I - Commerce et environnement au sein de l`ordre juridique

publicité
UNITAR
Programme de formation à l’application du droit international de
l’environnement
Cours 9
Environnement et commerce
Agnès Michelot
« LOGO »
OFFICE FEDERAL SUISSE
DE L’ENVIRONNEMENT, DES FORETS
ET DU PAYSAGE
« LOGO »
PNUE
« LOGO »
Union mondiale pour la nature
Ministerie van
Buitenlandse Zaken
Pays-Bas
« LOGO »
MINISTÈRE DE
L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE
ET DE L’ENVIRONNEMENT
1
Programme de formation à l’application du droit international de l’environnement
Le Programme UNITAR de formation à l’application du droit international de
l’environnement est destiné à promouvoir le renforcement des composantes juridiques et
institutionnelles nationales en vue d’une meilleure gestion de l’environnement dans la
perspective du développement durable. Il a été conçu précisément pour répondre aux
besoins des pays en développement et des pays à économie en transition.
Le Programme a été conçu en partenariat avec la Commission du droit de
l’environnement de l’Union mondiale pour la nature (UICN) et le Programme des Nations
unies pour l’environnement (PNUE). Il est mis en œuvre en coopération avec d’autres
organisations partenaires dont l’Université des Nations unies (UNU).
L’enseignement par correspondance est l’élément central du programme et vise à
atteindre une large audience dans des organisations tant gouvernementales que non
gouvernementales des pays du monde entier. Cet enseignement par correspondance sera
complété par des ateliers et des séminaires spécialisés qui seront organisés au niveau
régional et sous-régional parallèlement à des efforts ciblés de renforcement des capacités
au niveau national en matière de droit de l’environnement.
L’objectif du programme est de sensibiliser et d’approfondir les connaissances
concernant les obligations et les perspectives afférentes au droit de l’environnement. Ces
manuels de formation au droit de l’environnement contiennent des textes difficilement
disponibles par ailleurs et sont largement distribués pour une utilisation autonome :










Introduction au droit international de l’environnement
Le rôle des organisations internationales dans l’évolution du droit de
l’environnement
Techniques et procédures en droit international de l’environnement
Négociations internationales sur l’environnement
Droit international de l’environnement : matériaux dangereux et déchets
Droit international de l’environnement : diversité biologique
Droit International de l’environnement : atmosphère, eau douce et sol
Droit international de l’environnement : milieu marin, régions polaires et espace
extra-atmosphérique
Environnement et commerce
Évolution et principales tendances du droit international de l’environnement
2
Environnement et commerce
Agnès Michelot
Soutenu financièrement par l’Agence fédérale suisse de l’environnement, des forêts
et du paysage, le ministère néerlandais de la coopération pour le développement et le
ministère de l’environnement de la France.
Cours 9 du Programme UNITAR de formation à l’application du droit
international de l’environnement, en coopération avec la Commission du droit de
l’environnement de l’Union mondiale pour la nature (UICN) et du Programme des Nations
unies pour l’environnement (PNUE).
Institut des Nations Unies pour la formation et la recherche (UNITAR)
Genève, Suisse
Janvier, 2003
3
Publié par :
recherche
L’Institut des Nations Unies pour la formation et la
Palais des Nations
CH-1211 Genève 10
Suisse
Copyright :
Institut des Nations Unies pour la formation et la recherche,
1998
Notice :
Michelot, Agnès – Environnement et commerce – Genève,
Suisse : UNITAR, 2003, …. p.
ISBN :
92-9182-017-9
Mise en page :
Brigitte Brunner, Strasbourg, France
Imprimé par :
Nations Unies
Disponible auprès de :
UNITAR, Palais des Nations
CH- 1211 Genève 10
Suisse
Les opinions exprimées dans ce volume sont celles d’auteur et ne reflètent pas
nécessairement la position du Secrétariat des Nations Unies, de l’UNITAR, ou d’aucun des
autres bureaux des Nations Unies mentionnés dans ce volume.
Dans cette publication, les termes employés et la présentation des textes
n’impliquent pas l’expression d’une opinion de la part du Secrétariat des Nations Unies en
ce qui concerne le statut juridique de quelque pays, territoire, ville ou région, que ce soit ou
de leurs autorités ou en ce qui concerne la délimitation de leurs frontières.
Cette publication est protégée par la législation internationale sur les droits
d’auteur. Tous droits réservés. La reproduction, l’enregistrement sur une banque de
données ou la transmission, même partiels, de cette publication, sous quelque forme que ce
soit, et par quelque procédé que ce soit (électronique, mécanique, photocopie,
enregistrement ou autre), ne sont pas permis sans l’autorisation écrite de l’UNITAR.
Imprimé sur papier non chloré.
4
Abréviations
Pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique
Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au
commerce
AFTA
ASEAN Free Trade Agreement
AGCS
Accord général sur le commerce des services (ou GATS)
ALENA
Accord de libre-échange nord-américain
AME
Accords multilatéraux sur l’environnement
ANACDE
Accord nord-américain de coopération et de développement sur
l’environnement
APEC
Forum de coopération économique Asie-Pacifique
ASEAN
Association des Nations du Sud-Est asiatique (Association of South East
Asian Nations)
BanqueNAD Banque nord-américaine de développement
BEAC
Banque des États d’Afrique centrale
CCE
Comité du commerce et de l’environnement
CCE
Commission de coopération environnementale
CCEF
Commission de coopération environnementale transfrontière
CEA
Communauté économique africaine
CEDEAO
Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest
CEEAC
Communauté économique des États de l’Afrique centrale
CEMAC
Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale
CEPGL
Communauté économique des Pays des Grands Lacs
CIJ
Cour internationale de justice
CITES
Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore
sauvages menacées d’extinction
CJCE
Cour de justice des Communautés européennes
CMA
Union monétaire commune
CNUCED
Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement
CNUED
Conférence des Nations unies sur l’environnement et le développement
COI
Commission de l’océan Indien
COMESA
Marché commun de l’Afrique orientale et australe
CPJI
Cour permanente de justice internationale
CSA
Canadian Standard Association
EPA
Agence fédérale de protection de l’environnement
FAO
Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture
FSC
Forest Stewardship Council
GATT
Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (General Agreement
on Tariffs and Trade)
GATS
Accord général sur le commerce des services
HCFC
Hydrochlorofluorocarbone
ISO
International Organization for Standardization
MAP
Millenium African Plan
MERCOSUR Marché commun du Sud (Mercado Comùn del Sur)
NEPAD
Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique
OCDE
Organisation de coopération et de développement économiques
ACP
ADPIC
5
OGM
OMC
OMPI
ORD
OTC
OUA
PECO
PED
PEFC
PHARE
PMA
PMP
PNUD
PNUE
REMA
Organismes génétiquement modifiés
Organisation mondiale du commerce
Organisation mondiale de la propriété intellectuelle
Organe de règlement des différends
Obstacles techniques au commerce
Organisation de l’unité africaine
Pays d’Europe centrale et orientale
Pays en développement
Pan European Forest Certifications Scheme
Poland and Hungary Assistance for the Reconstruction of the Economy
Pays les moins avancés
Normes environnementales sur procédés et méthodes de production
Programme des Nations unies pour le developpement
Programme des Nations unies pour l’environnement
Réunion spécialisée sur l’environnement (Reunión Especializada de Medio
Ambiente)
SAADC
Conférence pour la coordination du développement de l’Afrique australe
SACU
Union douanière de l’Afrique australe
SADC
Communauté de développement de l’Afrique australe (Southern African
Development Community)
SAO
Substances appauvrissant la couche d’ozone
SFI
Sustainable Forestry Initiative
SMC
Accord sur les subventions et les mesures compensatoires
SPS
Accord sur l’application des mesures sanitaires et phytosanitaires
UDEAC
Union douanière et économique des États de l’Afrique centrale
UEMOA
Union économique et monétaire ouest-africaine
UMA
Union du Maghreb arabe
UPOV
Convention internationale pour la protection des obtentions végétales
ZEP
Zone d’échanges préférentiels de l’Afrique orientale et australe
ZLEA Zone de libre-échange des Amériques
6
PRÉFACE
Le droit international de l’environnement est un outil indispensable à la gestion et à
l’administration du développement durable. Il sert de fondement aux politiques
gouvernementales et aux actions de protection de l’environnement, qui garantissent un
usage à la fois équitable et durable des ressources naturelles.
Au cours des dernières années, le droit de l’environnement a connu un essor
remarquable. Plus de cent traités multilatéraux ayant trait à l’environnement ont été
conclus durant les vingt dernières années, sur des sujets aussi divers que la diversité
biologique, la pollution atmosphérique transfrontière à longue distance, le droit de la mer,
les changements climatiques, la désertification et la protection du patrimoine mondial,
culturel et naturel, et un nombre encore bien plus élevé de traités environnementaux ont été
adoptés au niveau régional ou sur une base bilatérale. De plus, de nombreux instruments de
« soft law » relatifs à l’environnement ont été promulgués, comme la Charte mondiale de la
nature de 1982 et la Déclaration de Rio de Janeiro sur l’environnement et le
développement de 1992.
Au niveau national, fort du soutien croissant du public, des pays du monde entier
modifient ou complètent les dispositions législatives, réglementaires et administratives de
leur ordre juridique interne dans le but d’améliorer la gestion de l’environnement.
Pourtant, en dépit de ce développement rapide, de nombreux problèmes subsistent,
en particulier en ce qui concerne l’application et la mise en œuvre des mesures législatives.
Dans de nombreux pays en développement, ainsi que dans les pays à économie en
transition, l’application du droit de l’environnement est sérieusement entravée, souvent par
manque de personnel qualifié, réduisant ainsi l’efficacité des initiatives majeures adoptées
pour la protection de l’environnement.
Renforcer l’application des instruments et des mécanismes juridiques
internationaux est l’un des objectifs principaux de l’Agenda 21, le plan d’action global
pour l’environnement et le développement adopté au Sommet de la Terre de 1992 (cf.
chapitre 39). En outre, les Principes 11 et 13 de la Déclaration de Rio soulignent
l’importance du droit de l’environnement en tant qu’instrument indispensable à une saine
répartition des bénéfices du développement durable.
L’UNITAR estime qu’il est temps de prêter une attention croissante à la formation
dans le domaine du droit de l’environnement. Afin de contribuer aux efforts des
organisations partenaires, l’UNITAR a lancé ce Programme de formation à l’application du
droit international de l’environnement, en insistant tout d’abord sur des cours
d’enseignement par correspondance.
Le Cours 9, Environnement et commerce, fait suite aux huit cours précédents et
traite d’un sujet particulièrement important et délicat : les relations entre le commerce
international et l’environnement.
7
Madame Agnès Michelot enseigne à l’Université de La Rochelle, avec laquelle
l’UNITAR a signé un accord de coopération. Elle participe aux travaux de l’UNITAR
depuis de nombreuses années et dispose d’une expertise reconnue dans la matière.
L’objectif de ce Programme UNITAR est d’aider les pays qui s’efforcent
d’améliorer l’application des dispositions du droit de l’environnement. La formation est un
processus de longue durée. Nous espérons que, grâce à ces cours d’enseignement par
correspondance, notre contribution à ce processus, bien qu’infime, sera utile.
Marcel A. Boisard
Directeur général de l’UNITAR
Sous-Secrétaire général des Nations Unies
8
NOTE
Ce volume est neuvième cours du Programme UNITAR/UICN/PNUE de formation à
l’application du droit international de l’environnement. Il doit être étudié parallèlement
aux autres cours de ce programme d’enseignement par correspondance (Cours 1 à 10)
auxquels ce texte renvoie à plusieurs reprises.
L’objectif de ce Cours est de fournir un outil pédagogique aux responsables
gouvernementaux, aux universitaires, aux juristes, aux juges, aux planificateurs, et aux
représentants des organisations non gouvernementales (ONG) travaillant dans le domaine
du droit, de la politique et de l’administration de l’environnement. Le texte a été conçu
pour permettre aux utilisateurs de s’engager plus efficacement dans les efforts déployés au
plan national pour atteindre les objectifs du développement durable.
Les cours par correspondance sont conçus de manière à ce que les participants puissent
étudier selon leur propre rythme en tenant compte notamment de leurs contraintes
professionnelles. A la fin de chaque volume les participants trouveront des questions
auxquelles ils doivent répondre. Ils recevront ensuite un corrigé de leurs devoirs. A la fin
du 10ème volume les candidats intéressés sont invités à écrire un travail personnel d’au
moins une quinzaine de pages sur un thème de droit international de l’environnement.
Celui-ci sera évalué par le Comité d’évaluation. Si le travail est accepté le candidat pourra
recevoir un Certificat de Réussite. Les participants ayant suivi la formation mais ne
désirant pas soumettre un travail personnel pourront obtenir une attestation de
fréquentation.
Nous espérons que ces nouvelles dispositions permettront à la formation d’être mieux
appréciée par le monde académique et assureront aux participants une véritable
reconnaissance des efforts fournis.
La formation de l’UNITAR peut être consolidée par l’organisation d’ateliers de
renforcement de capacités. Ces ateliers sont organisés en fonction des fonds disponibles.
Mary Sancy
Coordonnatrice de Programme
UNITAR
9
L’auteur
Angès Michelot, de nationalité française, est née à Dijon en 1968. Elle soutient sa thèse
pour l’obtention du grade de docteur en droit public en 1997 à l’Université de Bourgogne
et se voit décerner le prix Henri Gazin de la Faculté de droit et de science politique. Elle
devient par la suite lauréate du prix de thèse de l’Association Française pour le droit de
l’urbanisme (AFDRU) et de la Société Française de droit de l’environnement (SFDE).
Sa recherche la conduit à réaliser des missions dans différentes régions du monde
notamment en Afrique australe, en Inde et en Bolivie.
Elle occupe depuis 1998 les fonctions de Maître de conférences en droit public à
l’Université de La Rochelle où elle dispense des enseignements en droit international
public, droit de l’environnement, droit européen et systèmes juridiques comparés.
Elle prend en charge les relations internationales de la Faculté de droit et de sciences
politique, économique et de gestion de l’Université de La Rochelle et occupe le poste de
Directeur du Centre d’Etudes Juridiques Francophones. Ces fonctions l’amènent à mettre
en place des collaborations dans le domaine du droit de l’environnement avec différentes
universités étrangères en Europe mais aussi en Asie et en Amériques central, du nord et du
sud.
Elle participe à la mise en place puis au développement du volet francophone du
programme de formation à l’application du droit international de l’environnement en tant
qu’associée spéciale puis en qualité d’expert. Elle intervient dans les ateliers de formation
du programme de l’UNITAR et contribue à l’organisation du premier atelier francophone
qui se déroule en France à La Rochelle en 2001.
Consultante pour l’UNESCO sur le programme L’Homme et la Biosphère (MAB), elle
développe une expertise sur la mise en place du réseau de réserves de biosphère en Afrique
de l’ouest.
10
TABLE DES MATIÈRES
INTRODUCTION
COMMERCE ET ENVIRONNEMENT DANS L’ORDRE JURIDIQUE
INTERNATIONAL
A. Contexte historique
1. L’antériorité de l’ordre économique international sur le droit de l’environnement
2. L’intégration du droit international de l’environnement dans l’ordre juridique
international au côté du droit du commerce international
B. Les étapes de la relation commerce / environnement
C. Société internationale économique et environnement à l’épreuve de la
mondialisation
D. Le consensus mondial du développement
1. La coopération internationale pour le développement
2. Théorie du commerce mondial et enjeux de la protection de l’environnement : le
développement durable
E. L’unité de l’ordre juridique international
1. Incompatibilités entre accords multilatéraux de l’environnement et système
commercial multilatéral : application du droit des traités
2. Le règlement des différends
a. Les accord environnementaux et les procédés de règlement
pacifique des différends
b. Le système de règlement des litiges de l’Organisation mondiale du commerce
c. Concurrence des mécanismes de règlement des différends
3. Les organisations régionales d’intégration
Questions et réponses
I.
II. LE DROIT INTERNATIONAL DE L’ENVIRONNEMENT FACE AU REGIME
DU COMMERCE INTERNATIONAL
A. Les principes du système d’échange international
1. Principe de liberté du commerce
2. Les standards du commerce international
3. Les principes du système GATT/OMC
B. De la Conférence de Stockholm au Sommet de Johannesburg : la prise en compte
des impératifs économiques du développement
1. La Conférence des Nations unies sur l’environnement (1972)
2. La Conférence de Rio sur l’environnement et le développement (1992)
3. Le Sommet de Johannesburg (2002)
C. Les mesures commerciales dans les accords environnementaux
1. AME relatifs à la biodiversité
a. Les premières conventions : mesures de protection des espèces
b. La Convention CITES : le système de contrôle des échanges
c. Conventions d’appui à la CITES : réglementation des échanges,
contingentements et coopération
d. Ressources halieutiques et ressources biologiques de l’Antarctique : des
mesures concernant les procédés et méthodes de production
11
e. Les forêts et le commerce du bois tropical : privilégier l’exploitation durable
f. La diversité biologique
i. La Convention sur la diversité biologique
ii. Le Protocole de Cartagène sur la prévention des risques
biotechnologiques, relatif à la Convention sur la diversité biologique
(2000)
2. Les AME réglementant les substances et produits pouvant présenter un risque
pour l’environnement
a. Mesures commerciales pour la protection de l’air et de l’atmosphère
b. Mesures commerciales pour le contrôle des déchets et des substances
dangereuses
D. Les mesures d’appui à la protection de l’environnement comme instrument de
politique commerciale
1. Normes environnementales sur procédés et méthodes de production (normes
PMP)
2. Écolabel et système de certification
3. Instruments économiques : taxes et subventions
Questions et réponses
III. L’ENVIRONNEMENT : UNE LACUNE DANS LE SYSTEME DU
COMMERCE INTERNATIONAL
A. Le GATT : l’environnement comme dérogation
1. Les exceptions de l’article XX du GATT
2. Interprétation restrictive des exceptions de l’article XX : les rapports des
Groupes spéciaux
a. L’affaire Mexique / États-Unis, relative aux restrictions à l’importation de
thon, Groupe spécial du GATT, 3 septembre 1991
b. L’affaire Communauté européenne et Pays-Bas / Etats-Unis, Groupe spécial
du GATT, 14 juillet 1992
3. Le rapport « Commerce et environnement » du GATT de 1992
B. Accords de l’Organisation mondiale du commerce : la prise en compte progressive
mais limitée de l’environnement
1. Le commerce des marchandises
a. Le GATT 1994
i. Continuité avec le GATT 1947
ii. Les exceptions de l’article XX
b. L’Accord sur l’agriculture
i. Contexte
ii. Obligations des Parties
iii. Référence à l’environnement
c. L’Accord sur l’application des mesures sanitaires et phytosanitaires (SPS)
i. Contexte et champ d’application
ii. Contenu
iii. L’Accord et le principe de précaution
d. L’Accord sur les obstacles techniques au commerce (OTC)
i. Champ d’application
ii. Dispositif
iii. Procédure de notification
12
iv. Procédure de règlement des différends
e. L’Accord sur les subventions et les mesures compensatoires (SMC)
i. Champ d’application
ii. Catégorisation des subventions et différenciation des régimes
iii. Conditions applicables aux aides en faveur de l’environnement
iv. Régime applicable aux aides en faveur de l’environnement
v. Procédure anti-subvention
2. Le commerce des services
a. L’Accord général sur le commerce des services (AGCS ou GATS) :
l’environnement, une exception non expressément prévue
i. Les exceptions générales de l’article XIV
ii. Décision sur le commerce des services et l’environnement (15 décembre
1994)
b. L’AGCS et les services environnementaux
i. Le secteur des services environnementaux visés
ii. La portée élargie du principe du traitement de la nation la plus favorisée
iii. L’objectif de libéralisation des mesures gouvernementales restreignant le
commerce (article I.1 et XIX.1)
c. La libéralisation des services environnementaux
i. Enjeu pour les pays développés et contrainte pour les pays en
développement
ii. Formes de libéralisation des services environnementaux
3. Droits de propriété intellectuelle
a. L’Accord sur les droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce
(ADPIC ou TRIPS)
i. Contexte de l’ADPIC
ii. Contenu de l’ADPIC : champ d’application et droit des brevets
iii. La protection de l’environnement comme dérogation au libre-échange
iv. Protection de l’environnement et transfert de technologie
b. L’ADPIC, la Convention sur la diversité biologique et le droit des brevets
i. OMC et CDB : la philosophie commune de la brevetabilité
ii. CDB et ADPIC : divergences et limites
c. Les systèmes sui generis
i. Le modèle de législation de l’OUA
ii. Un régime commun d’accès aux ressources génétiques pour la
Communauté andine
d. Les moyens de la mise en œuvre de l’ADPIC
C. La prise en compte institutionnalisée de l’environnement
1. Le Comité du commerce et de l’environnement (CCE)
a. Mandat du CCE
b. Travaux du CCE
2. Évolution de la « jurisprudence » : des rapports des groupes spéciaux aux
décisions de l’Organe de règlement des différends (ORD)
a. États-Unis, Normes concernant l’essence, nouvelle et ancienne formule
(WT/DS 2), 1996
b. États-Unis, Prohibition à l’importation de certaines crevettes et de certains
produits à base de crevettes, (WT/DS58), 1998
c. Communauté européenne, Amiante (WT/DS 135), 2000
13
Questions et réponses
IV. LES ACCORDS REGIONAUX : LA RECHERCHE D’UN EQUILIBRE ENTRE
COMMERCE ET ENVIRONNEMENT
A. L’Europe
1. L’Union européenne
a. L’intégration de l’environnement dans les politiques communautaires
i. Le principe d’intégration
ii. Le respect des engagements internationaux environnementaux
b. L’environnement comme dérogation à la liberté du commerce et de la
concurrence
i. Le principe d’interdiction des atteintes à la liberté du commerce et à la
concurrence
ii. Les dérogations fondées sur la protection de l’environnement
iii. Les mesures nationales de protection de l’environnement renforcées
iv. Le contrôle de la mesure restrictive par le juge
2. La coopération économique internationale et la protection de l’environnement
a. Les conventions de coopération entre la Communauté européenne et les États
de l’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP)
i. Convention de Lomé IV, 15 décembre 1989
ii. L’Accord de Cotonou, 23 juin 2000
b. L’Union européenne et les pays d’Europe centrale et orientale (PECO)
i. L’appui de l’Union européenne dans la perspective d’un élargissement
ii. L’Accord de libre-échange en Europe centrale
B. L’Afrique
1. Le pluralisme du régionalisme africain
2. Le Traité d’Abuja : un régionalisme continental
3. Les organisations régionales tenant compte de l’environnement
4. Le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD)
C. Les Amériques
1. L’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA)
a. Le Traité ALENA : tentative de conciliation entre libéralisation des échanges
et environnement
i. Les dispositions liant commerce et environnement
ii. Les rapports entre l’ALENA et les accords environnementaux
multilatéraux
b. L’ANACDE
2. Le MERCOSUR
D. L’Asie
1. L’APEC
2. L’ASEAN
Questions et réponses
BIBLIOGRAPHIE
EXAMEN FINAL
14
INTRODUCTION
Droit du commerce international et droit international de l’environnement ont connu une
évolution distincte marquée par l’antériorité de l’ordre économique international sur la
construction du droit de l’environnement.
A présent, le processus de mondialisation génère des questionnements éthique,
philosophique et politique sur la construction et l’évolution de nos sociétés confrontées à la
prédominance de la logique économique. Dans ce contexte aborder la question très
complexe des relations entre commerce et environnement apparaît aussi essentiel
qu’incroyablement difficile.
Les difficultés se situent à différents niveaux en fonction des attentes que chacun peut faire
valoir quant à l’étude d’un tel thème : attentes en termes d’explications, d’analyse et
implicitement de positionnement sur un sujet particulièrement délicat et polémique à
l’issue du sommet mondial sur le développement durable qui s’est tenu à Johannesburg en
septembre 2002.
Pour cette raison il nous faut préciser la démarche suivie pour aborder les liens entre
l’environnement et le commerce. Dans le cadre d’une formation au droit international de
l’environnement, l’approche est évidemment juridique et nous n’abordons pas les
implications économiques, sociales et autres des régimes juridiques établis pour
réglementer les échanges commerciaux ayant un impact sur les politiques
d’environnement . De même nous ne pouvons pas présenter de manière approfondie
l’impact des mesures environnementales sur le développement des échanges commerciaux.
Cependant la prise en compte de ces interactions et de ces phénomènes a guidé la
construction du cours.
Nous avons tenté d’exposer les relations entre droit du commerce international et droit
international de l’environnement, deux espaces normatifs qui se sont élaborés
indépendamment au sein de l’ordre juridique international. Or c’est bien la prise en compte
des enjeux des relations entre ces deux espaces normatifs pour l’évolution et la cohérence
de l’ordre juridique international qui constituent le fil rouge de ce cours.
15
I. Commerce et environnement dans l’ordre juridique international
A. Contexte historique
1. L’antériorité de l’ordre économique international sur le droit de
l’environnement
Les relations économiques internationales existent depuis toujours, elles ont
précédé la mise en place d’une véritable société internationale organisée. À partir de ce
constat bien pragmatique, certains ont pu prétendre que le commerce était même à l’origine
du droit international. Les règles du droit international ont ainsi été le reflet des différentes
doctrines dominantes et de la conception défendue par les États de leur rôle dans le
domaine des échanges commerciaux. Du libéralisme à l’interventionnisme, différents
courants influencèrent le corps des règles que l’on désigne par le droit international
économique et même l’ordre international économique1.
Les deux guerres mondiales ont cependant transformé le cadre des relations
économiques internationales et plus généralement les fondements des relations
internationales : une transformation en profondeur, cristallisée dans la rédaction de la
Charte des Nations unies. L’Organisation des Nations unies a la responsabilité d’un
mandat général dans les domaines économique et social comme le prévoit l’article 55 de la
Charte. En posant la coopération économique comme l’un des buts et principes de l’ONU
(article 1 al. 3) ainsi que le principe d’un « bon voisinage économique », la Charte établit
sans ambiguïté le lien entre le développement des relations économiques et le maintien de
la paix.
Au lendemain de la seconde guerre mondiale, l’objectif est d’établir un ordre
international permettant d’assurer la paix, considérant que celle-ci repose sur l’édification
d’un ordre économique international néolibéral organisé autour de trois grandes idées : la
liberté des échanges et des paiements, l’égalité de traitement et la réciprocité des
avantages. C’est ainsi que fut convoquée, sous les auspices du Conseil économique et
social des Nations unies, la Conférence de La Havane destinée à élaborer une charte
constitutive d’une organisation internationale du commerce. Signée en mars 1948, la
« Charte de la Havane » n’entra jamais en vigueur suite au refus du Congrès américain de
la ratifier.
C’est pourtant sur la base de son chapitre IV, relatif aux échanges de produits
manufacturés, que va se mettre en place le seul instrument multilatéral régissant le
commerce mondial jusqu’en 1994 : l’Accord général sur les tarifs douaniers et le
commerce (General Agreement on Tariffs and Trade : GATT). Signé le 30 octobre 1947,
ce traité multilatéral en forme simplifiée est entré en vigueur le 1er janvier 1948 en vertu du
Protocole d’application provisoire. Par la suite, le système du GATT s’est progressivement
développé tant sur le plan institutionnel que substantiel par le biais des différents
« rounds », conférences commerciales multilatérales organisées périodiquement et
aboutissant à différents protocoles et textes complétant le GATT. Par voie conventionnelle,
Ordre économique international, c’est-à-dire : « l’ensemble cohérent de règles juridiques orientées en
fonction des finalités du système ».
1
16
les États s’engagent à libérer progressivement les transactions commerciales et leur
financement, chaque pays devant participer au démantèlement des restrictions existantes.
Le cadre juridique du commerce international apparaît alors comme dispersé et
lacunaire, un droit constitué d’une mosaïque d’ensembles normatifs polymorphes et
mouvants dont l’unique objectif est de favoriser le système de règles le plus favorable au
commerce. L’environnement n’apparaît pas dans ce système même si certaines dérogations
aux échanges – nécessaires à la protection de la santé et de la vie des personnes, à celle des
animaux ou à la préservation des végétaux – sont prévues.
Il faut attendre la création de l’Organisation mondiale du commerce née des
Accords de Marrakech du 15 avril 1995 pour institutionnaliser un cadre juridique commun
et parvenir à un système commercial multilatéral organisé prenant en compte différents
sujets et notamment l’environnement. Cette prise en compte a bien sûr été conditionnée par
l’influence croissante et la structuration du droit international de l’environnement, un droit
beaucoup plus récent2 qui connaît, lui aussi, une restructuration et de nouvelles
orientations. Un droit qui a dû prendre sa place au sein d’un ordre juridique international
reposant sur des principes bien établis du commerce international.
2. L’intégration du droit international de l’environnement dans l’ordre juridique
international au côté du droit du commerce international
Tout comme le droit international économique, le droit de l’environnement se
fonde sur un ensemble de sources de droit interne, de droit international ou autres qui
concourent à son objet. Pour le droit commercial, il s’agit de la production et de la libre
circulation des biens et des services, et pour le droit de l’environnement de la préservation
des ressources naturelles et des équilibres écologiques.
Par ailleurs, on constate que tout comme le droit destiné à régir les échanges
commerciaux internationaux, le droit international de l’environnement s’appuie assez
largement sur les principes généraux du droit et les actes des organisations
internationales. Le recours à des engagements non contraignants est important dans les
deux espaces normatifs même si, là encore, les raisons peuvent être totalement différentes
(pour le droit de l’environnement, la réticence des États à s’engager ; pour le droit
commercial, des exigences de rapidité et de technicité avec par exemple les réunions
périodiques des ministres des finances des pays développés, créés pour répondre à ces
impératifs).
Peu de domaines du droit international ont connu un essor rapide participant au
développement de l’ordre juridique international. Or, c’est le cas du droit international de
l’environnement qui, d’une part emprunte à des concepts juridiques largement établis
(comme les principes de bon voisinage ou de due diligence), et d’autre part élabore de
nouveaux concepts et principes favorisant l’émergence d’une responsabilité de la
communauté internationale vis-à-vis des générations futures3.
2
3
Voir historique du droit international de l’environnement, cours I UNITAR/ELP.
Voir cours I UNITAR/ELP.
17
Le droit international de l’environnement présente aussi la particularité d’un droit
désordonné qui s’est élaboré par à coups sous l’influence d’événements bien souvent
dramatiques (sinistre du Torrey Canyon en 1967, catastrophe de l’Amoco-Cadiz en 1978,
accident de l’usine chimique de Bhopal en 1984, explosion de la centrale nucléaire de
Tchernobyl en 1986, etc.) et non de manière régulière.
En découle un droit foisonnant, élaboré sans ordre logique évident et sans
articulation spontanée avec d’autres secteurs du droit international, même si les liens avec
les activités économiques apparaissent d’emblée évidents. La réglementation au préalable
très sectorielle va s’orienter vers une approche plus globale avec la Conférence de
Stockholm de 1972 pour peu à peu se structurer dans ses orientations.
B. Les étapes de la relation commerce / environnement
Ce bref rappel du contexte historique dans lequel s’inscrit la compréhension du lien
entre les échanges commerciaux internationaux et la problématique environnementale tend
à distinguer trois étapes essentielles dans l’évolution de cette relation :



