Résumé Socio Anthrop..

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Bultot Alexandre
Dessart Charles-Eric
ESPO1113A : Sociologie et Anthropologie
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Introduction
0.1 La Sociologie
La sociologie est la science qui étudie la constitution du lien social (« logos » : renvoie au mot
science et « socius » réfère au prochain). Elle apparaît au XIXème siècle dans le contexte très
précis de la révolution démocratique et industrielle en réaction aux théories abstraites des
Lumières (droit naturel moderne et économie politique).
0.1.1
Le contexte de genèse du projet sociologique
Au XVIII, le mouvement des Lumières (Aufklarung) avait accompagné l’émancipation démocratique
des sociétés européennes. Les Lumières imposent le règne de la raison dans le domaine des
affaires morales et politiques. Habermas et Concorcet étaient tout à fait d’accord avec ces
principes.
La sociologie nait au XIXème siècle dans le mouvement de déception qui a suivi l’époque des
Lumières et de la Révolution française. En effet, la Révolution politique a débouché sur la Terreur
et sur l’Empire. La Révolution industrielle suscite une nouvelle et terrifiante question sociale
qu’aucun programme « aufklarer » n’avait prévue. De nouvelles questions se posent et la
sociologie est appelée à répondre à ces nouvelles questions. Comme la nature physique, la société
a seslois, ses contraintes, etc. La réalité sociale se présente comme une deuxième nature (la
preimère étant la nature physique), qu’il importe de connaître avant de vouloir réformer.
0.1.2
Le développement de la sociologie
Le premier auteur à avoir parler utilisé le mot « sociologie » est Auguste Compte. La sociologie de
Comte contenait déjà toutes les composantes d’un projet qui va se complexifier et se diversifier
après lui.
1. Une fonction cognitive. La sociologie sert à expliquer les phénomènes sociaux, non à les
modifier ou les évaluer. La visée d’une connaissance fondée du réel sociale rattache la
sociologie à la science, quelles que soient ses difficultés à déterminer son cadre
épistémologique.
2. Une fonction critique. Dans ce cas, il s’agit non seulement d’expliquer mais aussi d’évaluer
les phénomènes sociaux, c'est-à-dire de porter sur eux un jugement critique (la société
aime qu’on port des jugements critiques, ça tombe bien). Mais la sociologie n’est pas
engagée en politique (bien qu’après la Révolution industrielle, on aurait pu dire qu’elle était
de gauche). Pourquoi ?
a.
b.
c.
On trouve à toutes les époques, des sociologues de tous les bords politiques.
Les notions de droite et de gauche dépendent d’un contexte socio-historique donné.
Parce qu’elle est en position réflexive, on ne peut tout simplement dire que la
sociologie est de droite ou de gauche.
3. Une fonction de conseil expert. Dans ce cas, le sociologue s’attache à informer et
renseigner plutôt qu’à comprendre et expliquer.
4. Une fonction expressive.
0.2 L’anthropologie
L’anthropologie sociale et culturelle a pour objet l’étude des institutions et des productions
culturelles qui apparaissent dans l’histoire humaine.
0.2.1 Le contexte de genèse du projet anthropologique
Tout comme la sociologie, l’anthropologie est née au XIXème siècle d’une interrogation sur les
autres sociétés, non industrialisées et non modernes. Elle a fait ses premiers pas comme
ethnologie. Il a fallu à l’anthropologie la volonté de rompre avec deux attitudes fondamentales : le
racisme et l’ethnocentrisme.
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0.2.2 Le développement de l’anthropologie
Mêmes fonctions que pour la sociologie
1. Une fonction cognitive. L’ethnologie s’est élargie vers deux directions, expliquant le
passage à l’anthropologie. D’une part l’approche des sociétés primitives s’est transformée
en une réflexion sur les premiers stades de l’évolution des sociétés humaine. L’étude de
toutes ces sociétés couplée à l’étude des autres sociétés qui ont une écriture n’a de sens
que si on peut les comparer. D’autre part, l’approche de ces sociétés mettait à l’avant plan
de la réflexion, la notion de culture (lien de parenté entre les peuples, les mythes, etc.).
2. Une fonction critique. Parce qu’elle est une discipline de l’altérité, l’anthropologie s’est
souvent présentée comme une critique radicale des formes de domination de l’Occident sur
les autres cultures.
3. Une fonction d’expertise. Suite aux mouvements migratoires du dernier demi siècle, la
question de l’inter culturalité devient sans cesse plus pressante. L’anthropologue peut
prétendre à un savoir pertinent.
4. Une fonction expressive.
0.3 Différences et convergences entre sociologie et anthropologie
4 oppositions :
1. La sociologie a eu tendance à comprendre le développement culturel de l’Occident comme
le développement de l’humanité elle-même.
2. Parce qu’elle a affaire à une société industrielle, la sociologie ne va pas développer des
méthodes d’observation participante (au contraire du travail de terrain qui caractérise
l’anthropologie).
3. Le corpus de référence de la sociologie et de l’anthropologie vont différer (deux
départements différents au sein de l’université)
4. Sociologie et anthropologie prennent des chemins épistémologiques différents. Difficulté
pour la sociologie de se dégager de son ascendance philosophique et contenu empirique
fort riche pour l’anthropologie.
Mais :
1. Les sociologues et les anthropologues se lisent et se fréquentent.
2. L’évolution du XXème siècle rend obsolète la distinction entre sociétés modernes et non
modernes. Le Nord est traversé par des courants migratoires du Sud qui ont un impact
certain sur le développement des sociétés du nord
Voilà deux raisons pour donner une introduction globale aux deux matières en un seul cours.
0.4 La démarche du sociologue et de l’anthropologue
0.4.1 Rompre avec les préjugés sociaux et culturels
1. Les savoirs spontanés : chacun à notre manière nous sommes un peu sociologue, nous
donnons de petites explications sur ce qui nous entoure. Mais le problème, c’est que nous
le faisons sans rigueur et sans souci de la vérité …
2. Les discours officiels : La justice est neutre, l’artiste n’est pas intéressé par l’argent, etc.
Autant de discours qui visent à la légitimation des pratiques plus qu’à la description et à
l’explication rationnelle.
3. Les médias : Les médias sont plus l’écran sur lequel se projette une image qui résulte de
multiples négociations entre acteurs qu’une fenêtre transparente sur le monde.
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0.4.2 Dénaturaliser le phénomène social et culturel
Il faut dénaturaliser l’objet d’étude. Dans ce but, deux procédures sont ouvertes. L’une met
l’accent sur la diachronie (l’histoire), l’autre sur la construction synchronique (à un moment
donné).
La première procédure consiste à montrer la dimension historique des pratiques sociales (mêmes
celles qui apparaissent les plus « naturelles ». Luc Van Campenhoudt a dit « la mise en perspective
historique permet de voir en quoi, ce qu’on appelle une « réalité sociale » comme une institution ou
un problème ne tombe pas du ciel ».
L’autre procédure, complémentaire, met en lumière la « construction sociale de la réalité ». On
peut montrer que les catégories de pensée sont le résultat, à un moment donné, de multiples
interactions entre des acteurs, des groupes, etc.
La « dénaturalisation » n’est pas facile car la « naturalisation » masque les rapports sociaux qui
sont à la base de notre perception du monde. Karl Marx ou Roland Barthes ont montré que la
« naturalisation » était un des procédés de légitimation les plus puissant des rapports de pouvoir
dans les sociétés contemporaines.
0.4.3 Appréhender des relations plutôt que des entités
La « substantialisation » va souvent de pair avec la « naturalisation ». On évoque souvent dans un
discours commun des « entités collectives » comme si elles étaient des individus. Du point de vue
de l’anthropologue ou du sociologue, ces entités n’existent pas (armée, famille, parti, etc.). Toutes
ces entités ne sont que des « paquets de relations ». Nous parlons ici de rapports, tout ce qui suit
dans ce cours aborde de tels rapports (rapport de domination, rapport de genre, rapport
génération, etc.). Ces rapports sont étudiés sous trois points de vue.
-
On peut analyser les rapports sociaux selon des échelles très différentes (ex : carte d’état
major et carte de l’atlas). Il est impossible de donner un discours à l’échelle zéro (qui
reviendrait à expliquer la réalité) et donc chaque discours est « réducteur ». Un des
problèmes majeurs de la sociologie et de l’anthropologie est d’articuler rigoureusement des
discours de connaissance construits à des échelles différentes sans pour autant tomber
dans la confusion de toutes les échelles.
-
Analyser « les logiques » à l’œuvre dans la constitution de ces rapports.
-
Analyser comme les rapports sociaux se connectent entre eux.
0.4.4 Décentrer les perspectives
Le chercheur est situé comme n’importe quel acteur social. Le pari d’une recherche en sociologie et
en anthropologie, c’est le pari du décentrement. Le chercheur en sociologie et en anthropologie
accepte de prendre sur le monde le point de vue des autres, de rentrer dans leur logique, de
restituer la cohérence de leur point de vue. Il s’agit d’expliquer pourquoi un acteur ou un groupe
adopte telle ou telle perspective sur le monde. A noter qu’un tel décentrement n’implique pas une
attitude relativiste à l’égard de la vérité (une mauvaise vision du monde est due à un manque
d’information de l’acteur social comme dit Marx).
Définition de « Epistémologie » :
processus de genèse d’une science
s’intéresse aux concepts mis en œuvre pour interpréter les données, les hypothèses, etc.
0.4.5 Chercher à articuler les théories et les données empiriques
A la différence des philosophes, les sociologues et anthropologues tentent d’expliquer le réel sur
une base empirique. Deux attitudes fondamentales sont ouvertes au chercheur :
-
le réel social est un ensemble de faits sociaux qui peuvent être objectivés par des
procédures cognitives idoines (exemple : des relevés de frontières indiquent le flux
migratoire)
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-
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le réel social est tissé par des symboles qui demandent à être déchiffrés (plutôt que
constatés) (exemple : que cache un échange entre deux acteurs)
Toutes ces données doivent être articulées, comparées et regroupées par des concepts
interprétatifs. C’est à ce stade qu’on peut dire que le chercheur fait œuvre scientifique.
0.4.6 Savoir que la recherche sociologique et anthropologique constitue une pratique sociale parmi
d’autres
La S&A constituent elles mêmes des pratiques sociales et culturelles.
-
Comme production de savoir. La pratique sociale et anthropologique participe d’une
division des taches officielle, instituée dans des appareils de production de savoir comme
l’université qui lui ouvre des possibilités mais, en même temps, constitue des zones
aveugles dans son champs de visibilité. On peut faire une distinction entre recherche
« appliquée » (expertise pour un gouvernement par exemple) et la recherche fondamentale
mais cette distinction n’est que relative car le milieu universitaire est loin d’être neutre.
-
Comme diffusion de savoir. La S&A rentrent de plein pied dans le débat social, alimentant
