un entretien individuel améliorait les prescriptions en ce qui concernait le traitement des cas de paludisme non compliqué mais que cela n’avait aucun impact sur les polyprescriptions. Une description plus détaillée de l’étude est disponible sur le site internet : (http://www.who.ch/programmes/dap/icium/posters/2C3_Text.html), Prescribing audit with feedback intervention in six regional hospitals and Mulago referral and teaching hospitals (Uganda). Ogwal-Okeng JW, Anokbonggo WW, Birungi H. Dans une autre étude menée au Népal, qui peut être consultée sur le site (http://www.who.ch/programmes/dap/icium/posters/2e3_txtf.html), des chercheurs ont évalué l’impact d’une supervision régulière des prescripteurs. Ils ont observé que cette stratégie permettait de réduire de façon significative le nombre d’injections et d’augmenter le temps de la consultation et le nombre de prescriptions respectant les protocoles (figures 3 et 4). Figure 3. Figure 4. Bien que cette méthode demande beaucoup d’efforts, cette stratégie peut être recommandée car elle est régulièrement couronnée de succès. Pour plus d’informations, reportez-vous à Managing Drug Supply, 2e édition p. 472-475. Si un hôpital dispose d’un comité du médicament, il s’agit alors d’une des méthodes 8 POLITIQUES DE GESTION ET POLITIQUES RÉGLEMENTAIRES que le comité pourrait adopter en vue d’améliorer les pratiques de prescription. Certains services de santé, en particulier les hôptaux, exigent que certains médicaments ne soient prescrits que dans le cadre de consultations spécialisées ou après que des éléments de justification ont été fournis. Les nouveaux antibiotiques, les médicaments anticancéreux et cardiaques relèvent souvent de ces listes. Un essai randomisé contrôlé destiné à tester l’impact des GDT avec ou sans formation associée et supervision sur la prescription a été conduit en Ouganda (Kafuko J, Zirabumuzale C, Bagenda D; 1994, UNICEF Ouganda). La qualité de la prescription, évaluée à partir du % de prescriptions conformes au Guide de diagnostic et de traitement (GDT) n’est améliorée que si cette distribution est accompagnée par une formation et une supervision. % de patients traités selon le GDT Impact de la formation et supervision sur l'observance du GDT en Ouganda 60% 50% 40% Après Avant 30% 20% 10% 0% Contrôle N=42 GDT GDT+F N=29 N=42 GDT+F+S N=14 F = Formation S = Supervision Politiques de gestion et politiques réglementaires 9 4. Financement et stratégies économiques Les stratégies économiques sont des stratégies de gestion qui utilisent les incitations économiques pour influer sur le processus de décision des prescripteurs et des patients de façon à ce qu’ils utilisent les médicaments de manière plus efficiente. Les professionnels peuvent être influencer par les budgets alloués ou des incitations financières et les patients par la participation qui leur est demandée. Les fonds de remboursement des médicaments ajustent parfois les prix des médicaments en fonction de leur impact sur la santé (des prix bas pour les antipaludéens et des prix plus élevés pour les médicaments contre la toux, par 9 POLITIQUES DE GESTION ET POLITIQUES RÉGLEMENTAIRES exemple). Ces mesures visent à inciter les patients à accepter des prescriptions de médicaments vitaux et essentiels, et à rendre moins attrayants les médicaments non essentiels. Bien que cette méthode semble avoir du sens, il existe peu d’éléments de preuve pour l’étayer et pour montrer qu’elle fonctionne réellement dans le contexte des soins de santé primaires. Malheureusement, beaucoup de systèmes de santé ont mis en place des incitations financières négatives qui conduisent les professionnels de santé et les patients à utiliser les médicaments irrationnellement. Quelques exemples sont discutés cidessous. La contribution des usagers peut avoir un impact sur l’utilisation des médicaments. Une étude avant-après des effets de différents systèmes de tarification sur la qualité de la prescription a été conduite dans une zone rurale du Népal (Holloway et al ; Health Policy and Planning. 