4
une période de juxtaposition des règles régissant la protection de
l’environnement considérant le caractère à la fois désordonné et lacunaire des
deux espaces normatifs pouvant conduire à des frictions épisodiques mais
aussi à une évolution parallèle et non concertée. Cette période précède la
Conférence de Stockholm de 1972 et s’étend jusqu’en 1991, période à
laquelle le Groupe spécial du GATT est confronté à l’examen des relations
entre les mesures commerciales et les politiques environnementales4. Le
constat apparaît alors clairement, le cadre juridique du commerce
international ne permet pas aux Parties contractantes du GATT de privilégier
leurs mesures environnementales par rapport à la liberté du commerce
international ;
une période d’enchevêtrements accompagnée d’une reconnaissance
progressive des interactions liant commerce et environnement sous l’influence
de la Conférence de Rio et avec la prise en compte d’une ouverture
environnementale à la fin de l’Uruguay Round (1986-1993) qui aboutira à la
Conférence de Marrakech en 1994 puis à l’entrée en vigueur des Accords de
l’OMC en 1995. Cette seconde période est considérée comme celle de la prise
de conscience du « problème environnemental » par les Parties contractantes
du GATT, considérant les carences de l’Accord général dans un domaine
susceptible d’affecter la liberté des échanges commerciaux ou de modifier les
conditions de l’échange de manière discriminatoire ;
enfin une période d’interactions positives ou espérées comme telles avec la
Conférence de Singapour de l’OMC en 1996 et les résultats des travaux du
Comité du commerce et de l’environnement mis en place par l’OMC.
L’Organisation mondiale du commerce admet que la sauvegarde d’un système
commercial multilatéral ouvert n’est pas incompatible avec la protection de
l’environnement.
Affaire « Restrictions à l’importation de thon I », BISD 39 S/155.
18
C. Société internationale économique et environnement à l’épreuve de la
mondialisation
L’évolution apparemment parallèle des deux espaces normatifs que constituent le
droit international de l’environnement et le droit du commerce international ne pouvait
continuer face à la nouvelle configuration des échanges quelle que soit leur nature.
Cette nouvelle configuration résulte du phénomène de mondialisation qui fait de la
terre une scène unique. Chaque expérience particulière prend une dimension universelle et,
à l’inverse, les grands conflits se décomposent en une multitude d’impacts au niveau local
au sein des États, à l’intérieur des groupes, entre les individus.
Sous l’angle économique, la mondialisation se traduit par la globalisation
financière, la transnationalisation des flux mais, en même temps, par la mise en
concurrence d’économies très inégalement développées.
Sous l’angle écologique, la mondialisation entraîne une répercussion des atteintes
à l’environnement au niveau mondial (atteinte de la couche d’ozone, pollution des mers,
menace sur la diversité biologique, etc.) et la nécessité de mettre en œuvre des politiques
internationales transsectorielles de conservation.
Concrètement, les deux ensembles normatifs que sont le droit international de
l’environnement et le droit du commerce international ont intégré de nouvelles règles pour
la production de leurs normes mettant en place parallèlement de nouveaux instruments
pour leur application. La mondialisation influence le réseau des éléments et des partenaires
à la fois destinataires et participants à la mise en œuvre des politiques commerciales et
environnementales.
On constate ainsi que la société internationale économique prend en
considération différents types d’acteurs :



les États, entendus dans leur diversité, car le droit international économique
n’est pas seulement un droit interétatique, c’est un droit qui concerne
directement ou indirectement les personnes privées. Par ailleurs, il aménage
ses règles en distinguant les pays développés des pays en développement
lesquels reçoivent un traitement plus favorable ;
les organisations internationales économiques : ces organisations
gouvernementales à vocation économique représentent un secteur foisonnant.
On dénombre plus d’organisations à vocation économique que d’États : par
exemple, les organisations mondiales comme le Fond monétaire international
ou la Banque mondiale, les organisations régionales telles que l’Accord de
libre-échange nord-américain, la CEE, l’OCDE, etc. ;
les organisations internationales non gouvernementales à vocation
économique : il s’agit de groupements créés à l’initiative de personnes
privées (physiques ou morales) réunissant des membres de différentes
nationalités en vue de l’exercice d’une activité internationale de caractère
désintéressé et dotés de la personnalité juridique de droit interne mais non de
droit international ;
19

les entreprises multinationales ou sociétés transnationales représentent les
acteurs essentiels du système des relations internationales économiques. Elles
se définissent comme des sociétés dont le siège se situe dans un pays
déterminé et qui exercent leurs activités dans un ou plusieurs autres pays par
l’intermédiaire de succursales ou de filiales qu’elles coordonnent5. Elle
réalisent la quasi-totalité des investissements internationaux et elles sont à
l’origine de l’essentiel des paiements internationaux. Ce sont les principaux
opérateurs du commerce international.
La particularité de la société internationale économique, reposant sur une
multiplicité d’acteurs et donc une grande complexité des relations entre les sujets
concernés, se retrouve dans les politiques de protection de l’environnement.
L’Agenda 21, programme d’action adopté à la Conférence de Rio destiné à guider
l’application des politiques environnementales et porteur d’une vision d’ensemble des
perspectives de développement durable, dresse ainsi l’inventaire de la multiplicité des
acteurs qu’il entend faire participer à sa mise en œuvre. De cette façon, il complète la
Déclaration de Stockholm qui déjà s’adressait aux citoyens, aux collectivités, aux
entreprises et aux institutions (point 7 de son préambule).




Le rôle des États est pris en compte à différents niveaux. Une distinction est
établie entre pays développés et pays en développement : le droit international
de l’environnement leur reconnaît une responsabilité commune mais
différenciée (par exemple dans la Convention sur la diversité biologique).
Selon les actions à mener, les États peuvent apparaître comme les
destinataires exclusifs des obligations contractées, c’est le cas par exemple
pour la gestion écologiquement rationnelle des déchets radioactifs ;
Les entreprises commerciales et industrielles y compris les sociétés
transnationales sont particulièrement visées en lien avec le rôle des
gouvernements ;
Les organisations internationales et non gouvernementales (ONG) y
compris les associations commerciales et scientifiques. Sont désignés
notamment les organismes des Nations unies qui « devraient améliorer les
mécanismes concernant les apports du commerce et de l’industrie et les
processus de formulation des politiques et des stratégies afin de veiller à ce
que les considérations écologiques occupent une plus grande place dans les
investissements étrangers. » (chapitre 30.28) ;
Et selon les objectifs fixés, les ménages, les femmes, les jeunes, les
syndicats, les groupes d’utilisateurs ou de consommateurs, les milieux
scientifiques (ingénieurs, concepteurs, etc.).
Ce réseau très complexe d’acteurs pris en compte par le droit international de
l’environnement rejoint à certains égards celui des relations économiques internationales,
étant entendu que les perspectives et les moyens d’action sont différents. Des orientations
Cette définition est inspirée d’un avis du Conseil économique et social français de 1972. Elle reflète une
position assez générale des pays d’influence romano-germanique. Cependant, la définition des sociétés
transnationales peut être sensiblement différente dans les pays dont le système juridique est d’influence
anglo-saxonne.
5
20
communes déterminées au niveau de l’Organisation des Nations unies ont permis de
dégager les perspectives de la relation commerce / environnement au sein de l’ordre
juridique international.
D. Le consensus mondial du développement
Si le phénomène de la mondialisation marque l’évolution des interactions
croissantes entre la sphère des échanges commerciaux mondiaux et les mesures globales de
protection de l’environnement, le constat de la détérioration – tant de l’environnement
mondial que du niveau de vie dans les pays en développement – conduit à une action
normative pour le développement durable.
Action fondée par l’article 55 de la Charte des Nations unies :
« (…) les Nations unies favoriseront :
a) le relèvement des niveaux de vie, le plein emploi et des conditions de progrès et
de développement dans l’ordre économique et social ;
b) la solution des problèmes internationaux dans les domaines économique, social,
de la santé publique et autres problèmes connexes (…) ; ».
C’est une mission des Nations unies dont on trouve une expression dans l’adoption
de la Charte mondiale de la nature de 19826.
1. La coopération internationale pour le développement
Plusieurs éléments ont contribué à rapprocher l’environnement du système du
commerce international :



la complexité croissante des relations internationales due notamment au
phénomène de mondialisation qui conduit à percevoir tous les échanges dans
un cadre interactif ;
l’augmentation du nombre des accords multilatéraux d’environnement et la
perspective globale qui les caractérise (par exemple les conventions de
protection de l’air et de l’atmosphère comme la Convention de Vienne sur la
pollution atmosphérique transfrontière à longue distance de 1979 ou la
Convention-cadre sur les changements climatiques de 1992) ;
le développement, thème abordé par la Conférence de Stockholm de 1972 et
mis au cœur des débats par le rapport Brundtland publié en 1987 par la
Commission mondiale sur l’environnement et le développement, commission
créée à l’initiative de l’Assemblée générale des Nations unies7. Le lien est
établi entre le développement et l’exploitation des ressources naturelles par la
Conférence de Stockholm, le Rapport Brundtland met l’interdépendance au
6
Assemblée générale des Nations unies, Résolution 37/7 du 28 octobre 1982. Résolution adoptée par 111
voix contre une (États-Unis), avec 18 abstentions.
7
Commission mondiale sur l’environnement et le développement, Notre avenir à tous, 1987. Commission
instituée par la résolution 38/161 du 19 décembre 1983 de l’Assemblée générale des Nations unies. Le
mandat ambitieux de la Commission était de proposer des formes nouvelles de coopération internationale
susceptible d’influencer les politiques et les événements dans le sens des changements nécessaires.
21
centre de ses recommandations reconnaissant l’interconnexion entre des
sphères politiques jusqu’à présent traitées par des normes et des institutions
différentes (telles que l’industrie, la protection des espèces et des ressources
génétiques, l’énergie, etc.). Enfin, elle propose pour la première fois une
conférence mondiale sur l’environnement et le développement.
La conférence de Rio met en relation droit au développement et impératifs de
protection de l’environnement. En ayant pour mission de donner une définition
consensuelle du concept de développement durable, la Conférence sur l’environnement et
le développement de 1992 met en présence différentes conceptions et notamment
différentes approches du développement (approche économique, écologique, sociale, etc.).
En dépit de l’absence d’une définition consensuelle dans un accord ayant force obligatoire,
la Conférence établit clairement le lien entre le développement économique, dont les
échanges commerciaux constituent une part essentielle, et les standards écologiques dans le
cadre de conditions sociales.
« Le droit au développement doit être réalisé de façon à satisfaire équitablement
les besoins relatifs au développement et à l’environnement des générations
présentes et futures. »
(Principe 3, Déclaration de Rio, 1992)
« Pour parvenir à un développement durable, la protection de l’environnement doit
faire partie intégrante du processus de développement et ne peut être considérée
isolément. »
(Principe 4, Déclaration de Rio, 1992)
L’Agenda 21, programme d’action adopté à la Conférence de Rio, précise la
responsabilité des États dans la mise en œuvre d’une politique de développement :
« 2.4. Les gouvernements reconnaissent qu’un nouvel effort est fait à l’échelle
mondiale pour lier les éléments du système économique international et la
nécessité pour l’humanité de vivre dans un environnement naturel sûr et stable.
C’est pourquoi les gouvernements sont résolus à poursuivre leurs efforts en vue de
renforcer le consensus à l’intersection des domaines relatifs à l’environnement, au
commerce et au développement dans les instances internationales, de même que
dans la politique intérieure de chaque pays. »
(Agenda 21, chapitre 2)
Plus largement, la relation entre commerce et environnement au sein de l’ordre
juridique international s’inscrit dans les fondements de la doctrine et des normes
internationales du développement8 désormais ancrés dans le processus de mondialisation :
Plusieurs déclarations marquent la doctrine commune dégagée par l’Organisation mondiale : la
proclamation par l’Assemblée générale des Nations unies le 5 décembre 1980 de la troisième décennie pour
le développement, la Déclaration sur la coopération économique internationale le 1 er mai 1990 ; la Stratégie
pour la quatrième décennie des Nations unies pour le développement.
8
22
« Le développement économique, le développement social et la protection de
l’environnement sont des composantes interdépendantes du développement
durable qui se renforcent mutuellement ».
(Résolution 51/240 du 20 juin 1997, Agenda pour le développement)
Animé par une logique d’intégration des pays en développement au marché
mondial nuancée par la prise en compte d’un développement durable, le consensus
mondial pour le développement exprime la volonté commune des États de parvenir à un
ordre juridique international fondé sur la coopération dont l’organisation des Nations unies
serait le cadre.
2. Théorie du commerce mondial et enjeux de la protection de l’environnement :
le développement durable
Les débats autour du concept de développement durable, issus notamment de la
Conférence de Rio de 1992, vont permettre de confronter les différentes théories sur
lesquelles reposent le système du commerce mondial et les grandes orientations du droit
international de l’environnement.
La croissance économique est la condition du développement, notamment des pays
en développement, car elle permet d’améliorer le niveau de vie en éliminant la pauvreté, la
maladie, en donnant les moyens de faire progresser le niveau d’éducation et d’améliorer
l’environnement. Comme le prévoit l’Agenda pour le développement, la protection de
l’environnement fait partie intégrante du processus de développement et ne peut être
envisagée séparément.
Avec la Conférence de Genève sur le commerce et le développement et la création
de la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement (CNUCED) en
1964 apparaît une nouvelle conception du développement économique soutenue par les
pays en voie de développement car beaucoup plus critique de la conception libérale. La
CNUCED permet d’ouvrir les négociations dans le domaine des relations commerciales.
La perspective est d’introduire davantage d’équité dans les échanges internationaux et
d’assurer la croissance économique et intégrée de toute la planète. Par la suite se poursuit
une politique d’intégration des pays en développement dans le marché mondial avec des
périodes de crises plus ou moins fortes en matière de coopération multilatérale, résultat
d’une contradiction entre la conscience d’un devenir commun englobant la planète et les
intérêts particuliers des États.
Reste cependant que la démocratie pluraliste fondée sur l’économie de marché reste
le seul modèle de développement reconnu au niveau de l’organisation mondiale.
Concernant la relation entre commerce et environnement, la théorie classique du
libre-échange a été nuancée pour admettre des aménagements en lien avec la
problématique environnementale.
Théorie classique du libre-échange :
La liberté des échanges en univers concurrentiel concourt à améliorer le bienêtre de toutes les Parties à l’échange. Cela induit que le commerce est un jeu à
23
somme positive, lui apporter des restrictions équivaut à porter atteinte au bienêtre collectif. Le principe de la liberté des échanges suppose que toutes les
composantes du coût de production, y compris leurs effets négatifs sur
l’environnement, sont internalisées par les producteurs.
Or, il apparaît que tous les effets sur l’environnement ne peuvent être
« internalisés » (c’est-à-dire intégrer dans les coûts) et, par conséquent, les règles du libreéchange n’induisent pas systématiquement des effets positifs notamment en matière
d’environnement.
Les perspectives restent cependant bien différentes selon qu’il s’agit de défendre
l’environnement ou de favoriser l’accroissement des échanges.
La relation commerce / environnement dans une perspective commerciale libérale :



le commerce crée les conditions de la croissance économique nécessaires à
l’amélioration du bien-être de l’homme et donc de l’environnement ;
le commerce peut être utilisé pour améliorer les conditions de protection de
l’environnement en permettant l’échange des connaissances, des techniques
de production respectueuses de l’environnement ou encore en favorisant la
diffusion de moyens de production moins polluants ;
le commerce peut éviter le gaspillage en permettant la répartition des
productions.
La perspective environnementale de la relation commerce / environnement connaît
plusieurs variantes selon l’approche théorique privilégiée et le caractère plus ou moins
radical des objectifs poursuivis. De manière générale, il est considéré que le système
commercial menace l’équilibre des écosystèmes :


en favorisant l’augmentation de la production et de la consommation qui en
découle (accroissement des activités extractives des ressources naturelles,
production des déchets et gaspillages potentiels) ;
en entraînant l’accroissement des pollutions par la multiplication des volumes
transportés.
La libéralisation des échanges entraîne une modification de l’échelle de la
production et de la consommation laquelle a pour conséquence une démultiplication des
effets dommageables pour l’environnement.
Le risque identifié à un niveau plus général est celui de la modification de
l’économie des pays qui les pousse à produire toujours plus sans qu’il y ait de contrôle au
niveau de l’État de l’impact structurel de ce phénomène sur la qualité de l’environnement.
D’emblée, l’économie est considérée comme un sous-système de la biosphère
opérant dans un cadre fini. Cela implique nécessairement que toute extension du commerce
accroît mécaniquement la pression sur l’environnement.
24
Face à ces deux perspectives, s’est dégagée peu à peu une démarche, sinon
consensuelle du moins « intermédiaire », au sein de l’Organisation mondiale et dans
différentes organisations intéressées (OCDE, OMC, CNUED) pour déterminer les
politiques de développement durable selon lesquelles :