certaines tendances, désavouant d’autres discours etc. Concernant ce point, il est à noter
que les sociologues et anthropologues s’expriment dans un jargon inaccessible au commun
des mortels pour éviter les récupérations (enfin, c’est ce qu’ils croient).
-
Les communautés de chercheurs font partie intégrante des objets qu’ils étudient. (Là j’ai
pas bien compris le paragraphe)
0.5 Plan du cours
Nous aborderons les grandes dynamiques du changement social sous 3 angles : angle
socioéconomique, angle socioculturel et angle sociopolitique.
Pour chacun des axes, nous suivrons 3 démarches :
-
Une mise en perspective historique
-
Une mise en perspective analytique : concepts cléfs qui permettent d’analyser les grandes
dynamiques du changement.
-
Une ouverture vers des grandes problématiques sociologiques et anthropologiques
Axe 1 : L’axe socio-économique
1.1 Bref rappel historique
Ce n’est qu’au XIXème siècle que la révolution industrielle début vraiment. En un très court laps de
temps, la production, la mobilité, la centralisation démographique, etc. ont augmenté de manière
foudroyante. A partir de 1960, nous sommes entrés dans une période « post-industrielle ».
1.1.1 La révolution des techniques de production et l’organisation du travail
Le leadership des découvertes techniques a d’abord été l’Angleterre entre 1810 et 1820. Ont
ensuite suivi, les européens continentaux et ce sont finalement les Américains qui arrivent en tête
aujourd’hui. Au plan strictement technique, on distingue 3 vagues de découvertes :
-
Première vague : machine à vapeur et charbon. La mécanisation est introduite dans
l’industrie textile dès le début du XVIIIème siècle. Le charbon de terre se substitue au
charbon de bois et est utilisé dans la métallurgie. De la mécanique et de la sidérurgie en
ressort : la machine à vapeur.
-
Deuxième vague : l’électricité, le moteur à explosion et les applications industrielles de la
chimie. La dynamo est inventée par Gramme en 1869 et c’est 10 ans plus tard que la
première ampoule brille. Entre 1865 et 1885, le moteur à 4 temps est mis au point et enfin
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l’industrie chimique (javel surtout) se développe de manière fulgurante au XIXème siècle
avec la production de colorants, plastique et industries du pétrole.
-
Troisième vague : l’énergie nucléaire. Au XXème siècle, on découvre la fission nucléaire. A
partir de 1960, le développement nucléaire est surtout axé sur la production d’électricité.
L’organisation du travail : usine
L’atelier de l’artisan est progressivement remplacé par la manufacture (l’usine).
-
Une accumulation du capital immobilisé : Avec un capital financier amassé via des actions
ou des crédits d’investissement, il se passe une concentration spatiale d’outils de
production.
-
Un contrôle de la rentabilité ouvrière : Cela suppose un détachement de l’ouvrier par
rapport à la famille et sa soumission à une discipline. Cela demande une technologie
politique de mise au travail des masses.
-
Une augmentation quantitative permanente des concentrations de travailleurs
-
Une perte de professionnalité ouvrière : On ne se dit plus « forgeron » ou « artisans » mais
ouvrier. Cet élément est crucial pour comprendre l’avènement d’une politique ouvrière.
1.1.2 L’urbanisation
L’urbanisation existe depuis le néolithique. C’est au XIXème siècle qu’à lieu l’explosion des villes.
Paul Bairoch dit : « le siècle-charnière de l’urbanisation du monde développé ».
Sur le plan social, la ville industrielle ne ressemble pas du tout à la ville médiévale :
-
Les industries sont présentes dans la ville elle-même ce qui crée des problèmes de
circulation et de pollution.
-
La plupart de la population des villes industrialisées est salariée. La campagne devient un
espace de liberté.
-
L’industrialisation engendre une forte hétérogénéité sociale de la composition de la
population urbaine (ségrégation par quartiers).
-
Compte tenu de la concentration et de l’augmentation de la population, les villes
deviennent des lieux d’agitation et de fermentation sociale.
1.1.3 L’institution du salariat
Il existait déjà au Moyen-âge des formes de travail quasi salariales. Mais c’est au XIXème siècle
seulement que le rapport salarial va commencer à jouer son rôle « d’attracteur institutionnel »
dans la vie économique de nos sociétés. Le salariat devient la forme dominante de rapport de
travail.
Définition : Le salariat
-
Le salariat est un contrat
-
Le salariat implique une rémunération du travailleur : Le salarié tire ses revenus de son
travail et non pas du produit de son travail. Le salaire est composé d’une partie monétaire.
La rémunération peut être directe ou indirecte.
-
Le salariat institue un lien de subordination limitée.
-
Le salariat implique le renoncement du travailleur à la maitrise du produit de son travail.
1.1.4 La colonisation
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Le colonialisme n’est pas une spécificité de l’industrialisation, elle existait déjà bien avant. C’est au
XIXème siècle que l’Europe fut prise d’une frénésie de colonialisme, l’Angleterre étant la grande
gagnante.
La colonisation est un rapport social extrêmement complexe qui (dé)structuré les sociétés
humaines qui couvrent la majeure partie de la planète. Paul Bairoch caractérise toute relation
coloniale typique en 3 points :
-
La colonisation implique un effort pour imposer la « civilisation » de la métropole.
La colonisation subordonne l’économie des colonies aux intérêts de la métropole.
La colonisation induit, au sein même des colonies comme dans le pays métropolitains, une
discrimination entre habituants de la colonie et colonisateurs (fondée sur la race, la
religion, etc.)
Chaque colonisation est différente, les points cités ci-dessus sont appliqués avec + ou – de force.
Ce qui nous intéresse ici, c’est le deuxième point. Comme dit Paul Bairoch :
-
Seuls les produits en provenance de la métropole peuvent être importés dans les colonies.
-
Les produits de la colonie sont exportés exclusivement vers la métropole d’où, en principe,
ils peuvent être réexportés.
-
Interdiction au pays colonisé de produire des articles qui feraient concurrence aux articles
de la métropole.
-
Les relations commerciales et le transport métropole  colonie est réservé aux citoyens
de la métropole.
1.2 Transformation récente du travail
1.2.1 La tertiarisation
Nous vivons dans une phase de « tertiarisation » de l’économie qui propulse les services au
premier rang. Le secteur primaire désigne les activités agricoles, le secteur secondaire comprend
l’ensemble des activités industrielles et le secteur tertiaire rassemble les activités non liées à des
produits physiques. C’est entre 1950 et 1970 que le tertiaire a dépassé le secondaire.
1.2.2 La révolution informatique
La tertiarisation des sociétés développées a été démultipliée par la révolution informatique.
Internet doit sa naissance à des besoins militaires, plus tard, en 1980, le réseau devient civil. En
1192, le World Wide Web fait son apparition.
1.2.3 Les répercussions sur la nature et l’organisation du travail
D’abord, la tertiarisation appelle une requalification du travail. Il y a
tendance longue propre à l’industrialisation. La formation devient une
diplôme en tête de ligne. Mais avoir un diplôme ne suffit pas dans
indicateurs, plus informelles, sont en voie de développement sur
(plurilinguisme, expérience, etc.).
là une rupture avec la
condition à l’emploi, le
tous les cas, d’autres
le marché du travail
Ensuite, on assiste dans les pays développés à une remarquable déconcentration des activités
productives (flexibilité externe). L’abaissement du cout des transports et de la communication est
le facteur décisif. C’est la formule de sous-traitance qui a été retenue pour développer la flexibilité
externe des entreprises. Ce mouvement contribue à expliquer la part croissante des petits
établissements dans l’emploi.
C’est la vie au travail qui se flexibilise.
-
Premier indicateur : les horaires deviennent très flexibles allant même jusqu’à la
transgression permanente de la frontière entre temps de travail et temps libre (notamment
pour les cadres).
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-
Deuxième indicateur : le développement de la polyvalence des taches. Alors que le
fordisme cultivait le diplôme conventionnel, le post-fordisme valorise l’apprentissage en
situation et le « life long learning ».
-
Troisième indicateur : l’affaiblissement des hiérarchies internes à l’entreprise (on améliore
la gestion quotidienne)
1.3.0 Les mutations du salariat
Définition : Configuration fordiste : Rémunérations élevées pour permettre le développement d’un
marché intérieur; contrat de travail à durée indéterminée dans une entreprise moyenne ou grosse;
négociations collectives pour fixer le prix du travail et les conditions horaires de travail.
Cette configuration du salariat est en crise mais pas le salariat en lui même.
1.3.1 La segmentation du marché du travail
Le rapport Supiot distingue plusieurs marchés de l’emploi :
-
Celui des cadres dirigeants qui cumulent les avantages du salariat et ceux de la fonction
patronale.
-
Celui des salariés ordinaires (durée indéterminée à temps plein), qui bénéficient en de
l’intégralité du statut salarial.
-
Celui des emplois subventionnés (marché de l’insertion).
Cette fragmentation est due à la structuration institutionnelle. Les institutions du marché du travail
dépendent :
-
de lois et règlements.
d’accords formels (négociation individuelle ou collective).
de normes implicites de comportement (qui dépendent elles mêmes d’autres acteurs
comme les syndicats).
De manière globale, le marché du travail est divisé en deux segments :
-
Le secteur primaire caractérisé par
o
o
o
o
-
Stabilité d’emploi (contrat à durée indéterminée)
Grosses entreprises
Perspectives de carrière
Règles de promotion
Le secteur secondaire caractérisé par
o
o
o
o
o
o
Rémunérations faibles
Rotation d’emplois élevée
Contrats de travail à durée déterminée
Travail à temps partiel
Entreprises de petite taille
Pas de perspective de carrière
Depuis 1960 on observe ce phénomène. On peut parler d’intensification de la dualisation quand la
mobilité des travailleurs entre les deux secteurs se réduit. Ceci étant du principalement par le
développement de la sous-traitance.
Rajoutons aux deux segments, un troisième pour caractériser le chômage.
Dans cette segmentation (pas le chômage, en général), le facteur du genre joue un rôle important.
Depuis l’accès au travail pour les femmes, les inégalités sont encore présentes.
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1.3.2 Les effets des transformations du travail sur la construction de l’identité des individus et des
collectifs
Les formes de travail ont un impact décisif sur les identités individuelles et collectives. La flexibilité
exigée met à rude épreuve l’identité du travailleur.
Dans la société fordiste, la carrière est structurante de l’identité des individus :
-
Le travail occupe une place centrale dans le mécanisme d’intégration de la société.
« La fin de carrière est plus douce que le début ».
Elle fournit une identité personnelle.
Le travail n’est plus un vecteur aussi central des trajectoires identitaires, les identités ethniques,
religieuses, etc. refont leur apparition. Le travail est relativisé.
Concernant les identités collectives, on assiste au crépuscule du monde ouvrier. La pluralisation
