Bultot Alexandre ESPO1113A : Sociologie et Anthropologie
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Introduction
0.1 La Sociologie
La sociologie est la science qui étudie la constitution du lien social logos » : renvoie au mot
science et « socius » réfère au prochain). Elle apparaît au XIXème siècle dans le contexte très
précis de la révolution démocratique et industrielle en réaction aux théories abstraites des
Lumières (droit naturel moderne et économie politique).
0.1.1 Le contexte de genèse du projet sociologique
Au XVIII, le mouvement des Lumières (Aufklarung) avait accompagné l’émancipation démocratique
des sociétés européennes. Les Lumières imposent le règne de la raison dans le domaine des
affaires morales et politiques. Habermas et Concorcet étaient tout à fait d’accord avec ces
principes.
La sociologie nait au XIXème siècle dans le mouvement de déception qui a suivi l’époque des
Lumières et de la Révolution française. En effet, la Révolution politique a débouché sur la Terreur
et sur l’Empire. La Révolution industrielle suscite une nouvelle et terrifiante question sociale
qu’aucun programme « aufklarer » n’avait prévue. De nouvelles questions se posent et la
sociologie est appelée à répondre à ces nouvelles questions. Comme la nature physique, la société
a seslois, ses contraintes, etc. La réalité sociale se présente comme une deuxième nature (la
preimère étant la nature physique), qu’il importe de connaître avant de vouloir réformer.
0.1.2 Le développement de la sociologie
Le premier auteur à avoir parler utilisé le mot « sociologie » est Auguste Compte. La sociologie de
Comte contenait déjà toutes les composantes d’un projet qui va se complexifier et se diversifier
après lui.
1. Une fonction cognitive. La sociologie sert à expliquer les phénomènes sociaux, non à les
modifier ou les évaluer. La visée d’une connaissance fondée du réel sociale rattache la
sociologie à la science, quelles que soient ses difficultés à déterminer son cadre
épistémologique.
2. Une fonction critique. Dans ce cas, il s’agit non seulement d’expliquer mais aussi d’évaluer
les phénomènes sociaux, c'est-à-dire de porter sur eux un jugement critique (la société
aime qu’on port des jugements critiques, ça tombe bien). Mais la sociologie n’est pas
engagée en politique (bien qu’après la Révolution industrielle, on aurait pu dire qu’elle était
de gauche). Pourquoi ?
a. On trouve à toutes les époques, des sociologues de tous les bords politiques.
b. Les notions de droite et de gauche dépendent d’un contexte socio-historique donné.
c. Parce qu’elle est en position réflexive, on ne peut tout simplement dire que la
sociologie est de droite ou de gauche.
3. Une fonction de conseil expert. Dans ce cas, le sociologue s’attache à informer et
renseigner plutôt qu’à comprendre et expliquer.
4. Une fonction expressive.
0.2 L’anthropologie
L’anthropologie sociale et culturelle a pour objet l’étude des institutions et des productions
culturelles qui apparaissent dans l’histoire humaine.
0.2.1 Le contexte de genèse du projet anthropologique
Tout comme la sociologie, l’anthropologie est née au XIXème siècle d’une interrogation sur les
autres sociétés, non industrialisées et non modernes. Elle a fait ses premiers pas comme
ethnologie. Il a fallu à l’anthropologie la volonté de rompre avec deux attitudes fondamentales : le
racisme et l’ethnocentrisme.
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0.2.2 Le développement de l’anthropologie
Mêmes fonctions que pour la sociologie
1. Une fonction cognitive. L’ethnologie s’est élargie vers deux directions, expliquant le
passage à l’anthropologie. D’une part l’approche des sociétés primitives s’est transformée
en une réflexion sur les premiers stades de l’évolution des sociétés humaine. L’étude de
toutes ces sociétés couplée à l’étude des autres sociétés qui ont une écriture n’a de sens
que si on peut les comparer. D’autre part, l’approche de ces sociétés mettait à l’avant plan
de la réflexion, la notion de culture (lien de parenté entre les peuples, les mythes, etc.).