les liens entre commerce et environnement sont multiples et complexes
considérant le contexte de la mondialisation ;
le commerce n’est pas en lui-même positif ou négatif pour l’environnement.
Ses effets sur l’environnement dépendent des moyens déployés pour le rendre
non seulement compatible mais également complémentaire des mesures
environnementales dans une interaction positive.
Cette orientation générale ne permet pas de résoudre les frictions répétées qui
interviennent entre les deux espaces normatifs et surtout ne permet pas de traiter en
profondeur les contradictions sur lesquelles reposent d’un côté le régime du commerce
international, de l’autre la construction d’un modèle de développement qui privilégierait
l’environnement9. L’ordre juridique international est donc confronté aux oppositions de ces
deux espaces normatifs.
E. L’unité de l’ordre juridique international
L’élaboration du droit international de l’environnement s’étant effectuée
principalement en parallèle de la mise en place du droit international économique et en
partie de manière sectorielle, les conflits avec les règles régissant les échanges
commerciaux doivent trouver une solution au sein de l’ordre juridique international dans le
respect du droit international général. Cependant la mise en place, tant par les accords
environnementaux que par les conventions de libre-échange établies au niveau
international ou régional, de régimes spécifiques et autonomes semble menacer l’unité de
l’ordre juridique international.
1. Incompatibilités entre accords multilatéraux de l’environnement et système
commercial multilatéral : application du droit des traités
Dans la mesure où les accords multilatéraux sur l’environnement (AME) se
multiplient et abordent ou même recourent à diverses mesures commerciales, les
interactions avec le système juridique international régissant les échanges internationaux
sont inévitables. On notera cependant que, jusqu’à présent, aucun conflit opposant les
dispositions d’un AME à des droits prévus par l’OMC n’a fait l’objet d’une procédure
formelle de règlement des différends. Cette situation s’explique assez facilement par le
Le problème crucial devient celui de l’évaluation des effets de l’interrelation entre commerce et
environnement. Afin de mieux maîtriser la relation entre commerce et environnement sont prévus des
groupes des travail au sein des organisations telles que l’OMC ou l’OCDE, chargés d’élaborer des méthodes
d’évaluation de l’impact sur l’environnement de la libéralisation des échanges et réciproquement, c’est-à-dire
des méthodes susceptibles de mesurer les effets sur l’environnement de la libéralisation des échanges. De
telles initiatives, encore très récentes, ne permettent pas de donner des résultats précis et exhaustifs sur tous
les secteurs d’activités. Par exemple, des études sont en cours sur l’agriculture, l’impact des pêcheries et les
mesures forestières au sein du groupe de travail conjoint sur les échanges et l’environnement de l’OCDE.
9
25
souhait des gouvernements de ne pas remettre en cause des traités ayant recueilli une large
approbation de la communauté internationale.
Cependant, il faut rappeler qu’un traité ne peut être considéré isolément, ses
dispositions doivent être confrontées avec d’autres normes juridiques avec lesquelles elles
peuvent entrer en concurrence.
Le droit des traités codifié par la Convention de Vienne du 23 mai 1969 permet
d’appréhender le traitement des incompatibilités entre droits et obligations issus d’un
accord international de protection de l’environnement et le système commercial
multilatéral.
L’article 30 de la Convention de Vienne relatif à « l’application des traités
successifs portant sur la même matière » permet de guider la résolution du conflit :
« Article 30 – Application de traités successifs portant sur la même matière
1. (…)
2. Lorsqu’un traité précise qu’il est subordonné à un traité antérieur ou postérieur
ou qu’il ne doit pas être considéré comme incompatible avec cet autre traité, les
dispositions de celui-ci l’emportent.
3. Lorsque toutes les Parties au traité antérieur sont également Parties au traité
postérieur, sans que le traité antérieur ait pris fin ou que son application ait été
suspendue en vertu de l’article 59, le traité antérieur ne s’applique que dans la
mesure où ses dispositions sont compatibles avec celles du traité postérieur.
4. Lorsque les parties au traité antérieur ne sont pas toutes parties au traité
postérieur :
dans les relations entre les États Parties aux deux traités, la règle applicable est
celle qui est énoncée au paragraphe 3 ;
dans les relations entre un État Partie aux deux traités et un État Partie à l’un de
ces traités seulement, le traité auquel les deux États sont Parties régit leurs droits
et obligations réciproques. (…) ».
(Convention de Vienne sur le droit des traités, 1969)
Tout d’abord les Parties à un traité peuvent elles-mêmes prévoir des critères
hiérarchiques ou des clauses de compatibilité afin de prévenir les conflits. C’est le cas
notamment de la Convention sur la diversité biologique qui prévoit, très prudemment, une
disposition particulière :
« Article 22 – Relations avec d’autres conventions internationales
1. Les dispositions de la présente Convention ne modifient en rien les droits et
obligations découlant pour une Partie contractante d’un accord international
existant, sauf si l’exercice de ces droits ou le respect de ces obligations causait de
sérieux dommages à la diversité biologique ou constituait pour elle une menace. »
(Convention sur la diversité biologique, Rio, 1992)
Cependant, ces clauses peuvent elles-mêmes soulever des incertitudes : en
l’occurrence, comment apprécier les termes « la menace » ou les « sérieux dommages à la
diversité biologique » et le lien de causalité avec l’application de mesures commerciales ?
26
En cas de silence des Parties, le droit des traités prévoit des règles précises
destinées à s’appliquer presque mécaniquement pour déterminer quelle obligation
conventionnelle doit s’appliquer lorsque deux ou plusieurs traités adoptés à des dates
différentes mais ayant des dispositions contradictoires entrent en conflit. Cette règle
d’application impose une hiérarchie faisant prévaloir le traité le plus récent.
Exemple : dans le cas d’un conflit entre une obligation conventionnelle établissant
une interdiction relative aux restrictions commerciales (comme prévue par le
GATT/OMC) et d’un traité établissant certaines restrictions commerciales
(comme les restrictions aux échanges prévues par la Convention de Bâle de 1989
concernant le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et
leur élimination), entre les Parties aux deux instruments, le dernier, c’est-à-dire la
Convention de 1989, prévaudra.
On précisera cependant que, dans le cas où deux États sont à la fois Partie à la
Convention de Bâle et membre de l’OMC, il est fort improbable, dans la pratique,
qu’ils contestent une mesure prise en vertu de leurs obligations issues de la
Convention de Bâle.
Par contre, le cas où les deux pays (A et B) sont membres de l’OMC mais dont un
seul, (l’État A), est Partie à la Convention de Bâle, pourrait donner lieu à un
conflit. En respectant ses obligations en vertu de la Convention de Bâle, l’État A
pourrait se trouver dans l’impossibilité de respecter certaines obligations vis-à-vis
de l’État B, membre de l’OMC, non Partie à la Convention de 1989.
Ces mécanismes de hiérarchisation prévus par la Convention de Vienne s’articulent
avec la règle coutumière selon laquelle la convention ayant un objet plus spécifique
l’emporte sur celle ayant un objet plus général. Le principe pacta sunt servanda10 impose
de respecter ses obligations conventionnelles de bonne foi.
Par ailleurs l’article 31 de la Convention de Vienne prévoit que pour interpréter
les accords et donc examiner leur incompatibilité éventuelle, il convient de prendre en
considération – outre le contexte, les accords ultérieurs et la pratique – « toute règle
pertinente de droit international applicable dans les relations entre les Parties ».
Cette disposition consacre l’unité du droit international et insiste sur le fait que des
règles issues de relations conventionnelles ne doivent pas être considérées comme isolées
par rapport au droit international général.
« Un instrument international doit être interprété et appliqué dans le cadre du
système juridique tout entier tel qu’il était applicable au moment de son
interprétation ».
(CIJ, Avis consultatif, Éthiopie c. Afrique du Sud ; Liberia c. Afrique du Sud, 21
juin 197111)
10
Article 26 de la Convention de Vienne sur le droit des traités : « Tout traité en vigueur lie les Parties et
doit être exécuté par elles de bonne foi ».
11
Conséquences juridiques pour les États de la présence continue de l’Afrique du Sud (Sud Ouest africain)
en Namibie, nonobstant la résolution 276 du Conseil de sécurité, CIJ, Avis consultatif du 21 juin 1971, Rec.
1971, p. 16, § 31. Dans cette affaire, la Cour internationale a considéré que l’interprétation de l’Acte
27
Récapitulatif des règles applicables en cas de traités successifs portant sur le même
sujet :
 le traité postérieur l’emporte sur le traité antérieur sauf précision particulière du
traité ;
 le traité spécial l’emporte sur le traité général ;
 les traités doivent être appliqués et interprétés de bonne foi, de manière à leur
donner tout leur effet.
2. Le règlement des différends
Considérant d’une part les multiples interactions entre le droit international de
l’environnement et le système commercial multilatéral et, d’autre part la mise en place par
ces deux espaces normatifs de procédures et de principes qui leur sont propres, la question
préliminaire des moyens de règlement pacifique des différends va avoir des conséquences
importantes.
a. Les accord environnementaux et les procédés de règlement pacifique des
différends
La plupart des conventions internationales relatives à l’environnement prévoient
des dispositions particulières. Par exemple, la Convention sur la diversité biologique
prévoit que si les Parties concernées ne peuvent parvenir à un accord par voie de
négociation, elles peuvent conjointement faire appel aux médiations ou aux bons offices.
Dans le cas d’un différend qui n’a pas été réglé par ces moyens, les Parties pourront
recourir à l’arbitrage ou à la Cour internationale de justice. Dans l’hypothèse où un accord
n’interviendrait pas selon ces procédés, le différend est soumis à la conciliation (procédure
prévue à l’annexe II de la Convention).
Il est de jurisprudence constante qu’avant qu’un différend fasse l’objet d’un recours
en justice, son objet ait été défini lors de pourparlers diplomatiques12.
Toutes les procédures juridictionnelles ou non juridictionnelles de règlement
pacifique des différends sont ainsi assez largement rappelées dans la plupart des accords
environnementaux (article 14 de la Convention sur les changements climatiques, article 20
de la Convention de Bâle de 1989, article 18 de la Convention CITES, article 28 de la
Convention sur la lutte contre la désertification de 1994, etc.).
b. Le système de règlement des litiges de l’Organisation mondiale du commerce
constitutif de la Société des Nations et les institutions qu’elle établissait ne pouvaient rester imperméables
aux développements juridiques intervenus ultérieurement, y compris la Charte des Nations unies et le droit
coutumier. La Cour n’a pas eu recours à l’article 31 (3) de la Convention de Vienne qui n’était pas en vigueur
à l’époque. Cette disposition n’a été invoquée que très rarement devant les juridictions internationales, sans
doute parce que sa signification pratique est difficile à définir.
12
CPJI, ordonnance du 19 août 1929, Affaire des zones franches entre la France et la Suisse, Série A, n° 22 ;
CPJI, 30 août 1924, Mavrommatis, Série A, n° 2 ; CIF, 26 novembre 1957, Droit de passage en territoire
indien / exceptions préliminaires, Rec. 1957.
28
Le système multilatéral commercial a prévu un système particulier de règlement
des litiges. Précédemment le GATT de 1947 instituait un système interne de règlement des
différends commerciaux entre les Parties contractantes à base de conciliation. L’originalité
en était la procédure prévue, interne à l’institution, et surtout sa nature non contentieuse.
Le « Mémorandum d’accord sur les règles et procédures régissant le règlement des
différends » annexé à l’OMC réforme profondément le système précédent.
Il met en place un mécanisme général administré par un Organe de règlement des
différends (ORD) sous le contrôle du Conseil général de l’OMC. La nature juridique sui
generis de ce système de règlement des litiges apparaît car il s’agit de procédures à michemin entre la négociation diplomatique et le règlement juridictionnel. Les principales
phases de règlement des litiges sont les suivantes :




phase de consultations bilatérales : si cela n’aboutit pas dans les 60 jours
suivant la date de la demande des consultations, la partie plaignante pourra
demander la création d’un Groupe spécial (article 3 § 3 du Mémorandum) ;
phase du Groupe spécial : une fois mis en place il devra élaborer son rapport
dans un délai maximum de six mois (trois mois en cas d’urgence) (article 8 §
7 du Mémorandum) ;
phase éventuelle d’appel du rapport du Groupe spécial devant l’Organe
permanent d’appel (article 17 § 4 du Mémorandum) : l’appel ne peut
concerner que des questions de droit couvertes par le rapport et les
interprétations de droit données par le Groupe spécial (article 17 § 6)13 ;
phase de mise en œuvre des recommandations du Groupe spécial ou de
l’Organe d’appel permanent. Une fois que le rapport du Groupe spécial est
adopté par l’ORD, la partie concernée doit notifier dans un délai de 30 jours
ses intentions relatives à la mise en œuvre des recommandations. Si la partie
concernée ne peut se conformer immédiatement aux recommandations, un
délai raisonnable peut lui être accordé (délai qui peut être déterminé par
arbitrage, article 23 § 3c du Mémorandum). En cas d’inexécution des
recommandations dans le délai imparti, des modalités de mise en œuvre des
compensations et des suspensions de concessions sont prévues (article 22 § 2
à 9 du Mémorandum).
Il faut considérer la portée de ce mécanisme de règlement des différends. Ce
mécanisme interétatique ne concerne pas les parties privées qui sont pourtant les agents
quasi exclusifs des échanges commerciaux internationaux. Par ailleurs, il s’agit d’un
mécanisme global qui s’applique à l’ensemble des différends issus de l’application des
accords de Marrakech instituant l’OMC sous réserve des exclusions et précisions qui
résultent de l’article 1er14. La vocation de l’ORD est de régler le contentieux commercial
Le déroulement de l’ensemble de la procédure d’appel est régi par le « Règlement de la procédure
d’appel » adopté le 15 février 1996 et ensuite rectifié le 28 février 1997.
14
Le Mémorandum ne s’applique pas ipso jure à quatre accords commerciaux plurilatéraux car l’application
du mécanisme de règlement des différends est subordonné à une manifestation de volonté. Par ailleurs
certains accords contiennent des procédures spéciales en matière de règlement des différends susceptibles
d’entraîner des conflits entre règles et procédures. Le Mémorandum fournit quelques directives pour résoudre
ces conflits.
13
29
international interétatique sur la base du droit spécial du commerce, excluant la
compétence d’autres juridictions prévues dans d’autres accords, comme par exemple au
plan régional celle de la Cour de justice des Communautés européennes.
La création de juridictions spéciales ne devraient pas nuire à l’unité du droit
international dès lors que le principe de spécialité15 des organisations internationales est
strictement respecté. Concernant l’extension du mécanisme de l’OMC, et donc des
compétences de l’ORD sur les politiques environnementales, le rapport du GATT publié
en 1992 intitulé « Commerce et environnement » donne quelques indications. De manière
générale, le rapport souligne que :
« Les règles de l’Accord général visent essentiellement à empêcher la
discrimination (…). On peut donc raisonnablement en conclure que, même s’il
n’est pas fait explicitement mention de l’environnement dans l’Accord général, les
politiques non discriminatoires suivies en la matière devraient normalement
échapper à toute contrainte imposée dans le cadre du GATT. »
Selon ce rapport, les règles du GATT ne s’opposent pas à l’adoption de politiques
environnementales qui sont soutenues par la communauté internationale. Par contre, il en
découle que toutes les mesures prises par un État à l’encontre d’un autre État en raison du
laxisme des règles environnementales de ce dernier seront contraires au GATT, car cela
serait assimilé à un soutien au protectionnisme et apparaîtrait en opposition totale avec
l’Accord général. Cette approche sera d’ailleurs clairement appliquée dans un rapport du
Groupe spécial concernant les restrictions à l’importation de thon de 199116. Le Groupe
spécial jugera que les États-Unis avaient appliqué une mesure d’interdiction d’importation
des thons à nageoires jaunes pêchés à la senne coulissante à des pêcheurs mexicains en
application de la loi américaine sur la protection des mammifères marins mais en
contradiction avec les dispositions de l’article XI du GATT sur l’interdiction des
restrictions quantitatives.
Par la suite, les travaux du Comité du commerce et de l’environnement (CCE)
mis en place avec l’entrée en fonction de l’OMC en 1994, vont préciser les limites de
l’OMC dans le domaine de l’environnement, considérant que cette organisation n’a pas
pour objectif la protection de l’environnement. L’Organisation mondiale du commerce n’a
donc vocation à s’y intéresser que si des politiques environnementales ont un impact sur le
commerce de ses membres.
(insérer tableau : La procédure de règlement des différends commerciaux de
l’OMC)
c. Concurrence des mécanismes de règlement des différends
15
Les organisations internationales (qui peuvent être des organisations régionales) sont régies par le principe
de spécialité c’est à dire qu’elles sont dotées par les États qui les créent de compétences d’attribution dans les
limites des fonctions qui leur sont dévolues. CIJ, avis OMS du 8 juillet 1996, Rec. 1996, p. 78.
16
BISD 39 S/55, non adopté.
30
Dans l’éventualité d’un conflit entre des mesures environnementales et le système
commercial de l’OMC qui déboucherait sur une procédure de règlement des différends
lancée par l’OMC, le Groupe spécial serait chargé de trancher la question dans le cadre des
accords pertinents de l’OMC en faisant appel aux « règles coutumières d’interprétation du
droit international public ».
Cependant, en cas de dualité de systèmes normatifs applicables, quel mécanisme
pourra prévaloir ?
Le nouveau système de l’OMC n’évite pas le problème de la « mosaïque » qui
caractérisait le GATT, c’est-à-dire qu’il fait référence à d’autres institutions internationales
(comme l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, par exemple) ainsi qu’à
différents accords multilatéraux, notamment environnementaux, qui peuvent contenir leur
propre système de règlement des différends. Par ailleurs, certaines conventions
internationales (comme la Convention de Montego Bay de 1982 sur le droit de la mer) ou
des organisations régionales (Union européenne, ALENA) se référent au système du
GATT tout en possédant leur propre système de règlement des différends.
Devant la multiplication des systèmes de règlement des litiges et leur concurrence
éventuelle, les États se verront en situation de choisir le mécanisme qui leur apparaîtra le
plus favorable à leur cause. Cet effet pervers de la prolifération des juridictions sur l’unité
de l’ordre international doit être nuancé du fait de la faible consistance du conflit de
jurisprudence. Les juges internationaux, quel que soit leur organe de rattachement,
endossent la responsabilité de respecter et de faire respecter l’ordre juridique international ;
ils sont par ailleurs sélectionnés pour leur compétence technique notoire. En dehors de ces
considérations d’ordre statutaire, la pratique judiciaire internationale, y compris de l’ORD,
montre une certaine cohérence dans le respect du droit international et des interprétations
des règles.
Par exemple, l’instance d’appel de l’organe de règlement des différends de l’OMC
s’est appuyé sur l’arrêt de la Cour internationale de justice du 25 septembre 1997 relatif au
barrage Gabcikovo-Nagymaros pour rendre sa décision du 16 janvier 1998 relative aux
mesures prises par la Communauté européenne concernant la viande aux hormones et
prendre position sur le principe de précaution en droit international de l’environnement.
Concernant la dualité des systèmes de règlement des différends pouvant intervenir
entre le système OMC et le système prévu dans un accord multilatéral environnement, une
réflexion au sein du Comité du commerce et de l’environnement a été engagée afin de
solutionner les conflits potentiels.
Il apparaît ainsi dans la section « Conclusions et recommandations » du rapport de
décembre 1996 du Comité du commerce et de l’environnement de l’OMC, l’opinion selon
laquelle
« en cas de différend entre des membres de l’OMC Parties à un AME sur le recours
aux mesures commerciales qu’ils appliquent mutuellement en vertu de l’AME,
31
ceux-ci doivent envisager de le régler par l’intermédiaire du mécanisme de
règlement des différends prévu par l’AME »17.
Il faut cependant souligner que plusieurs délégations ont exprimé des réserves sur
certains paragraphes du rapport, notamment que dans le cas où plusieurs cadres
institutionnels peuvent être envisagés pour régler un litige, le choix doit être libre.
On peut ajouter que certaines organisations régionales ont explicitement envisagé
cette question. Ainsi, les membres de l’ALENA précisent dans l’article 104 de l’accord
que, dans la mesure où des accords sur l’environnement spécifiés comportent des
procédures propres de règlement des différends, celles-ci prévalent sur les procédures
applicables de règlement des différends prévues par l’ALENA.
3. Les organisations régionales d’intégration
Les organisations régionales constituent un cadre très important pour les échanges
commerciaux internationaux ; destinées à favoriser les échanges dans une région ou une
sous-région, elles donnent une structure à l’élaboration de politiques environnementales
concertées. Ces regroupements d’États peuvent revêtir différentes formes :




zone de libre-échange qui consiste en l’élimination par plusieurs États des
obstacles tarifaires et non tarifaires dans leurs échanges commerciaux
mutuels. C’est le cas de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) ;
union douanière qui ajoute aux caractéristiques de la zone de libre-échange
une protection commune tarifaire et non tarifaire vis-à-vis des États non
membres. Exemple du Bénélux créé par diverses conventions entre la
Belgique, le Luxembourg et les Pays Bas ;
marché commun, qui vise à supprimer toute restriction à la libre circulation
des autres facteurs économiques et à la création d’un milieu économique
homogène. Le MERCOSUR, (accord conclu en 1994 entre l’Argentine, le
Brésil, le Paraguay et l’Uruguay) tente de mettre en place un marché
commun, suivant les traces de l’expérience communautaire européenne ;
union économique, qui est une véritable harmonisation commerciale,
douanière mais aussi monétaire entraînant des conséquences politiques
importantes (abandon de souveraineté). Depuis le Traité de Maastricht de
1992 ouvrant la voie à la création d’une union économique et monétaire,
l’expérience communautaire a valeur d’exemple.
La logique de l’intégration économique repose sur le fédéralisme économique car
c’est la mise en place d’un marché unique entre États membres en s’appuyant sur
l’harmonisation des conditions de production et de circulation des personnes, des biens et
des services. Cette harmonisation implique des transferts de compétence au profit d’une
structure régionale (plus ou moins élaborée selon les objectifs poursuivis). Toutes les
régions du monde disposent à présent d’accords d’intégration régionale : l’Afrique avec
l’Union économique et monétaire ouest-africaine, née le 10 janvier 1994 (UEMOA), la
17
Paragraphe 178 du Rapport de décembre 1996 du CCE (WT/CTE/1). Le Président du CCE a déclaré que
ce rapport ne modifiait pas les droits et obligations des membres de l’OMC au titre des accords de l’OMC.
32
Communauté économique africaine (CEA, traité signé à Abuja le 3 juin 1991), la SADC
(Southern African Development Community) établie par le traité du 17 août 1992, l’Asie
avec l’ASEAN (Association of South East Asian Nations) créé en 1967, l’Amérique du
Sud avec le MERCOSUR, l’Amérique du Nord avec l’ALENA.
L’unité du droit international ne souffre pas a priori de ces structures aux objectifs
déterminés, dont les organes se réfèrent au droit international général en tant que de besoin,
considérant par ailleurs que les organisations régionales répondent aux critères et principes
de fonctionnement des organisations internationales tels que prévus par le droit
international général18.
Le droit international de l’environnement trouve dans ces organisations les moyens
de s’exprimer par des mesures concrètes organisées souvent par des programmes d’action
régionaux (programmes d’autant plus élaborés que le niveau d’intégration régional est
élevé ; l’exemple de la communauté européenne est significatif avec le lancement du
premier programme en 1973 et la réalisation à présent d’un sixième programme)19.
Par contre, une application universelle du traitement de la nation la plus favorisée
tel qu’il résulte du système OMC (article 1 GATT 1994) interdirait aux membres de
l’OMC d’être Parties à un accord économique régional. En effet, cela implique des liens
préférentiels entre les membres de l’organisation ce qui est contraire au système OMC. Le
GATT 1994 prévoit donc une exception de plein droit pour les intégrations régionales.
« Les Parties contractantes reconnaissent qu’il est souhaitable d’augmenter la
liberté du commerce en développant, par le moyen d’accords librement conclus,
une intégration plus étroite des pays participant à de tels accords. »
(Article XXIV, paragraphe 4, GATT 1994)
Le Préambule du Mémorandum d’Accord sur l’interprétation de l’article XXIV,
adopté lors de la Conférence de Marrakech en 1994, reconnaît « la contribution qu’une
intégration plus étroite des économies des Parties à de tels accords peut apporter à
l’expansion du commerce mondial ». Il ne considère pas pour autant que toutes les formes
d’accords régionaux sont licites et n’admet comme exception de plein droit que les zones
de libre-échange et les unions douanières.
L’approche des deux espaces normatifs, droit de l’environnement et droit du
commerce international, en ce qui concerne le rôle de l’intégration régionale dans la
réalisation de leurs objectifs marque bien la différence de logique utilisée.

Pour le système commercial multilatéral, la perspective est celle d’une liberté
totale des échanges ; tout ce qui peut favoriser son développement est
encouragé. Par contre toute structure visant à aller au delà de cette
libéralisation, c’est-à-dire à construire un projet politique susceptible de
18
Toute organisation internationale est dotée dès sa naissance, de la personnalité juridique internationale.
Cette personnalité est reconnue dans les traités constitutifs des organisations ou dans des instruments
collatéraux (annexe ou protocole). La fonctionnalité des organisations est dérivée de la volonté des États.
19
De plus amples explications sur le contenu des mesures adoptées au plan régional seront données dans la
partie V.
33

permettre la réalisation de véritables politiques organisées dans des domaines
assez larges, n’est pas acceptée.
Les politiques d’environnement trouvent au contraire dans le cadre régional
les moyens d’une action organisée efficace pour sauvegarder
l’environnement. La logique utilisée est celle de la protection et non de la
libéralisation, ce qui implique une réglementation par opposition à tout
processus de dérégulation soutenu par la logique néolibérale. Par
conséquent, la mise en place de structures établissant une articulation des
compétences pour la protection de l’environnement aux différents niveaux,
c’est-à-dire local, national et international, est bénéfique dans la perspective
d’une meilleure régulation ou d’un meilleur contrôle des activités nocives ou
potentiellement nuisibles pour l’environnement.
34
QUESTIONS
1. Dans quelle mesure peut-on évoquer l’antériorité de l’ordre économique international
sur le droit de l’environnement ?
2. Quelles sont les grandes étapes de la relation entre commerce et environnement ?
3. Comment résoudre les incompatibilités entre accords multilatéraux d’environnement et
les règles du système commercial multilatéral?
4. Comment surmonter l’éventuelle concurrence des mécanismes de règlement des
différends pour régler des conflits qui lient commerce international et environnement?
35
RÉPONSES
1. Les relations économiques internationales ont précédé la mise en place d’une véritable
société internationale. L’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce
(GATT) a été signé en 1947, par la suite le système du GATT s’est progressivement
développé par le biais de conférences multilatérales, les « rounds ». Le droit
international de l’environnement ne s’est structuré que plus tard, dans les années 1960
et surtout à partir de la Conférence de Stockholm de 1972.
2. Période de juxtaposition des règles : période qui précède la Conférence de Stockholm
de 1972 et s’étend jusqu’en 1991 ; une période d’enchevêtrement des règles jusqu’à la
Conférence de Marrakech en 1994 qui conduit à une prise de conscience
environnementale au sein du GATT.
3. Il faut se référer au droit des traités codifié par la Convention de Vienne.
4. Les organes compétents de l’OMC se réfèrent aux règles coutumières d’interprétation
du droit international public pour déterminer l’instance compétente. Les États peuvent
être amenés à choisir en fonction de leurs intérêts. Il n’existe pas de réponse tranchée
sur la question. La tendance est de se référer aux dispositions prévues dans les AME,
les procédures de règlement des différents pouvant prévaloir sur celle de l’OMC
(travaux du CCE).
36
II. Le droit international de l’environnement face au régime du commerce
international
Le droit international de l’environnement, tel qu’il apparaît puis se construit à partir
de la Conférence des Nations unies sur l’environnement humain en 1972, se voit d’emblée
confronté au régime du commerce international établi sur le modèle libéral. Afin de
percevoir les enjeux de la relation complexe entre l’environnement et le commerce, il faut,
d’une part mieux connaître les principes qui gouvernent le système commercial
international et d’autre part examiner la position du droit de l’environnement, élaboré tant
au niveau international qu’au niveau national, par rapport au régime du commerce
international.
Avertissement :
Le rappel des règles qui régissent le commerce international ne doit cependant pas
faire oublier les « zones d’ombre » encore nombreuses dans la réglementation des
échanges internationaux (certains secteurs sont encore « protégés », le commerce des
services est loin d’être libre, etc.), ni le contexte économique mondial (la montée de
l’endettement international, l’accroissement des inégalités entre pays développés et pays en
développement, etc.) ainsi que le caractère parfois très flexible de ces règles en fonction de
l’évolution des intérêts des Parties.
Il faut aussi prendre en considération l’évolution de la structure des échanges, c’està-dire de ce qui peut faire l’objet d’une transaction commerciale licite (la mondialisation
ayant hélas d’autres effets démultiplicateurs d’échanges : trafic d’esclaves, de drogue,
etc.). Car si le volume des échanges a été multiplié par 100 en l’espace de 50 ans, le
secteur des services (transport, tourisme, opérations d’assurances, services bancaires,
télécommunications, informatique, etc.) joue un rôle croissant tant dans l’économie interne
des pays20 que dans les échanges internationaux. Ce que l’on appelle le commerce invisible
par opposition au commerce visible (commerce des biens ou des marchandises) représente
à présent plus du tiers des échanges mondiaux ; il est dominé par les pays développés et
concerne, par de nombreux aspects, la protection de l’environnement.
A. Les principes du système d’échange international
1. Principe de liberté du commerce
Le modèle qui a inspiré les fondateurs de l’ordre commercial international
contemporain est celui de l’ère libérale (1815-1914) reposant sur l’idée d’une division
internationale du travail réalisée par le jeu des forces du marché en fonction de l’avantage
comparé. Cette approche a fondé les principes essentiels du système des échanges
internationaux et constitue la philosophie sous-jacente de l’OMC. Le principe de la liberté
du commerce a été défini par la CPJI :
« la faculté en principe illimitée, de se livrer à toute activité commerciale, que
celle-ci ait pour objet le négoce proprement dit, c’est-à-dire la vente et l’achat de
20
Pour les pays développés, le secteur des services représente 60 à 70% du Produit national brut. On observe
que le développement va de pair avec l’accroissement du secteur tertiaire.
37
marchandises ou qu’elle s’applique à l’industrie (…), qu’elle s’exerce à l’intérieur
ou qu’elle s’exerce à l’extérieur par importation ou exportation. »
(Arrêt CPJI du 12 décembre 1934, affaire Oscar Chinn)
Cependant, les sujets de droit international doivent faire passer cette liberté dans le
droit positif par l’adoption de réglementations ou d’accords internationaux qui en prévoient
les effets juridiques.
2. Les standards du commerce international
Quelles que soient les orientations idéologiques, le principe d’une concurrence
saine a été admis par l’ensemble de la communauté internationale et ce, même si la
tentation protectionniste est permanente et si elle s’est déjà manifestée à plusieurs
reprises21. C’est ainsi que l’Assemblée générale des Nations unies a approuvé le « code »
relatif à l’ensemble des principes et des règles équitables convenus au niveau multilatéral
pour le contrôle des pratiques commerciales restrictives en 198022. On retrouve dans ce
code – ainsi que dans bon nombre de décisions unilatérales, conventions bilatérales,
accords régionaux ou conventions multilatérales à vocation universelle – les standards du
droit commercial, sorte de principes coutumiers dont la combinaison dans une même
réglementation peut créer le régime juridique applicable aux échanges.
Les principaux standards des relations commerciales internationales :