2001 ; 16 (4) : 421-427). En 1992, les 3 districts de l’étude utilisaient la même tarification unique par prescription. En 1995, le district témoin utilisait toujours ce système, un district avait mis en place une tarification fixe par médicament (et non plus par ordonnance) et le dernier district utilisait un tarif pour les médicaments coûteux et un tarif plus faible pour les médicaments moins onéreux. Dans tous les cas, les tarifs utilisés couvraient le financement des traitements complets. On a pu montrer alors que la qualité des prescriptions s’améliorait nettement et que les coûts des prescriptions étaient plus faibles avec les deux systèmes de tarification fondés sur le nombre de médicaments par rapport au forfait unique par ordonnance. Tous les changements étaient statistiquement significatifs (p<0,025). Impact du changement tarifaire sur la polymédication et sur l’utilisation des vitamines % ordonnances avec vitamines Nbre moyen de médicaments/patient 4 30 3 20 2 10 1 0 0 tarif A tarif B 1992 tarif C tarif A 1995 tarif B tarif C 1992 1995 Région 1 => Tarif A : tarif fixe par ordonnance Région 2 => Tarif B : tarif unique pour tous les médicaments Région 3 => Tarif C : 2 tarifs pour les médicaments Politiques de gestion et politiques réglementaires 10 13 POLITIQUES DE GESTION ET POLITIQUES RÉGLEMENTAIRES Impact du changement tarifaire sur la prescription d’injections et d’antibiotiques % de prescriptions avec injection % de prescriptions avec antibiotique 25 20 15 10 5 0 80 60 40 20 0 tarif A tarif B tarif C tarif A 1992 1995 tarif B tarif C 1992 1995 Région 1 => Tarif A : tarif fixe par ordonnance Région 2 => Tarif B : tarif unique pour tous les médicaments Région 3 => Tarif C : 2 tarifs pour les médicaments Politiques de gestion et politiques réglementaires 14 Impact du changement tarifaire sur le suivi des GDT et sur le coût des médicaments prescrits Coût moyen des médicaments precsrits par patient % de prescriptions suivant le GDT 60 50 40 30 20 10 0 35 30 25 20 15 10 5 0 tarif A tarif B tarif C tarif A tarif B 1992 1992 1995 tarif C 1995 Région 1 => Tarif A : tarif fixe par ordonnance Région 2 => Tarif B : tarif unique pour tous les médicaments Région 3 => Tarif C : 2 tarifs pour les médicaments Politiques de gestion et politiques réglementaires 15 Une autre étude a été réalisée au Nigeria pour comparer les prescriptions et les soins aux patients dans des services de santé primaires appliquant ou non l’Initiative de 11 POLITIQUES DE GESTION ET POLITIQUES RÉGLEMENTAIRES Bamako (Scuzochukwu et al, HPP, 2002). Cette étude montre clairement que la disponibilité et l’utilisation des médicaments essentiels est bien plus importante dans les structures appliquant l’Initiative de Bamako, c'est-à-dire faisant payer l’intégralité des coûts de médicaments aux patients. Dans le même temps, l’utilisation des médicaments, en terme de nombre de produits, antibiotiques, injections étaient nettement moins rationnelle dans ces services appliquant l’Initiative de Bamako par rapport à ceux qui ne l’appliquait pas. Prescription au niveau des SSP avec et sans initiative de Bamako au Nigeria (Scuzochukwu et coll, coll, HPP, 2002) 15,3 % med LME indisponibles 35,4 21 % presc. sur LME 93 25,6 % presc. avec antibiotique 64,7 38 % presc. avec injection 72,8 2,1 5,3 Nbre méd./presc. 0 20 40 21 Bamako init. 60 80 100 12 non-Bamako init. Politiques de gestion et politiques réglementaires 16 De nombreuses études ont montré que les prescripteurs qui dispensent et vendent directement les traitements, prescrivent plus de médicaments et des médicaments plus chers que ceux qui ne le font pas. Une étude a été réalisée au Zimbabwe pour comparer la prescription et les soins aux patients entre des médecins dispensateurs et des médecins non-dispensateurs (Trap et al, HPP 2001 et ICIUM 2004). Cette étude montre clairement que les médecins dispensateurs passent moins de temps avec leurs patients pendant les consultations et prescrivent plus de médicaments, plus d’antibiotiques et plus d’injections. 