profane. Ainsi, elles disent des choses sur ce dernier. Elles nous disent, par exemple, quelle
est l’origine du monde et de l’homme. Elles attribuent, bien souvent, une cause divine à un
grand nombre de phénomènes naturels (les orages, les tempêtes, etc.). Par conséquent, il
est possible de vérifier à l’aide de la science si les croyances religieuses sont vraies ou
fausses, du moins lorsque ces croyances concernent l’univers visible, celui que nous
pouvons observer. La science, en effet, est une connaissance fondée sur des preuves
rationnelles (raisonnements démonstratifs) ou/et empiriques (expériences). Elle permet
ainsi de prouver qu’une croyance religieuse est en contradiction avec elle-même ou avec la
réalité. Dans le premier cas, il s’agit seulement de faire des raisonnements rationnels. Dans
le second cas, il s’agit de coupler la raison (pour de penser de manière cohérente) avec
l’expérience (connaissance qui s’appuie sur les informations données par les sens).
Par exemple, il est possible de démontrer que de prétendus miracles sont en contradiction
avec les lois de la nature, ou au contraire s’expliquent par ces mêmes lois. Selon les lois de la
physique, il est impossible que la mer Rouge se soient séparée en deux, et que les Hébreux aient pu
la traverser à pied sec, entre deux murailles d’eau. En revanche, on peut très bien prouver que
certains phénomènes extraordinaires (comme l’apparition d’une comète) ont réellement eu lieu,
mais qu’ils s’expliquent par des lois tout à fait naturelles, et non par l’intervention d’une divinité.
Un autre exemple : la Genèse prétend que l’univers a été créé en 6 jours, ce qui contredit de
nombreuses observations scientifiques, comme l’existence de fossiles de dinosaures, ou de traces
d’anciens fonds marins dans des montagnes. Par ailleurs, on peut relever des contradictions
logiques dans certains textes sacrés. Ainsi, la Genèse donne deux récits successifs de la création.
D’après le premier, l’être humain a été créé après les animaux. D’après le second, l’homme a été
créé en premier. En toute logique, il est impossible que ces deux récits soient vrais en même temps.
[Transition – Récapitulation et objection] On vient de voir que la science a les moyens
de confirmer ou de d’infirmer les croyances religieuses, dans la mesure où celles-ci disent
des choses sur la nature et sur l’homme. Mais ce raisonnement n’est-il pas contestable,
dans la mesure où il prête à la science un pouvoir qu’elle n’a peut-être pas ? Est-il possible
de connaître scientifiquement toutes les lois de la nature, et toutes les causes des
événements naturels ? Et la science peut-elle se prononcer sur un être tellement sacré qu’il
s’élève infiniment au-dessus de l’homme : Dieu ?
II. Notre raison peut nous permettre de réfuter des religions incohérentes,
mais elle est incapable de se prononcer sur la croyance en un Dieu infini
[1. Objection à l'argumentation précédente (développement de la transition)]
Comme nous l'avons vu plus haut, les connaissances scientifiques reposent sur des
preuves rationnelles (démonstrations) ou expérimentales. Or, la raison et l'expérience
humaines sont très limitées. Comme l'explique Pascal, il est impossible de tout démontrer :
le raisonnement doit s'appuyer sur des bases considérées comme évidentes. Par exemple,
on sait que l'égalité est commutative : si A = B, alors B = A. Ce genre de vérité n’est pas connu par
la raison (définie comme faculté de bien raisonner), mais par une sorte d'intuition (connaissance
immédiate, directe, qui ne passe pas par un raisonnement). Pascal appelle « cœur » le pouvoir
de connaître par intuition.
Or, notre cœur – s’il n’est pas éclairé par la lumière divine – n’est pas capable de nous
renseigner sur les causes profondes des événements naturels. Nous ne savons pas, par
exemple, pourquoi l’univers existe, ni pourquoi les lois de la nature sont comme elles sont.