2. Une fonction critique. Parce qu’elle est une discipline de l’altérité, l’anthropologie s’est
souvent présentée comme une critique radicale des formes de domination de l’Occident sur
les autres cultures.
3. Une fonction d’expertise. Suite aux mouvements migratoires du dernier demi siècle, la
question de l’inter culturalité devient sans cesse plus pressante. L’anthropologue peut
prétendre à un savoir pertinent.
4. Une fonction expressive.
0.3 Différences et convergences entre sociologie et anthropologie
4 oppositions :
1. La sociologie a eu tendance à comprendre le développement culturel de l’Occident comme
le développement de l’humanité elle-même.
2. Parce qu’elle a affaire à une société industrielle, la sociologie ne va pas développer des
méthodes d’observation participante (au contraire du travail de terrain qui caractérise
l’anthropologie).
3. Le corpus de référence de la sociologie et de l’anthropologie vont différer (deux
départements différents au sein de l’université)
4. Sociologie et anthropologie prennent des chemins épistémologiques différents. Difficulté
pour la sociologie de se dégager de son ascendance philosophique et contenu empirique
fort riche pour l’anthropologie.
Mais :
1. Les sociologues et les anthropologues se lisent et se fréquentent.
2. L’évolution du XXème siècle rend obsolète la distinction entre sociétés modernes et non
modernes. Le Nord est traversé par des courants migratoires du Sud qui ont un impact
certain sur le développement des sociétés du nord
Voilà deux raisons pour donner une introduction globale aux deux matières en un seul cours.
0.4 La démarche du sociologue et de l’anthropologue
0.4.1 Rompre avec les préjugés sociaux et culturels
1. Les savoirs spontanés : chacun à notre manière nous sommes un peu sociologue, nous
donnons de petites explications sur ce qui nous entoure. Mais le problème, c’est que nous
le faisons sans rigueur et sans souci de la vérité …
2. Les discours officiels : La justice est neutre, l’artiste n’est pas intéressé par l’argent, etc.
Autant de discours qui visent à la légitimation des pratiques plus qu’à la description et à
l’explication rationnelle.
3. Les médias : Les médias sont plus l’écran sur lequel se projette une image qui résulte de
multiples négociations entre acteurs qu’une fenêtre transparente sur le monde.
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0.4.2 Dénaturaliser le phénomène social et culturel
Il faut dénaturaliser l’objet d’étude. Dans ce but, deux procédures sont ouvertes. L’une met
l’accent sur la diachronie (l’histoire), l’autre sur la construction synchronique (à un moment
donné).
La première procédure consiste à montrer la dimension historique des pratiques sociales (mêmes
celles qui apparaissent les plus « naturelles ». Luc Van Campenhoudt a dit « la mise en perspective
historique permet de voir en quoi, ce qu’on appelle une « réalité sociale » comme une institution ou
un problème ne tombe pas du ciel ».
L’autre procédure, complémentaire, met en lumière la « construction sociale de la réalité ». On
peut montrer que les catégories de pensée sont le résultat, à un moment donné, de multiples
interactions entre des acteurs, des groupes, etc.
La « dénaturalisation » n’est pas facile car la « naturalisation » masque les rapports sociaux qui
sont à la base de notre perception du monde. Karl Marx ou Roland Barthes ont montré que la
« naturalisation » était un des procédés de gitimation les plus puissant des rapports de pouvoir
dans les sociétés contemporaines.
0.4.3 Appréhender des relations plutôt que des entités
La « substantialisation » va souvent de pair avec la « naturalisation ». On évoque souvent dans un
discours commun des « entités collectives » comme si elles étaient des individus. Du point de vue
de l’anthropologue ou du sociologue, ces entités n’existent pas (armée, famille, parti, etc.). Toutes
ces entités ne sont que des « paquets de relations ». Nous parlons ici de rapports, tout ce qui suit
dans ce cours aborde de tels rapports (rapport de domination, rapport de genre, rapport
génération, etc.). Ces rapports sont étudiés sous trois points de vue.
