
La Qualité de la Vie est-elle un concept?
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présentées ici afin de tracer les grandes tendances qui ont traversé le monde scientifique
anglo-saxon ces 30 dernières années. Nous nous sommes délibérément focalisés sur les
publications anglo-saxonnes, dans la mesure où jusque dans les années 90, il s’agit d’un
concept qui a essentiellement été développé dans cet environnement culturel, et qu’un
certain nombre de termes fondamentaux ne recouvrent pas les mêmes champs
sémantiques en français et en anglais. Ainsi en est-il par exemple du terme
“performance” ou du mot “bonheur” qui en anglais inclut moins sa dimension
eudémonique qu’en français (elle se retrouve plutôt dans le terme “bliss”) et fait par
contre plus référence à la dimension de chance (“luck”). Pour ces raisons, il nous a
semblé plus approprié de rester dans un même univers culturel, sans juger pour autant de
la valeur et de la richesse de ces univers culturels.
Origine
Un certain nombre d’auteurs (10, 76, 92, 100) s’accordent pour dire qu’à l'origine le
terme de Qualité de la Vie est un slogan, un slogan politique, un slogan américain, un
slogan lancé par Lyndon B. Johnson en 1964 dans son message à la nation intitulé "The
Great Society". Ce Slogan s'inscrit dans le coeur même de la constitution américaine de
Jefferson qui fait du bonheur, un droit inaliénable de tout citoyen américain (106).
L'intérêt politique du vocable était d'être suffisamment flou pour englober tant les
éléments de la Qualité de Vie Objective que Subjective, mais surtout de donner à
"l'American Way of life" une dimension morale, un but. Quant au contenu du concept, il
est dès le départ laissé à l’appréciation du citoyen américain et non aux scientifiques ou
aux technocrates.
Nous retiendrons que pour l'ensemble des auteurs de cette époque, bonheur et qualité de
vie se situaient dans des univers conceptuels proches l’un de l’autre: le bonheur était
éminemment subjectif, composé essentiellement d’affects positifs, de l’ordre de la
complétude, avec pour antonyme le malheur évoquant, en anglais, tant la souffrance que
la malchance. La qualité de la vie, elle, avait une connotation plus réaliste et ouvrait
l'espoir de pouvoir établir des indicateurs ou standards objectivables (opérationnels).