12 POLITIQUES DE GESTION ET POLITIQUES RÉGLEMENTAIRES Prescribing by dispensing and nondispensing doctors in Zimbabwe Trap et al 2000 13 8.65 consultation time (mins) 48 % Px with antibiotics 9.5 % Px with injections 58 28.4 1.67 2.31 no.drug items/Px 0 10 dispensing doctors 20 30 40 50 60 70 non-dispensing doctors Managerial and Regulatory Strategies 17 Par conséquent, une réglementation qui peut être efficace (mais que de nombreux pays n’ont pas réussi à adopter) consiste à séparer les fonctions de prescription et de dispensation, c'est-à-dire interdire aux prescripteurs de vendre des médicaments. Ce ci a été fait en Corée et a entraîné une réduction modeste de l’utilisation des antibiotiques lors des infections virales (Parke et al, ICIUM 2004 http://www.icium.org). C - POLITIQUES RÉGLEMENTAIRES Les politiques réglementaires visent généralement à économiser de l’argent ou à prévenir un mauvais usage des médicaments. Elles impliquent un certain degré (parfois important) d’arbitraire. Elles tendent à être précises et plutôt rigides. Parce que les possibilités d’ajustement sont limitées une fois que les mesures réglementaires ont été lancées, il est important qu’elles soient bien conçues et bien testées avant leur mise en œuvre à plus grande échelle. Ces mesures réglementaires comportent toujours un risque d’effets externes indésirables, parmi lesquels : • Les réponses aux restrictions – Manipulation des données médicales – Création d’un marché noir – Bascule entre secteur public et secteur privé • Phénomènes de substitution – Les médicaments alternatifs peuvent être moins sûrs, moins appropriés sur un plan médical et plus coûteux – Les restrictions sur certains médicaments peuvent augmenter le recours à d’autres prestations 13 POLITIQUES DE GESTION ET POLITIQUES RÉGLEMENTAIRES TABLEAU 2 Les mesures réglementaires envisageables en matière de restriction des choix et des décisions dans le but d’améliorer l’utilisation des médicaments Les contrôles du marché : Interdiction des médicaments dangereux ou inefficaces. Restrictions sur le choix des produits. Inscription des médicaments en fonction des besoins médicaux. Contrôles de la distribution. Les contrôles de la prescription et de la dispensation : Restrictions de la distribution en fonction du niveau de soins délivrés. Restrictions sur qui peut prescrire ou délivrer les médicaments. Limites sur le nombre de médicaments différents par patient (la « règle des 3médicaments », par exemple). Limites sur les quantités prescrites pour chaque médicament (la « règle des 3 jours », par exemple). 1. Choix des médicaments Dans certains pays, comme en Norvège par exemple, les réglementations en vigueur n’exigent pas seulement qu’un médicament ait montré son innocuité et son efficacité, mais également qu’il ait fait la preuve de sa nécessité sur le plan médical. La notion de « besoin médical » implique généralement que le produit procure des améliorations thérapeutiques indéniables par rapport aux autres produits déjà commercialisés, et ceci à un prix raisonnable. Il se peut qu’une telle mesure ne soit pas envisageable à un niveau national mais qu’elle puisse être mise en œuvre dans le cadre d’un formulaire régional ou hospitalier. Dans certains pays, des médicaments ont été retirés du marché parce qu’ils étaient dangereux ou inefficaces. L’OMS a promu cette approche pour les médicaments antidiarrhéiques, (http://www.who.ch/programmes/dap/icium/posters/4A1_Text.html). L’OMS a distribué environ 15 000 exemplaires de son document de synthèse sur les médicaments antidiarrhéiques à l’aide de différents réseaux officiels et des ONG, s’inscrivant ainsi en porte-à-faux avec le contexte de