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IGU - International Geographical
Union
UGI - Union Géographique
Internationale
International Workshop
Cultures and Civilisations for Human Development
Rome, Home of Geography
Villa Celimontana
December 12-14, 2005
Quelques réflexions préliminaires
par
Alì Toumi, Tunisie <[email protected]>
Re Session 1 The role of scientific approaches to cultures and civilizations
L’étymologie est sans aucun doute d’un apport fondamental comme point de départ pour une
réflexion sur le couple culture et civilisation et sur leurs différents liens et interactions.
Dans la langue arabe, le terme culture (Thaqâfa) provient étymologiquement du verbe «
thaqifa » qui signifie « s’approprier une certaine intelligence », l’intelligence signifiant ici «
la vitalité d’esprit ». La personne qui acquiert la « thaqâfa » est donc intelligente, vive
d’esprit. Cela suppose également l’acquisition d’une « somme de savoirs (connaissances) »
permettant à l’individu d’éviter la « sottise ».
Partant de ce sens étymologique, le sens moderne du terme « thaqâfa » nous réfère à
tout le corpus de connaissances que l’individu éduqué peut acquérir tout au long de sa vie.
Rapportée aux collectivités, la thaqâfa est donc le degré d’intelligence et le niveau élevé dans
les échelles du savoir, qui peut caractériser les peuples.
Un second sens, appréhendé lui du point de vue philosophique, nous réfère à tout ce
qui est « dépassement de la nature ». C’est-à-dire, ce qui est acquis par une volonté délibérée,
contrairement à ce qui est inné chez les individus. La culture est donc un dépassement de la
nature. Elle intègre tout ce que l’individu peut acquérir grâce au système éducatif mis en
place. Elle intègre également tout ce qui peut raffiner la nature humaine en transmettant à
l’individu le sens du bon goût et des sensibilités artistiques.
Le terme de civilisation ( Hadhâra) prend ses origines dans le verbe ( Hadhara ou
Hadhira) dont l’un des multiples sens signifie « habiter la ville ( la cité ) ou le gros bourg ».
Appartenir à la cité signifie ici acquérir les ingrédients du comportement citadin, c’est-à-dire
du comportement de personnes qui ont acquis un certain raffinement, une certaine « culture »
qui les éloigne de la rudesse de la vie bédouine, qui les rend « civilisés », éloignés de la
« barbarie ».
Dans son acception moderne, l’usage du mot « civilisation » est très récent dans la
langue arabe. Il apparaît dans certains ouvrages vers la fin du XIXe siècle et surtout au début
du XXe quand des intellectuels du monde arabe se sont mis à comparer l’Occident au monde
arabo-islamique, sur la base d’éléments qualifiés de civilisationnels et très divers, tels la
religion, le mode de vie, l’architecture, l’expression artistique, les relations sociales …
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Ainsi donc, force est de constater qu’il existe un lien fondamental entre civilisation et
culture, car toute culture appartient forcément à une civilisation donnée et toute civilisation
est marquée par une certaine culture. Certains auteurs vont même jusqu’à voir une adéquation
totale entre les deux concepts.
En dehors de l’intérêt sémantique des deux termes, je voudrais participer à ce premier
débat en émettant quelques observations :
L’humanité traverse actuellement une période où le dialogue des civilisations est
devenu un véritable impératif. Elle n’a plus le choix aujourd’hui car le dialogue est la seule
voie salutaire permettant d’espérer voir un jour disparaître la guerre et les malentendus entre
les peuples. Les géographes ont un rôle fondamental dans la promotion d’un tel dialogue.
Même si, le plus souvent, ils n’ont pas beaucoup de pouvoir politique, ils bénéficient toutefois
d’un pouvoir moral et d’une crédibilité scientifique indéniable pouvant aider à la mise en
place, à l’échelle universelle, d’une culture du dialogue, à travers les programmes
d’enseignement de la Géographie, parallèlement à celui de l’Histoire.
Le choc des civilisations est également une réalité qui existe et qu’il ne faudra pas
ignorer. Les trop grands écarts de niveaux de vie entre les peuples, la maîtrise différentielle
des technologies classiques et modernes, les inégalités dans les dotations dont bénéficient les
uns et manquent les autres, sont autant d éléments qui sont de nature à nourrir des haines, des
malentendus et des tensions que seule la culture peut permettre d’éviter. La compréhension de
l’autre, le partage équitable des rôles, le fait de considérer les maux de certains peuples
comme étant ceux de toute l’humanité, telles sont à notre avis, les conditions requises pour
asseoir, à l’échelle universelle, une culture mondiale du dialogue.
Promouvoir des civilisations et des cultures de partage, tel devrait être l’objectif
commun des peuples. A partir des origines étymologiques des termes « civilisation » et
« culture », la langue arabe fait dériver un verbe qui signifie « interagir » par la civilisation
ou par la culture, selon le cas. Cela veut dire tout simplement que, dans cette langue, toute
civilisation et toute culture est envisagée également dans une perspective d’interaction avec
l’environnement, sur différentes échelles, qu’il s’agisse d’interaction entre individus, entre
communautés ou entre peuples. Nous pensons de notre côté que c’est même un devoir, une
obligation absolue, car on ne peut prétendre contribuer à promouvoir la condition humaine en
général en érigeant des barrières autour de soi. L’ouverture, d’esprit comme de frontière, est
à notre avis le seul garant permettant à tous les peuples de contribuer à la création collective
d’une inter culturalité universelle. Mais là encore une fois, on peut se demander : que peuvent
faire les géographes face aux politiques. C’est une autre question que l’on pourra peut-être
débattre dans un prochain papier.
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