des compétences et la fragmentation des statuts salariaux ne permettent plus de créer une identité
représentative du groupe qu’elle représente.
1.4 L’expansion de l’économie informelle dans les pays en développement
1.4.1 Qu’est ce que l’économie informelle ?
Le « secteur informel » est difficilement analysable. Nous retiendrons deux critères : le critère de la
marginalité à l’égard de la loi et le critère de la faible accumulation. C’est le contraire du salariat.
L’économie informelle rassemble un certain type d’activités indépendantes qu’on peut qualifier de
petites activités de subsistance, càd des activités à faible accumulation. On y inclut les travailleurs,
des vendeurs, etc.
Certains analystes estiment qu’il occupe ¼ de la population et que dans certains pays comme le
Benin il atteint 80%.
1.4.2 Les causes du développement du secteur informel
1.4.2.1 L’urbanisation accélérée :
Le premier facteur est bien sur l’urbanisation intensive qui caractérise aujourd’hui la plupart des
pays du Tiers-Monde (et aussi l’Asie mais différemment). Cette urbanisation ne s’accompagne pas
toujours d’une industrialisation et donc, génère un important taux de chômage.
A noter qu’il ne faut pas croire que l’économie informelle n’est qu’un secteur de transition vers une
économie régulière.
1.4.2.2 Le désinvestissement de l’Etat
Les pays colonisés accèdent à l’indépendance politique au cours du second tiers du XXème siècle,
mais cela ne veut pas dire qu’ils accèdent à l’indépendance économique. Mis sous la tutelle d’un
pays « développeur », les programmes d’industrialisation furent plus ou moins couronnés de
succès. Mais à partir des années 1980, les politiques d’ajustement imposées aux pays du Tiers
Monde par les organismes de prêt internationaux vont restreindre les possibilités de l’Etat. Et du
coup, toutes les entreprises jadis financées par un embryon d’Etat social ont disparu.
1.4.3 Les rapports sociaux dans le se secteur informel
La relation économique dans les pays en voie de développement est un mixte assez instable de
relations de don, de relations de marché et de rapports associatifs. Les relations de marché ne
suffisent pas à maintenir l’économie car cela nécessite un comportement individualiste et
calculateur, des règles de transaction, etc. Tout cela existe mais de manière imparfaite dans
l’économie informelle. On constate alors le maintien de rapports de don. Le rapport de don n’est
pas un échange mercantile car de toute manière, il n’est pas monétarisé, il ne résulte pas d’un
contrat et la rétribution doit être différée dans le temps. Il est essentiel que le don apparaisse
comme un don gratuit (même si cela crée tout de même une relation de dette à l’égard du
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donateur). Le don oblige et donc constitue un des modes les plus importants du rapport social, il
fonde un sentiment de solidarité communautaire (famille, clan, etc.). Comme le dit Marcel Mauss,
le don est un des modes les plus primitifs de l’échange économique. Et, sans systèmes existants et
stabilisés, les gens se raccrochent aux solidarités familiales, lignagères, etc.
Ce phénomène du donc crée donc un rapport social qui fait obstacle, au sein de l’économie
informelle à l’apparition de rapports marchands plus individualistes. A noter que ceux-ci ne sont
pas totalement absents, ils sont justes à un état embryonnaires.
Troisième composante de l’économie informelle ; l’association volontaire sur base non familiale,
mais sur base de projets cristallisés dans des associations. C’est le cas des mutualités ou des
associations volontaires populaires d’entraides.
1.5 La pauvreté et l’exclusion
Questions sur un texte, je n’ai pas les réponses.
1.6 Questions à approfondir
1.6.1 Expliquer et comprendre l’échange économique
Pour comprendre la vie économique des sociétés contemporaines, voici trois champs de
questionnement :
-
La pluralité des motivations de l’acteur économique. A première vue, on pourrait croire que
la seule motivation est l’intérêt général, mais tous les sociologues qui se sont penchés sur
le sujet diront que la moralité, la socialité et la solidarité compte autant que l’intérêt
personnel.
-
La pluralité des formes d’échanges économiques. Il ne faut pas réduire l’économie aux
seuls rapports de marché, comme nous l’avons vu pour les pays du Tiers-Monde, les
rapports de don et les rapports d’associations sont tout aussi importants. Et ce, même en
Occident où la famille et l’Etat compte encore beaucoup !
-
Les conditions sociales d’une économie de marché. Le marché n’a rien de naturel. Dans le
livre on donne l’exemple du capitalisme qui est une institutionnalisation du rapport
économique très particulière.
1.6.2 Expliquer et comprendre le rapport de travail
Qu’est ce que le travail ?
Typiquement, le travail articule deux dimensions ; le rapport à la nature et le rapport social.
Pour Marx, le rapport de travail était un rapport de production qui articulait deux médiations ; les
« moyens de productions » et la médiation sociale qui se résumait au fait qu’une classe était
dirigée par une autre.
Depuis Marx, l’analyse du travail s’est fortement approfondie et modifiée. La dimension de
l’organisation du travail a pris une place importante dans cette analyse (entre la relation directe
des producteurs entre eux et les relations macro-sociales, il y a l’univers des organisations).
Ensuite c’est l’activité de travail qui a fait l’objet de descriptions fines : engagement de la
subjectivité, engagement des collectifs, etc. Dans les sociétés contemporaines, le rapport de
service et l’activité de manipulation des symboles dématérialisent le rapport de travail.
Enfin, les référentiels de justice au travail ne peuvent se ramener à la conceptualité trop simple de
l’exploitation. Certes, l’exploitation de travail d’autrui fait partie intégrante du rapport de travail,
mais il ne faut pas oublier de se poser des questions sur le juste prix du travail et la satisfaction au
travail.
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La place du rapport de travail dans la dynamique sociale
Pour Marx, le rapport de travail était absolument déterminant « en dernière instance » de la
totalité des rapports sociaux (le rapport de travail est la « base » et le reste « la super
structure »).
Aujourd’hui on met en doute cette centralité du rapport de travail. L’autonomie du culturel et du
politique par rapport à l’économique a fait l’objet d’analyses systématiques qui conduisent à une
vision « décentrée » de la société.
1.6.3 Expliquer et comprendre le capitalisme
A première vue on serait tenté d’identifier capitalisme et marché mais cela est faux. Il existe des
formes de marchés qui ne sont pas dans un monde capitaliste. Plusieurs caractéristiques
permettent de l’identifier :
-
La rationalisation de la vie économique (Max Weber) : Qui dit capitalisme, dit calcul, travail
discipliné, etc. De là découle la nécessité d’institutions spécifiques. La séparation de la vie
privée, domestique et de la vie de travail est une caractéristique importante, tout comme
l’existence de règles de comptabilité et de l’institutionnalisation de rapports de propriété.
-
L’accumulation qui devient elle-même sa propre finalité : Comme le dit Immanuel
Wallerstein : « Ce qui fait la spécificité du système social que nous appelons capitalisme,
c’et que le capital a fini par y être investi d’une manière bien particulière. Il en est venu à
être employé dans le but premier et délibéré de son auto-expansion. ». C’est bien pourquoi
il faut distinguer capitalisme et marché : « L’accumulation capitaliste ne se plie à la
régulation marchande que lorsque des chemins de profit plus directs lui seront fermés ».
-
Une tendance systématique du capitalisme à intégrer dans son processus tous les aspects
de l’existence : La visée de l’accumulation entraîne la nécessité de mettre tout
l’environnement social et naturel à son service.
Les développements actuels du capitalisme appellent de nouvelles considérations sur ses
ancrages et ses conséquences culturelles, institutionnelles et sociales :
-
L’esprit du capitalisme (Weber, Boltanski et Chapiello) : Weber a montré que l’ascétisme
puritain des capitalistes européens protestants du XVIIème et XVIIIème siècle avait joué
un rôle non négligeable dans le développement du capitalisme : il avait justifié et permis
une « conduite méthodique » de vie qui permettait une accumulation inhabituelle de
capital. Le capitalisme ne se fonde pas sur une soif de jouissance mais bien sur des
doctrines morales.
Boltanski et Chapiello se sont récemment demandé ce qui tenait lieu « d’esprit du
capitalisme » dans le monde contemporain, marqué par la flexibilité de la production car ce
n’est plus le protestantisme ascétique qui suffit aux acteurs économiques. En étudiant les
livres de management, ils ont montré comment construire un univers de référence
« morale », qu’ils ont appelé « Cité du projet ». L’enjeu est de se connecter aux autres par
des liens qui ne soient ni trop forts, ni trop faibles.
-
La question de la régulation du capitalisme : Marx avait souligné la tendance à
l’autodestruction du capitalisme mais c’est cela est trop réducteur. Au cours de l’histoire, le
capitalisme a été canalisé par des formes de régulation plus ou moins efficaces, c'est-à-dire
en s’institutionnalisant. Un mode de régulation est un ensemble cohérent de mises en
forme de divers rapports sociaux formant un système et assurant une régularité à ces
rapports dans une société pour une période donnée.
Le rapport salarial fordiste constitue une institution de régulation fondée sur un compromis
entre les forces sociales et économiques. Depuis la crise du système fordiste en 1973, on
peut se demander si un nouveau système n’a pas émergé : le « capitalisme flexible ou
patrimonial »
-
La question de la mondialisation du capitalisme : Depuis le début, Marx a théorisé le
capitalisme comme un processus social qui ne connaît pas les frontières nationales. Au
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XVIème siècle, alors que la modernité politique se constitue autour de l’idée de territoire
national, la modernité économique s’engage dès la même époque dans une voie qui ne
connaît pas ces limites. Braudel et Wallerstein ont tenté de conceptualiser ce phénomène
par la notion d’économie-monde :
o
La souveraineté des nations est une souveraineté limitée économiquement. Une
nation est prise dans un système interétatique qui contraint fortement sa volonté.
o
L’économie-monde est structurée par une hégémonie d’un « centre » sur la
« périphérie ». Une région, une nation ou un groupe de nations exercent une
hégémonie par différents moyens.
o
Le centre de l’économie-monde se déplace au gré des rapports de force qui
structurent l’économie-monde.
1.6.4 La construction d’un point de vue et d’une action critiques des sociétés contemporaines
Une chose est d’expliquer et de comprendre l’économie contemporaine et le capitalisme, une autre
chose est d’en évaluer les conséquences politiques, morales et culturelles. La sociologie constitue le
point de vue le plus approprié. Elle est capable d’articuler une critique réaliste de l’économie et du
capitalisme qui intègre différents points de vue normatifs :
-
point
point
point
point
de
de
de
de
vue
vue
vue
vue
moral (profits, individualisme, etc.)
de l’égalité des personnes et des groupes