couverture médiatique mondial et les activités de certains groupes ou individus. En 1994, l’OMS a étudié l’impact de ses actions sur les positions réglementaires nationales. Les chercheurs ont observé qu’au cours de la période de cinq ans 1989-1993, on a mené des actions réglementaires dans 16 pays et à 21 occasions différentes. La plupart des actions concernaient les médicaments antispasmodiques ; quelques-unes visaient à combattre les adsorbents, les médicaments antidiarrhéiques contenant des agents antimicrobiens ou les solutions de réhydratation pour adulte. Six pays ont engagé des actions contre des catégories importantes et 14 POLITIQUES DE GESTION ET POLITIQUES RÉGLEMENTAIRES hétérogènes de médicaments antidiarrhéiques. La plupart des actions ont eu lieu au cours des deux années ayant suivi la diffusion du document de synthèse de l’OMS. En revanche, on ne sait pas si les pratiques de prescription se sont réellement améliorées. 2. Contrôles de la distribution Les restrictions de la distribution en fonction du niveau de soins délivrés interdisent la distribution de certaines catégories de médicaments dans les établissements de santé où les personnels n’ont pas été suffisamment formés pour pouvoir les utiliser. Au Zimbabwe, par exemple, les médicaments faisant partie de la Liste des Médicaments Essentiels sont classés en catégories S, A, B et C, selon leur niveau d’utilisation [Figure 5]. 3. Contrôle de la prescription Dans le cas des restrictions de type niveau de prescription, la prescription de certains médicaments disponibles dans les établissements sanitaires est réservée aux médecins, et parfois même aux spécialistes. Il s’agit là d’une solution alternative à celle qui consiste à exiger des consultations spécialisées ou la fourniture d’éléments de justification pour le recours à certains médicaments. De la même façon on observe que les nouveaux antibiotiques, les médicaments anticancéreux et cardiaques, mais également certains médicaments de la sphère gastrointestinale relèvent souvent de cette catégorie. Un des effets pervers de cette approche est que des médecins généralistes ou spécialistes débordés rédigent et signent des ordonnances par avance au cas où ils ne seraient plus disponibles le jour où on les solliciterait pour cela. Cette pratique annule entièrement les effets positifs de cette stratégie. Les ordonnances à arrêt automatiques, déjà mentionnées en tant que politique de gestion, peuvent être utilisées dans les hôpitaux. Ce type d’ordonnance peut indiquer que passé un certain nombre de jours, la prescription d’un médicament spécifique sera automatiquement interrompue à moins d’un renouvellement explicite par le médecin. 15 POLITIQUES DE GESTION ET POLITIQUES RÉGLEMENTAIRES On pourrait imaginer, par exemple, un système où les médicaments traitant les symptômes seraient arrêtés après trois jours et les antibiotiques après cinq jours. 4. Le contrôle de la dispensation Les mesures de contrôle de la dispensation limitent le nombre (à peut-être deux ou trois) ou la quantité (à peut-être trois ou cinq jours) de médicaments qu’un patient peut recevoir. Ces deux types de restrictions sont arbitraires et comportent certains risques. Si par exemple, on applique la « règle des trois-médicaments » à un prescripteur qui privilégie les antibiotiques, les vitamines et les antidiarrhéiques aux sels de réhydratation orale (ce qui est toujours le cas dans certains endroits), cela signifiera que le patient ne recevra par de SRO. Des études approfondies ont été réalisées aux Etats-Unis dans le but d’évaluer les effets de la mise en place d’un plafonnement du nombre de médicaments pouvant être délivrés. En 1982, l’Etat du New Hampshire a limité les prescriptions à 3 médicaments maximum par patient. Des chercheurs ont comparé des patients du New Hampshire à qui on avait prescrit plus de 3 médicaments avant que la politique de restriction ne soit appliquée avec