Projet de qualitéde l`acte A. Lapointe - UMF Baie-des

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Projet de qualité de l’acte
L’anticoagulothérapie chez les patients hospitalisés avec fibrillation auriculaire
Alexis Lapointe
UMF de la Baie-des-Chaleurs
Mai 2014
Introduction
L'arrivée des nouveaux anticoagulants vient ajouter à l'arsenal déjà existant pour la prévention de
l'ACV chez les patients souffrant de fibrillation auriculaire. L'objectif de ce projet sera d'évaluer
l'effet de l'intégration de ces nouveaux anticoagulants aux lignes directrices sur le traitement des
patients chez qui un diagnostic de fibrillation auriculaire a été posé à l'hôpital de Maria. La
population étudiée est les patients hospitalisés à l'hôpital de Maria du 1er janvier 2012 au 15
octobre 2013 chez qui on retrouve le diagnostic principal de fibrillation auriculaire (FA) ou de
fibrillation auriculaire de novo. L’intervention étudiée est l’anticoagulothérapie orale utilisée.
Les lignes directrices utilisées
À la fin de l’année 2011, plusieurs lignes directrices intégrèrent les nouveaux anticoagulants
(NACO), soit le dabigatran et le rivaroxaban, au régime d’anticoagulothérapie (dominé par la
warfarine) pour les patients souffrant de fibrillation auriculaire. Ces lignes directrices sont le
guide clinique de l'INESSS sur l'anticoagulothérapie et le Focused 2012 Update of the Canadian
Cardiovascular Society Atrial Fibrilation Guidelines.
Le Focused 2012 Update of the Canadian Cardiovascular Society Atrial Fibrilation Guidelines
La société cardiovasculaire canadienne, dans sa mise à jour de 2012, affirme : « when OAC
therapy is indicated, most patients should receive dabigatran, rivaroxaban, or apixaban (once
approved by Health Canada), in preference to warfarin (Conditional Recommendation, HighQuality Evidence) »1. Comme l’expliquent les auteurs des lignes directrices, cette
recommandation repose sur l’argument selon lequel le dabigatran et l’apixaban seraient plus
efficaces que la warfarine (et le rivaroxaban aussi efficace) tout en ne causant pas plus de
saignements majeurs et moins de saignements intracrâniens2.
Le guide le l’INESSS sur l’anticoagulothérapie
Le guide actuel de l’INESSS sur l’anticoagulothérapie a été publié le 1er octobre 20123.
Cependant, dès décembre 2011, l’INESSS avait publié un guide sur l’usage du dabigatran dans la
fibrillation auriculaire. Le guide a par la suite été mis à jour pour ajouter les nouvelles molécules
approuvées pour cette indication, soit le rivaroxaban et l’apixaban. Dans la première version du
guide – qui est susceptible d’avoir influencé les prescripteurs pendant la période étudiée, il était
mentionné que « la warfarine demeure le médicament de choix étant donné son efficacité et sa
sécurité à long terme ainsi que son rapport coût-efficacité à long terme »4. À noter que la dernière
version du guide d’octobre 2012 se contente de présenter un tableau comparatif des
anticoagulants oraux sans énoncer de molécule à privilégier en première intention.
1
Skanes et al. « Focused 2012 Update of the Canadian Cardiovascular Society Atrial Fibrillation Guidelines :
Recommendations for Stroke Prevention and Rate/Rythm Control », Canadian Journal of Cardiology 28 (2012) 125136. Publié en janvier 2012.
2
Ibid., p. 130.
3
http://www.inesss.qc.ca/publications/publications/publication/fibrillation-auriculaire-chez-ladulte-choix-delanticoagulotherapie.html consulté le 15 avril 2014.
