LA PARENTALITE. Le concept de parentalité a été introduit pour la première fois, en 1961, par le psychanalyste Paul Racamier pour évoquer la crise psychique entraînée par la naissance d’un enfant. Ce terme a, depuis, connu un succès tel qu’il a été accommodé à toutes les sauces: on parle par exemple de co-parentalité (dans le champ du divorce), de dysparentalité (dysfonctionnements de la fonction parentale), d’a-parentalité (grandes difficultés à entrer dans la fonction), de parentalité partielle (exercice de la fonction limité dans le temps ou sur certains aspects. Définitions : Le mot Parent vient du latin « parens », « parentis », le père, la mère, et de « parere » ceux qui ont donné la vie, enfanter, engendrer. Etre parent conjugue des réalités biologique, des dimensions juridiques fondant la filiation et par là permettant l’inscription de l’enfant dans le corps social et la prise en charge quotidienne qui se traduit en de nombreuses activités de soins, d’éducation … La parentalité est le processus par lequel on devient parent d’un point de vue psychique. L’entrée dans la parentalité est un moment important pour les individus. Elle donne lieu à un profond remaniement psychique. Le premier élément de la parentalité est le désir d’enfant. Le second est le processus de parentification. La "Parentalité apparaît comme un terme spécifique du vocabulaire médicopsycho-social qui désigne de façon très large la fonction d' « être parent » en y incluant à la fois les responsabilités juridiques, telles que la loi les définit, des responsabilités morales, telle que la socio-culture les impose et des responsabilités éducatives." (Dictionnaire critique de l'action sociale – Bayard – 1995) Le processus de parentification : correspond aux phénomènes psychiques à l’œuvre quand les individus entrent dans la parentalité. Généralement, la fonction parentale est définit comme la fonction qui appartient aux parents, qui leur est propre. Selon J.Lacan La fonction parentale correspond à « l’essence de la maternité, comme de la paternité est problématique, ce sont des termes qui ne se situent pas purement et simplement au niveau de l’expérience.» La manière dont subjectivement les parents exercent leur fonction s’étudie autour de 3 moments clés : ce qui se passe lors du désir d’enfant, à la naissance et après la naissance. - Le désir d’enfant : « Le désir d’enfant prend sa source dans l’histoire des futurs parents » Dominique Luciani. Le désir d’accéder au statut de parent précède celui d’avoir un enfant. Ce désir est « sous la prédominance du narcissisme: on désire s’arroger la puissance attribuée aux parents » Brazelton .T. Berry., Cramer B. La vie fantasmatique de la mère durant la grossesse est très importante dans la construction du désir d’avoir un enfant. C’est la mise en place du lent processus de parentification. La vie fantasmatique de la mère permettra de produire un « enfant imaginaire », « fantasmé » et de construire le processus d’attachement. L’enfant traduit et prolonge l’enfance que chacun des parents a eue. « C’est ainsi que la naissance offre une nouvelle chance à l’histoire ancienne des parents de se remettre en scène. » borris Cyrulnik L’enfant est investi d’une mission qui dépasse le bébé réel. L’enfant avant de naître, est chargé par ses parents : d’une mission où « il lui faut désormais incarner leurs fantasmes » ; et d’un « statut de réparateur de fantasmes.» - A la naissance : Il y a trois bébés qui arrivent ensemble. L’enfant imaginaire, l’enfant de leurs fantasmes, et le fœtus invisible mais réel, dont les rythmes particuliers et la personnalité se sont faits de plus en plus évidents au fil des mois, se confondent avec le véritable nouveau-né que l’on peut voir, entendre et enfin tenir tout contre soi. - Après la naissance : L’attachement des parents à un nouveau né, n’éclôt pas du jour au lendemain, et va se construire sur les relations antérieures qu’ils ont établies avec l’enfant imaginaire et le fœtus. En devenant parent pour la première fois, des changements se produisent au niveau du statut social et du statut affectif. On n’est plus l’enfant de X mais le parent de Y. Cette entrée dans la parentalité bouleverse la vie des deux parents. Il y a un changement identitaire, tout le psychisme doit se réaménager. Le père et la mère doivent investir l’enfant réel et pour cela abandonner l’enfant imaginaire. Le passage n’est pas toujours facile car l’enfant imaginaire peut tout réparer alors que l’enfant réel n’a pas ce pouvoir. C’est à ce moment là, que toutes les failles de l’enfance sont réactivées, ré-élaborées ou abandonnées. Il y aura investissement ou non de l’enfant. L’enfant grandira donc confronté aux désirs communs de ses parents. Les soins parentaux (c'est-à-dire les diverses tâches remplies par les parents auprès des enfants pour son bon développement psychique et physique) font partie de la pratique de la parentalité. Cependant, dans notre société, on est peu ou pas préparé au métier de parent. Pourtant, Si l’expérience de parentification ne se fait pas, il y aura des conséquences sur la pratique de la parentalité. Ainsi, la parentalité, se situe parmi les fonctions et les rôles de la vie des