une population témoin d’un autre Etat (le New Jersey) qui n’était pas concernée par le plafonnement. L’étude a montré que le nombre de médicaments utilisé a bien chuté, mais qu’en parallèle on avait observé une augmentation du nombre d’admissions en maison de retraite médicalisée. Ainsi, le nombre de patients institutionnalisés a presque été multiplié par deux.Cette étude illustre bien les effets pervers pouvant être associés à la mise en place de mesures de type réglementaires. Proportions mensuelles de patients en maison de retraite médicalisée : l’effet du plafonnement des médicaments 16 POLITIQUES DE GESTION ET POLITIQUES RÉGLEMENTAIRES Une « règle des trois-jours » peut permettre d’économiser de l’argent, mais peut également entraîner des problèmes de sous-dosage, d’augmentation des phénomènes de résistance bactérienne et donner aux patients la fausse idée qu’un traitement de trois jours suffit quel que soit le médicament. Dans la plupart des pays, les règlementations distinguent les produits pharmaceutiques qui sont en vente libre (OTC : over the counter) et ceux qui sont uniquement disponibles sur prescription. Malheureusement, dans de nombreux pays également, les produits réservés à la prescription sont également souvent en vente libre. Au Chili, le gouvernement s’est préoccupé du niveau élevé de mauvais usage des antibiotiques et à réussi avec succès à introduire une réglementation prohibant la vente d’antibiotiques sans prescription médicale (voir ci-dessous). L’adoption de cette réglementation n’a pu être obtenue qu’après un lobbying intensif et des négociations permettant d’obtenir un accord de toutes les personnes concernées. La mise en place de cette réglementation a été accompagnée par une campagne éducative à l’attention de tous les professionnels de santé et des consommateurs. Impact du renforcement d’une politique de prescription obligatoire pour les antibiotiques au Chili 0,35 0,3 0,25 Dose/jour/1000 hab.000 0,4 0,2 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 Source : Ballesteros et Cabello, Cabello, ICIUM 2004 Politiques de gestion et politiques réglementaires 21 D - CHOISIR LES STRATÉGIES Á TESTER ET Á METTRE EN ŒUVRE En plus des techniques décrites précédemment, il existe d’autres stratégies de gestion et réglementaires envisageables pour votre pays ou pour votre programme. Il est 17 POLITIQUES DE GESTION ET POLITIQUES RÉGLEMENTAIRES important de choisir un nombre restreint de stratégies ayant une chance de réussite, de les tester au cours d’une phase pilote et puis de les mettre en œuvre de la manière la plus efficace possible. Recherchez toujours les effets indésirables associés. Dans le choix des stratégies, il convient de s’interroger sur les éléments suivants : Ampleur espérée de l’impact du programme : Si la stratégie mise en œuvre est couronnée de succès, quel est l’impact espéré ? En d’autres termes, la stratégie va-t-elle avoir une incidence sur quelques médicaments ou quelques professionnels de santé seulement, ou encore va-t-elle permettre d’économiser de petites sommes d’argent seulement ? Ou alors son impact sera-t-il important ? Il est évident que la préférence va vers les stratégies susceptibles d’avoir le plus gros impact sur les problèmes d’utilisation des médicaments prioritaires. Probabilité de succès : Toutes choses ayant été considérées, quelle est la probabilité que la stratégie soit couronnée de succès ? Est-ce que les résistances seront tellement importantes ou les tâches tellement complexes que le succès de la stratégies apparaît comme peu probable ? Qu’est-il arrivé dans d’autres pays ou dans des situations comparables ? Risque d’effets indésirables : Quels sont les effets indésirables qui pourraient survenir ? Comment pourrait-on minimiser ces effets, s’ils devaient survenir ? Faisabilité sur le plan politique et culturel : Dans quelle mesure la stratégie envisagée est-elle acceptable dans le contexte