d'Espagne, ce qui explique leur implantation dans le Sud-Ouest pyrénéen : les camps d'hébergement de Bram, Argelès et Saint-Cyprien, les camps de
femmes du Vernet et de Rieucros, les Milles près de Marseille pour les étrangers en instance d'émigration. Gurs est affecté aux juifs allemands âgés, que les
nazis expulsent du Palatinat. Début 1941, sont créés Rivesaltes, Noé et Récébédou pour les ménages âgés et les infirmes, tandis que sont fermés Saint-
Cyprien, Argelès et Agde, près de Perpignan. Il existe aussi de nombreux « petits camps ».
En décembre 1940, on estime à 35 000 le nombre d'internés juifs étrangers dans les camps administrés par Vichy. Ce chiffre diminue dans les mois suivants.
Epouvantées par les conditions d'internement, les assistantes sociales, les bénévoles de la Cimade, font le siège des services préfectoraux pour faire sortir
en priorité les enfants. Ils savent convaincre. Après les enfants, les adultes peuvent, au printemps 1941, être libérés s'ils peuvent justifier de ressources. Les
hommes se retrouvent dans des groupements de travailleurs étrangers.
Les familles (10 000 personnes à l'été 1942) sont assignées à résidence dans des petits centres ruraux. Ce sont elles que les préfets zélés feront arrêter pour
rejoindre les victimes des rafles de l'été 1942.
Les camps sont peu nombreux en zone occupée. Les deux principaux sont créés dans le Loiret à Beaune-la-Rolande et à Pithiviers. Il en existe aussi à
Troyes, à La Lande, près de Tours, à Mérignac près de Bordeaux, et à Poitiers.
Les premières vérifications d'identité ont lieu en zone occupée le 14 mai 1941 : 6 694 juifs de Paris sont convoqués au gymnase Japy, à la caserne Napoléon
ou à celle des Minimes. Un peu plus de la moitié se présente. Des convois partent pour Pithiviers et Beaune-la-Rolande. Le 20 août 1941, 4 000 juifs sont
envoyés à Drancy, en proche banlieue parisienne, vidé de ses prisonniers britanniques. Le 6 décembre 1941, un millier de notables juifs de Paris sont
arrêtés. Les grandes rafles de l'été 1942 vont avoir une tout autre ampleur, témoigner de la collaboration franco-allemande et toucher aussi les femmes et les
enfants.
En 1943 et 1944, la physionomie de la communauté juive française est bouleversée par rapport au début de la guerre. Les déportations l'ont réduite et les
survivants se sont déplacés. En juin 1944, il ne resterait que 60 000 juifs à Paris. La zone Sud est devenue terre de refuge. La population juive y atteint 140
000 individus en 1943 et 150 000 en 1944. En février 1943, on en compte 40 000 dans la région de Lyon, 32 000 à Marseille, 25 000 à Toulouse, 15 000 à
Nice, 12 000 à Limoges, 8 000 à Montpellier et autant dans la région de Clermont-Ferrand.
Le mouvement incessant de cette population obéit aux injonctions de l'administration et aux rumeurs. La crainte d'une rafle fait fuir un domicile provisoire.
L'espoir d'une protection amène un afflux de population. Des expulsions, touchant surtout les juifs étrangers, ont lieu dans le Var, les Pyrénées-Orientales,
l'Hérault, l'Aude, la Haute-Garonne, l'Ariège, les Basses-Pyrénées. Les expulsés se retrouvent dans la Creuse, le Gers, le Lot et la Corrèze. Le 31 mai 1943,
en prévision des vacances de Pétain à La Bourboule, les juifs en sont chassés. Ils doivent quitter aussi Châtel-Guyon et Aix-les-Bains, où les dirigeants de
l'Etat et de la haute administration française envisagent de se reposer.
L'occupation d'une partie de la zone libre par les Italiens en novembre 1942 leur offre un répit. Les Italiens n'appliquent pas les dispositions antisémites et
protègent les juifs des demandes de l'Etat français : Grenoble, Cannes, Nice sont des refuges sûrs. Mais en juillet 1943, le grand Conseil fasciste démet
Mussolini. Pendant les quelques semaines qui séparent cet événement de l'armistice conclu en septembre 1943 entre l'Italie et les Alliés, des personnalités
s'efforcent de sauver les juifs de la zone « italienne ». Le banquier Angelo Donati, le père Pierre Marie-Benoît, le grand rabbin de Genève s'adressent aux
Alliés et aux Suisses. Mais ils n'obtiennent ni le transfert des juifs en Afrique du Nord, désormais libérée, ni l'ouverture de la frontière helvétique.
Après l'armistice italien, les Allemands prennent la relève. Une nouvelle dispersion des juifs commence. Elle est particulièrement bien réussie pour les enfants
grâce à la collaboration de l'OSE juive (OEuvre de secours aux enfants) et des chrétiens. A la différence de l'UGIF (Union générale des israélites de France)
qui refuse d'évacuer ses foyers d'enfants - ce qui leur sera fatal -, l'OSE comprend le danger que courent les 800 jeunes qui lui sont confiés dans des foyers
aux adresses bien connues. Aidée par les oeuvres chrétiennes et parfois par l'administration (Pierre Laval le 5 septembre 1942 a fait prévenir le pasteur