- On peut analyser les rapports sociaux selon des échelles très différentes (ex : carte d’état
major et carte de l’atlas). Il est impossible de donner un discours à l’échelle zéro (qui
reviendrait à expliquer la réalité) et donc chaque discours est « réducteur ». Un des
problèmes majeurs de la sociologie et de l’anthropologie est d’articuler rigoureusement des
discours de connaissance construits à des échelles différentes sans pour autant tomber
dans la confusion de toutes les échelles.
- Analyser « les logiques » à l’œuvre dans la constitution de ces rapports.
- Analyser comme les rapports sociaux se connectent entre eux.
0.4.4 Décentrer les perspectives
Le chercheur est situé comme n’importe quel acteur social. Le pari d’une recherche en sociologie et
en anthropologie, c’est le pari du décentrement. Le chercheur en sociologie et en anthropologie
accepte de prendre sur le monde le point de vue des autres, de rentrer dans leur logique, de
restituer la cohérence de leur point de vue. Il s’agit d’expliquer pourquoi un acteur ou un groupe
adopte telle ou telle perspective sur le monde. A noter qu’un tel décentrement n’implique pas une
attitude relativiste à l’égard de la vérité (une mauvaise vision du monde est due à un manque
d’information de l’acteur social comme dit Marx).
Définition de « Epistémologie » :
- processus de genèse d’une science
- s’intéresse aux concepts mis en œuvre pour interpréter les données, les hypothèses, etc.
0.4.5 Chercher à articuler les théories et les données empiriques
A la différence des philosophes, les sociologues et anthropologues tentent d’expliquer le réel sur
une base empirique. Deux attitudes fondamentales sont ouvertes au chercheur :
- le réel social est un ensemble de faits sociaux qui peuvent être objectivés par des
procédures cognitives idoines (exemple : des relevés de frontières indiquent le flux
migratoire)
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- le réel social est tissé par des symboles qui demandent à être chiffrés (plutôt que
constatés) (exemple : que cache un échange entre deux acteurs)
Toutes ces données doivent être articulées, comparées et regroupées par des concepts
interprétatifs. C’est à ce stade qu’on peut dire que le chercheur fait œuvre scientifique.
0.4.6 Savoir que la recherche sociologique et anthropologique constitue une pratique sociale parmi
d’autres
La S&A constituent elles mêmes des pratiques sociales et culturelles.
- Comme production de savoir. La pratique sociale et anthropologique participe d’une
division des taches officielle, instituée dans des appareils de production de savoir comme
l’université qui lui ouvre des possibilités mais, en même temps, constitue des zones
aveugles dans son champs de visibilité. On peut faire une distinction entre recherche
« appliquée » (expertise pour un gouvernement par exemple) et la recherche fondamentale
mais cette distinction n’est que relative car le milieu universitaire est loin d’être neutre.
- Comme diffusion de savoir. La S&A rentrent de plein pied dans le débat social, alimentant
certaines tendances, désavouant d’autres discours etc. Concernant ce point, il est à noter
que les sociologues et anthropologues s’expriment dans un jargon inaccessible au commun
des mortels pour éviter les récupérations (enfin, c’est ce qu’ils croient).
- Les communautés de chercheurs font partie intégrante des objets qu’ils étudient. (Là j’ai
pas bien compris le paragraphe)
0.5 Plan du cours
Nous aborderons les grandes dynamiques du changement social sous 3 angles : angle
socioéconomique, angle socioculturel et angle sociopolitique.
Pour chacun des axes, nous suivrons 3 démarches :
- Une mise en perspective historique
- Une mise en perspective analytique : concepts cléfs qui permettent d’analyser les grandes
dynamiques du changement.