local ? Les facteurs politiques et culturels vont-ils favoriser le développement et la mise en œuvre de la stratégie, ou alors vont-ils constituer des obstacles importants ? Faisabilité sur le plan technique : Quels sont les besoins techniques de la stratégie ? Des ordinateurs ? Un système d’information hautement développé ? Quels seront les besoins sur le plan technique ? (en personnels, en systèmes, en équipements) Coût (faisabilité sur le plan économique) : Quel est le coût du programme, en particulier lorsqu’on le rapporte aux ressources disponibles et aux bénéfices potentiels en cas de réussite ? Potentiel de financement par des donateurs : Est-ce qu’il sera nécessaire de demander des aides à des donateurs ? Ou alors, cela sera-t-il exigé ? Quelle est la probabilité que les donateurs avec lesquels vous travaillez soutiennent les stratégies proposées ? Si un examen informel des stratégies envisageables a permis de réduire leur nombre à quelques unes (deux à huit, par exemple), vous pourriez construire une matrice de décision où la première dimension serait constituée par les stratégies restantes et la seconde dimension par les facteurs de sélection présentés ci-dessus. Evaluez par avance les stratégies choisies quelles qu’elles soient et surveillez l’impact de leur mise en œuvre. Il est possible que certaines des stratégies sélectionnées ne puissent réussir que si leur mise en œuvre se fait en parallèle avec d’autres interventions. La constitution de listes 18 POLITIQUES DE GESTION ET POLITIQUES RÉGLEMENTAIRES de médicaments essentiels en fonction de leurs noms génériques entraîne généralement une diminution des coûts d’approvisionnement, mais la plus petite liste de médicaments essentiels peut laisser beaucoup de place pour une utilisation inefficace, dangereuse et peu économique des médicaments. Dans le même temps, la mise en place de protocoles de traitement standard ne peut se faire sans une liste de médicaments essentiels qui comprenne les médicaments utilisés dans le cadre de ces traitements. Les listes de médicaments essentiels et les recommandations en matière de traitements de référence apparaissent donc comme des interventions complémentaires. En résumé, les interventions de gestion et de type réglementaires constituent un ensemble d’efforts coordonnés qui vise à améliorer les conditions d’utilisation des médicaments. Les mérites respectifs de chacune des interventions doivent être soigneusement évalués. De plus, le but de ces interventions n’est pas seulement d’économiser de l’argent en prévenant un mauvais usage des médicaments, mais également d’améliorer la qualité des soins délivrés aux patients grâce à une utilisation efficace, sûre et économique des médicaments. 19 POLITIQUES DE GESTION ET POLITIQUES RÉGLEMENTAIRES TRAVAUX DIRIGÉS 1 Politiques de gestion visant à modifier les conditions d’utilisation des médicaments génériques dans un hôpital universitaire SCÉNARIO Le responsable du Comité des Médicaments (CM) de l’hôpital a convoqué une réunion, qui est généralement peu fréquentée, et a demandé aux pharmaciens de bien vouloir remettre leurs rapports mensuels. Après l’habituel passage en revue des médicaments qui manquent ou qui sont en rupture de stock, le pharmacien responsable a provoqué la surprise en disant : « Il y a un point que je souhaiterais soulever. Le ministère a une politique de promotion du bon usage des médicaments, mais notre pratique en la matière m’apparaît comme scandaleuse. J’ai examiné les prescriptions du service de consultations externes du mois dernier et il m’est apparu que les génériques représentaient moins de 40% des prescriptions. J’ai analysé les comptes-rendus d’hospitalisation et me suis rendu compte que le taux d’utilisation de génériques variait selon les patients entre 23% et 94%. J’ai parlé à un interne la semaine dernière. J’ai alors réalisé que celui-ci ne connaissait pas le nom générique des