individus les plus délicats à assumer. De multiples raisons peuvent expliquer cette difficulté. Comme l'éclatement de la cellule familiale traditionnelle ; les changements de configuration de la famille traditionnelle elle-même; l’évolution de l'autorité parentale. Ces changements ont eu des répercussions sur l'exercice de la fonction parentale et sur la nature même des relations entre chacun des membres de la famille. Les rapports d'autorité stricte ont laissé la place à des relations faisant davantage appel à l'estime, à la confiance, à la reconnaissance de l'autre. Les enjeux de la parentalité. Selon M. Houzel : « la famille est le lieu où se construit le psychisme de la personne. À ce titre, la famille doit pouvoir soutenir le développement du psychisme individuel dans la perspective de lui permettre d’assumer trois grands types de différences : la différence entre soi et l’Autre, la différence des générations, la différence des sexes. » Pour répondre à ces enjeux, il a été déterminé trois dimensions de la paternité, se jouant à deux niveaux différents. Les trois dimensions de la parentalité : - L’exercice de la parentalité, axe fondateur et organisateur Dans toute société, il y a une définition précise des liens de parenté. Ces relations fondées du point de vue anthropologique organisent la parentalité en situant chaque individu dans ses liens avec ses proches et en y associant des devoirs. - L’expérience de la parentalité, axe correspondant aux aspects subjectifs conscient et inconscient. On ne devient pas “parent” par simple désignation du droit, on doit le devenir en traversant des étapes qui sont autant de maturations (désir d’enfant - conflit œdipien; processus de périnatalité - constellation de la maternité etc.). - La pratique de la parentalité, axe correspondant aux aspects les plus observables, au rôle éducatif des parents Cette dimension rejoint les aspects relatifs aux soins physiques et psychiques dispensés par les parents. La théorie psychanalytique postule que les liens affectifs que l’enfant noue avec son entourage s’étayent sur la satisfaction de ses besoins corporels. Les deux niveaux de la relation Parents-enfants : Le niveau conscient dans lequel se vit la fonction éducative parentale. C’est à ce niveau que se situe la question du contrôle parental et des règles mises en place pour l’exercer. Le niveau inconscient : il s’agit de ce que transmettent les parents à leurs enfants, à leur insu, et qui émane de leur propre histoire et de leur vécu psychique. Travail social et parentalité. Ce sont les travailleurs sociaux par l’évaluation, qui déterminent si les parents sont « aptes ». L’évaluation est un processus dynamique, contradictoire qui ouvre un véritable champ spéculatif. Toute évaluation sur la parentalité, reste complexe, c’est pourquoi elle doit être élaborée non seulement en tenant compte de l’ensemble des tâches qui la constituent, mais également en tenant compte de 3 niveaux : - Le niveau macroscopique : c’est-à-dire le comportement de parent à partir des conduites sociales attendues (ex : aller chercher son enfant à l’heure à l’école). Elles sont principalement recueillies par les travailleurs sociaux tels les éducateurs ou les assistants de service social. -Le niveau sur un plan dit microscopique : ce sont les interventions observables dans le quotidien. (Exemple : le comportement d’une mère ou d’un père à l’égard de son enfant dans une situation précise) - Le niveau endoscopique : Il s’agit là de recueillir les effets de la présence des parents sur le développement de l’enfant au-delà des actes posés ou des paroles prononcées. Le positionnement du travailleur social dans chaque situation sera aussi révélateur. Cependant, le positionnement professionnel en travail social montre bien des philosophies différentes, ainsi aucun positionnement n’est sans défaut. Aussi, quand les parents sont séparés de leurs enfants, comment assurer à ces derniers les meilleures conditions de développement ? RESUME de la partie : il est important de ne pas oublier toute la complexité du statut et de fonction de parent. L’entrée dans la parentalité est à la fois un moment important et difficile. Cette notion est composite puisqu’elle recouvre à la fois le fait de devenir et d’être reconnu parent, une notion d’expérience et de pratique de la parentalité. Ainsi, Ce qui pose problème, c’est la façon d’exercer les différents rôles parentaux. Le terme de parentalité qui est apparu avec la modification des modèles sociaux, se décline désormais au rythme des transformations de la famille. La monoparentalité a sa propre problématique, comme la pluri-parentalité. ou Tout récemment comme l’homo-parentalité. On parle également de disparentalité qui exprime le concept de troubles de la fonction parentale en dehors de toute fonction moralisatrice. Enfin, on parle aussi de parentalité partielle qui consiste à être et rester parent au-delà des difficultés. Aussi, quand les parents sont séparés de leurs enfants, comment assurer à ces derniers les meilleures conditions de développement ? la parentalité a pris depuis quelques années une ampleur politique, ampleur qui pourrait donc déplacer les enjeux de la parentalité.