le traitement de la nation la plus favorisée : implique que l’État doit
accorder à celui auquel le lie la clause de la nation la plus favorisée, un
traitement au moins égal à celui qu’il applique à un État tiers ;
le traitement préférentiel : incompatible avec le traitement de la nation la
plus favorisée sauf aménagement expressément prévu, il repose sur une
collaboration privilégiée entre les partenaires. Il peut être réciproque ou
consenti unilatéralement ;
le traitement national : standard selon lequel un État doit accorder à ses
partenaires et à leurs ressortissants les mêmes droits, avantages ou prestations
que ceux qu’il accorde à ses nationaux ;
le traitement réciproque : les États liés se consentent mutuellement les
mêmes avantages ou prestations.
Considérant leur valeur coutumière, ces principes constituent la base du régime
applicable aux échanges commerciaux internationaux en dehors de tout système
institutionnalisé comme celui mis en place par les Accords de Marrakech de 1994 pour
l’Organisation mondiale du commerce.
3. Les principes du système GATT/OMC
21
Des politiques protectionnistes se sont développées notamment dans les années 1980, les États développés
ont fait pression sur les pays développés pour qu’ils acceptent des « restrictions volontaires à l’exportation »
ou des « arrangements de commercialisation ordonnée ».
22
Résolution 35/63, Assemblée générale des Nations unies, code élaboré par une conférence sous les
auspices de la CNUCED, Genève, 1980.
38
Les accords de Marrakech de 1994 qui institutionnalisent l’Organisation mondiale
du commerce distinguent trois catégories d’actes multilatéraux :



les accords sur le commerce des marchandises qui intègrent les règles du
GATT 1947 révisées par des Mémorandums et 12 accords conclus lors de la
même conférence qui composent le GATT 1994 ;
l’Accord général sur le commerce des services (AGCS) ;
l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle touchant au
commerce (ADPIC).
Instrument par excellence de la libéralisation des échanges, le GATT met en place
un régime juridique pour les échanges reposant sur les principes de non-discrimination, du
désarmement douanier et d’interdiction des restrictions quantitatives considérant que ces
principes se réalisent par l’application des standards internationaux et qu’ils peuvent
connaître des aménagements ou des dérogations.
– le principe de non-discrimination se décompose en trois règles :



la clause de la nation la plus favorisée : l’article 1 du GATT 1947 repris dans
le GATT 1994 (et article II.1 de l’AGCS) exige de tout État qui consent une
concession douanière à l’un de ses partenaires du GATT d’en étendre le
bénéfice à toutes les autres Parties.
Cette disposition doit être tempérée du fait des négociations commerciales
multilatérales qui peuvent conduire les États durant les « rounds » (cycle de
négociations du GATT de Tokyo 1973-1979 ou de l’Uruguay 1986-1993, par
exemple) à participer à l’un ou l’autre des accords conclu ;
la réciprocité : un État peut ne faire de concessions qu’en contrepartie de
concessions de la part d’autres Parties. Cette règle est très contestée par les
pays en développement qui ont obtenu une dérogation générale et
permanente ;
le principe du traitement national, c’est-à-dire de la non-discrimination entre
produits étrangers et nationaux similaires (article III § 4 du GATT, article 3.1
Accord ADPIC) ou directement concurrents ou « directement substituables ».
– le désarmement douanier : les États doivent procéder sur une « base de
réciprocité et d’avantages mutuels » à un abaissement général et progressif de leurs droits
de douane par voie de négociation (article XXVIIIbis du GATT 1994). Par le jeu du
traitement de la nation la plus favorisée, les concessions tarifaires que les Parties
contractantes du GATT, puis les membres de l’OMC, se sont consenties mutuellement,
sont étendues à tous les membres de l’OMC . Ces concessions, une fois négociées, sont
intégrées dans des listes annexées au GATT 1994.
– le principe de l’interdiction des restrictions quantitatives : il s’agit d’éviter de
poser des limites à l’importation ou à l’exportation d’un produit (article XI 1, GATT
1994). Ce principe connaît des dérogations dans le sens de l’importation pour lutter contre
les excédents agricoles, remédier aux déséquilibres de la balance des paiements et dans le
sens de l’exportation pour remédier à la pénurie agricole, réaliser des accords sur les
39
produits de base ou maintenir la sécurité (mesures décidées par le Conseil de sécurité sur la
base de la Charte des Nations unies).
Ces trois principes doivent d’une manière générale être compris par rapport à
l’acceptation d’un traitement différencié en faveur des pays en développement, des
pays en transition ou des pays les moins avancés (PMA). Ces catégories sont identifiées
tant au niveau des accords généraux (article IV AGCS) que dans les accords sectoriels
(article 15 de l’Accord anti-dumping23, article 27 de l’accord sur les subventions et les
mesures compensatoires (SMC)24, article 12 de l’Accord sur les obstacles techniques au
commerce (OTC)25, etc.). Dans l’accord particulier sur l’agriculture26, une distinction est
établie entre PMA et pays en développement, les PMA étant dispensés de toute obligation
aussi bien concernant les abaissements de droits de douane résultant de la tarification,
qu’en ce qui concerne les réductions des soutiens internes et des subventions à
l’exportation. Les pays en développement ont des obligations allégées.
B. De la Conférence de Stockholm au Sommet de Johannesburg : la prise en
compte des impératifs économiques du développement
Les déclarations de principes ont une fonction particulière en droit international de
l’environnement ; elles permettent de codifier des principes et des orientations autour
desquels un consensus s’est formé. Ainsi les Conférences de Stockholm (1972) puis de Rio
(1992) occupent une place centrale de part leur influence sur les négociations
internationales ; elles indiquent la voie juridique en consacrant le droit coutumier de
l’environnement et en participant au développement progressif du droit de
l’environnement. En cela elles donnent les indicateurs de l’approche choisie pour aborder
sous l’angle de la protection de l’environnement le système de la libéralisation des
échanges.
Le Sommet mondial sur le développement durable de Johannesburg, qui s’est tenu
du 2 au 4 septembre 2002, marque la dernière évolution des positions adoptées par les
États pour la réalisation d’un développement durable au niveau mondial.
1. La Conférence des Nations unies sur l’environnement (1972)
La Conférence de Stockholm marque la confrontation des perspectives et des
objectifs de développement selon les pays. Une grande part des dégradations
environnementales, comme la pollution de l’air ou la surexploitation des ressources
naturelles renouvelables (forêts, poissons, etc.) et non renouvelables est due aux
comportements de consommation et de production des pays industrialisés. Les pays
industrialisés sont conscients de l’importance de préserver les ressources
Accord de défense commerciale conclu à l’issue du Cycle du Tokyo Round en 1979. Entré en vigueur le 1er
janvier 1995, il s’agit d’un accord-cadre fixant des règles qui doivent être transposées dans les législations
nationales.
24
Accord sur les subventions et les mesures compensatoires, entré en vigueur le 1 er janvier 1995.
25
Accord entré en vigueur le 1er janvier 1995 qui élargit et précise l’accord qui avait le même intitulé et qui
avait été conclu lors du Tokyo Round.
26
À la suite de l’échec de la Charte de La Havane, l’agriculture n’était comprise que très partiellement dans
le GATT 1947. Il faut attendre les Accords de Marrakech en 1994 pour que soit conclu un accord sur
l’agriculture.
23
40
environnementales qui « alimentent » leur économie. Les pays en développement ont pour
perspective de développer leurs activités afin de prendre leur place dans les relations
commerciales internationales et craignent l’utilisation de normes environnementales pour
bloquer leur accès aux marchés et gêner leurs objectifs de développement. La Conférence
de Stockholm a permis de relier les impératifs de développement économique à la
protection de l’environnement sans faire cependant référence à la libéralisation des
échanges ni au jeu de la concurrence mais aux « conditions de vie ».
D’où le postulat selon lequel :
« Le développement économique et social est indispensable si l’on veut assurer un
environnement propice à l’existence et au travail de l’homme et créer sur la terre
des conditions nécessaires à l’amélioration de la qualité de la vie. »
(Principe 8, Déclaration de Stockholm, 1972)
Par ailleurs, sont envisagés l’aspect négatif potentiel des mesures
environnementales sur le plan économique et le rôle positif que devraient avoir au
contraire les politiques de protection de l’environnement dans la perspective du
développement. L’approche concertée est privilégiée pour résoudre cette difficulté en
s’appuyant sur la responsabilité des États et des organisations internationales.
« Les politiques nationales d’environnement devraient renforcer le potentiel de
progrès actuel et futur des pays en voie de développement, et non l’affaiblir ou
faire obstacle à l’instauration de meilleures conditions de vie pour tous. Les États
et les organisations internationales devraient prendre les mesures voulues pour
s’entendre sur les moyens de parer aux conséquences économiques que peut avoir,
au niveau national et international, l’application de mesures de protection de
l’environnement. »
(Principe 11, Déclaration de la Conférence des Nations unies sur l’environnement,
Stockholm, 1972)
2. La Conférence de Rio sur l’environnement et le développement (1992)
La Conférence de Rio s’appuie sur les travaux de la Commission mondiale pour
l’environnement et le développement pour souligner l’importance de l’intégration des
préoccupations environnementales dans les activités de développement économique. Le
concept de développement durable est au centre de toutes les dispositions. Les contours de
la coopération internationale sont tracés autour des responsabilités communes mais
différenciées des groupes d’États et selon les moyens de répartir les tâches et les bénéfices
en tenant compte des intérêts des pays en développement.
La Déclaration de Rio fait clairement référence aux standards du commerce
international : un système ouvert fondé sur le multilatéralisme et respectant le principe de
non-discrimination dans les échanges.
« Les États devraient coopérer pour promouvoir un système économique
international ouvert et favorable, propre à engendrer une croissance économique
et un développement durable dans tous les pays, qui permettrait de mieux lutter
contre les problèmes de dégradation de l’environnement. Les mesures de politique
41
commerciale motivées par des considérations relatives à l’environnement ne
devraient pas constituer un moyen de discrimination arbitraire ou injustifiable, ni
une restriction déguisée aux échanges internationaux. Toute action unilatérale
visant à résoudre les grands problèmes écologiques au-delà de la juridiction du
pays importateur devrait être évitée. Les mesures de lutte contre les problèmes
écologiques transfrontières ou mondiaux devraient, autant que possible, être
fondées sur un consensus international. »
(Principe 12, Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement, 1992)
Le plan d’action mondial pour le développement durable, adopté lors de la
Conférence de Rio, désigné par Agenda 21, établit l’inventaire des actions et stratégies à
mettre en place. La référence à la libéralisation du commerce est expresse :
« 2.3. L’économie internationale doit créer un climat international propice à la
réalisation des objectifs en matière d’environnement et de développement :
a) En encourageant le développement durable par une libéralisation du
commerce ;
b) En faisant en sorte que le commerce et l’environnement se soutiennent
mutuellement ; (…). »
Les principes d’action établis par le chapitre 2 de l’Agenda 21 prévoient la
promotion du développement durable par le commerce et énoncent les principales règles
animant le système d’échanges mondial :
« 2.5. Un système commercial multilatéral ouvert, équitable, sûr, non
discriminatoire, prévisible, compatible avec les objectifs du développement
durable, et conduisant à une répartition optimale de la production mondiale selon
les principes de l’avantage comparatif est bénéfique pour tous les partenaires
commerciaux. De plus, un meilleur accès des exportations des pays en
développement aux marchés des pays développés, allant de pair avec des politiques
macro-économiques et environnementales rationnelles, aurait sur l’environnement
une incidence bénéfique et apporterait de ce fait une contribution importante au
développement durable. »
Une condition de compatibilité entre le système commercial multilatéral et les
objectifs de développement durable est présentée, considérant que l’objectif global
recherché est celui d’une répartition optimale de la production mondiale, celle-ci devant
intervenir en application des principes de l’avantage comparatif.
L’ouverture du droit international de l’environnement lors de la Conférence de Rio
non seulement aux impératifs de développement économique liés à l’accroissement des
échanges mais à la reconnaissance d’un effet potentiellement bénéfique pour
l’environnement marque la prise en compte de l’interrelation entre commerce et
environnement.
3. Le Sommet de Johannesburg (2002)
42
Le Sommet mondial, qui s’est tenu en Afrique du Sud en septembre 2002, a réuni
les délégations des États membres des Nations unies et Parties aux principaux accords
internationaux environnementaux ainsi que de nombreux experts et représentants d’ONG.
Le thème des relations entre commerce et environnement a été abordé dans les documents
issus de la Conférence en se référant au contexte de mondialisation des échanges et aux
engagements pris au sein de l’OMC.
– la Déclaration de Johannesburg sur le développement durable évoque l’apport de la
mondialisation pour relever les défis de l’environnement :
« La mondialisation a ajouté une nouvelle dimension à ces problèmes.
L’intégration rapide des marchés, la mobilité des capitaux et l’accroissement
notable des flux d’investissements dans le monde entier sont sources de nouveaux
défis, mais ouvrent aussi de nouvelles possibilités en matière de développement
durable. »
(Déclaration de Johannesburg, § 14)
– le Plan d’application du Sommet mondial pour le développement durable, qui fait
référence à un développement durable à l’ère de la mondialisation (Plan d’application,
partie V, Le développement durable à l’ère de la mondialisation), s’appuie sur la
Déclaration ministérielle de l’OMC de Doha du 20 novembre 2001. Il réaffirme le rôle
d’un système commercial multilatéral équitable et non discriminatoire dans la réalisation
du développement durable (partie V, § 47 a).
Le plan précise que le commerce peut participer au développement durable et à
l’éradication de la pauvreté, et qu’à ce titre il faut encourager les États membres de l’OMC
à mettre en œuvre le programme d’action adopté lors de la 4e réunion ministérielle de
l’OMC (partie X : Moyens d’exécution, § 90). Sur ce point, la spécificité des difficultés
rencontrées par les pays en voie de développement est soulignée :
« Conformément à la Déclaration de Doha ainsi qu’aux décisions pertinentes
prises à Doha, nous sommes résolus à prendre des mesures concrètes pour aborder
les questions et préoccupations soulevées par les pays en développement au sujet
de l’application de certains accords et de certaines décisions de l’OMC,
notamment les difficultés et les problèmes de ressources qu’ils rencontrent dans
l’application de ces accords. »
(Plan d’application du Sommet de Johannesburg, § 91)
Les références répétées à la Déclaration de Doha sont en cohérence avec les
positions exprimées au cours de la Conférence ministérielle de l’OMC :
« Nous réaffirmons avec force notre engagement en faveur de l’objectif de
développement durable, tel qu’il est énoncé dans le Préambule de l’Accord de
Marrakech. Nous sommes convaincus que les objectifs consistant à maintenir et à
préserver un système commercial multilatéral ouvert et non discriminatoire, et à
œuvrer en faveur de la protection de l’environnement et de la promotion du
développement durable peuvent et doivent se renforcer mutuellement. (…) »
43
(Conférence ministérielle de l’OMC27, Doha, 2001, § 6)
Le sommet mondial de Johannesburg est marqué par l’approche économique
néolibérale qui donne une nouvelle orientation au concept de développement durable.
Celui-ci est en effet indissociablement lié dans ses objectifs au maintien d’un système
commercial multilatéral ouvert.
En dehors de cette orientation générale, différents accords multilatéraux
environnementaux ont intégré la problématique commerciale dans leurs dispositions.
C. Les mesures commerciales dans les accords environnementaux
Le droit international de l’environnement, confronté à la réalité de la libéralisation
des échanges, a adopté des mesures commerciales visant à régler différents problèmes
environnementaux dans leur dimension nationale et internationale.
Le terme « mesures commerciales » vise en général tout instrument qui impose des
contraintes, des conditions ou des restrictions aux produits ou services importés ou
exportés, ou au processus d’importation ou d’exportation de ces produits ou de ces
services. Ainsi, les mesures commerciales peuvent prendre des formes très variées dans la
perspective de la mise en place d’une politique environnementale : interdictions
d’échanges, normes de produits, procédures de notification, etc. Par ailleurs les mesures
commerciales peuvent jouer un rôle très différent d’une convention à l’autre selon les
objectifs poursuivis par le texte et l’impact estimé des relations commerciales sur l’objectif
environnemental poursuivi. On estime à plus de 180 les accords multilatéraux
environnementaux, par conséquent les problèmes environnementaux abordés sont très
divers, certains accords portant sur des points très spécifiques, d’autres traitant des activités
économiques.
De manière très générale, on peut établir une distinction entre :