médicaments. Pour qu’il les reconnaisse, j’ai dû les lui traduire en nom de marque. Nous sommes dans un centre hospitalier universitaire et nous devrions donc pouvoir faire mieux. Je propose donc que nous arrêtions notre pratique actuelle de substitution pour les ordonnances rédigées avec des noms de marque et que nous demandions aux médecins de les réécrire chaque fois que cela sera nécessaire. » Les autres membres de l’assemblée en ont eu le souffle coupé. Le chirurgien en chef a marmonné dans sa barbe : « Je n’ai jamais aimé cette histoire de génériques. Si vous retournez les ordonnances, les patients devront attendre leurs traitements pendant de longues périodes. Comme je suis souvent au bloc, il devront attendre que j’ai fini. » Tout le monde avait conscience que cette observation était exacte, puisque de nombreux médecins voyaient leurs patients hospitalisés le matin et se dépêchaient ensuite de rejoindre leur cabinets privés. 20 POLITIQUES DE GESTION ET POLITIQUES RÉGLEMENTAIRES Le pharmacien responsable a coupé court aux bavardages : « La politique du gouvernement est claire : nous devrions utiliser les noms génériques, mais l’idée de faire attendre les patients ne me plaît pas non plus. Est-ce que quelqu'un aurait une solution à proposer ? » Le nouveau jeune chef de clinique en pharmacologie clinique pris la parole : « Dans le cadre d’un cours auquel j’ai récemment assisté, on nous a présenté une intervention appelée « audit et retour d’information ». Elle consiste à examiner les dossiers-patients de chaque prescripteur, à calculer les taux de prescriptions rédigées avec les noms génériques et, ensuite, à indiquer à chacun d’entre eux comment il se situe par rapport à la norme et par rapport aux autres. » Le pharmacien responsable hocha la tête en signe d’approbation : « Je pense que cela pourrait marcher, mais je pressens quelques difficultés. Pourrions-nous essayer de dresser la liste des difficultés qui selon nous devront être résolues avant que nous décidions si cette nouvelle méthode doit être tentée ? » Une série de suggestions et de questions a suivi. Le secrétaire les a notés sur un tableau de conférence. Les questions étaient : * Quelles sont les sources de données disponibles ? * Quels prescripteurs faut-il inclure ? * Quels patients faut-il inclure ? * Comment définirait-on les génériques? * Comment ferait-on pour organiser le retour d’information des résultats ? * Qu’arriverait-il aux meilleurs et aux plus mauvais prescripteurs de génériques ? * Qui serait informé des résultats de l’enquête ? * A quelle fréquence devrait-on organiser les enquêtes ? * A quel moment faudrait-il arrêter les enquêtes ? * Faudrait-il avertir le personnel médical que leurs prescriptions sont sur le point d’être examinées ? * A qui devrait-on confier la réalisation de ces enquêtes ? * Comment ferait-on pour convaincre les principaux dirigeants de l’hôpital de bien vouloir soutenir une telle initiative ? TÂCHES À RÉALISER PAR LES GROUPES Veuillez discuter cet exemple et essayer de répondre aux questions. Le groupe un répond aux deux premières questions, le groupe deux aux deux questions suivantes et ainsi de suite. Si vous avez fini de répondre à vos deux questions, continuez avec la(es) question(s) suivante(s) jusqu’à ce que tous les groupes soient prêts à faire un compte-rendu. 21 POLITIQUES DE GESTION ET POLITIQUES RÉGLEMENTAIRES TRAVAUX DIRIGÉS 2 Politiques réglementaires utilisées dans votre pays Au moyen du tableau ci-dessous, dressez la liste et discutez des stratégies réglementaires actuellement utilisées dans votre pays. Vous devriez passer environ 15 minutes à dresser la liste et 15 minutes à rendre compte de cette liste à votre groupe. STRATÉGIE PAYS Enregistrement des produits, y compris leur interdiction éventuelle Choix et disponibilité des produits Autorisation d’exercice professionnel Prescription Dispensation Contrôles du marché et de la publicité 22