- Une ouverture vers des grandes problématiques sociologiques et anthropologiques
Axe 1 : L’axe socio-économique
1.1 Bref rappel historique
Ce n’est qu’au XIXème siècle que la révolution industrielle début vraiment. En un très court laps de
temps, la production, la mobilité, la centralisation démographique, etc. ont augmenté de manière
foudroyante. A partir de 1960, nous sommes entrés dans une période « post-industrielle ».
1.1.1 La révolution des techniques de production et l’organisation du travail
Le leadership des découvertes techniques a d’abord été l’Angleterre entre 1810 et 1820. Ont
ensuite suivi, les européens continentaux et ce sont finalement les Américains qui arrivent en tête
aujourd’hui. Au plan strictement technique, on distingue 3 vagues de découvertes :
- Première vague : machine à vapeur et charbon. La mécanisation est introduite dans
l’industrie textile dès le début du XVIIIème siècle. Le charbon de terre se substitue au
charbon de bois et est utilisé dans la métallurgie. De la mécanique et de la sidérurgie en
ressort : la machine à vapeur.
- Deuxième vague : l’électricité, le moteur à explosion et les applications industrielles de la
chimie. La dynamo est inventée par Gramme en 1869 et c’est 10 ans plus tard que la
première ampoule brille. Entre 1865 et 1885, le moteur à 4 temps est mis au point et enfin
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l’industrie chimique (javel surtout) se développe de manière fulgurante au XIXème siècle
avec la production de colorants, plastique et industries du pétrole.
- Troisième vague : l’énergie nucléaire. Au XXème siècle, on découvre la fission nucléaire. A
partir de 1960, le développement nucléaire est surtout axé sur la production d’électricité.
L’organisation du travail : usine
L’atelier de l’artisan est progressivement remplacé par la manufacture (l’usine).
- Une accumulation du capital immobilisé : Avec un capital financier amassé via des actions
ou des crédits d’investissement, il se passe une concentration spatiale d’outils de
production.
- Un contrôle de la rentabilité ouvrière : Cela suppose un détachement de l’ouvrier par
rapport à la famille et sa soumission à une discipline. Cela demande une technologie
politique de mise au travail des masses.
- Une augmentation quantitative permanente des concentrations de travailleurs
- Une perte de professionnalité ouvrière : On ne se dit plus « forgeron » ou « artisans » mais
ouvrier. Cet élément est crucial pour comprendre l’avènement d’une politique ouvrière.
1.1.2 L’urbanisation
L’urbanisation existe depuis le néolithique. C’est au XIXème siècle qu’à lieu l’explosion des villes.
Paul Bairoch dit : « le siècle-charnière de l’urbanisation du monde développé ».
Sur le plan social, la ville industrielle ne ressemble pas du tout à la ville médiévale :
- Les industries sont présentes dans la ville elle-même ce qui crée des problèmes de
circulation et de pollution.
- La plupart de la population des villes industrialisées est salariée. La campagne devient un
espace de liberté.
- L’industrialisation engendre une forte hétérogénéité sociale de la composition de la
population urbaine (ségrégation par quartiers).
- Compte tenu de la concentration et de l’augmentation de la population, les villes
deviennent des lieux d’agitation et de fermentation sociale.
1.1.3 L’institution du salariat
Il existait déjà au Moyen-âge des formes de travail quasi salariales. Mais c’est au XIXème siècle
seulement que le rapport salarial va commencer à jouer son rôle « d’attracteur institutionnel »
dans la vie économique de nos sociétés. Le salariat devient la forme dominante de rapport de
travail.
Définition : Le salariat
- Le salariat est un contrat
- Le salariat implique une rémunération du travailleur : Le salarié tire ses revenus de son
travail et non pas du produit de son travail. Le salaire est composé d’une partie monétaire.
La rémunération peut être directe ou indirecte.
- Le salariat institue un lien de subordination limitée.
- Le salariat implique le renoncement du travailleur à la maitrise du produit de son travail.
1.1.4 La colonisation
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