démocratique de l’action collective excluant la subordination
de l’identité culturelle
Le sociologue n’est évidemment pas le seul à poser ces questions. Les mouvements sociaux ont
toujours constitué un de ses appuis fondamentaux pour porter un diagnostic du temps présent. Le
premier est le mouvement ouvrier, étudié par Marx. Par la suite d’autres sont apparus dont
notamment : L’écologie politique (effets pervers de l’industrialisation) et l’alter mondialisme (contre
la mondialisation du à l’échec du « socialisme réel »)
Axe 2 : L’axe socio-culturel
Définition : Culture : « Organisation symbolique d’un groupe, transmission de cette organisation et
ensemble des valeurs étayant la représentation que le groupe se fait de lui même, de ses rapports
avec les autres groupes et de ses rapports avec l’univers naturel ».
2.1 Chapitre 1: Les cheminements religieux des sociétés contemporaines
2.1.1 Repères historiques
2.1.1.1 La sécularisation de la société occidentale
La société traditionnelle d’Ancien régime est une société rurale dont, dans nos contrées, le
catholicisme constitue la culture englobante. Elle place l’homme dans un monde gouverné par Dieu
où l’Eglise établit le lien entre le ciel et la terre. Pendant les trois derniers siècles, les
questionnements sur cette centralité de la culture religieuse ne touchaient que l’élite politique et
culturelle. C’est au XIXème et XXème que les mises en question de la religion vont avoir des effets
culturels et sociaux massifs, c’est ce qu’on a appelé ; la sécularisation.
La sécularisation se fait en deux temps, tout d’abord il y a une relativisation du discours religieux
puis une perte d’emprise de l’institution religieuse sur la société (rituels quotidiens, pouvoirs, etc.).
On insiste bien sur le fait que c’est la forme institutionnelle qui diminue. Une grande partie de la
population dit encore croire en une « divinité ».
On peut distinguer deux sortes de sécularisation :
-
sécularisation externe : qui modifie la place de la religion dans la totalité sociale, elle
apparaît avec l’autonomisation des institutions.
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-
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sécularisation interne : qui transforme de l’intérieur le rapport au religieux, elle est due à
une sorte d’acclimatation progressive des thèmes modernes au sein de l’Eglise.
La sécularisation externe
La religion est concurrencée de l’extérieur par des discours et des pratiques qui fournissent des
repères symboliques alternatifs (science, démocratie et art) C’est trois discours rationalisent trois
rapports :
-
Le rapport à la nature : La nature est, du point de vue religieux, un ordre voulu par Dieu.
Elle a une dimension symbolique (volonté du Créateur) et est régie par un ordre immuable.
Mais la science moderne (galiléenne) établit un autre rapport à la nature. La nature devient
intelligible à la raison humaine et sous l’emprise de la technique, elle devient manipulable.
Exemple : Avec Copernic, la terre n’est plus le centre du monde. Et dans ce monde,
l’homme lui même apparaît come un être naturel et contingent (Darwin).
-
L’axe des rapports des hommes entre eux : Le monde traditionnel est régi par un ordre
invisible, extérieur à la volonté et l’intention des hommes. Dans une démocratie moderne
au contraire, le pouvoir résulte d’un accord des hommes entre eux. L’Etat ne dépend donc
plus d’un ordre supraterrestre, mais de la raison humaine.
-
L’axe du rapport à soi-même : L’art moderne (littérature, musique, image, etc.) devient
une voie privilégiées de l’exploration de la subjectivité et le l’intersubjectivité. Il ouvre un
rapport avec la nature différent que celui qu’incarne la science moderne.
La sécularisation interne
Comment l’Eglise catholique a-t-elle réagi à cette relativisation de son emprise sur la société ?
Jusqu’à la convocation du Concile Vatican II, l’Eglise n’accepta pas de faire des concessions à la
modernité. Ensuite l’Eglise catholique suivit progressivement trois lignes de réforme au cours des
XIXème et XXème siècles.
-
Acceptation de la démocratie et de la république comme forme de gouvernement (il y eut
aussi l’acceptation des Droits de l’Homme)
-
Renouement avec la science (dans lequel l’université de Louvain a joué un rôle)
-
Nouvelle stratégie missionnaire pour reconquérir les classes ayant désertés les campagnes
et s’étant éloigné de la religion (Exemple : L’option sociale prise par l’Eglise à la suite de
l’encyclique Rerum Novarum de 1891).
Le catholicisme n’est pas la seule religion a avoir connu cet te sécularisation interne.
La pluralité des cheminements religieux
La sécularisation est un mouvement de fond, commun à toutes les sociétés occidentales. Il dégage
un espace culturel et politique nouveau. Cependant, ce mouvement connaît des formes diverses, la
« sortie » de la religion n’est pas la seule issue du processus. Il faut distinguer les pays européens
à tradition catholique et protestante. Le protestantisme est une forme de christianisme plus
« séculière ». Les pays adoptant le protestantisme l’ont fait au nom de la Réforme mais sans
vouloir construire un concept offensif et agressif de laïcité comme l’a fait la France.
Quant aux Etats-Unis, ils sont une exception. Dès le départ, la construction de la société
américaine s’est opérée autour d’une multitude de communautés religieuses. La liberté de
conscience et la pluralité des communautés ont été d’emblée assumées comme des vecteurs
constitutifs dans la démocratie américaine. D’où ce paradoxe : Les Etats-Unis respectent la liberté
religieuse et la séparation de l’Eglise et de l’Etat mais reste une société profondément religieuse.
Quant aux pays d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine, ils vivent une autre histoire religieuse suite à
leur situation coloniale.
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Les religions séculières
Au cours de leur modernisation, les sociétés ont produit et adhéré à des systèmes de pensée
institutionnalisés qui présentent beaucoup de traits communs avec les religions ordinaires. Ce sont
les idéologies liées à des partis et des Etats totalitaires au XXème siècle. Raymond Aron les appelle
« les religions séculières ». Le concept est paradoxal puisque la sécularisation est un processus de
sortie de la religion. Les religions séculières ne parlent pas de dieu mais ont un concept très proche
des comportements sociaux observables dans les religions et les systèmes totalitaires :
-
Une doctrine totalitaire se veut comme une vision globale du monde.
-
Elles constituent l’autorité politique sur une orthodoxie, chassant les hérétiques et les
traitres avec une violence impitoyable.
-
Les appareils idéologique ont un comportement missionnaire, il ne s’agit pas seulement de
conquérir et dominer politiquement mais de modeler les esprits et de modifier les
comportements culturels de base.
2.1.1.2 La rencontre coloniale
La situation coloniale constitue, sur le plan culturel, une réalité très complexe. Comme Malinowski
l’avait déjà noté, de la situation de contact coloniale nait une culture nouvelle constituée
d’éléments partiellement fusionnés.
La culture du colonisateur ne se présente jamais comme un tout homogène et intégré, qui aurait
vocation à une diffusion immédiate dans la société colonisée. En effet, l’Occident exporte autant
ses conflits culturels que son unité. Ainsi, la colonisation fut à la fois un produit de l’élan
missionnaire des églises et d’un Occident identifié aux lumières, imbu de sciences et de raison, de
démocratie et de droits de l’homme.
De son coté, le colonisé a adopté une grand e variété d’attitudes à l’égard de la colonisation
culturelle. Du refus radical à l’acceptation, du mélange sélectif à la confusion généralisée.
Pour simplifier, on peut grossièrement distinguer quatre grandes modalités de la réponse du
colonisé au colonisateur : le rejet, la conversion, le syncrétisme et la coupure.
-
le rejet : Il s’agit du refus pur et simple de la culture. Des formes très volontaristes de rejet
ont aussi émergé, comme le salafisme dans le monde arabo-musulman. Plus tard, le
salafisme fut théorisé et donna naissance à d’autres mouvances dont le but est de
préserver la communauté islamique contre le projet modernisateur.
-
La conversion : Dans ce cas, la personne ou le groupe renonce à des formes culturelles
pour adapter de nouvelles formes, empruntées au colonisateur.
Celui-ci a souvent
encouragé cette attitude via un système exo-éducatif créant ainsi une élite de jeunes
tranchant avec leurs cultures d’origine. Mais cela n’est pas une sorte de soumission, la
plupart des membres des élites africaines qui ont conduit les indépendances furent des
« convertis ».
-
Le syncrétisme : Il s’agit du mélange d’éléments culturels hétérogènes dans une forme
culturelle nouvelle plus ou moins cohérente.
Ainsi, par exemple, le kimbanguisme au Congo belge est une création des années 1920 qui
mélange divers éléments issus du monde traditionnel retenant le contact avec les ancêtres
d’une part, et de la religion judéo-chrétienne retenant le prophétisme.
Le candomblé brésilien est une autre forme de syncrétisme. Ici la religion est née du culte
des ancêtres pratiqué par les esclaves africains, le contact avec les divinités se passent par
dance, rituels, etc. Les dieux trouvent sans difficultés une incarnation chrétienne.
-
La coupure : Au contraire du syncrétisme, il ne s’agit pas dans ce cas de mélanger les
formes culturelles mais de les vivre en même temps comme des mondes de référence
parallèles n’ayant pas de contacts entre eux.
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Au Nigeria, avec la colonisation anglaise, les nigérians participent au culte chrétien en
masse. Cependant, cela ne les empêche pas de pratiquer, à la maison, le culte des ancêtres et
participer à la vie rituelle du Palais.
Karen McCarthy Brown a enquêté en anthropologue sur le culte haïtien vaudou à New York
et peut témoigner du fait suivant : Lors des communions, la messe se déroule avec une
Bible apposée sur une table mais il y aussi une table réservée au culte vaudou.
La coupure est loin d’être étrange puisqu’elle s’enracine dans le discours libéral lui même,
qui en donne une version en proclamant la distinction entre la sphère publique et la sphère
privée.
Et enfin soulignons le fait que ces quatre attitudes-clefs s’appliquent aussi à des minorités
occidentales.
2.1.2 Les mutations du rapport au religieux dans les pays européens
Dans les années 1970, les églises de l’ouest ont toutes perdu énormément de pouvoir et
paradoxalement, les églises de l’est, protégée par le rideau de fer n’ont pas subi une telle défaveur.
2.1.2.1 La baisse des pratiques religieuses officielles
Pour objectiver la perte de l’emprise religieuse dans les sociétés d’Europe de l’Ouest, le sociologue
cherche des indicateurs permettant de mesurer le phénomène. La pratique religieuse est
multiforme. Une bonne partie est inobservable (prière, comportements privés) mais il est possible
d’observer la partie publique représentant les rites.
On peut distinguer deux types de rite :
-
Les rites liturgiques : La liturgie est la célébration religieuse collective adresse à Dieu.
L’Eglise catholique recommande la liturgie hebdomadaire.
-
Les rites de passage : est la cérémonie religieuse qui marque la transition d’une étape à
une autre de la vie de l’individu.