les accords visant à maîtriser et à contrôler les activités commerciales
considérant que celles-ci constituent un facteur de surexploitation des
ressources ou des richesses naturelles (espèces animales, végétales, ressources
minérales, etc.) ;
et les accords visant à lutter contre les activités commerciales comme source
de pollution (déchets, pollution atmosphérique, etc.).
Différents accords environnementaux internationaux ont prévu des mesures de
restriction ou de contrôle du commerce afin de parvenir à remplir efficacement leurs
objectifs.
1. AME relatifs à la biodiversité
27
WT/MIN(01)/DEC/1 20 novembre 2001.
44
Les échanges internationaux constituent un facteur non négligeable de l’extinction
des espèces même s’ils ne représentent pas la première cause de recul de la biodiversité.
Différents accords internationaux ont intégré des mesures commerciales pour limiter la
pression de la demande internationale sur certaines espèces animales et végétales ou pour
privilégier dans les échanges les modes de gestion durable des ressources naturelles.
a. Les premières conventions : mesures de protection des espèces
Historiquement, la Convention de Londres relative à la conservation de la faune et
de la flore à l’état naturel du 8 novembre 1933 prévoyait déjà le contrôle et la
réglementation de l’importation et de l’exportation d’objets provenant de trophées (article
9). Par la suite des conventions régionales ont tenté de mette en place des mécanismes de
contrôle des échanges d’espèces.
La Convention pour la protection de la flore, de la faune et des beautés
panoramiques naturelles des pays de l’Amérique, adoptée à Washington le 12 octobre
1940, institue un système de contrôle par la délivrance de certificats autorisant
l’exportation, le transit et l’importation de certaines espèces protégées de faune et de flore
(article IX).
La Convention africaine pour la conservation de la nature et des ressources
naturelles, adoptée à Alger le 15 septembre 1968, prend des mesures destinées à
réglementer le trafic (transport, commerce, exportation, etc.) de spécimens ou de trophées
en établissant un système d’autorisations pour leur exportation et leur importation (article
IX). Différentes annexes permettent d’établir des régimes d’autorisation de prises (plus
stricts pour les espèces de la liste A que de la liste B, article VIII.1).
b. La Convention CITES : le système de contrôle des échanges
La Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore
sauvages menacées d’extinction (CITES) ayant pour objectif principal de contrôler les
échanges d’espèces menacées d’extinction, les mesures commerciales y jouent un rôle
essentiel. Cette convention, signée à Washington le 3 mars 1973, réglemente et limite le
commerce international de la faune et de la flore sauvages par un ensemble de mesures de
contrôle applicables aux échanges d’espèces répertoriées dans trois annexes. La
réglementation des échanges est organisée sur la base de permis d’importation et
d’exportation, de contingents et de marques d’origine.
– Les échanges inscrits à l’Annexe 1 sont interdits à de très rares exceptions près,
définies strictement par l’article VII de la convention (acquisitions antérieures à l’entrée en
vigueur du traité, spécimens élevés en captivité, etc.). Toute transaction réalisée sur une
espèce inscrite dans cette annexe est présumée porter préjudice à sa survie ; il incombe
donc aux acteurs de l’échange, importateurs et exportateurs, d’apporter la preuve que ce
n’est pas le cas. La Convention CITES, particulièrement évolutive, a mis en place d’autres
mécanismes non prévus par le texte, tels que les contingents nationaux. Ce mécanisme
permet d’autoriser un volume limité d’échanges pour certaines populations animales d’une
espèce inscrite à l’Annexe 1. Le régime de restrictions aux échanges appliqué à ces espèces
est assoupli au plan national tout en maintenant un niveau de contrôle élevé au plan
45
mondial. L’objectif recherché est d’établir une distinction entre les différentes populations
nationales d’une même espèce selon qu’elles sont gérées ou non de manière durable. Des
catégories spécifiques de faune et de flore marquées ou identifiées – comme c’est le cas
dans des programmes d’utilisation durable basés sur l’élevage extensif – peuvent
appartenir au contingent autorisé en vue du commerce international sans menacer de
surexploitation les espèces concernées.
– L’Annexe 2 répertorie les espèces qui ne sont pas forcément menacées
d’extinction actuellement mais qui pourraient le devenir si leur commerce n’était pas
soumis à une réglementation stricte empêchant une exploitation susceptible de nuire à leur
survie. Il s’agit de privilégier directement l’utilisation durable des espèces et de maintenir
un contrôle sur les échanges les concernant. Dans cette perspective, un permis
d’exportation, dont la délivrance repose sur le caractère non préjudiciable de la transaction,
et la preuve de l’acquisition légale de l’exemplaire sont requis.
– L’Annexe 3 regroupe les animaux et végétaux protégés dans des pays particuliers
lesquels sollicitent l’aide des autres Parties à la CITES pour lutter contre le commerce
illicite de ces espèces. La procédure de délivrance des permis d’importation est différente
selon que le pays exportateur est ou non le pays d’origine de l’espèce, considérant que la
CITES exige de tout autre État exportateur de se procurer un certificat d’origine émis par
l’organe de gestion national.
D’autres mesures de restrictions aux échanges sont prévues, notamment les
restrictions aux échanges avec les États non Parties. Depuis la huitième conférence des
Parties, le commerce avec des États non Parties des espèces inscrites à l’annexe 1 doit se
limiter à des cas strictement délimités qui favorisent leur conservation. Par ailleurs le
commerce avec un État non Partie est autorisé à la condition que celui-ci présente des
documents comparables aux documents exigés par la CITES. Cette mesure vise à éviter
que les pays non Parties ne servent de pays de transit pour des échanges illicites ainsi qu’à
inciter les États à adhérer à la convention. Par ailleurs, des mesures commerciales peuvent
être utilisées à titre de sanction à l’encontre des Parties ne respectant pas leurs obligations.
Le Comité permanent de la CITES a ainsi recommandé l’interdiction des échanges d’une
ou plusieurs espèces réglementées par la convention à l’encontre de certains États Parties.
c. Conventions d’appui à la CITES : réglementation des échanges,
contingentements et coopération
La Convention CITES, quoique adoptée bien avant la Conférence de Rio de 1992,
s’appuie sur des objectifs de développement durable. Ainsi le bon fonctionnement de la
CITES repose sur l’évaluation des incidences du commerce international sur l’état des
espèces et donc sur la prise en compte d’indicateurs scientifiques objectifs pour mieux
percevoir la vulnérabilité et la viabilité des espèces. L’importance de la coopération avec
d’autres conventions multilatérales environnementales est réaffirmée pour améliorer
l’efficacité des mécanismes mis en place : la Convention sur la diversité biologique (Rio,
1992), la Convention concernant la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel
(Paris, 1972), la Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la
faune sauvage (Bonn, 1979), etc.
46
D’autres conventions peuvent jouer un rôle d’appui ou de relais, par exemple
l’Accord concernant une exécution commune de mesures visant à lutter contre le
commerce illégal de faune et de flore sauvages, signé à Lusaka le 8 septembre 1994.
Cette convention, dont l’objectif est de réduire et, à terme, d’éliminer le commerce illicite
des espèces, donne pour obligation aux États de prendre les mesures appropriées pour
enquêter sur les trafics et engager des poursuites (article 4.1).
Par ailleurs, différentes conventions relatives à la protection des espèces ou plus
généralement à la conservation de la biodiversité établissent des interdictions et des
restrictions des échanges lorsque des pratiques risquent de menacer la préservation de
certaines espèces. C’est le cas des dispositions du Protocole concernant la conservation
et la gestion des zones marines protégées du Pacifique du Sud-Est (Paipa, 1989, articles
2 et 5) ou encore du Protocole sur les zones et la vie sauvage spécialement protégées du
milieu marin des Caraïbes (Kingston, 1990). L’article 10 du Protocole de Kingston
prévoit de réglementer, voire d’interdire, les activités néfastes aux espèces protégées,
notamment les activités commerciales. Des mesures très concrètes de réglementation du
commerce des espèces sauvages ont également été prises au niveau européen, notamment
avec le règlement 348/81 du 20 janvier 1981 relatif à un régime commun applicable aux
importations de cétacés et avec la directive 83/129 du 28 mars 1983 concernant
l’importation dans les États membres de peaux de bébés phoques et de produits dérivés.
d. Ressources halieutiques et ressources biologiques de l’Antarctique : des mesures
concernant les procédés et méthodes de production
Un procédé ou une méthode de production peut être interdit dans la mesure où il est
susceptible de provoquer la disparition d’espèces migratrices ou de ressources biologiques
partagées. À titre d’exemple, la Convention pour l’interdiction de la pêche au filet maillant
dérivant de grande dimension dans le Pacifique Sud (Wellington, 1989) et les résolutions
des Nations unies sur ce type de pêche28 prévoient des mesures en ce sens pour les régions
où les ressources biologiques sont soumises à d’importantes pressions commerciales. La
Convention de Wellington interdit la pêche au filet dérivant à grande échelle en haute mer
car l’important volume de capture que permet l’usage de ces filets menace la viabilité de
certaines espèces (exemple : le germon du Pacifique sud). La convention prévoit que les
Parties peuvent prendre des mesures « conformes au droit international » pour interdire
l’importation de poissons pêchés au filet dérivant.
Dans le cadre de la protection d’un milieu et des ressources biologiques qui s’y
trouvent, le système de protection de l’Antarctique, organisé autour de cinq accords29,
comporte des normes de procédés particulières telles que les limitations à la capture du
krill et des crabes dans le cadre des mesures de conservation et de gestion des pêcheries
existantes et des pêcheries nouvelles et d’exploration. Le contingentement constitue une
mesure essentielle dans le dispositif mis en place pour la conservation des ressources de
l’Antarctique : ainsi la Convention de Canberra sur la conservation de la faune et de la
28
Résolutions 44/225 du 22 décembre 1989, 45/197 du 21 décembre 1990, 46/215 du 20 décembre 1991.
Le système Antarctique : les Mesures concertées de 1964 pour la préservation de la faune et de la flore, la
Convention pour la préservation des phoques de 1972, la Convention sur la conservation de la faune et de la
flore marines de l’Antarctique de 1980, la Convention pour la réglementation des activités relatives aux
ressources minérales de 1988, le Protocole sur l’Antarctique pour la protection de l’environnement de 1991.
29
47
flore marines de l’Antarctique de 1980 prévoit que le volume des captures ne doit pas
compromettre le maintien des espèces exploitées à un niveau stable (article II).
e. Les forêts et le commerce du bois tropical : privilégier l’exploitation durable
La déforestation représente aujourd’hui l’une des préoccupations
environnementales majeures ; les forêts tropicales humides abritent 50 à 90% des espèces
vivantes de la planète et jouent un rôle essentiel dans la régulation du système climatique.
L’approche internationale de la conservation des forêts se fait très progressivement.
La Déclaration de principes, non juridiquement contraignante mais faisant autorité,
pour un consensus mondial sur la gestion, la conservation et l’exploitation écologiquement
viable de tous les types de forêts, adoptée à Rio en 1992, propose une exploitation durable
mais surtout réaffirme des principes de libre exploitation et de libre commerce du bois pour
que les pays producteurs puissent bénéficier des avantages du marché international sans
contrainte.
L’Agenda 21, quant à lui, aborde la question de la lutte contre le déboisement mais
préconise surtout d’améliorer la coopération pour parvenir à une exploitation
écologiquement viable. L’objectif demeure principalement la promotion d’une meilleure
exploitation commerciale des bois d’œuvre.
« Le commerce des produits forestiers devrait se fonder sur des règles et
procédures non discriminatoires et multilatéralement acceptées, compatibles avec
le droit et les pratiques commerciales internationales. Il conviendrait à cet égard
de favoriser un commerce international ouvert et libre ; (…). »
(Article 13.a, Déclaration de principes, Rio, 14 juin 1992).
Parallèlement, les professionnels du bois ont tenté de réglementer le commerce des
bois tropicaux en 1983 par le biais de l’Accord international sur les bois tropicaux, signé à
Genève. Cet accord a été modifié le 26 janvier 1994 créant l’Organisation internationale
des bois tropicaux destinée à réguler le marché afin de soutenir des politiques nationales de
conservation. L’Accord vise à encourager le commerce du bois tropical mais aussi à
promouvoir le développement durable :
« ( …) les objectifs de l’Accord sont les suivants :
(…)
d) Renforcer la capacité des membres d’exécuter une stratégie visant à ce que,
d’ici à l’an 2000, les exportations de bois et de produits dérivés des bois tropicaux
proviennent de sources gérées de façon durable ;
(…)
k) Améliorer la commercialisation et la distribution des exportations de bois
tropicaux provenant de sources gérées de façon durable ; (…). »
(Article 1, Accord international sur les bois tropicaux, Genève, 26 janvier 1994)
Par conséquent, on trouve dans l’accord de 1994 la perspective de restreindre les
échanges de bois d’œuvre qui ne provient pas de forêts gérées d’une manière
écologiquement viable et qui pourraient par conséquent contribuer à la diminution de la
48
biodiversité. Aucune interdiction unilatérale à l’importation de bois tropicale n’a cependant
été prévue par le texte. En contrepartie, on est parvenu à éviter l’inscription d’une
interdiction de principe des restrictions aux échanges. Cependant aucune disposition
n’autorise expressément des mesures commerciales à caractère restrictif et, en cela,
l’Accord se différencie des autres conventions environnementales qui donnent la faculté
aux États de restreindre les échanges commerciaux pour réaliser les objectifs qu’elles se
sont fixés.
f. La diversité biologique
i. La Convention sur la diversité biologique
La Convention du 5 juin 1992 est marquée par l’orientation utilitariste et les
principes mercantiles affirmés au cours de la Conférence de Rio et précisés par l’Agenda
21. S’agissant d’une convention-cadre, chaque État Partie est responsable de la mise en
application de l’accord dans son ordre interne. La diversité biologique n’étant considérée
que comme une « préoccupation de l’humanité » les États ont le droit souverain
d’exploiter leurs propres ressources (article 3). Celles-ci sont donc clairement considérées
et traitées en tant que ressource économique à laquelle il faut appliquer un régime
d’exploitation compatible avec des objectifs de développement durable.
Les évaluations économiques des bénéfices apportés par la diversité biologique
portent notamment sur les plantes pharmaceutiques pour des usages médicaux potentiels
ou déjà exploités. Dans une approche libérale, la valeur économique que représentent les
ressources génétiques de la forêt tropicale pour l’industrie pharmaceutique justifie les
mesures de protection de l’accès à la ressource comme de la ressource elle-même. À cet
égard, la Convention de Rio, sans présenter de dispositions expresses sur le commerce des
espèces animales ou végétales, fonde ses articles sur le lien entre le contrôle de l’accès,
l’exploitation et les conditions de commercialisation de la ressource. Dans la perspective
d’une « utilisation écologiquement rationnelle » ou commerciale, l’État est certes
souverain sur ses ressources mais il ne peut en refuser systématiquement l’accès et doit au
contraire le faciliter.
« 2. Chaque Partie contractante s’efforce de créer les conditions propres à faciliter
l’accès aux ressources génétiques aux fins d’utilisation écologiquement rationnelle
par d’autres Parties contractantes et de ne pas imposer de restrictions allant à
l’encontre des objectifs de la présente Convention.
(…)
7. Chaque Partie contractante prend les mesures législatives, administratives ou de
politique générale appropriées (…) pour assurer le partage juste et équitable des
résultats de la recherche et de la mise en valeur ainsi que des avantages résultant
de l’utilisation commerciale et autre des ressources génétiques avec la Partie
contractante qui fournit ces ressources. Ce partage s’effectue selon des modalités
mutuellement convenues. »
(Article 15, Convention sur la diversité biologique)
Cela permet aux États de passer des contrats avec des entreprises désireuses
d’exploiter les ressources biologiques présentes sur leur territoire. C’est ainsi que se
49
multiplient les contrats de bioprospection. Pour favoriser ce nouveau secteur d’activité, la
CNUCED a lancé le programme « biotrade initiative » lors de la troisième conférence des
Parties de la Convention sur la diversité biologique. Ce programme a pour but d’aider les
négociations entre des partenaires dont les connaissances et les moyens d’expertise sont
souvent inégaux en proposant, par exemple, des modèles de contrats. Les pays concernés
par ce nouveau domaine du commerce international pourront intégrer de nouveaux
marchés, conformément à la théorie libérale des avantages comparatifs.
Les limites à la volonté contractuelle dans les contrats d’exploitation de la
biodiversité :
 pour les contrats de collecte de spécimens, les avantages sont aléatoires ; il ne
faut pas surestimer le rôle du contrat comme moteur des politiques de
valorisation ;
 la fiabilité du rapport économique institué par contrat peut être sujette à caution
car il est difficile de contrôler le développement d’éventuelles inventions ;
 la liberté contractuelle est limitée par les dispositions législatives ou
réglementaires du pays fournisseur.
Cependant, si sous la poussée des biotechnologies, la Convention de 1992 a
souscrit à une conception marchande de la biodiversité, elle prévoit également le respect
des droits de propriété intellectuelle de certains groupes ou communautés locales, des
transferts technologiques des pays du Nord vers ceux du Sud (article 16) et l’instauration
des conditions nécessaires pour assurer la compatibilité entre les utilisations actuelles et la
conservation de la diversité biologique en privilégiant la conservation in situ (article 8). La
convention a pu être considérée comme remettant en cause le droit des brevets et comme
étant peu conforme aux droits de propriété intellectuelle, tels que prévus par l’Organisation
mondiale du commerce30.
ii. Le Protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques,
relatif à la Convention sur la diversité biologique (2000)
Le Protocole a été adopté le 29 janvier 2000, 108 États en sont signataires. Suivant
l’article 37, le texte n’entre en vigueur qu’après la ratification de 50 États ou organisations
régionales d’intégration économique, Parties à la Convention sur la diversité biologique.
L’accord vise la sécurité du transfert international et de l’utilisation « d’organismes
vivants modifiés résultant de la biotechnologie moderne » considérant que les mouvements
transfrontières de ces organismes peuvent avoir des « effets défavorables sur la
conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique » (Préambule).
Afin de parvenir à cet objectif, des mesures de contrôle des échanges sont prévues
par le Protocole sous forme d’une procédure obligatoire de notification par le pays
exportateur, comprenant un rapport d’évaluation des risques, et d’une autorisation
préalable par le pays importateur. Ce dernier dispose de 270 jours pour informer le
demandeur de sa décision après avoir évaluer les risques mais il peut également exiger
Ce point sera développé dans la partie III dans le paragraphe consacré à l’Accord sur les droits de propriété
intellectuelle de l’OMC.
30
50
que l’exportateur procède à l’évaluation des risques pour prendre une décision (article
15.2).
Le coût de l’évaluation des risques supplémentaires peut reposer sur le pays
exportateur si l’auteur de la notification le demande (article 15.3). La décision qui doit en
tout état de cause être motivée peut autoriser, avec ou sans condition, l’importation ou
l’interdire. Le protocole fait application du principe de précaution, c’est-à-dire que
l’absence de certitude scientifique ne conduit pas à autoriser le transfert. Il n’est pas
imposé que les justifications apportées s’appuient sur les seuls éléments bénéficiant d’une
certitude scientifique :
« L’absence de certitude scientifique due à l’insuffisance des informations et
connaissances scientifiques pertinentes concernant l’étendue des effets
défavorables potentiels d’un organisme vivant modifié sur la conservation et
l’utilisation durable de la diversité biologique dans la Partie importatrice, compte
tenu également des risques pour la santé humaine, n’empêche pas cette Partie de
prendre comme il convient une décision concernant l’importation de l’organisme
vivant modifié en question comme indiqué au paragraphe 3 ci-dessus, pour éviter
ou réduire au minimum ces effets défavorables potentiels. »
(Article 10.6. du Protocole de Cartagena, 2000)
Par ailleurs, de nouvelles informations scientifiques obtenues après la décision
d’importation peuvent permettre à un État de revenir sur l’autorisation accordée. Le
Protocole prévoit également que les États consultent le public lors de la prise de décision
(article 23) et de la prise en compte des incidences socio-économiques des impacts
éventuels sur la biodiversité (article 26).
Le Protocole mettant en place des restrictions aux échanges en faisant pleine
application du principe de précaution, la question demeure d’un potentiel recours auprès de
l’OMC pour refus d’importer des OGM (Organismes génétiquement modifiés). Le texte du
Protocole reste muet sur ce point précis.
Cependant trois dispositions du Préambule laissent supposer qu’il n’existe pas une
hiérarchie avec le droit de l’OMC :
« Estimant que les accords sur le commerce et l’environnement devraient
concourir conjointement à l’avènement d’un développement durable,
Soulignant que le présent Protocole ne sera pas interprété comme impliquant une
modification des droits et obligations d’une Partie en vertu d’autres accords
internationaux pertinents,
Considérant qu’il est entendu que le présent préambule ne vise pas à subordonner
le Protocole à d’autres accords internationaux, (…). »
Ce passage marque l’ambiguïté avec laquelle est abordée la confrontation des deux
systèmes normatifs liant commerce et environnement, aucune solution n’étant
véritablement prévue pour lever les difficultés de leur coexistence. Dans l’attente de
l’entrée en vigueur du Protocole, le commerce des OGM continue de relever de l’OMC
considérant qu’il est susceptible de relever de l’Accord sur les mesures sanitaires, de
51
l’Accord sur les obstacles techniques au commerce ou encore de l’Accord sur
l’agriculture31.
2. Les AME réglementant les substances et produits pouvant présenter un risque
pour l’environnement
Les premiers accords internationaux prévoyant des restrictions aux échanges afin
de protéger l’environnement concernent les substances qui détruisent la couche d’ozone et
sont :
– la Convention pour la protection de la couche d’ozone, de Vienne du 22 mars
1985,
– le Protocole relatif à des substances qui appauvrissent la couche d’ozone, de
Montréal du 16 septembre 1987,
– la Convention-cadre sur les changements climatiques de 1992 et
– le Protocole à la Convention-cadre sur les changements climatiques, de Kyoto de
199732.
Par la suite des conventions globales ou régionales se sont intéressées aux
mouvements transfrontières des déchets dangereux avec tout d’abord :
– la Convention concernant le contrôle des mouvements transfrontières de déchets
dangereux et leur élimination, signée à Bâle le 22 mars 1989,
– la Convention sur l’interdiction d’importer des déchets dangereux et le contrôle
de leurs mouvements transfrontières en Afrique, signée à Bamako le 30 janvier
1991,
– l’Accord régional concernant les mouvements transfrontières des déchets
dangereux, de Panama du 11 décembre 1992,
– les accords élaborés pour les mers régionales (le Protocole du 1er octobre 1996
relatif à la prévention de la pollution de la mer Méditerranée par les mouvements
transfrontières de déchets dangereux et leur élimination, la Convention de
Waigani du 16 septembre 1995 interdisant l’importation dans les îles relevant des
pays du Forum du Pacifique de déchets dangereux et de déchets radioactifs et
soumettant à contrôle les mouvements transfrontières et la gestion des déchets
dangereux dans le Pacifique Sud),
– la Convention de Rotterdam du 10 septembre 1998 sur la procédure de
consentement préalable en connaissance de cause, applicable à certains produits
chimiques et pesticides dangereux qui font l’objet d’un commerce international.
Dans le domaine de la protection de la couche d’ozone, les mesures visent à
restreindre les échanges de produits fabriqués à l’aide de substances appauvrissant la
couche d’ozone alors que dans le domaine de la gestion des déchets et du contrôle des
substances chimiques ou dangereuses pour l’environnement, les mesures commerciales
visent à restreindre directement le commerce de ces substances. Le premier domaine
Ces accords de l’OMC sont traités dans la partie III.
Protocole ouvert à la signature le 16 mars 1998. Il entrera en vigueur 90 jours après avoir été ratifié par au
moins 55 Parties à la Convention sur les changements climatiques, parmi lesquelles les pays développés dont
les émissions totales de dioxyde de carbone représentaient au moins 55% de la quantité globale de dioxyde
de carbone émise en 1990 par ce groupe de pays.
31
32
52
implique des mesures susceptibles de limiter un dommage environnemental
(appauvrissement de la couche d’ozone, changement climatique) au niveau mondial. En ce
qui concerne les déchets et autres substances dangereuses, les dommages
environnementaux peuvent être limités au territoire du pays impliqué dans le commerce de
ces produits. Ainsi les mesures commerciales utilisées pourront varier en fonction du
domaine concerné.
a. Mesures commerciales pour la protection de l’air et de l’atmosphère
Le régime juridique de protection de la couche d’ozone, à l’instar du régime
européen relatif à la pollution atmosphérique à longue distance, repose sur une conventioncadre donnant des objectifs généraux et une base de coopération : la Convention-cadre de
Vienne de 1985. Le Protocole de Montréal (1987) négocié ultérieurement prévoit quant à
lui des objectifs de réduction des substances qui appauvrissent la couche d’ozone tout en
laissant le choix aux États des moyens pour y parvenir. Les amendements adoptés
successivement en 1990, 1992 et 1995 ont permis d’étendre le nombre de substances
réglementées et de se rapprocher de l’objectif ultime, soit l’élimination de la production de
ces substances.
Dans cette perspective, les mesures de restrictions aux échanges sont au cœur du
dispositif du Protocole de Montréal. Il interdit l’importation en provenance de pays, qui ne
sont pas Parties au Protocole, de produits contenant des substances régies par celui-ci. Il
vise à réduire progressivement la consommation et la production de substances
appauvrissant la couche d’ozone (SAO) en mettant en place des calendriers prévoyant la
réduction des importations et des exportations des substances réglementées entre Parties.
Parallèlement, les échanges commerciaux avec les États non Parties au protocole sont
limités pour éviter un déplacement de la production des États Parties vers les États non
Parties.
Les restrictions aux échanges expressément prévues par le texte concernent :



les échanges avec les États non Parties. À l’origine, les mesures étaient
conçues pour couvrir les SAO sous toutes leurs formes, produits chimiques et
produits contenant ou fabriqués en utilisant des SAO ainsi que des
technologies de production et d’utilisation des SAO ;
l’engagement d’appliquer un système de licences aux échanges entre les
Parties, l’objectif étant d’améliorer la qualité des informations recueillies sur
les échanges de substances réglementées ;
l’interdiction des exportations de substances usagées et recyclées applicable
aux Parties qui ne sont pas en conformité avec les calendriers de réduction
afin de lutter contre le commerce illicite.
Le Protocole de Montréal est l’un des rares accords concernant la pollution
transfrontière qui comporte des normes sur les produits et les processus de production aussi
rigoureuses susceptibles de poser des problèmes de coûts et donc de compétitivité. Ainsi le
Protocole a pour objectif d’encourager les États à devenir Parties en limitant le commerce
des produits réglementés aux États Parties.
53
Le réchauffement planétaire appelant une réaction de l’ensemble de la communauté
internationale, l’objectif poursuivi sera également de réunir un maximum d’États autour
d’un accord commun.
Ainsi, la Convention-cadre sur les changements climatiques (1992) vise à
stabiliser les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère à un niveau qui
empêche toute perturbation susceptible d’affecter dangereusement le système climatique
(article 2). Elle met en place une responsabilité commune mais différenciée en divisant les
États en trois groupes avec des devoirs spécifiques (article 4) tenant compte des priorités
nationales et régionales de développement et de l’importance de maintenir une croissance
économique durable.
« Il appartient aux Parties de travailler de concert à un système économique
international qui soit porteur et ouvert et qui mène à une croissance économique et
à un développement durables de toutes les Parties, en particulier des pays en
développement Parties, pour leur permettre de mieux s’attaquer aux problèmes
posés par les changements climatiques. Il convient d’éviter que les mesures prises
pour lutter contre les changements climatiques, y compris les mesures unilatérales,
constituent un moyen d’imposer des discriminations arbitraires ou injustifiables
sur le plan du commerce international, ou des entraves déguisées à ce commerce. »
(Article 3.5., Convention-cadre sur les changements climatiques, 1992)
Les objectifs et les obligations étant définis de manière très générale dans la
convention, aucune mesure commerciale n’est prévue en dehors de cette disposition
destinée à prévenir le conflit entre le système économique international et des mesures
prises pour lutter contre les changements climatiques. La convention évoque donc
simplement le risque d’utiliser les mesures environnementales de manière à entraver la
libre concurrence et de remettre en cause les grands principes du commerce international
sans prévoir clairement une obligation reposant sur les États.
C’est en fait dans le Protocole de Kyoto de décembre 1997 que des obligations
plus précises apparaissent avec des obligations en lien avec l’énumération des gaz à effet
de serre, l’acceptation par les pays industrialisés d’objectifs de réduction des émissions
sans contrepartie de la part des pays en développement, la possibilité de totaliser les
émissions des pays industrialisés et la possibilité de céder les « droits d’émission » entre
États Partie ou entre un État et une personne privée.
Le Protocole de Kyoto présente la particularité de s’appuyer sur les stratégies de
marché et donc avant tout sur une logique marchande pour parvenir à ses objectifs. La
définition des objectifs de réduction d’émission a été accompagnée de la mise en place
d’un mécanisme d’échanges d’unités de réduction consacrant le rôle du secteur privé
comme partenaire. L’article 4 permet de globaliser les quotas d’émission au niveau du
groupe de pays en répartissant les efforts. Cette souplesse donnée aux États par
« catégories » permet aux agents économiques de parvenir aux objectifs fixés de la manière
la moins coûteuse. Par contre, en fonction de l’attribution des objectifs fixés, il peut
54
apparaître des surplus de droits d’émission ; or la mise sur le marché de ces surplus peut
entraîner une augmentation des émissions de l’ensemble des pays industrialisés33.
Le Protocole fait place à la technique des échanges dans le cadre des relations entre
les pays de l’Annexe I. Cependant de nombreuses critiques ont été émises sur cette
technique qui conduit à « marchandiser » l’atmosphère.
Par ailleurs, la Conférence des Parties de la convention, organe responsable des
conditions d’application de la convention sur les changements climatiques, a décidé
d’instaurer une phase pilote permettant aux pays industrialisés et aux pays en
développement de conclure des accords visant à la satisfaction des obligations de réduction
des émissions de gaz à effet de serre en participant à des projets d’investissement. Les
États et le secteur privé pourront faire des investissements dans les pays en économie de
transition ou en développement et obtenir en échange des crédits d’émission. Ces unités de
réduction d’émissions seront soustraites de la quantité attribuée à la Partie qui procède à la
cession (articles 3.10 et 3.12).
D’autres techniques préconisées par le Protocole sont :