4
INESSS, Anticoagulothérapie par le dabigatran (Pradax), décembre 2011, p. 1. Disponible en ligne au
http://www.inesss.qc.ca/fileadmin/doc/INESSS/Outils/Pradax/Pradaxa_FINAL_201205_FR.pdf
Méthodologie
Les dossiers ayant comme diagnostic principal « fibrillation auriculaire » entre le 1er janvier 2012
et le 15 octobre 2013 ont été révisés. Pour des raisons de mots-clés utilisés par les archives de
l’hôpital de Maria, il n’a pas été possible de sélectionner uniquement les dossiers portant comme
diagnostic principal « fibrillation auriculaire de novo ». La question de recherche principale était
donc la suivante : « chez les patients hospitalisés à l’hôpital de Maria avec un diagnostic de
fibrillation auriculaire pendant la période étudiée, quel était l’anticoagulant privilégié ? ». La
question de recherche secondaire était « chez les patients hospitalisés avec un diagnostic de
fibrillation auriculaire de novo, quel était l’anticoagulant privilégié ? ».
Résultats
31 dossiers portaient comme diagnostic principal « fibrillation auriculaire » (ou FA) pour la
période étudiée. Les tableaux et figures suivantes présentent les caractéristiques des patients :
Âge
< 50 ans
2
Nombre de patients
Tableau 1 – âge des patients
50-75 ans
13
> 75 ans
16
On remarque donc que la majorité des patients avaient plus de 75 ans, ce qui est attendu étant
donné la population étudiée (population hospitalisée). De plus, la prévalence de la fibrillation
auriculaire augmente avec l’âge.
Quant au diagnostic principal, 21 patients (68%) avaient un diagnostic de fibrillation auriculaire
de novo et 10 patients (32%) avaient un diagnostic de fibrillation auriculaire.
Le score de CHADS2
Le score de CHADS2 est utilisé en clinique pour prédire la probabilité d’accident vasculaire
cérébral chez les patients souffrant de fibrillation auriculaire. Pour le calculer, on donne 1 point
pour chacun des éléments suivants : insuffisance cardiaque, hypertension artérielle, âge de plus
de 75 ans et diabète. On donne deux points si le patient a un antécédent d’accident vasculaire
cérébral. Les risques, exprimés en événements par 100 personnes par année sont les suivants :
Score CHADS2
0
1
2
3
4
5
6
Risque d’événement (par 100 personnesannée)
1,9
2,8
4
5,9
8,5
12,5
18,2
Selon les lignes directrices 2012 de la Canadian Cardiovascular Society utilisées ici, le score de
CHADS2 devrait être utilisé afin de déterminer la prophylaxie antithrombotique adéquate pour
chacun des patients avec fibrillation auriculaire. Ainsi, un patient avec un score de 0 pourrait ou
bien ne recevoir aucune anticoagulothérapie, ou bien recevoir de l’aspirine, ou bien recevoir des
anticoagulants oraux selon ses facteurs de risque additionnels (sexe féminin ou maladie
vasculaire préexistante). Un patient avec un score de 1 devrait recevoir un anticoagulant oral ou
encore, chez certains patients où les risques de l’anticoagulant oral dépassent les bénéfices, de
l’aspirine. Selon cet algorithme, tous les patients avec un score plus grand ou égal à 2 devraient
recevoir un anticoagulant oral. La figure suivante résume ces recommandations5 :
5
Skanes et al. « Focused 2012 Update of the Canadian Cardiovascular Society Atrial Fibrillation Guidelines :
Recommendations for Stroke Prevention and Rate/Rythm Control », Canadian Journal of Cardiology 28 (2012) 125136.
Chez les patients étudiés, la répartition était la suivante :
CHADS2 des patients sélectionnés
12
Nombre de patients
10
8
6
4
2
0
0
1
2
3
4
5
Score CHADS2
Pour notre étude, le score a été calculé à partir des éléments connus au moment de
l’hospitalisation étudiée. On remarque donc qu’une grande partie des patients étudiés avaient un
score de CHADS2 faible (0 à 1) avec un risque d’événement à 3% ou moins par année.