L’évolution de la participation de la population aux rites liturgiques et de passage est extrêmement
révélatrice de la baisse des pratiques religieuses.
2.1.2.2 La privatisation des croyances
Le changement objectif des comportements témoigne d’une désaffection à l’égard de l’institution.
Pourtant 65% disent croire encore en Dieu. On assiste à une privatisation des croyances.
L’intériorisation du rapport à la foi entraîne une désaffection par rapport aux comportements rituels
imposés. La communauté religieuse se vit sur un mode non imposé et festif, non quotidien, chaud
et transitoire.
Le rapport entre religion et morale s’en trouve bouleversé. L’introduction d’un critère d’authenticité
personnelle dans le rapport à la religion a des conséquences sur le rapport à la règle morale. Cela
ne signifie sûrement pas une perte radicale de la morale, mais un épuisement progressif d’une
forme de morale au profit de nouveaux repères moreaux qui se construisent dans l’incertitude et la
polémique sociales.
Cette privatisation engendre une hybridation incontrôlée du contenu de croyance. Comme dit
Danièle Hervieu-Léger on assiste à des hybridations, des mixages, etc. C’est notamment le cas du
New Age.
2.1.3 Les mouvements religieux non européens à l’autre XXIème siècle
La sécularisation radicale de l’Europe est une exception dans le monde. Aux USA, on n’observe pas
un mouvement d’une ampleur, et certainement pas dans les pays ex-colonisés. Mais n’allons pas
jusqu’à dire que nous suivons un mouvement inverse.
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La religion constitue, dans l’histoire de l’humanité, la première forme de « mondialisation ». La
« globalisation religieuse » a été caractéristique de grandes religions à vocation universelle nées
entre le VIème siècle avant JC et le VIème siècle de notre ère. Ce n’est donc pas nouveau.
Les transformations religieuses sont légion dans le monde contemporain et il ne peut être question
d’en dresser ici le bilan exhaustif.
Nous verrons ici deux phénomènes socioreligieux globaux qui ont attiré spécialement l’attention au
cours de ces dernières années. Le premier est le réveil de l’Islam ; le second est la propagation des
églises évangéliques dans le monde.
2.1.3.1 Le réveil de l’Islam
Le monde musulman ne peut as être confondu avec le mon arable même si ceux-ci ont tout deux
leur centre en Arabie Saoudite. Le monde musulman est présent de manière significative sur tous
les continents et continue à s’étendre. Comme dit Felice Dassetto, il est intéressant d’utiliser le mot
« islam » au pluriel. Il existe différentes manières vivre l’Islam mais surtout de l’interpréter et de le
comprendre. C’est cela qui est un des grands enjeux de l’islam contemporain à savoir celui de
maintenir l’unité de la communauté de foi, malgré les divergences importantes de compréhension
et ceci en l’absence d’instances régulatrices.
On peut distinguer sommairement deux formes de renouveau islamique :
-
La réislamisation par le bas : a pris forme d’une diffusion volontariste, à partir des années
1980, d’une éthique de la vie musulmane de la vie quotidienne. On en retrouve une origine
doctrinale dans le Tabligh, un mouvement intégriste. Il s’agit de modifier le comportement
vestimentaire, les relations entre hommes et femmes, etc. Cette tendance antimoderniste
vise à restaurer des formes de vie musulmanes supposées authentiques et renvoyant
directement à Mohamed. La base sociale est essentiellement populaire et ses adeptes sont
implantés dans les milieux déshérités. Ce mouvement semblait à la fois soustraire la
population à la délinquance ainsi qu’au militantisme et fut donc favorisé par de nombreux
pouvoirs en place.
-
La réislamisation par le haut : renvoie à la prise de pouvoir politique. C’est donc l’appareil
d’Etat qui est visé plus que le circuit de socialisation primaire et secondaire. Comme tout
grand mouvement politique, l’islamisme politique est très divisé sur les objectifs à atteindre
et les stratégies à mobiliser. On peut au moins distinguer deux grandes tendances. La
première est celle du militantisme globalisé, qui englobe le terrorisme et la lutte armée. La
seconde tendance est celle qu’incarnent les partis islamiques qui ont pénétré les appareils
d’Etat dans le monde musulman à partir des années 1980 et qui soutiennent des formes
d’islamisation des pouvoirs politiques en place.
2.1.3.2 Le pentecôtisme
Il est par nature difficile d’évaluer l’importance numérique du pentecôtisme. Le christianisme
représente environ 2 milliards d’adeptes et le pentecôtisme représente entre 1/8 et ¼ de cette
population.
Le pentecôtisme se caractérise par les traits suivants :
-
Comme le protestantisme, il y a une absence d’autorité centrale. Un accent mis sur la
relation du croyant avec Dieu et un privilège donné à la Bible comme source directe de la
foi.
-
Le pentecôtisme met l’accent sur la guérison spirituelle.
-
Le pentecôtisme en appelle à des formes liturgiques émotionnelles et collectives.
-
Le pentecôtisme met l’accent sur la conduite morale de la vie (alcool, sexualité, etc.)
Sociologiquement et politiquement, il faut remarquer que malgré son conservatisme moral, le
pentecôtisme n’est pas du tout hostile à une sécularisation de l’Etat. Comme tout protestantisme, il
est ajusté à une situation de pluralisme religieux.
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2.2 Chapitre 2: Exo-éducation, art et médias
2.2.1 Repères historiques
2.2.1.1 L’exo-éducation
Au XIXème et au XXème siècle, le rapport entre culture et société va connaître en Occident une
transformation radicale qui rompt avec celui qui a caractérisé les sociétés agraires. Ernest Gellner
schématise cela comme le passage d’un modèle endo-éducatif à un modèle exo-éducatif
Système endo-éducatif
Système exo-éducatif
Très basse, on recherchait la
stabilité.
Très forte, on envisage sans
cesse son propre progèrs.
Réservée aux clercs. On y
apprend l’hébreu, le latin et
l’arabe classique.
Diffusée dans tout le corps
social, on apprend la langue
nationale via les écoles.
Ecriture
Réservée aux clercs.
Diffusée dans tout le corps
social.
Compétences techniques
Réservée
spécialisés.
groupes
Connaissances
élémentaires
diffusées dans tout le corps
social.
Organisation de la formation
Décentralisation.
L’enseignement est propre à
chaque famille.
Centralisation. L’enseignement
est centralisé par l’Etat.
Mobilité sociale
Langue
de
universelle
communication
aux
2.2.1.2 La médiatisation
La médiatisation existe depuis l’invention de l’imprimante au XVème siècle. Il y a de fortes
différences entre le XVIIIème et le XXIème siècle. En se limitant à la période qui va du XIXème
siècle aux années 1960-1970, on peut grossièrement distinguer trois vagues d’innovation
technique qui ont porté l’expansion des médias.
La presse écrite populaire
La presse se diffuse au XVIIIème siècle. Mais jusqu’au XIXème siècle, on ne peut parler de presse
populaire. La presse populaire nait et se développe dans la seconde moitié du XIXème siècle
grâce :
-
à l’alphabétisation en progression
aux innovations techniques qui permettent des tirages de plus en plus importants
l’amélioration de l’acheminement des journaux (routes, train, etc.)
La presse imprimée devient avec le livre et l’affiche le medium par excellence de la vie politique et
culturelle. C’est aussi un vecteur puissant dans la création d’un marché de la consommation.
La radiodiffusion
Après la première guerre mondiale, l’usage de la radio fut « civilisée » et régulée par l’Etat.
Jusqu’en 1960-1970, la radio constituera un élément fondamental de la vie politique, économique
et culturelle.
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Photographie, cinéma et télévision
La technique de la photographie s’est développée pendant tout le XIXème siècle. Le premier film
parlant est né en 1927. En 1930 l’industrie cinématographique explose et la diffusion de la
télévision après la guerre fut très rapide.
Les mutations du rapport à la culture
La médiatisation produit des conséquences jusqu’au cœur des processus de constitution de la
société et de socialisation des personnes. Notons deux (moi je dirais trois) grandes mutations :
l’avènement d’un espace public médiatisé, l’avènement d’une industrie culturelle de masse et le
décentrement de la transmission culturelle.
L’espace public médiatisé constitue un rapport social entre d’une part un public et d’autre part des
collectifs d’édition et d’émission (privé ou public). La fonction de cet espace est de permettre
d’abord la communication sociale au-delà des limites physiques et sociales. Cette communication
médiatisée change les règles de l’interaction car elle ne permet pas sa réversibilité comme dans un
dialogue face à face. Les journaux établissent un « agenda » des questions qui apparaissent relevé
de l’ordre collectif. Tout cela est bien sur l’objet de tentatives permanentes de capture par des
groupes particuliers ou des Etats qui tentent, d’influencer le devenir social.
Avec la presse imprimée populaire, de nouveaux marchés s’ouvrent au capitalisme dès le XIXème
siècle. La création « d’industries culturelles » est un long processus de développement des médias.
Ainsi, avec l’industrie du cinéma en 1930 et l’introduction successive de la radio et l’arrivée de la
télévision, il aura fallu toujours plus d’investissements ouvrant sur des marchés énormes. Mais le
capitalisme n’a pas été le seul maitre du jeu, beaucoup de pays possédaient le monopole de la
radiodiffusion jusqu’en 1970.
Le sujet individuel (un homme au hasard) est, du point de vue de la socio et de l’anthropo,
constitué à travers des interactions symbolique qui le lient aux autres sujets sociaux. Les
interactions avec des « autrui significatifs » (les gens qui l’entourent) et des autres plus ou moins
lointains sont constitutives de l’identité. Le poids des interactions médiatisées s’accentue au
détriment des interactions en co-présence. On se trouve donc devant un processus qui a la même
portée de décentrement (moi j’aurais dit de centralisation) que l’exo-éducation mais qui est
beaucoup moins contrôlé par l’Etat.
Axe 3 : L’axe socio politique
Durant les dernières années du 20ième siècle, beaucoup de bouleversements politiques ont eu lieu,
mettant en place une multitude de nations nouvelles. Ce qui bouleversa la situation géopolitique et
géo militaire. Nous avons aussi vu, dès lors, que le capitalisme devint mondial, grâce à l’explosion
des technologies de la communication (axe 1) ; que la médiatisation est devenue aussi globale,
mettant en péril les ordres publiques fermés (axe 2). Bref le pouvoir est en voie de transformation
profonde.
Le pouvoir constitue une des questions les plus importantes de la S&A mais nous n’allons voir
qu’un de ses aspects les plus importants : la construction de l’Etat contemporain.
L’Etat ne date pas d’aujourd’hui, on retrouve des traces d’ « étatisation » dès le néolithique mais ce
qui nous intéresse, ce sont les rapports Etat – société entre le 19ième et le 21ième siècle.
3.1 Bref rappel historique
A l’aube de la révolution industrielle, l’Etat dans le monde entier a connu un processus
révolutionnaire qui l’a profondément changé : dans sa structure, sa légitimité, ses règles de
fonctionnement.
Quatre dynamiques profondes traversent les sociétés en voie de modernisation. Celles-ci vont
toutes avoir une incidence directe sur le pouvoir et la forme de l’Etat moderne :