l’imposition de taxes sur les émissions de dioxyde de carbone ;
l’adoption de certaines normes de traitement ou d’émission notamment
pour les émissions de gaz à effet de serre non réglementées par le Protocole
de Montréal ;
l’élimination des subventions et de toute pratique d’incitation fiscale qui
iraient à l’encontre de l’objectif recherché.
Le Protocole de Kyoto prévoit l’application de mesures de libéralisation du marché
pour s’acquitter de ses engagements :
« Réduction progressive ou suppression graduelle des imperfections du marché,
des incitations fiscales, des exonérations d’impôt et de droits et des subventions qui
vont à l’encontre de l’objectif de la Convention, dans tous les secteurs émettant des
gaz à effet de serre et application d’instruments du marché ; »
(Article 2.1.a)v), Protocole de Kyoto, 1997)
Le texte du Protocole établit un lien direct entre l’application de mesures pour
réduire les émissions et les conséquences sur le commerce international en respectant le
principe très général énoncé par la convention-cadre de la compatibilité entre les systèmes
de normes. Aucune instance de l’un des systèmes n’étant supposée prédominer sur l’autre,
l’orientation est plus à la conciliation en cas de conflit. Le Protocole rappelle ainsi que les
pays de l’Annexe I doivent limiter l’impact de leurs politiques et mesures sur le commerce
international :
Ainsi des pays comme l’Ukraine ou la Russie qui appartiennent à l’annexe I/B se sont vu attribuer des
objectifs très supérieurs à leurs besoins. Ils disposeront donc d’un surplus de droits d’émission car leurs
économies encore en transition sont en difficulté.
33
55
« Les Parties visées à l’annexe I s’efforcent d’appliquer les politiques et les
mesures prévues dans le présent article de manière à réduire au minimum les effets
négatifs, notamment les effets néfastes des changements climatiques, les
répercussions sur le commerce international et les conséquences sociales,
environnementales et économiques pour les autres Parties, surtout les pays en
développement Parties (…). »
(Article 2.3., Protocole de Kyoto, 1997)
S’inscrivant clairement dans le respect des principes de libre-échange, l’une des
caractéristiques du Protocole est de donner au secteur privé une importance particulière
pour la mise en œuvre des stratégies de marché envisagées. Cependant, leur intervention
peut conduire à se confronter à des problèmes de monopole ou d’abus de position
dominante (par exemple si les sociétés d’un même groupe se retrouvent seules
bénéficiaires de transferts de subsides ou de technologie). Des questions de responsabilité
pénale ou civile peuvent également se poser pour les agents économiques impliqués dans
la réalisation de prestations visant à la réduction des émissions à effet de serre.
b. Mesures commerciales pour le contrôle des déchets et des substances
dangereuses
La production et l’utilisation de substances chimiques ayant connu une constante
progression avec le développement industriel et l’évolution corrélative des modes de
consommation, ces substances participent à un niveau non négligeable au commerce
mondial. Des milliers de nouveaux produits sont commercialisés chaque année sans que
l’on en connaisse toujours précisément les effets sur la santé ou l’environnement. Jusqu’à
présent, il n’existe aucun texte de portée générale qui viserait tous les problèmes nés de la
production, du transport, de l’utilisation et de l’élimination des substances toxiques ou
dangereuses.
La réglementation du commerce international des produits chimiques a connu une
lente évolution depuis la Convention internationale concernant le transport de
marchandises par chemin de fer de 1924 et le Règlement international relatif au transport
des marchandises dangereuses par chemin de fer de 1924. Il faut attendre le début des
années 1970 pour voir apparaître les premières mesures de contrôle des substances
dangereuses pour l’homme et l’environnement (résolution du 18 mai 1971 de l’OCDE
prévoyant une procédure de notification préalable et de consultation).
Sous l’impulsion du PNUE et de la FAO, naît la Convention de Rotterdam du 10
septembre 199834 sur la procédure de consentement préalable en connaissance de cause,
applicable à certains produits chimiques et pesticides dangereux qui font l’objet d’un
commerce international. Cette convention permet de favoriser le partage des
responsabilités pour le commerce de ces produits considérant que cette activité est
conditionnée par les décisions nationales concernant l’importation et l’exportation.
L’annexe III de la convention énumère les produits chimiques et autres produits
(notamment des pesticides) extrêmement dangereux qui sont soumis à une procédure de
consentement préalable (les articles 5 et 6 précisent la procédure qui prévoit l’intervention
34
Accord signé par plusieurs États mais encore non ratifié et donc non en vigueur.
56
d’un Comité d’étude des produits chimiques). Tout État, qui souhaite interdire
l’importation d’un produit chimique ou soumettre l’importation à certaines conditions, doit
appliquer cette décision à tous les États y compris les États tiers (articles 10 et 11). Des
règles particulières sont prévues pour les produits chimiques interdits ou strictement
réglementés par un État sans être inscrits à l’annexe III imposant la notification de
l’exportation à l’État importateur, lequel doit en accuser réception (article 12).
Ainsi les impératifs de protection de l’environnement ont pu aboutir à une
réglementation du commerce de substances toxiques ou dangereuses permettant d’établir
des restrictions aux échanges de certains produits malgré les enjeux économiques souvent
importants pour les États importateurs comme pour les États exportateurs.
Parallèlement à la difficile question des produits toxiques ou dangereux, la
communauté internationale a dû se pencher sur la gestion et le contrôle des flux des
déchets, devenus l’une des préoccupations majeures au niveau mondial.
L’OCDE, le PNUE et les Communautés européennes ont élaboré des textes pour
apporter certaines solutions en matière de planification, d’autorisation et de surveillance
des déchets dangereux, mais la plupart n’ont pas d’effets contraignants (Recommandation
du 28 septembre 1976 de l’OCDE, Principes directeurs du PNUE, Décision 14/30 du
Conseil d’administration du 17 juin 1987, etc.).
En matière de flux transfrontaliers de déchets toxiques ou dangereux, l’adoption de
la Convention de Bâle, le 22 mars 1989, qui va reprendre plusieurs principes formulés
dans les textes précédents, donne à la communauté internationale un instrument pour
limiter le commerce international des déchets dangereux (149 États Parties35). Ces
échanges préjudiciables pour l’environnement36, perçus comme injustes notamment pour
les pays en développement qui, moyennant des redevances financières, acceptent
d’importer des déchets dangereux, sont découragés, voire interdits, par différentes mesures.
L’objectif général de la Convention de Bâle est celui de « protéger par un contrôle
strict la santé humaine et l’environnement contre les effets nocifs qui peuvent résulter de la
production et de la gestion des déchets dangereux et d’autres déchets » (Préambule).
Plusieurs priorités sont identifiées par la convention, dont : le contrôle et la
réduction au minimum des mouvements transfrontières de déchets dangereux et la
prévention des mouvements illicites de déchets dangereux .
Les mesures prévues pour y parvenir sont les suivantes :

une procédure de notification et de consentement : l’État exportateur est tenu
d’informer l’autorité compétente des États d’importation et de transit de tout
mouvement transfrontière envisagé de déchets dangereux ou d’autres déchets.
35
149 États Parties à la Convention de Bâle au 2 janvier 2002.
Il est cependant très difficile d’évaluer le volume total des déchets dangereux produits et transportés sur le
plan international car les informations sur ce sujet sont peu nombreuses. Le Secrétariat de la Convention de
Bâle estime le total mondial des déchets dangereux produits chaque année à plus de 400 millions de tonnes
(estimation d’un rapport de 1997).
36
57



Les États importateurs et de transit accusent réception par écrit de la
notification en consentant avec ou sans réserve au mouvement ou en
demandant un complément d’information ;
le droit souverain de l’État d’interdire l’entrée de déchets dangereux sur son
territoire (article 4.1). Par ailleurs l’importation de déchets dangereux depuis
un État non Partie est interdite (article 4.5) à moins qu’elle ne fasse l’objet
d’un arrangement qui ne permette en aucun cas de déroger aux dispositions de
la Convention (article 11). Enfin les Parties prennent les dispositions voulues
pour empêcher les importations de déchets dangereux si elles ont des raisons
de croire que les déchets « ne seront pas gérés selon des méthodes
écologiquement rationnelles » (article 4.2.f)37 ;
des obligations concernant le transport, l’élimination, l’emballage et
l’étiquetage : les Parties doivent faire respecter les règles internationales en
matière d’emballage, d’étiquetage et de transport pour les déchets dangereux
et les autres déchets qui doivent faire l’objet d’un mouvement transfrontière
(article 4.7) ;
une réglementation des exportations : les États d’exportation ont l’obligation
d’évaluer si la gestion est écologiquement rationnelle dans les États
d’importation (article 4.10).
Les dispositions opérationnelles de la Convention de Bâle qui visent à atteindre des
objectifs écologiques, reposent donc sur des mesures commerciales. En l’occurrence,
l’efficacité globale de la convention est conditionnée par la réalisation de restrictions aux
échanges de produits. Le commerce de certains produits étant en soi dommageable pour
l’environnement, c’est l’activité commerciale qu’il faut réglementer.
Mesures commerciales dans les AME et relations avec les principes du système
commercial multilatéral
Mesures
commerciales
Permis ou
licence
d’importation
Permis ou
licence
d’exportation
Restriction
aux exportations
Restrictions aux
importations
AME
(dispositions)
CITES
CITES
CITES
CITES
Interdiction
des échanges
entre Parties
et non
Parties
CITES
Convention
de Bâle
Notification
Consentement
préalable
Protocole de
Montréal,
Convention
de Bâle
Étiquetage
Taxes
Subventions
Suppression
des imperfections du
marché
Protocole de
Kyoto
Protocole de
Kyoto
D. Les mesures d’appui à la protection de l’environnement comme instrument
de politique commerciale
Des mesures commerciales sont adoptées pour restreindre, voire interdire des
échanges dangereux ou potentiellement dangereux pour l’environnement. Inversement, des
mesures environnementales peuvent participer au jeu du commerce international et des
politiques nationales tout comme des mesures prévues par des accords multilatéraux
37
La convention définit la gestion écologiquement rationnelle et des directives techniques viennent préciser
les pratiques écologiquement rationnelles.
58
peuvent renforcer la compétitivité de produits conformes à des normes environnementales
et créer des conditions d’échange intégrant la dimension environnementale.
1. Normes environnementales sur procédés et méthodes de production (normes
PMP)
Des normes environnementales concernant les différentes étapes de la production
d’un produit peuvent créer des critères supplémentaires qui influencent le marché. Une
distinction peut être établie à cet égard entre les produits résultant de l’utilisation de
procédés favorables au respect de l’environnement, considérés comme identiques aux
produits commercialisés n’ayant pas utilisé de tels procédés, et les produits issus de ces
procédés donnant un produit différencié dans sa qualité. Dans le second cas, le
consommateur va choisir entre des produits différents alors que dans le premier, le critère
écologique peut conditionner son choix sur des produits similaires dans le respect de la
liberté du commerce. Par exemple, une pomme issue de l’agriculture biologique constitue
un produit différent d’une pomme issue de l’agriculture traditionnelle (avec engrais
chimiques, pesticides, etc.) alors qu’un bloc de papier, qu’il soit produit à base de papier
recyclé ou de manière traditionnelle, constitue un produit identique dans sa qualité malgré
la différence de procédé utilisé.
Sur le plan de la protection de l’environnement, les normes concernant les procédés
et méthodes de production répondent à une préoccupation élémentaire en terme
d’efficacité : les industries doivent produire selon certains procédés moins polluants, les
producteurs de bois doivent respecter des règles de coupes pour éviter la surexploitation,
les entreprises minières doivent respecter des normes pour le traitement de leurs déchets et
restaurer les sites exploités, etc. Toutes ces normes peuvent apparaître dans les
réglementations nationales avec des objectifs clairs relatifs à la santé humaine, la sécurité
et, de manière générale, aux conditions de vie et à la protection de l’environnement humain
et naturel.
Les instruments commerciaux fondés sur des normes PMP sont les suivants :



Interdictions ou restrictions aux échanges : mesures visant les produits
importés qui ne satisfont pas à une norme PMP d’environnement en vigueur
dans le pays importateur. Ces restrictions au commerce peuvent viser non
seulement les procédés et méthodes de production des produits, mais
également l’exportation de produits lorsque le pays destinataire ne respecte
pas certaines normes PMP, par exemple pour le traitement des déchets ;
Sanctions commerciales : elles peuvent prendre la forme d’interdictions ou de
restrictions portant sur des produits autres que le produit soumis à la norme
PMP. Exemple : restriction d’importation de radio en provenance d’un État
utilisant des méthodes de pêche destructrices pour la faune marine ;
Tarifs douaniers : prélèvements financiers sur les produits importés qui
pourraient être liés aux normes PMP d’environnement. Certains États sont
favorables à l’instauration de « préférences tarifaires écologiques » permettant
aux produits respectant des normes PMP protectrices de l’environnement de
bénéficier de tarifs douaniers plus avantageux ;
59



Ajustements fiscaux aux frontières : pratiques fiscales qui ont pour effet de
soumettre les biens importés aux taxes en vigueur dans le pays producteur et
d’exempter les biens exportés des taxes en vigueur dans le pays exportateur.
Afin de favoriser les importations des pays respectueux de normes PMP
environnementales, on peut leur appliquer le régime fiscal le plus favorable,
c’est-à-dire les exempter de taxes à l’importation ;
Droits compensateurs : taxes perçues sur les produits importés pour
compenser les subventions reçues dans le pays producteur et ainsi égaliser les
coûts de production ; il a été proposé, par exemple, d’appliquer des droits
compensateurs sur les exportations d’un pays qui appliquerait mal ou pas du
tout des normes PMP protectrices de l’environnement ;
Écolabels obligatoires : labels apposés sur les produits importés indiquant
qu’ils ont respecté certaines normes de production ou qu’ils répondent à
certains critères environnementaux au cours de leur cycle de vie. Dans ce cas,
c’est le consommateur qui décide de la « restriction » dans les échanges.
Inconvénients ou risques pour la libéralisation des échanges :
Dans la pratique commerciale, de telles mesures peuvent conduire à une forme de
discrimination basée sur des standards élaborés au niveau national et agir comme obstacle
aux échanges internationaux. Le risque dénoncé est celui d’une utilisation de ces mesures à
des fins protectionnistes, contraires à la libéralisation des échanges. Un État, après
inventaire des procédés de production, pourrait décider de privilégier ceux qui favorisent
les entreprises nationales.
Autre crainte : les standards imposés pourraient se révéler inappropriés sur le plan
environnemental pour des entreprises ou des producteurs étrangers en ce qui concerne leur
niveau technologique, leurs ressources naturelles etc. Les standards environnementaux,
adaptés à un contexte de production ou d’exploitation donné, peuvent avoir un tout autre
impact, y compris contraire aux objectifs environnementaux, dans un autre contexte.
Enfin, ces nouveaux standards apparaissent comme des contraintes supplémentaires
pour les pays en développement qui sont le plus susceptibles de subir cette forme de
« discrimination environnementale ». Très souvent, les pays du Sud invoquent d’autres
priorités dans la structuration et le développement de leurs échanges extérieurs que celle
d’une amélioration de leurs conditions de production ou d’exploitation sur le plan
environnemental. Ils font valoir, notamment, le principe de souveraineté qui permet à
l’État d’assumer des choix de développement, même s’ils peuvent apparaître contraires au
maintien de la qualité de l’environnement, dès lors que le dommage environnemental est
subi localement. Cette argumentation a pu être utilisée notamment pour l’exploitation des
forêts.
2. Écolabel et système de certification
Alors que les standards sur les processus et procédés passent par une
réglementation nationale ou par des obligations internationales imposées par des accords
internationaux, l’écolabel et les programmes de certification présentent la particularité de
60
s’adresser directement au consommateur pour influencer son choix38. Il s’agit donc plus
d’incitations commerciales qui font appel à la conscience écologique des acteurs du
marché que de mesures coercitives développées par l’autorité publique. En l’occurrence,
ces normes peuvent être préconisées par des organismes professionnels en dehors de tout
système réglementaire obligatoire. L’exemple en est fourni par l’ISO (International
Organization for Standardization) qui met en place au niveau international la série des
normes 14000 prévoyant l’audit environnemental, le suivi des produits et l’octroi d’un
label.
Trois types d’écolabels selon l’ISO, organisation non gouvernementale regroupant des
organismes nationaux, publics et privés :
Type 1 : labels comparant les produits dans la même catégorie en indiquant ceux qui ont
respecté des normes environnementales au cours de leur cycle de production. Les critères
ont été fixés par un organe indépendant et contrôlé par une procédure de certification ou
d’audit ;
Type II : labels environnementaux utilisés pour la vente de produits, élaborés par les
producteurs ou distributeurs. Ils ne sont pas contrôlés de manière indépendante et
n’utilisent pas des références ou des critères prédéterminés et acceptés par des organismes
indépendants (exemple : un produit peut être présenté comme biodégradable sans que le
terme ne soit défini) ;
Type III : label présentant une liste des impacts environnementaux d’un produit au cours de
l’ensemble de son cycle de vie. Les catégories d’informations peuvent être établies par le
secteur industriel ou par des organismes indépendants. Les consommateurs sont libres
d’interpréter les informations (exemple : évaluer si un produit est moins dommageable
pour l’environnement, si les émissions de sulfure sont moins dangereuses que les
émissions de cadmium).
Le système de certification s’inscrit dans la démarche du management
environnemental. Il s’agit d’un système qui implique pour les entreprises de suivre les
principes environnementaux et plus précisément des orientations conformes à ces principes
dans la conduite de leurs affaires. On distingue entre des programmes de certification
fondés sur des normes de procédures et des programmes basés sur des normes de
performance, notamment dans le domaine de la gestion forestière. Par exemple, l’approche
centrée sur les résultats obtenus (normes de performance) est utilisée par le Forest
Stewardship Council (FSC), organisation internationale à but non lucratif créée en 1993
avec l’appui de l’organisation écologiste WWF. Le FSC a pour rôle d’évaluer et de
contrôler l’activité d’organismes indépendants de certification des forêts. Lorsque ces
organismes reçoivent l’accréditation du FSC, ils peuvent certifier des exploitations en
déterminant des critères de bonne gestion forestière établis en fonction des règles
déterminées par le FSC. D’autres programmes de certification pour les espaces forestiers
se sont mis en place principalement dans les pays développés tels que le PEFC (Pan
European Forest Certifications Scheme), le CSA (Canadian Standard Association) ou le
SFI (Sustainable Forestry Initiative) attestant du développement d’un véritable marché de
la certification de la foresterie durable.
38
Voir cours UNITAR 3, p. 58 et suiv.
61
Entre le système de certification et les écolabels apparaît une nouvelle catégorie de
certification environnementale par secteur : pêche, agriculture organique, foresterie, etc.
Une entreprise peut obtenir la certification si un organisme indépendant réalise un audit
favorable qui atteste du respect des normes prévues par le programme. Cela l’autorise à
placer un label sur ces produits attestant de son adhésion au programme environnemental.
Inconvénients ou risques pour la liberté du commerce :




Comme pour les normes de procédé, les écolabels et programmes de
certification peuvent conduire à des pratiques discriminatoires. La plupart de
ces programmes sont développés au niveau national sur la base de réalités
économiques et environnementales précises. Par conséquent, les critères
utilisés peuvent se révéler inadaptés par rapport aux priorités
environnementales d’autres pays ;
Les procédures pour obtenir les labels peuvent imposer de se soumettre à des
tests impliquant l’utilisation de technologies, d’infrastructure et une
expertise dont tous les pays ne disposent pas ;
Même si les coûts pour remplir les conditions imposées par les programmes
peuvent être assumés, ils vont entraîner une augmentation importante des
coûts à la production qu’il faudra répercuter sur les produits, d’où une baisse
de compétitivité que ne subiraient pas tous les acteurs économiques de la même
façon ;
Le problème du fonctionnement des organismes indépendants chargés de
faire respecter les programmes demeure dès lors que leur coût est élevé et
implique une participation d’experts que tous les États ne peuvent se permettre
d’affecter à cette tâche. Par conséquent, des pays en développement sont sousreprésentés dans ces organismes.
3. Instruments économiques : taxes et subventions
Les instruments économiques comme les subventions représentent un terrain
particulier de la rencontre entre enjeux commerciaux et protection de l’environnement. En
effet, ils peuvent se révéler très utiles pour soutenir des mesures de coopération en faveur
de l’environnement ou, au contraire, provoquer des dégâts majeurs sur le plan économique.
Ainsi, la Déclaration de Rio de 1992 enjoint les autorités nationales à promouvoir
« l’utilisation d’instruments économiques, en vertu du principe selon lequel c’est le
pollueur qui doit, en principe, assumer le coût de la pollution » (principe 16).
Les instruments économiques peuvent être utilisés par les États comme moyens
d’action de leur politique environnementale pour orienter les producteurs et les
consommateurs vers des comportements plus respectueux de l’environnement. Ils peuvent
prendre la forme de subventions, de prêts, de redevances, d’avantages fiscaux ou au
contraire de taxes afin d’influencer le marché.
Inconvénients pour le commerce :
62



Les subventions peuvent avoir un effet pervers car elles influencent les prix
artificiellement. Elles peuvent, en soutenant certains secteurs comme par
exemple l’agriculture, la foresterie ou la pêche, produire des effets contraires à
la protection de l’environnement en conduisant par exemple à la surexploitation
des ressources ;
Le consommateur ne paie pas en achetant le produit le coût environnemental
induit par sa production ;
Les subventions apportées à certaines productions énergétiques comme
l’énergie fossile ou le nucléaire sont autant de moyens que l’on ne met pas à la
recherche d’alternatives comme l’énergie solaire.
L’ensemble de ces mesures commerciales destinées à promouvoir la protection de
l’environnement au niveau national ou international a pris la forme d’un véritable
instrument de politique commerciale au cœur de la relation dynamique entre l’enjeu
écologique et la liberté des échanges internationaux. Le régime juridique du commerce
international mis en place par le GATT puis par l’Organisation mondiale du commerce se
voit donc confronté à des mesures environnementales présentant une dimension
commerciale et stratégique susceptible d’affecter ses principes fondamentaux.
Précédent concernant l’incompatibilité d’un texte national utilisant la certification et
des mesures économiques à des fins environnementales comme critère de ses
échanges :
L’Autriche a adopté une loi exigeant d’une part que le bois tropical importé soit certifié,
d’autre part qu’il soit taxé à hauteur de 70%. En réaction à cette initiative, l’Association
des États du Sud-Est Asiatique (ASEAN), le Canada, le Japon, la Nouvelle-Zélande et
l’Australie ont considéré qu’il s’agissait d’un texte créant une discrimination à l’encontre
du bois tropical par rapport au bois indigène qui lui, bénéficiait d’un traitement plus
favorable. Face à l’hostilité de ces États menaçant l’Autriche de sanctions commerciales, le
texte fut abrogé avant même la saisine d’un Groupe spécial du GATT.
Normes environnementales et commerce
Normes de procédé et normes de produit jouent un rôle direct dans le fonctionnement
des marchés :
Les normes de procédé sont des normes qui ont pour objet de définir des spécifications
auxquelles doivent répondre des installations fixes. Il s’agit d’une obligation de moyen.
Ces normes imposent l’utilisation de certaines techniques considérées comme moins
dommageables pour l’environnement. En cela, elles se distinguent par exemple des normes
d’émission qui imposent un résultat quantifiable sans préciser les moyens à utiliser pour
réaliser l’obligation.
Les normes de produit fixent les propriétés physiques ou chimiques d’un produit, ou
encore les règles de conditionnement, d’emballage ou d’identification (notamment pour les
63
produits toxiques). Elles peuvent également indiquer les propriétés en matière de limitation
de production de gaz polluant.
Normes de qualité et normes d’émission ont des objectifs de protection de
l’environnement clairs et induisent des modifications dans les comportements de
production et de consommation qui vont indirectement influencer les échanges
commerciaux :
Les normes de qualité fixent les niveaux maximaux de pollution dans les milieux
récepteurs : sol, air, eau.
Les normes d’émission indiquent la quantité de polluants ou leur concentration dans les
effluents qui peut être rejetée. Ces normes établissent des obligations de résultat laissant
libre le pollueur de choisir et d’utiliser les moyens les plus adéquats pour y parvenir.
Les instruments économiques
Les subventions, les taxes, les redevances, les avantages fiscaux, les autorisations
transférables, etc. permettent d’influencer les marchés en modifiant les comportements des
producteurs ou des consommateurs.
64
QUESTIONS
1. Quels sont les principes du système GATT/OMC ?
2. Dans quelle mesure peut-on considérer que la Conférence de Rio de 1992 a intégré les
standards du commerce international ?
3. Quels sont les principaux accords multilatéraux environnementaux (AME) ayant prévu
des mesures de restriction ou de contrôle du commerce ?
4. Quelle est la particularité du Protocole de Kyoto sur le plan des mesures commerciales
par rapport aux autres AME ?
5. Présentez les avantages et les inconvénients de l’application de standards
environnementaux sur les procédés et méthodes de production.
65
RÉPONSES
1. Principe de non-discrimination qui se décompose en trois règles : la clause de la nation
la plus favorisée, la réciprocité, le principe du traitement national. Le désarmement
douanier doit permettre de procéder à l’abaissement des droits de douanes. Enfin, le
principe de l’interdiction des restrictions quantitatives doit pouvoir libérer les échanges
en évitant les restrictions à l’importation ou aux exportations.
2. La Conférence de Rio fait clairement référence aux règles du commerce international.
Le principe 12 de la Déclaration de Rio ainsi que différents chapitres de l’Agenda 21
évoquent la promotion d’un système économique international ouvert, compatible avec
les objectifs du développement durable. Les principes d’action de l’Agenda 21
prévoient de promouvoir un système commercial multilatéral non discriminatoire
conduisant à une répartition optimale de la production mondiale selon les principes de
l’avantage comparatif.
3. Concernant la diversité biologique : CITES, Convention sur la diversité biologique,
Protocole de Cartagena.
AME réglementant les substances et produits pouvant présenter un risque pour
l’environnement : Protocole de Montréal, Convention sur les changements climatiques,
Protocole de Kyoto, Convention de Bâle.
4. Le Protocole de Kyoto s’appuie sur les stratégies de marché et donc avant tout sur une
logique marchande. Il met en place un mécanisme d’échange d’unités de production et,
en outre, l’utilisation d’autres techniques économiques : taxes sur les émissions,
élimination des subventions.
5. Avantages : ces standards répondent à une préoccupation environnementale essentielle,
contrôler les productions dès l’origine afin de limiter leur impact sur l’environnement.
Inconvénients : des risques de discrimination en créant des normes plus favorables pour
les producteurs nationaux, des règles inappropriées sur le plan environnemental, risque
de créer des contraintes supplémentaires pour les pays en développement.
66
III. L’environnement : une lacune dans le système du commerce international
Les règles régissant les échanges internationaux ont encore aujourd’hui pour
principale origine l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) de
1947, et constituent toujours le fondement du droit matériel applicable pour les États
Parties. Les principes du libre-échange et l’interdiction des mesures discriminatoires
s’appliquent aux échanges de ressources naturelles. Or le régime juridique établi par le
GATT 1947 puis par le GATT 1994 ainsi que par tous les accords multilatéraux adoptés
par les États lors de la Conférence de Marrakech en avril 1994 semble aller à l’encontre de
toute mesure commerciale qu’un État pourrait adopter en vue de protéger l’environnement
au niveau national ou même international.
Les étapes de formation du système commercial multilatéral :