Anticoagulothérapie
Chez les patients étudiés, l’anticoagulothérapie de choix était la warfarine, comme en témoigne le
graphique suivant :
Anticoagulothérapie utilisée
1
1
3
Aucun
Coumadin
Pradax 150 mg BID
Xarelto 20 mg DIE
26
Notons qu’aucun patient dans la population étudiée n’a reçu de l’aspirine en prophylaxie de
l’AVC. On peut se demander si certains facteurs comme l’âge, le diagnostic ou le score de
CHADS2 pourraient avoir une influence sur la prescription des nouveaux anticoagulants.
Si l’on considère seulement les patient avec un diagnostic de fibrillation auriculaire de novo, on
remarque que la tendance à prescrire la warfarine en première intention est la même.
Anticoagulothérapie chez les patients avec un diagnostic de FA de novo
1
1
3
Aucun
Coumadin
Pradax 150 mg BID
Xarelto 20 mg DIE
16
On remarque donc que les patients avec un diagnostic de FA de novo ont eu en majorité une
prescription de warfarine au congé de l’hôpital.
Caractéristiques des patients ayant reçu les NACO
Si l’on s’attarde aux caractéristiques du patient ayant reçu une prescription de rivaroxaban
(Xarelto®), celui-ci avait 60 ans, un diagnostic de FA de novo et un score de CHADS2 de 1 (voir
annexe). Quand aux patients ayant reçu une prescription de dabigatran (Pradaxa®), ceux-ci
avaient les caractéristiques suivantes :
Patient
Âge
Diagnostic
CHADS2
#1
62
FA de novo
1
#2
40
FA de novo
0
#3
80
FA de novo
2
Tableau 2 – Caractéristiques des patients ayant reçu une prescription de dabigatran
On doit cependant noter – bien que cela sorte du cadre strict de cette étude – deux éléments
importants dans le devenir de ces patients ayant eu du dabigatran à leur congé de l’hôpital. En
effet, deux de ces patients sur trois (#2 et #3) ont vu leur anticoagulothérapie cessée dans les
semaines qui ont suivi leur congé de l’hôpital. En effet, le patient #2 n’a reçu le dabigatran que
quatre semaines, puis ce médicament a été remplacé par de l’aspirine (suite à discussion avec le
consultant en médecine interne). Quant au patient #3, le dabigatran a été cessé au suivi suite à une
cardioversion électrique.
Quant au patient n’ayant reçu aucun traitement, il avait 35 ans, un diagnostic de FA de novo et un
score de CHADS2 à 0.
Discussion
On remarque que bien que les lignes directrices canadiennes aient favorisé dès 2011 les NACO à
cause de leur monitoring plus facile et de leur efficacité supérieure (pour le dabigatran), les
médecins traitants de l’hôpital de Maria ont gardé en grande majorité l’approche traditionnelle
favorisée par l’INESSS, soit l’utilisation de la warfarine chez la plupart des patients avec
fibrillation auriculaire. Bien que le petit nombre de patients ayant reçu un NACO rende difficile
de mettre en évidence un profil précis, on remarque que ceux-ci sont généralement jeunes et ont
peu de comorbidités (CHADS2 de 0 à 2). Il est également intéressant de noter que deux patients
sur trois ayant reçu une prescription de dabigatran ont vu ce médicament cessé au suivi.
Bien que les raisons justifiant le choix des NACO plutôt que de la warfarine n’aient pas toujours
été mentionnées de manière explicite, dans au moins deux cas (dabigatran et rivaroxaban) les
médecins prescripteurs ont justifié leurs choix par la difficulté pour ces patients de gérer des
dosages de RNI en externe.
Notre travail dans sa forme actuelle présente quelques limites. La première concerne la période
étudiée, qui est relativement proche de la publication des lignes directrices en décembre 2011. Il
serait intéressant de refaire cette recherche dans quelques années pour voir si les habitudes de
prescription pourraient avoir changé avec la familiarité plus grande avec ces médicaments ainsi
que les nouvelles données sur leur profil d’effet secondaire.