L’Etat-nation va se construire comme une entité culturelle homogène, articulée
autour de la langue nationale, de croyances commune et d’une histoire partagée.
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
La base sociale change de nature : au 18ième et 19ième siècle ce sont les bourgeois
qui vont prendre le pouvoir au détriment des aristocrates.

Les révolutions vont faire apparaître un nouvel ordre juridique et ouvrir la voie à la
citoyenneté. L’Etat se fonde sur les droits.

L’Etat-nation va être entraîné dans un vaste mouvement d’expansion sous deux
formes :
o
Elan d’impérialisme va faire tomber une bonne partie des sociétés africaines
et asiatiques sous l’emprise des européens
o
En Allemagne, Russie et Japon, un mouvement annexionniste va pousser à
l’expansion territoriale mitoyenne.
La construction étatique s’articule entre ces quatre dynamiques qui tantôt se supportent
mutuellement, tantôt rentrent en contradiction.
3.1.1 La dynamique de la nation
L’Etat-nation est une invention moderne, on n’en trouve pas trace dans l’Antiquité sauf peut-être
en Israël sous une forme embryonnaire. On peut définir cette notion d’Etat comme étant « l’unité
d’un appareil institutionnel d’Etat, d’une identité culturelle homogène et d’un territoire ». La
différence avec l’Etat réside donc dans l’homogénéité culturelle. Il ajoute aussi un monopole de
l’éducation légitime aux monopoles de la violence et de l’impôt.
La formation d’un tel Etat moderne se rencontre pour la première fois en 1648 dans le Traité de
Westphalie.
Les processus de construction de l’Etat-nation ont été très différents dans leur nature et dans leur
rythme selon les pays rencontrés. Ces différentes se remarquent autant dans des discours
idéologiques articulés que dans des pratiques d’intégration nationale très différentes les unes de
autres.
La dialectique entre l’Etat et la nation
Cette expression d’ « Etat-nation » soulève à la fois la tension et l’unité entre les deux termes. Le
mythe national serait donc une unité et une singularité culturelles car on présent la notion comme
antérieur à l’Etat. Un tel mythe est entretenu par des mouvements nationalistes qui cherchent tous
à démontrer l’existence d’une nation, même sans Etat.
Mais la réalité sociologique est bien différente, il n’y a pas d’antériorité entre les deux. L’unité
culturelle est le résultat d’un processus d’unification qui résulte de volontés et d’appareils politiques
mais aussi de processus culturels spontanés.
Trois processus furent porteurs de nationalismes :