l’échec de la Charte de la Havane après la seconde guerre mondiale et l’entrée
en vigueur du GATT en 1948 : organisation provisoire, non dotée de la
personnalité juridique et dépendant de l’Organisation internationale du
commerce (ICITO, Commission intérimaire de l’Organisation internationale du
commerce) ;
le développement du système du GATT par des négociations commerciales
multilatérales (les « Rounds ») de 1948 à 1994 ;
la Conférence de Marrakech de 1994 et l’entrée en vigueur des Accords du
cycle de l’Uruguay, mise en place de l’OMC disposant de la personnalité
juridique en tant qu’organisation internationale et non comme Institution
spécialisée des Nations unies.
Le système GATT/OMC a dû cependant peu à peu s’ouvrir à la problématique
environnementale tout en soulignant, par le biais de ses différents organes, qu’il n’a pas
vocation à évaluer des politiques environnementales dans leurs implications commerciales
mais bien à faire respecter les principes essentiels de non-discrimination dans les échanges
permettant l’accès libre au marché.
Le système commercial multilatéral, à présent représenté par l’Organisation
mondiale du commerce, regroupe plus de 140 États (les Parties contractantes au GATT
sont devenues automatiquement membres originels de l’OMC). L’adhésion de la Chine39 et
de nombreux nouveaux membres depuis 1995 marquent la dimension mondiale de
l’Organisation et son rôle prépondérant dans les orientations prises dans le domaine
commercial. Dans cette perspective, toutes les mesures et politiques environnementales
développées tant sur le plan national qu’international se trouvent confrontées à
l’application des règles de cette organisation dont la plupart des États sont membres.
A. Le GATT : l’environnement comme dérogation
Comme la plupart des traités et accords qui ont régi les relations économiques
internationales après la seconde guerre mondiale, le GATT a été mis au service du
Protocole d’accession de la Chine à l’OMC le 11 décembre 2001,conformémement à la procédure
d’accession prévue à l’article XII de l’Accord instituant l’OMC.
39
67
développement des échanges internationaux en affirmant le principe de libre-échange
comme fondement de la croissance et du développement. La prise en considération de
l’influence des mesures et politiques environnementales sur le commerce international
n’apparaît que dans les années 1970 avec la création d’un groupe de travail sur les mesures
environnementales et le commerce international en 1971. Ce groupe ne connaîtra aucune
activité jusqu’à sa réactivation, vingt ans plus tard, dans le cadre de sa participation à la
Conférence des Nations unies sur l’environnement et le développement (CNUED).
Initialement le GATT, tel que signé en 1947, ne fait aucune référence à
l’environnement. Seuls deux standards internationaux prévalent en dehors de
l’interdiction des restrictions quantitatives aux échanges : le traitement de la nation la
plus favorisée selon lequel les pays contractants acceptent de s’octroyer mutuellement les
bénéfices des avantages commerciaux supplémentaires qu’ils accorderaient ultérieurement
à des pays tiers, et le traitement national qui suppose que les produits importés ne soient
pas défavorisés dans leur accession au marché par rapport aux produits nationaux.
1. Les exceptions de l’article XX du GATT
Dans la perspective de l’instauration de la liberté des échanges, les deux exceptions
majeures à l’application de ces principes sont les préférences commerciales accordées aux
pays en développement et les zones de libre-échange ou unions douanières. Seul l’article
XX de l’Accord général permet une approche de la problématique environnementale par la
dérogation :
« Sous réserve que ces mesures ne soient pas appliquées de façon à constituer soit un
moyen de discrimination arbitraire ou injustifiable entre les pays où les mêmes
conditions existent, soit une restriction déguisée au commerce international, rien dans le
présent Accord ne sera interprété comme empêchant l’adoption ou l’application par
toute Partie contractante des mesures :
(…)
b) nécessaires à la protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux ou à
la préservation des végétaux ;
(…)
g) se rapportant à la conservation des ressources naturelles épuisables, si de telles
mesures sont appliquées conjointement avec des restrictions à la production ou à la
consommation nationales ; (…). »
L’article XX, à défaut de mentionner la protection de l’environnement, permet
l’application de mesures discriminatoires en autorisant une Partie contractante à appliquer
des mesures restrictives aux échanges :


lorsqu’elles sont strictement nécessaires à la protection de la vie des
personnes, des animaux ou à la préservation des végétaux ;
lorsqu’elles se rapportent à la conservation des ressources naturelles.
Des restrictions importantes sont apportées à la mise en œuvre de cette dérogation :
le critère de nécessité d’une mesure s’apprécie au regard de différentes conditions. La
mesure ne doit constituer ni une discrimination arbitraire, ni une discrimination
68
injustifiable, ni une restriction déguisée au commerce international. Par conséquent, cette
mesure doit être celle qui interfère le moins dans les échanges. Par ailleurs, elle ne doit pas
pouvoir être remplacée par une autre qui présenterait moins d’incompatibilité avec les
dispositions de l’Accord.
Avec de telles restrictions à son interprétation, l’utilisation d’une telle dérogation
est extrêmement difficile dans la mesure où il devient presque impossible de justifier une
mesure commerciale contraire aux règles de l’Accord ayant pour objectif la protection de
l’environnement. Dès lors, toutes les mesures commerciales adoptées par les conventions
multilatérales de l’environnement peuvent apparaître en contravention avec les dispositions
du GATT.
Bien qu’aucun recours n’ait été intenté concernant l’incompatibilité de mesures
prises sur la base d’un AME et de l’Accord, les groupes spéciaux ont été saisis à plusieurs
occasions pour analyser ce critère de nécessité sans pour autant dégager une définition
commune40. Il ressort des conclusions adoptées au cours des différentes affaires, que
l’article XX constitue une exception limitée et conditionnelle qu’il faut interpréter de
manière très restrictive.
2. Interprétation restrictive des exceptions de l’article XX : les rapports des Groupes
spéciaux
Sur la base de l’article XXIII, alinéa 2 du GATT des groupes spéciaux composés
d’experts étaient chargés d’assister les États en cas de litige afin de favoriser une
conciliation. À l’issue de la procédure qui présente la particularité d’être extrêmement
souple, les « panels » (ou groupes spéciaux) adoptent des rapports dont l’analyse permet de
dégager une sorte de jurisprudence sur l’interprétation de l’article XX dans les affaires
soulevant des problèmes d’incompatibilité entre mesures environnementales et dispositions
de l’Accord général.
a. L’affaire Mexique / États-Unis, relative aux restrictions à l’importation de thon,
Groupe spécial du GATT, 3 septembre 199141
Dans la zone tropicale orientale de l’océan Pacifique, les dauphins se déplacent
avec les thons à nageoires jaunes, ce qui induit la capture accidentelle des dauphins pêchés
à la senne coulissante. Afin de remédier à cette situation, la loi américaine de 1972 sur la
protection des mammifères marins (MMPA), révisée en 1988 et 199042, établit des normes
de protection des dauphins applicables à la flotte de pêche nationale comme aux bateaux de
pêche étrangers qui capturent les thons dans cette zone.
40
Dans le cadre du règlement des litiges des panels du GATT : affaires cigarettes de Thaïlande, Instruments
de base et documents divers, IBDD (publications du GATT), 37, p. 214 et suiv. ; Les mesures affectant
l’exploitation des harengs et des saumons non préparés, IBDD, 35, p. 106 et suiv.
41
Après consultations bilatérales avec les États-Unis, le Mexique a demandé le 25 janvier 1990 aux Parties
contractantes du GATT l’établissement d’un Groupe spécial sur la base de l’article XXIII § 2 de l’Accord. La
création du groupe a été décidée par le conseil, le 6 février 1991.
42
Marine Mammal Protection Act of the United States (MMPA).
69
La loi américaine autorise la prise accidentelle de dauphins par les thoniers
nationaux à hauteur d’un maximum de 20 500 têtes par an afin de favoriser le
développement d’autres techniques de pêche. La loi vise également les pêcheurs étrangers
dans la mesure où elle prévoit l’interdiction de l’importation de poissons ou de produits à
base de poissons issus de la pêche effectuée par des techniques ayant pour effet de blesser
ou tuer un nombre de mammifères supérieur aux normes établies. Par ailleurs, la loi sur
l’information du consommateur pour la protection des dauphins permet aux produits
exportés ou vendus aux États-Unis de porter une étiquette « sans risque pour les dauphins »
(« Dolphin Safe ») destinée à indiquer que la pêche n’a pas porté atteinte aux populations
de dauphins.
Après avoir précisé que « sa tâche se limitait à examiner la question à la lumière
des dispositions de l’Accord général applicables en l’espèce et, par conséquent, n’appelait
pas de constatation quant à l’adéquation des politiques de conservation des États-Unis et
du Mexique en tant que telles » (§ 6.1 du Rapport), le Groupe spécial a répondu en trois
étapes aux thèses des Parties :
– tout d’abord, il a estimé que les mesures restrictives instituées par les États-Unis
au titre de la MMPA ne constituaient pas des mesures intérieures visées par l’article III de
l’Accord général, mais s’apparentaient bel et bien à des restrictions quantitatives ;
– ensuite il a conclu que ces restrictions étaient incompatibles avec les dispositions
de l’article XI § 1 du GATT ;
– enfin, il estime que les exceptions de l’article XX b) ou g) ne sont pas applicables et que,
par conséquent, les restrictions quantitatives prévues par les États-Unis sont illicites.
En effet, selon le Groupe spécial, il aurait été possible d’une part de recourir à des
accords de coopération internationale (comme l’invoquait le Mexique), et d’autre part il
n’était pas « nécessaire » de limiter les échanges en fonction de conditions telles que fixées
par la loi américaine MMPA. Le Groupe considère que les conditions concernant
notamment le taux maximal de prises accidentelles revêtent un caractère fluctuant et
imprévisible ne pouvant être considéré comme nécessaire. Il estime qu’une limitation des
échanges fondée sur des conditions aussi imprévisibles ne peut pas être considérée comme
visant principalement à la conservation des dauphins (§ 5.28).
Étant donné que l’étiquetage « Dolphin Safe » s’appliquait à tous les navires
opérant dans la zone, sans distinction entre les produits mexicains ou ceux originaires
d’autres pays, le Groupe spécial a considéré qu’il était compatible avec les termes de
l’Accord (article I § 1).
En conséquence, il se dégage de cette affaire la conclusion suivante : « une Partie
contractante ne pouvait pas limiter les importations d’un produit simplement parce que
celui-ci provenait d’un pays dont les politiques en matière d’environnement étaient
différentes des siennes » (§ 6.2 du Rapport).
b. L’affaire Communauté européenne et Pays-Bas / Etats-Unis, Groupe spécial du
GATT, 14 juillet 1992
Par la suite, le Conseil du GATT dut instaurer un autre Groupe spécial, le 14 juillet
1992, pour examiner une plainte émanant de la Communauté européenne et des Pays-Bas
70
concernant une nouvelle fois des restrictions à l’importation de thon décidée par les ÉtatsUnis. Dans ce nouveau différend impliquant les mesures des États-Unis visant à protéger
les dauphins, le Groupe spécial a pris en considération une justification au regard de
l’article XX g). Il a ainsi conclu :
– que la politique américaine visait à la protection des dauphins et donc, à ce titre, à
la conservation des ressources naturelles épuisables, reconnaissant ainsi que
l’Accord ne condamne pas les mesures relatives à des objets ou à des actions à
l’extérieur de la juridiction territoriale de la Partie à l’origine de la mesure ;
– par contre, les mesures d’embargo ayant pour but d’inciter, voire d’imposer à
d’autres pays un changement de leur politique, ne peuvent être considérées
comme visant essentiellement la protection d’une espèce, et l’article XX g) est
donc considéré comme inapplicable.
Dans ces deux rapports, ainsi que dans son dernier rapport adopté avant
l’instauration de l’Organisation mondiale du commerce (Taxes ou impositions appliquées
aux automobiles, rapport du 24 septembre 1994), il apparaît que l’interprétation de l’article
XX ne permet pas une prise en considération de la problématique environnementale et que
ses dispositions s’avèrent insuffisantes pour réaliser toute évolution du GATT dans ce
domaine.
3. Le rapport « Commerce et environnement » du GATT de 1992
Le début des années 1990 marque le début de la prise de conscience de
l’importance pour le GATT de se positionner par rapport aux conflits potentiels et même
déjà bien réels entre politique de protection de l’environnement – adoptée au plan national
comme au plan international – et liberté du commerce.
Ainsi, en 1992, le Secrétaire général du GATT publie un rapport sur le thème
« Commerce et environnement » qui relève plusieurs aspects :




la croissance du revenu par habitant et l’accroissement du commerce sont des
facteurs favorables pour la protection de l’environnement à condition qu’une
politique environnementale appropriée soit mise en œuvre ;
la coopération internationale est essentielle ; dans cette perspective, il n’est
pas nécessaire d’adopter des politiques nationales ayant des effets
extraterritoriaux ;
les restrictions commerciales ne doivent pas être considérées comme un
moyen efficace de protection de l’environnement ;
les règles du GATT visant à empêcher la discrimination et les politiques non
discriminatoires suivies en matière d’environnement devraient
« normalement » échapper à toute contrainte imposée dans le cadre du GATT.
Le rapport conclut que commerce et protection de l’environnement peuvent ne pas
être incompatibles tout en développant une analyse généralement méfiante à l’égard de
toute action prise en faveur de l’environnement, considérée comme susceptible de couvrir
des objectifs protectionnistes. Il n’est sans doute pas inutile de préciser que ce rapport a
suscité de nombreuses contestations de la part des ONG de protection de l’environnement
qui ont considéré les conclusions du rapport comme beaucoup trop orientées sur la défense
71
de la liberté du commerce, sans considération pour les impératifs écologiques. Ainsi, le
rapport peut conduire à comprendre que l’Accord général constitue un cadre adapté pour
assurer la réalisation d’objectifs environnementaux. Par ailleurs, il conduit à cautionner
l’interdiction de toute réglementation environnementale ayant un effet extraterritorial et ne
reconnaît pas les normes de procédés.
Cependant le débat sur le thème commerce et environnement est lancé, relayé par
différentes organisations telles que l’ONU, l’OCDE, la Conférence des Nations unies sur
l’environnement et le développement (CNUED), le PNUE, etc.
B. Accords de l’Organisation mondiale du commerce : la prise en compte
progressive mais limitée de l’environnement
Le système multilatéral du GATT s’est développé à la suite de différentes
conférences commerciales multilatérales (« Rounds ») organisées périodiquement depuis
1947 afin d’intégrer d’autres domaines ou de procéder à des aménagements des accords.
Après le Kennedy Round (1963-1967) ayant porté principalement sur l’abaissement des
droits de douane relatifs aux produits manufacturés et le Tokyo Round (1973-1979)
concernant les domaines tarifaires et non tarifaires des produits manufacturés, ainsi que la
réforme du système institutionnel du GATT, l’Uruguay Round (1986-1993) a couvert des
domaines beaucoup plus étendus aboutissant à la signature des Accords de Marrakech les
14 et 15 avril 1994.
À cette occasion, les États adoptèrent une décision sur le commerce et
l’environnement reconnaissant ainsi la problématique environnementale comme
incontournable dans les orientations de développement économique.
« Rappelant le Préambule de l’Accord instituant l’Organisation mondiale du commerce
(OMC) qui dispose que “les rapports [des Membres] dans le domaine commercial et
économique devraient être orientés vers le relèvement des niveaux de vie, la réalisation du
plein emploi et d’un niveau élevé et toujours croissant du revenu réel et de la demande
effective, et l’accroissement de la production et du commerce de marchandises et de
services, tout en permettant l’utilisation optimale des ressources mondiales conformément
à l’objectif de développement durable, en vue à la fois de protéger et de préserver
l’environnement et de renforcer les moyens d’y parvenir d’une manière qui soit compatible
avec leurs besoins et soucis respectifs à différents niveaux de développement économique”,
(…)
Désireux de coordonner les politiques dans le domaine du commerce et de
l’environnement, et cela sans dépasser le cadre du système commercial multilatéral, qui
est limité aux politiques commerciales et aux aspects des politiques environnementales qui
touchent au commerce et qui peuvent avoir des effets notables sur les échanges de ses
membres, (…). »
(Décision sur le commerce et l’environnement, Conférence de Marrakech, 14 avril
1994)
La structure des accords de l’OMC
72
Droit institutionnel : 2 accords concernent à titre principal la personnalité juridique, les
structures, les compétences de l’Organisation :
– l’Accord instituant l’OMC ;
– le Mémorandum d’accord sur les règles et procédures régissant le règlement des
différends.
Droit substantiel : normes conventionnelles résultant des accords, droit devant être
transposé dans les législations et les réglementations nationales des États membres
– les accords multilatéraux :
* les accords sur le commerce de marchandises (GATT 1994 ; accords
sectoriels (agriculture, mesures sanitaires et phytosanitaires, textiles) ; accords
portant sur certaines mesures non tarifaires ; accord sur les mesures concernant
les
investissements et liées au commerce ; accords de défense commerciale (accord
antidumping ; accord sur les subventions et les mesures compensatoires) ;
* l’Accord général sur le commerce des services (AGCS) ;
* l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au
commerce (ADPIC)
– les accords commerciaux plurilatéraux :
* accord sur le commerce des aéronefs civils ;
* accord sur les marchés publics.
(insérer tableau : Les structures internes de l’OMC)
Les normes conventionnelles des accords de Marrakech touchent à différents
domaines souvent fortement liés à la problématique environnementale et générateurs de
nombreux conflits tant au niveau du commerce de marchandises (avec comme enjeu
essentiel l’agriculture) qu’au niveau du commerce des services, secteur commercial en
pleine expansion. Plus récemment, de nombreux enjeux sont apparus dans le domaine de la
propriété intellectuelle en lien direct avec l’application de la Convention sur la diversité
biologique.
Ce sont donc ces thèmes qui seront abordés prioritairement afin de confronter le
système commercial multilatéral aux politiques environnementales et de comprendre les
implications de leurs relations parfois dynamiques et souvent difficiles.
1. Le commerce des marchandises
Le commerce des marchandises entretient, à bien des égards, une relation étroite
avec la problématique environnementale. En effet, le commerce des marchandises
conditionne les conditions d’exploitation sur le plan quantitatif comme sur le plan des
procédés utilisés. Ainsi les modifications de la réglementation internationale dans le
domaine de l’agriculture ont-elles un impact majeur sur le développement durable
considérant qu’elles concernent autant les pays industrialisés exportateurs et importateurs
73
de produits agricoles que les pays en développement souvent très dépendants des marchés
internationaux pour l’exportation de leurs produits de base.
Les accords de la Conférence de Marrakech sur le commerce des marchandises
marquent le renforcement de l’approche néolibérale en réaffirmant les principes liés à la
liberté des échanges dans le respect desquels doivent pouvoir s’inscrire les mesures
environnementales.
a. Le GATT 1994
i. Continuité avec le GATT 1947
L’article XX n’ayant pas été modifié par l’accord de Marrakech, on y retrouve les
conditions cumulatives et restrictives du GATT 1947. Les dispositions visent à exclure
certains produits du libre-échange en raison de leur spécificité, comme c’est le cas pour les
ressources naturelles épuisables (article XX g), d’autres visent à garantir la défense des
intérêts légitimes des États qui concernent l’ordre public (article XX b).
ii. Les exceptions de l’article XX
Quoi qu’il en soit, les mesures environnementales, pour être acceptées, doivent
subir un double contrôle dans la mesure où après avoir été considérées comme satisfaisant
aux exigences de l’alinéa b) ou g), elles doivent ensuite répondre aux conditions du
chapeau de l’article XX.


Au titre de l’article XX b) : l’adoption ou le maintien de mesures
environnementales n’est admis que si ces mesures sont « nécessaires » et si
elles obéissent à un objectif sanitaire ou environnemental ;
Au titre de l’article XX g) : les mesures environnementales ne sont acceptées
que si elles ont trait à la conservation d’une ressource épuisable et si elles sont
appliquées conjointement à des restrictions à la production ou à la
consommation nationales.
Dans les deux cas, il faut ensuite que ces mesures répondent aux conditions de
sincérité et d’opportunité pour parvenir à l’objectif environnemental visé, mais également
qu’elles ne constituent pas un moyen de discrimination arbitraire ou injustifié.
En aucun cas, les mesures adoptées à des fins environnementales ne doivent
conduire à une restriction déguisée au commerce international.
Les autres accords du système GATT/OMC contiennent, quant à eux, des
dispositifs ponctuels qui se veulent plus spécifiquement adaptés aux objectifs qu’ils
poursuivent, le problème étant d’articuler les dispositions des différents accords43.
b. L’Accord sur l’agriculture
43
Cette articulation a le plus souvent été prévue par les accords eux-mêmes, sous la forme de formules telles
que : « exception faite de ce qui est prévue dans l’accord (…) », « nonobstant », « le présent article ne e
s’applique pas (…) ».
74
i. Contexte
À la Conférence des Nations unies sur l’environnement et le développement, tenue
en 1992, il avait été soutenu que la libéralisation des échanges agricoles et la protection de
l’environnement pouvaient se compléter, voire se renforcer mutuellement dans le cadre
d’une stratégie concertée. Afin de parvenir à une démarche cohérente et dynamique entre
politique commerciale et politique environnementale, il est prévu notamment de procéder à
une réduction substantielle et progressive des aides dans le secteur agricole.
L’idée émise lors de la Conférence de Rio et reprise dans l’Accord sur l’agriculture
de l’OMC est que les subventions à l’exportation non seulement ne peuvent en aucune
façon être bénéfiques pour l’environnement, mais qu’elles présentent de surcroît un coût
environnemental important.
Arguments développés pour soutenir la réduction des aides à l’agriculture44 :






l’utilisation des ressources serait plus efficiente (obtenir la même production en
exploitant moins de ressources naturelles) sans subvention, par conséquent la
pression sur l’environnement diminuerait ;
avec la suppression des subventions, c’est la fin des excédents de production
qu’entraînent les politiques agricoles subventionnées, donc l’abandon de la
pratique de déversement des excédents sur le marché international provoquant
des perturbations sur le marché avec des effets particulièrement néfastes pour
les pays en développement ;
un environnement économique international est plus propice à l’encouragement
des investissements à long terme dans une production agricole rationnelle ;
les subventions à l’exportation sont une des causes de la faiblesse des revenus
ruraux en aggravant l’instabilité des prix sur les marchés ;
les subventions ont un effet dissuasif sur l’investissement dans le secteur
agricole ;
les subventions à l’exportation sapent les efforts que font d’autres États pour
développer leurs secteurs agricoles dans des conditions écologiquement
viables.
S’appuyant sur cette argumentation, l’Agenda 21 fait référence à la nécessité de
procéder à la réduction des subventions à l’exportation et des autres mesures de soutien qui
faussent les conditions du commerce et renforcent les tendances protectionnistes.
ii. Obligations des Parties
Aux termes de l’Accord de l’OMC sur l’agriculture, les membres doivent :
44
Ces arguments sont bien sûr à manier avec précaution, ils sont fondés le plus souvent sur des études
réalisées par des organisations économiques. Cette énumération est destinée à expliquer le contexte de la
relation entre agriculture et environnement telle qu’elle peut être appréhendée dans le cadre de l’Accord.
75




abaisser la protection aux frontières : les mesures non tarifaires appliquées
aux produits agricoles doivent être converties en droits de douane pour un
meilleur accès au marché ;
procéder à la réduction des équivalents tarifaires ;
réduire les dépenses budgétaires consacrées aux subventions et le volume des
exportations subventionnées, et
honorer les engagements de réduction prévus par les listes établies avec des
objectifs différents pour les pays développés et les pays en développement, les
pays les moins avancés n’étant pas tenus de prendre des engagements de
réduction des subventions à l’exportation. Il faut considérer que le régime de
subvention à l’exportation peut varier considérablement selon les pays et
selon les produits agricoles.
iii. Référence à l’environnement
La protection de l’environnement fait partie intégrante de l’Accord sur l’agriculture
dans la mesure où il y est fait référence à la fois dans le Préambule (§ 6), qui prévoit que
les engagements doivent prendre en considération l’environnement, et dans l’article 20
prévoyant que les négociations sur la poursuite de la réforme du programme doivent tenir
compte des aspects non commerciaux, ce qui implique l’environnement. Par ailleurs,
l’Annexe 2 prévoyant les aides ne donnant pas lieu à une action (subventions de la boîte
verte) énumère diverses mesures de soutien dont les versements au titre de la protection de
l’environnement. Ainsi les politiques agro-environnementales qui ont un impact faible sur
la production ou le commerce peuvent rentrer dans cette catégorie.
De manière plus générale, une réflexion tend à être menée par les États pour
comprendre les effets tant négatifs que positifs de la libéralisation des échanges sur
l’environnement. À titre d’exemple, la Corée avait appliqué une politique de la « ceinture
verte » qui délimitait certaines zones agricoles et forestières et en interdisait
l’aménagement. Ce pays estime que le déclin de l’agriculture résultant d’une libéralisation
du commerce agricole dans un petit espace territorial très peuplé comme celui de la Corée,
pourrait conduire à des risques de réaffectation des terres agricoles à des usages
potentiellement beaucoup plus nuisibles à l’environnement.
c. L’Accord sur l’application des mesures sanitaires et phytosanitaires (SPS)
i. Contexte et champ d’application
L’innovation technologique, la globalisation de l’offre alimentaire, le relèvement
du niveau de vie et une conscience accrue des risques de maladie d’origine alimentaire ont
entraîné une plus grande méfiance des consommateurs dans les pays développés et le
développement de véritables politiques phytosanitaires. Ainsi, dans le cadre des
négociations commerciales du cycle de l’Uruguay Round, un nouvel accord est conclu sur
les mesures sanitaires et phytosanitaires afin de mettre en place une réglementation dans ce
domaine au niveau international. Le contenu de la mesure sanitaire ou phytosanitaire est
entendu de la manière la plus large, c’est-à-dire qu’il vise le produit final et tous les
procédés et méthodes de production.
76
ii. Contenu
Le principe fondateur de l’Accord SPS est que les pays peuvent adopter les
mesures qui leur semblent nécessaires à la protection de la santé et de la vie des personnes
et des animaux, et à la préservation des végétaux.
Cependant, partagé entre la préoccupation légitime de protéger le marché de
produits dont la sûreté suscite des doutes et l’importance de prévenir les abus, l’Accord
prévoit des restrictions :