La deuxième limite concerne le nombre de patients, qui est relativement petit. Cependant, notre
étude est complète en ce qu’elle regroupe tous les dossiers portant le diagnostic principal de
fibrillation auriculaire pour la période étudiée.
La troisième limite concerne le diagnostic. Pour des raisons techniques, il n’a pas été possible
d’inclure tous les patients avec un diagnostic secondaire de fibrillation auriculaire, car la quantité
de dossiers aurait été trop importante.
Finalement, les patients étudiés étaient les patients hospitalisés, ce qui représente une population
avec plus de comorbidités. Il serait intéressant d’étudier les patients s’étant présentés avec
fibrillation auriculaire de novo à l’urgence sans être hospitalisés par la suite. En effet, on peut
s’attendre à ce qu’une population plus jeune, avec moins de comorbidités, ait reçu en plus grande
proportion une prescription de NACO.
Conclusion
La warfarine demeure l’anticoagulant privilégié chez les patients hospitalisés à l’hôpital de Maria
avec un diagnostic de fibrillation auriculaire ou de fibrillation auriculaire de novo entre le 1 er
janvier 2012 et le 15 octobre 2013.
Bibliographie
INESSS, Anticoagulothérapie par le dabigatran (Pradax), décembre 2011, p. 1. Disponible en
ligne au
http://www.inesss.qc.ca/fileadmin/doc/INESSS/Outils/Pradax/Pradaxa_FINAL_201205_FR.pdf
INESSS, Fibrillation auriculaire chez l’adulte – le choix de l’anticoagulothérapie, mise à jour
octobre 2012. http://www.inesss.qc.ca/publications/publications/publication/fibrillationauriculaire-chez-ladulte-choix-de-lanticoagulotherapie.html consulté le 15 avril 2014.
Skanes et al. « Focused 2012 Update of the Canadian Cardiovascular Society Atrial Fibrillation
Guidelines : Recommendations for Stroke Prevention and Rate/Rythm Control », Canadian
Journal of Cardiology 28 (2012) 125-136.
Annexe
Tableau des résultats compilés
Score
CHADS2Vasc
Anticoagulothérapie au congé
Score
Diagnostic CHADS2
Age
51
87
77
84
74
84
83
87
60
74
62
35
67
84
79
88
63
90
82
fa
fa
fa
fa
fa
fa
fa
fa
fa
fa
fa
fa
fa
fa
fa
fa
fa
fa
fa
dn
dn
dn
dn
40
66
73
66
77
77
63
74
80
70
86
79
fa
fa
fa
fa
fa
fa
fa
fa
fa
fa
fa
fa
dn
dn
dn
dn
dn
dn
dn
dn
dn
dn
dn
dn
dn
dn
dn
dn
dn
0
2
4
5
3
2
2
2
1
2
1
0
0
4
3
1
1
3
3
0
3
4
6
3
2
3
2
2
3
1
0
3
6
3
2
1
6
4
0
1
1
1
4
2
3
2
2
1
1
1
0
2
3
3
6
3
4
4
3
2
2
4
Fa= fibrillation auriculaire
Fa dn= fibrillation auriculaire de novo
Coumadin
Coumadin
Coumadin
Coumadin
Coumadin
Coumadin
coumadin
Coumadin
Xarelto 20 mg die
Coumadin
Pradax 150 mg bid
nil
Coumadin
Coumadin
Coumadin
Coumadin
Coumadin
Coumadin
Coumadin
Pradax 150 mg bid x 4
semaines puis ASA 80 mg die
Coumadin
Coumadin
Coumadin
Coumadin
Coumadin
Coumadin
Coumadin
Pradax 150 mg bid
Coumadin
Coumadin
Coumadin
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