Constitution de forces armées modernes.
Unification d’entités culturelles homogènes autour de la langue et de la culture.
Constitution de discours historiques et de dispositifs symboliques nationaux.
Les forces armées modernes
La constitution d’un Etat passe par l’exercice du monopole de la violence, càd de la constitution de
forces armées organisées et centralisées, tournées tant vers l’ennemi extérieur qu’intérieur.
Avant, les armées étaient constituées de mercenaires commandées par des « professionnels » au
service d’un seigneur.
Après les révolutions, l’armée ne pouvait plus être structurée par une hiérarchie aristocratique. Ce
sera une armée de citoyens égaux, liés entre eux par une commune appartenance à la nation.
Cette double appartenance qu’est la « mère-patrie » fondait l’acceptation de chacun : mourir au
combat.
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L’armée moderne va se caractériser par une conscription nationale et une mobilisation de masse
qui vont avoir au moins deux conséquences :

Transformation de l’échelle de la guerre : la mobilisation totale des peuples
conduira aux grands massacres des deux premières guerre mondiale.

Formation d’une conscience nationale sacrificielle : le sacrifice au combat existait
déjà au Moyen Age mais il était expliqué par des voies religieuses. Maintenant on a
trouvé un moyen de l’expliquer par des voies profanes.
Comme le dit Anderson : « les grandes guerres de ce siècles… ne sont pas tant
extraordinaires par l’ampleur sans précédent de leurs victimes que par les
multitudes de citoyens qui se laissèrent persuader de donner leur vie. »
L’armée moderne va être structurée selon la stricte hiérarchie et la discipline nécessaire à une
action collective, ordonnée et efficiente en situation de vie ou de mort. La liberté de parole,
d’association, le respect de la propriété privée cessent de valoir dès que l’on passe du « civil » au
« militaire ». L’armée constituera longtemps une sorte d’ « Etat dans l’ Etat » qui sera aussi une
menace pour la démocratie.
Langue, éducation, médias
L’homogénéité culturelle multiples et convergents vont caractérisés les Etats modernes du 19 ième et
20ième siècle. Trois facteurs en ressortent :



Politique de la langue
Développement de l’enseignement obligatoire
Extension de l’espace médiatique national.
Tous les nationalismes ne reposent pas sur la langue. Un bon exemple est le développement des
nationalismes américains. En revanche comme dit Anderson : « dans les nationalismes qui entre
1820 et 1920 ont changé la face du Vieux Monde, les « langues nationales d’imprimerie » ont eu
une importance politique et idéologique centrale ». La langue nationale est une langue populaire
écrite qui signifie d’une part qu’il s’agit d’une langue imprimée qui remplacera le latin et qui sera
donc plus lue ; d’autre part une langue exemplifiée, grammaticalisée et codifiée par des lettrés.
Comme le dit Hobsbawm : « L’instruction publique, la justice et l’administration furent les trois
forces qui firent de la langue une condition primordiale d’appartenance à la nation ».
Des politiques d’alphabétisation des masses et d’imposition de la langue nationale vont en effet
permettre l’homogénéisation culturelle nationale.
L’espace de la communication médiatique est lui aussi un des vecteurs importants de constitution
d’un collectif culturel. Surtout avec la politique radiophonique et télévisuelle.
L’historiographie nationale
Une historiographie va se développer : « d’Augustin Thierry à Lavisse, les historiens du 19ième
siècle s’attelleront à cette tâche, indissociablement savante et pédagogique, encouragés par les
pouvoirs publics. Entreprise multiforme, englobant aussi bien la rédaction des manuels d’instruction
primaire que le développement des études érudites. L’œuvre de a Monarchie de juillet fonde en
1834 la Société de l’histoire de France, dont le but est de publier des documents relatifs à l’histoire
nationale ; il multiplie les chaires d’histoire. Un an plus tard, le gouvernement lance un Comité des
travaux historiques et scientifiques, toujours en place actuellement, qui édite de nombreux
documents » nous dit Rosanvallon.
3.1.2 La dynamique des classes
Les marxistes ont baptisé les révolutions qui ont renversé l’Ancien régime « révolutions
bourgeoises ». En effet, la période 1789 à 1870 fut la période pendant laquelle les bourgeois ont
pris les pouvoirs politiques par les bouleversements révolutionnaires mais ils étaient déjà avant
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socialement dominante. L’Etat du 19ième siècle est donc Etat mis au service de la force économique
dominante, celle de la bourgeoisie.
L’Etat bourgeois
Le capitalisme n’a pu se développer qu’en articulation avec l’Etat dans les secteurs économiques
névralgiques :



Commerce : le marché des produits passe par le contrôle des douanes. Question : libreéchange et protectionnisme.
Industrie : cette politique nécessite la création et l’entretien d’infrastructures collectives et
d’une régulation du marché du travail.
Finance et banque : généralisation de la société par actions, régulation des cours de la
bourse et développement de la banque. Tout cela implique une politique monétaire.
Ce couplage fonctionnel de l’Etat et de l’économie industrielle en développement n’a pu se réaliser
que par la domination de la bourgeoisie sur la vie politique et sociale.
La déstabilisation de l’Etat bourgeois
La lutte des classes va ébranler cet Etat bourgeois. Elle prend l’allure d’une menace révolutionnaire
qui va miner la stabilité de l’Etat jusqu'à la seconde guerre mondiale. Une opposition ouverte aux
politiques conservatrices va prendre forme en Europe en 1830. Des mouvements comme
l’anarchisme, le communisme, le socialisme élaborent des doctrines et fondent des actions
collectives.
L’Etat social et l’expansion de la classe moyenne
Après la seconde guerre mondiale, dans un contexte de guerre froide, les sociétés occidentales
optent pour la pacification des classes. Elles vont donc institutionnaliser les compromis
fragmentaires de classes élaborés (les compromis) au fil des conflits de la société industrielle.
Composantes de la construction d’un Etat social :

Politique keynésienne : construction d’un marché
consommation au prix de déficits budgétaires vertueux
intérieur
par
le
soutien
à
la

Développement du droit du travail de la concentration sociale et négociation collective

Redistribution du revenu par les droits sociaux et par le développement des services
publics
Sur le plan politique, l’Etat social est un Etat néo-corporatiste qui est un Etat qui accorde des
pouvoirs réels aux groupes et représentants socio-professionnels. Il a aussi un caractère
démocratique, respectueux de l’Etat de droit.
Sur le plan de la structure de classe de la société, on remarque une extension d’une vaste classe
moyenne qui devient la base électorale des principaux partis politiques. La « socio-démocratie » et
la démocratie chrétienne représentent en Europe, les deux piliers.
3.1.3 La dynamique des droits
L’Etat moderne va être limité par le droit. Ce processus ne se réalise pas en un coup. On peut
distinguer quelques grandes étapes de ce processus de juridisation qui est un processus de
conquête de la citoyenneté.
L’Etat de droit civil et constitutionnel
La société civile va se distinguée de l’Etat en un espace régi par le droit civil, par opposition au
droit public qui s’applique à l’Etat. Ce processus date du Moyen Age mais il trouve son
aboutissement dans la rédaction des Codes juridiques fondamentaux au cours de la fin du 18 ième
siècle et de la première moitié du 19ième.
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Les droits civils définissent l’individu comme un sujet de droit capable de se lier par contrat,
d’acquérir, de vendre et d’hériter de la propriété.
Le droit public définit les conditions d’exercice de la souveraineté politique et donc limite son
empan : Etat est limité de l’intérieur par la séparation des pouvoirs et extérieurement par les droits
subjectifs des citoyens.
L’Etat de droit démocratique
L’Etat de droit devient démocratique lorsque la souveraineté est donnée au peuple :

Reconnaissance du droit de vote universel et égal à tous les citoyens : la question est de
savoir qui est membre du peuple, ou de comment définir la nation. Les critères
économiques, culturels, de classe, le lieu de naissance,… vont interférer dans la définition
de la citoyenneté universelle.

Ouverture d’un espace social de libre communication : les libertés constitutionnelles
d’opinion et d’expression ouvrent un espace de communication protégé par le droit. Cet
espace permet une discussion de tous les aspects de la politique.

Souveraineté populaire signifie aussi la liberté d’association en partis politiques : cela va
impliquer une dynamique associative nouvelle, celle des partis politiques.
L’Etat social
La pacification du conflit des classes est passée par une juridisation progressive et même une
constitutionnalisation du compromis de classes.
Le droit du travail a limité la liberté contractuelle. La fixation du salaire et les conditions de travail
ont fait l’objet de réglementations. Les conditions d’embauche et de licenciement ont été fixées par
la loi.
Les droits sociaux ont institué un système d’assurance sociale portant sur le chômage, la maladie,…
L’exercice de ses droits sociaux a été liée à l’émergence d’une constellation d’associations qui
traduisent les positions socio-économiques en positions politiques dans l’espace public.
Les droits culturels
Après 1945, une génération de droit nouvelle accorde au citoyen une protection juridique de
certaines libertés culturelles. Il s’agit de droits individuels ou collectifs. La reconnaissance de tels
droits culturels rentre évidemment en contradiction avec l’affirmation de l’homogénéité culturelle
des nations et rencontre donc de nombreuses résistances.
3.1.4 La dynamique impérialiste
Entre 1875 et 1914, le monde est dans une phase d’expansion : l’ère des nations triomphantes fut
aussi celle des empires tentaculaires. Tous les continents sauf l’Europe vont être découpés en
territoires placés sous l’autorité directe d’une poignée d’Etat.
Il faut noter qu’il n’y a aucune nécessité logique à l’expansion impériale. Les partisans du
libéralisme économique ne pouvaient que réprouver la colonisation et la classe ouvrière ne voyait
pas cela d’un bon œil.
Pourtant le nationalisme poussait des groupes sociaux à l’impérialisme, surtout dans la petite et
moyenne bourgeoisie. Cet impérialisme est nourri par un modèle d’identification à la race ou à la
civilisation. Cela créé un sentiment de supériorité sur les autres peuples.
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Le rapport politique entre administration coloniale et société colonisée
Les peuples colonisés n’étaient pas des peuples politiquement informes. On retrouve plusieurs
formes d’administration : clan, groupes lignagers, tribus, … Il y eut des révoltes contre le pouvoir
colonial.
Les rapports traditionnels forment en revanche un obstacle permanent à la pénétration coloniale.
Pour les rencontrer on peut par exemple, reconnaître une authentique autonomie à des chefs et
pouvoirs locaux, moyennant leur loyauté à l’égard du pouvoir colonial dans quelques domaines
jugés primordiaux (indirect rule).
Dans d’autres cas, les colonisateurs ont carrément fait alliance avec des sous-groupes ethniques ou
culturels, jouant sur les clivages internes aux sociétés indigènes et les manipulant selon leurs
intérêts.
Textes à lire à titre d’exemple (pp. 131-132)
Le nationalisme dans le Tiers Monde
L’Etat colonial est un Etat sans nation, une collection d’ethnies ou de fragments d’ethnies, formée à
l’extérieur par le colonisateur. Le tracé des frontières coloniales n’obéit à aucune considération
sociale ou culturelle, c’est le fruit d’accords entre grandes puissances. Dans un premier temps, la
nation est donc une création coloniale. Cependant une certaine appropriation de la forme de l’Etatnation par les peuples du Tiers Monde s’est effectuée dans un temps second, à l’occasion des luttes
pour l’indépendance.
Ces luttes d’indépendance ont en effet jeté les bases d’un nouveau rapport entre Etat, société et
nation. La volonté de liberté des peuples colonisés s’est exprimée dans le langage importé de l’Etat
nation. Il faut donc se souvenir que les origines du nationalisme africain sont différentes de celles
en Europe. L’Afrique pré indépendante n’est pas le résultat d’une révolution industrielle. Le
nationalisme africain traduit un mouvement de anti-colonialisme.
La dynamique nationaliste s’est souvent composée, dans le monde colonial, avec une dynamique
de classes. Les nationalisations ont été mises à l’ordre du jour des nouveaux Etats indépendants
pour des raisons qui appartiennent simultanément à un discours nationaliste et marxiste. Mais, il
faut noter que la dynamique de classes dans le Tiers Monde a pris une tout autre allure qu’en
Europe en raison du faible niveau de propagation du salariat. La question paysanne a largement
dominé le conflit social dans le Tiers Monde. En revanche, la dynamique de construction d’un Etat
de droit fut la grande absente des indépendances dans le Tiers Monde, à quelques exceptions près.
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