une condition de proportionnalité (article 2 § 2) : la mesure doit être appliquée
que « dans la mesure nécessaire pour protéger la santé et la vie des
personnes et des animaux ou préserver les végétaux » ; elle ne doit pas
limiter le commerce plus que nécessaire pour obtenir le niveau de protection
approprié (article 5 § 6)
un principe de sincérité et de non-discrimination (article 3 § 2) : la mesure ne
doit pas constituer un protectionnisme déguisé ;
la justification scientifique (article 5 § 2) : la mesure doit reposer sur des
preuves scientifiques suffisantes.
iii. L’Accord et le principe de précaution
L’accord SPS constitue d’une certaine manière en lui-même une application de
l’article XX b) du GATT dans la mesure où il s’applique à « toutes les mesures sanitaires
et phytosanitaires qui peuvent, directement ou indirectement, affecter le commerce
international. » (article 1 § 1). Très logiquement, le problème de l’application du principe
de précaution s’est posé dans le cadre de la mise en œuvre de l’accord pour les risques
nouveaux qui ne font pas encore l’objet d’un consensus scientifique. Ce principe est, d’une
certaine manière, pris en compte dans l’article 5 § 7 :
« Dans les cas où les preuves scientifiques pertinentes seront insuffisantes, un Membre
pourra provisoirement adopter des mesures sanitaires ou phytosanitaires sur la base des
renseignements pertinents disponibles, y compris ceux qui émanent des organisations
internationales compétentes ainsi que ceux qui découlent des mesures sanitaires et
phytosanitaires appliquées par d’autres Membres. Dans de telles circonstances, les
Membres s’efforceront d’obtenir les renseignements additionnels nécessaires pour
procéder à une évaluation plus objective du risque et examineront en conséquence la
mesure sanitaire ou phytosanitaire dans un délai raisonnable. »
Un membre peut donc adopter provisoirement de telles mesures pendant qu’il
cherche à obtenir les renseignements additionnels nécessaires pour procéder à une
évaluation plus juste du risque. Cependant, comme il s’agit d’une disposition qui, par
nature, vise une situation provisoire, et face au souhait des associations de consommateurs
de voir reconnaître le principe de précaution, l’Union européenne a proposé une
clarification sur ce point. L’affaire de la viande aux hormones a permis de dégager une
position de l’organe d’appel sur cette difficile question.
77
Communauté européenne – Mesures concernant les viandes et les produits carnés
(hormones) (WT/DS26/AB/R ; WT/DS48/AB/R), 1998.
Les États-Unis et le Canada ont protesté contre les mesures prises par l’Union européenne
concernant l’interdiction d’importation et de commerce au sein du territoire de l’Union des
viandes aux hormones et de produits carnés provenant d’animaux auxquels ont été
administrés des hormones. Le Canada et les États-Unis ont protesté contre les directives
communautaires en se fondant sur l’accord SPS. De son côté, l’Union européenne a plaidé
pour l’application du principe de précaution comme règle coutumière ou du moins comme
principe général du droit applicable en l’espèce. L’organe d’appel a repris et approfondi la
position du Groupe spécial visant à ne pas accorder au principe de précaution une
autonomie par rapport à l’Accord SPS. Il souligne que le principe fait encore l’objet d’un
débat, appuyant ainsi la constatation du Groupe spécial selon laquelle le principe de
précaution « du moins en dehors du droit international de l’environnement, n’a pas encore
fait l’objet d’une formulation faisant autorité »45.
L’ORD a adopté le rapport de l’organe d’appel selon lequel l’interdiction d’importer de la
viande aux hormones, décidée par la Communauté européenne, est incompatible avec
l’Accord SPS au motif que « l’évaluation des risques » pour la santé humaine ne justifie
pas pleinement les mesures adoptées. L’organe d’appel a cependant considéré que l’Union
européenne ne pouvait être considérée comme responsable d’actes de protectionnisme en
admettant que l’évaluation des risques ne consiste pas uniquement à évaluer le risque
vérifiable en laboratoire, mais aussi « le risque pour les sociétés humaines telles qu’elles
existent ».
d. L’Accord sur les obstacles techniques au commerce (OTC)
i. Champ d’application
L’Accord élaboré en lien avec le Code de normalisation, adopté en 1979 lors du
Tokyo Round, concerne la préparation et l’adoption des exigences techniques relatives aux
produits industriels et agricoles (article 1.3). En revanche, ne sont pas couvertes par
l’accord les spécifications en matière d’achat prévues par les organismes gouvernementaux
qui sont couvertes par l’Accord sur les marchés publics ainsi que les mesures sanitaires et
phytosanitaires couvertes par l’Accord SPS.
Ce texte se révèle essentiel pour tous les aspects commerciaux des politiques
environnementales et, en particulier, pour tout ce qui implique des normes techniques. En
effet, il vise aussi bien les règlements techniques qui énoncent les caractéristiques d’un
produit ou les procédés et méthodes de production s’y rapportant (Annexe I.1), que les
normes, c’est-à-dire des documents approuvés par un organisme reconnu qui fournit pour
des usages communs et répétés des lignes directrices ou des caractéristiques pour des
produits ou des procédés de production connexes (Annexe I.2).
ii. Dispositif
45
Rapport du Groupe spécial, 1998 , § 18-157.
78
Il prévoit que les États membres puissent prendre des mesures pouvant constituer
des obstacles techniques au commerce, nécessaires à leur politique de santé publique ou
d’environnement, mais sous certaines conditions (l’article 2.2 établit une liste d’« objectifs
légitimes »). Les États ne peuvent appliquer ces mesures de manière discriminatoire car ils
sont tenus de respecter le principe de traitement national et la clause de la nation la plus
favorisée.
Les mesures techniques imposées par l’État et qui revêtent donc un caractère
obligatoire doivent répondre à un critère de proportionnalité par rapport aux objectifs
poursuivis et ne pas constituer de barrières techniques aux échanges. Par ailleurs, il est
prévu que ces mesures soient adoptées en toute transparence pour éviter un éventuel
impact négatif sur des opérations écologiques.
iii. Procédure de notification
Une procédure de notification est prévue pour permettre aux opérateurs
économiques d’ajuster leurs exportations aux exigences techniques requises (article 2.9) et,
à la demande d’un État membre, l’État auteur de la mesure devra justifier le règlement
technique susceptible d’avoir un effet sur le commerce de cet État (article 2.5).
C’est ainsi que dans le cadre de l’OMC, de nombreuses mesures environnementales
ayant un effet sur le commerce ont été notifiées : mesures concernant les procédés, les
écolabels, la lutte contre la pollution, la conservation de l’énergie, la gestion des déchets,
les instruments économiques ainsi que les mesures adoptées en application des accords
multilatéraux environnementaux.
Par ailleurs, l’Accord encourage, sans imposer, l’utilisation de normes
internationales pour limiter l’augmentation des exigences techniques nationales
susceptibles de perturber le marché.
iv. Procédure de règlement des différends
En cas de litige, un groupe spécial peut, de sa propre initiative, ou à la demande de
l’une des Parties, établir un groupe d’experts techniques qui devra l’assister (article 14.2)46.
Dans le domaine de l’environnement où les mesures adoptées présentent de plus en plus un
haut niveau de technicité, notamment avec le développement des normes PMP et des
écolabels, cette disposition prend un relief tout particulier.
e. L’Accord sur les subventions et les mesures compensatoires (SMC)
Les subventions peuvent jouer un rôle important dans la protection de
l’environnement dans la mesure où elles peuvent soutenir une politique dans différents
secteurs économiques, notamment en favorisant le respect de normes PMP compatibles
avec des exigences écologiques ou encore en soutenant des activités permettant de lutter
contre la pollution, la destruction du milieu naturel, etc. Or l’Accord SMC, qui a pour objet
46
L’Annexe 2 de l’Accord OTC fixe les procédures applicables aux groupes d’experts techniques.
79
de contrôler et de restreindre les possibilités de recourir aux subventions, s’il se réfère
explicitement à l’environnement, ne prévoit un régime favorable (les subventions sont
tolérées) que pour certaines mesures environnementales et dans des conditions précises.
i. Champ d’application
Pour qu’une mesure relève de l’Accord SMC, il faut qu’elle soit une subvention
telle que définie à l’article 1. Une subvention sera réputée exister :


s’il y a une contribution financière des pouvoirs publics ou de tout organisme
public du ressort territorial d’un membre ; ou s’il y a une forme quelconque
de soutien des revenus ou des prix au sens de l’article XVI du GATT 1994 ;
si un avantage est ainsi conféré.
Constitue une subvention selon l’article XVI.1 du GATT 1994 :
« toute forme de soutien des revenus ou des prix, qui a directement ou
indirectement pour effet d’accroître les exportations d’un produit du territoire de
ladite Partie contractante ou de réduire les importations de ce produit sur son
territoire ».
ii. Catégorisation des subventions et différenciation des régimes
En établissant trois catégories de subventions, les rédacteurs de l’Accord se sont
inspirés de l’approche utilisée par la Communauté européenne en la matière (article 192 du
Traité de l’Union européenne et jurisprudence communautaire sur les aides d’État).



les subventions prohibées (« boîte rouge ») : elles comprennent les
subventions à l’exportation et les subventions subordonnées à l’utilisation de
produits nationaux plutôt qu’à celles de produits importés (article 3) ;
les subventions pouvant donner lieu à une action (« boîte jaune ») :
subventions qui ne sont pas illicites en elles-mêmes, mais qui peuvent avoir
des effets défavorables, c’est-à-dire qui peuvent causer un dommage à une
branche de production d’un État membre ou annuler certains effets de
l’application des dispositions du GATT de 1994 (article 6) ;
les subventions ne donnant pas lieu à action (« boîte verte ») : elles visent les
subventions qui ne sont pas limitées à certaines entreprises ou à certains
groupes d’entreprises ou branche de production, c’est-à-dire les subventions
qui sont accordées de manière automatique en fonction de critères objectifs et
neutres ainsi que trois groupes d’aide licites : aides à la recherche, aides aux
régions défavorisées, aides à l’environnement (article 8).
iii. Conditions applicables aux aides en faveur de l’environnement
L’Accord sur les subventions et les mesures compensatoires prévoit dans l’une de
ses dispositions une nouvelle catégorie d’aide non actionnable, c’est-à-dire non susceptible
de fonder une action (subventions de la « boîte verte ») :
80
« aide visant à promouvoir l’adaptation d’installations existantes à de nouvelles
prescriptions environnementales imposées par la législation et/ou la réglementation qui se
traduisent pour les entreprises par des contraintes plus importantes et une charge
financière plus lourde (…) » (article 8.2.c).
Pour être licite, l’aide doit remplir certaines conditions (article 8.2) :




avoir le caractère de mesure ponctuelle ;
être limitée à 20% du coût du remplacement et de l’exploitation (qui doit être
à la charge de l’entreprise) ;
être proportionnée à la réduction des nuisances ou de la pollution ;
être offerte à toutes les entreprises pouvant adopter le nouveau matériel
permettant les adaptations aux prescriptions environnementales.
iv. Régime applicable aux aides en faveur de l’environnement
Régime applicable (article 8.3) :


les programmes de subventions doivent être notifiés par les Membres au
Comité des subventions avant leur mise en œuvre47 ;
si le programme n’est pas accepté par le Comité, tout Membre peut demander
un arbitrage contraignant pour déterminer le statut du programme ; l’organe
d’arbitrage doit rendre sa décision dans un délai de 120 jours.
Il y a possibilité d’une procédure spécifique sur la base de l’article 9 si la mise en
œuvre d’un programme de subventions, reconnu comme ne donnant pas lieu à action,
cause des effets défavorables à une branche de production d’un Membre.
v. Procédure anti-subvention
Cette procédure n’est pas appliquée aux subventions de la « boîte verte » qui ne
peuvent faire l’objet d’une action dans le cadre de la procédure prévue à la partie V de
l’Accord (voie 1) et à l’article 7 (voie 2).
La procédure de la voie 1 comprend trois phases :


l’engagement de la procédure par les autorités du Membre importateur
(article 11) à la suite d’une plaine comportant des éléments de preuve
suffisants de l’existence d’une subvention (article 11), le montant de la
subvention doit être suffisamment important ;
l’enquête : le plaignant devra démontrer l’existence d’une subvention
actionnable, l’existence d’un préjudice et un lien de causalité les unissant
(articles 12 à 15) ;
47
En 1995, le Comité des subventions a approuvé un modèle de notification pour les subventions ne donnant
pas lieu à une action.
81

les résultats de l’enquête peuvent conduire au rejet de la plainte, à la
conclusion d’engagements acceptés par le plaignant ou à l’imposition de
droits compensateurs si la plainte est fondée (article 19).
La procédure de la voie 2 :
Il s’agit d’une action pouvant conduire à l’institution de « contre-mesures
proportionnelles » à l’encontre des subventions prohibées. Les étapes sont les mêmes que
pour la voie 1, mais avec des délais plus longs et des procédures particulières pour la
collecte de renseignements dans les cas de préjudice grave (Annexe V de l’Accord).
2. Le commerce des services
Le secteur des services joue un rôle croissant dans les échanges internationaux
comme dans les économies internes des pays. Il représente plus du tiers des échanges
mondiaux et se compose d’un ensemble économique hétérogène (de la garde d’enfant à
domicile à la vente de services financiers internationaux). Le caractère immatériel des
services induit des modalités d’échanges différentes de celles s’appliquant aux
marchandises, d’où un régime juridique présentant des spécificités. Par ailleurs,
historiquement, ce secteur constitue l’un des domaines d’intervention privilégié de l’État à
la fois prestataire de services, directement ou indirectement, et responsable de la
réglementation à tendance protectionniste dans ce domaine.
Du fait de son caractère hétérogène et de l’interventionnisme omniprésent de l’État,
le secteur des services a intégré d’une façon particulière la problématique
environnementale. L’environnement apparaît dans l’Accord sur les services de l’OMC à la
fois sous l’aspect d’une exception très conditionnée aux principes de liberté des échanges
et comme une rubrique de services susceptibles d’être libéralisés. Le développement de
services environnementaux constitue un enjeu important pour les prochaines décennies, en
même temps qu’il cristallise des conflits idéologiques sur la manière de concevoir et mettre
en œuvre des politiques de protection de l’environnement.
a. L’Accord général sur le commerce des services (AGCS ou GATS) :
l’environnement, une exception non expressément prévue
i. Les exceptions générales de l’article XIV
Comme dans les autres accords de l’OMC, des exceptions au régime de
libéralisation du commerce sont prévues. L’article XIV de l’Accord reprend un certain
nombre d’exceptions générales qui figurent dans l’article XX du GATT : la protection de
la moralité publique, le maintien de l’ordre public, la protection de la santé des personnes
et des animaux, la préservation des végétaux. Une note sous l’article XIV précise les
situations dans lesquelles l’ordre public peut être invoqué : « cas où une menace véritable
et suffisamment grave pèse sur l’un des intérêts fondamentaux de la société » (formulation
que l’on ne trouve pas dans le GATT). Par contre, l’exception relative aux « ressources
naturelles épuisables » prévue par le GATT n’apparaît pas.
82
Dans l’article XIV de l’AGCS comme dans l’article XX du GATT, aucune
référence n’est faite directement à l’environnement. Afin de prévenir les problèmes liés à
l’interprétation de cet article de l’Accord sur le commerce des services, et conscient des
conflits potentiels de l’Accord avec des mesures environnementales, le Conseil du
commerce des services adopte dès le 15 avril 1994 une décision.
ii. Décision sur le commerce des services et l’environnement (15 décembre 1994)
« Le Conseil du commerce des services,
Reconnaissant que les mesures nécessaires à la protection de l’environnement
peuvent entrer en conflit avec les dispositions de l’Accord, et
Notant que, puisque les mesures nécessaires à la protection de l’environnement se
caractérisent par le fait qu’elles ont pour objectif la protection de la santé et de la vie
des personnes et des animaux ou la préservation des végétaux, il n’est peut-être pas
nécessaire de prévoir d’autres dispositions que celles de l’alinéa b) de l’article XIV,
Décide ce qui suit :
1. Pour déterminer s’il serait nécessaire de modifier l’article XIV de l’Accord afin de
tenir compte de ces mesures, (…) invite le Comité du commerce et de l’environnement à
examiner les relations entre le commerce et l’environnement, y compris la question du
développement durable (…) ».
La Décision prévoit donc de s’en remettre aux travaux du Comité du commerce et
de l’environnement pour modifier la disposition dérogatoire afin de l’ouvrir de façon
explicite aux mesures environnementales.
b. L’AGCS et les services environnementaux
L’Accord général sur le commerce des services constitue une composante
essentielle du système GATT/OMC dont la structure institutionnelle commune est l’OMC
(préambule et article II.1 de l’OMC). Il établit un cadre juridique multilatéral qui transpose
au secteur des services les principes essentiels du GATT, c’est-à-dire la clause de la nation
la plus favorisée, le traitement national et la transparence des législations. Ce dernier
principe oblige de porter à la connaissance du public toute réglementation ayant une
incidence sur le fonctionnement de l’accord.
Ce texte se présente comme un code de bonne conduite que ses membres sont
invités à suivre et à concrétiser par des accords portant sur des services spécifiques.
i. Le secteur des services environnementaux visés
Une liste classifiant par secteur les services a été annexée à l’Accord suite aux
négociations de l’Uruguay Round. Le secteur des services environnementaux comprend
quatre catégories :




les services de drainage ;
les services d’élimination des déchets ;
les services sanitaires assimilés ;
autres.
83
La catégorie « autres » visent les services tels que le nettoyage des gaz
d’échappement, la diminution du bruit, la protection du paysage, etc.
Les services concernés se trouvent susceptibles de faire l’objet d’engagements de la
part des États souhaitant favoriser leur libéralisation et faciliter l’accès au marché.
Par ailleurs, il faut considérer que, au delà de cette catégorisation, de nombreux
autres secteurs peuvent concerner directement l’environnement : la recherche, l’ingénierie,
la construction, etc. Ces secteurs peuvent se voir appliquer le régime de libéralisation des
services du GATS et éventuellement rentrer dans le cadre de l’application de l’Accord
plurilatéral sur les marchés publics, entré en vigueur en 1996. Cet accord a pour objectif
que les passations de marchés publics relevant de l’Accord s’effectuent dans des conditions
de concurrence équitables et non discriminatoires.
ii. La portée élargie du principe du traitement de la nation la plus favorisée
« (…) chaque Membre accordera immédiatement et sans condition (…) un
traitement non moins favorable que celui qu’il accorde aux services similaires et
fournisseurs de services similaires de tout autre pays. » (article II.1).
Le GATS présente un effet direct dans la mesure où les personnes physiques et
morales, fournisseurs de services, sont visées par le régime mis en place. L’égalité de
traitement doit être totale entre fournisseurs étrangers et fournisseurs nationaux sans
dérogation pour les accords d’intégration économique.
iii. L’objectif de libéralisation des mesures gouvernementales restreignant le
commerce (article I.1 et XIX.1)
Contrairement au commerce des marchandises, le commerce des services est
souvent très réglementé et l’AGCS, loin de l’interdire, reconnaît les réglementations
nationales de services. Cependant, celles-ci ne doivent pas constituer des moyens de
discrimination ni des restrictions déguisées aux échanges.
Or, les services font souvent l’objet de réglementations nationales qui peuvent faire
obstacle au commerce et, dès lors, agir comme des barrières non tarifaires. Pour lutter
contre ce phénomène, plusieurs dispositions ont été adoptées :



chaque État membre dispose d’un droit à l’information sur la pratique de ses
partenaires (article III.4), sauf renseignements confidentiels (article III bis) ;
l’administration des mesures affectant le commerce doit être « raisonnable,
objective et impartiale » (article VI.1), avec possibilité de recours
juridictionnels effectifs des fournisseurs affectés par une mesure préjudiciable
(article VI.2) ;
les qualifications, normes ou licences ne doivent pas constituer des obstacles
déguisés au commerce des services (article VI.4).
c. La libéralisation des services environnementaux
84
i. Enjeu pour les pays développés et contrainte pour les pays en développement
Les plus importantes organisations internationales économiques se penchent sur le
rôle « gagnant/gagnant » (win/win) de la libéralisation des échanges dans la protection de
l’environnement et du développement économique. L’intérêt du développement des
services environnementaux, et surtout de la libéralisation des marchés dans ce domaine,
tient notamment à l’accroissement des débouchés pour les entreprises des pays
industrialisés.
En ce qui concerne l’intérêt pour les pays en développement, certaines
organisations comme la Banque mondiale et le Programme des Nations unies pour le
développement (PNUD), soutiennent que la participation du secteur privé à des prestations
de services relatifs à l’environnement leur apporterait plusieurs avantages :




apport de compétences techniques et de gestion dans le secteur concerné ;
injection massive de capital et plus grande efficacité dans l’emploi de ce
capital ;
réduction des subventions dans le secteur ;
meilleure capacité d’ajustement aux besoins et préférences des
consommateurs.
ii. Formes de libéralisation des services environnementaux
L’ouverture du marché des services peut prendre plusieurs formes :




privatisation des entreprises de service public détenues par l’État ;
concession de ces entreprises au secteur privé qui les exploite ;
cession de marchés publics à des entreprises privées qui assurent la fourniture
des services ;
octroi de concessions à des entreprises privées qui proposent des services
privés.
Ces formes de libéralisation du marché sont adaptées aux secteurs de la gestion de
l’eau et des déchets. Pour d’autres services environnementaux, des formes de délégation,
par les pouvoirs publics, des services d’aide à l’élaboration de programmes ou des services
pour la mise en place d’obligations particulières sont envisageables.
Il apparaît le plus souvent que les décisions portant autorisation de la participation
du secteur privé sont motivées par la gravité de certains problèmes qui réclament des
solutions urgentes. En matière de gestion de l’eau et des déchets, les gouvernements
soumis à d’importantes contraintes budgétaires, disposent de très peu de marge de
manœuvre pour faire face à la pression des besoins humains décuplés par la croissance
démographique et, en ce qui concerne le milieu urbain, par les flux migratoires.
3. Droits de propriété intellectuelle
85
L’évolution économique et le progrès technique font que les produits et les services
ne peuvent aborder les marchés de manière compétitive que pour autant qu’ils bénéficient
d’une innovation technologique ou d’une création intellectuelle. L’économie mondiale
s’oriente vers une économie de l’immatériel reposant sur la création, l’échange et
l’exploitation du savoir. Le développement des États, l’amélioration de la compétitivité,
des performances des entreprises, l’ouverture vers de nouvelles possibilités de
développement du secteur privé dépendent de plus en plus des ressources technologiques.
La propriété intellectuelle est l’expression de ces capacités d’innovation dans lesquelles
apparaissent les nouvelles perspectives de richesse des nations.
Or, du fait de la globalisation des marchés, la propriété intellectuelle revêt une
importance considérable dans le dynamisme du commerce mondial. Constituant un enjeu
essentiel dans cette perspective du fait du potentiel de découvertes des ressources
biologiques et de l’apport des connaissances des sociétés traditionnelles, le statut des
ressources naturelles et le régime de leur exploitation vont être « saisis » par le système
commercial multilatéral.
Le système commercial international s’intéresse progressivement à la propriété
intellectuelle :



pour le GATT 1947 : la protection de la propriété intellectuelle peut constituer
une exception aux principes de libre-échange aux conditions fixées par
l’article XX d), la démarche étant uniquement dérogatoire ;
en 1986 : la Déclaration de Puntal del Este, qui lance l’Uruguay Round,
mentionne la propriété intellectuelle parmi les nouveaux thèmes de
négociations. Elle n’a cependant pas de place autonome et se trouve dans la
partie consacrée au commerce des marchandises ;
1994 : conclusion de l’Accord sur les droits de propriété intellectuelle qui
touchent au commerce (ADPIC ou TRIPS). Il traite de l’existence, de la
portée, de l’acquisition et du respect des droits de propriété intellectuelle,
ainsi que de la prévention d’un usage abusif de ces droits (article 63).
a. L’Accord sur les droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce
(ADPIC ou TRIPS)
i. Contexte de l’ADPIC
L’Accord ADPIC a pour but d’harmoniser la protection de la propriété
intellectuelle à l’échelle mondiale alors que le sujet suscite des conflits d’intérêt :



pour les pays développés : la protection de la propriété intellectuelle signifie
le renforcement de leurs avantages comparatifs et l’accroissement des revenus
de leurs entreprises en éliminant les pertes résultant de la contrefaçon ;
les pays en voie de développement craignent de voir se renforcer les
difficultés d’accès aux nouvelles technologies et de subir une augmentation
des prix sur leurs marchés intérieurs ;
la CNUCED dénonce la propriété intellectuelle soutenant l’idée d’une
technologie « patrimoine commun de l’humanité ».
86
Les États (notamment les pays en développement, les pays de l’Europe de l’Est) ont
évolué sur la question au cours des quinze dernières années. Certains considèrent à présent
que la propriété intellectuelle est un élément moteur de leur politique économique, leur
permettant de favoriser les investissements étrangers et les transferts de technologies.
D’autres sont toujours réticents à accepter le principe du dépôt de brevets sur les ressources
biologiques. Pour la protection de la propriété intellectuelle, leur préférence les porte plus
vers des systèmes sui generis garantissant en particulier le privilège du fermier (le droit de
replanter gratuitement les semences issues de la récolte précédente) et l’exemption de la
recherche.
Enfin, d’autres conventions internationales avaient été conclues avant que le GATT
ne s’intéresse à la propriété intellectuelle, d’où certaines difficultés d’articulation des
différents textes internationaux :


Convention de Paris sur la protection industrielle, 1967 ;
Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires, 1971.
Ces deux conventions sont administrées par l’Organisation mondiale de la propriété
intellectuelle (OMPI), une organisation spécialisée des Nations unies. L’Accord ADPIC va
ainsi incorporer les principales dispositions des grandes conventions multilatérales sur la
propriété intellectuelle (article 2) :



le Traité de Washington sur la propriété intellectuelle en matière de circuits
intégrés, 1989 ;
la Convention internationale pour la protection des obtentions végétales, 1961
(UPOV) ;
l’Engagement international de la FAO sur les ressources phytogénétiques
pour l’alimentation et l’agriculture, 1983.
L’engagement de la FAO cherche à garantir la liberté de la recherche, le libre accès
aux ressources et les droits des paysans. La Convention UPOV établit un régime des droits
d’obtention végétale permettant de protéger l’obtenteur des variétés végétales tout en
reconnaissant l’exemption de recherche et le privilège de l’agriculteur.
Quant à la Convention sur la diversité biologique de 1992, elle présente des
dispositions favorables à la brevetabilité et se trouve donc à l’opposé de la position prise
dans l’engagement de la FAO.
L’Accord de l’OMC naît donc dans un contexte déjà chargé de conflits potentiels et
riche sur le plan normatif. Cependant, dès lors que la propriété intellectuelle va faire partie
des nouveaux secteurs administrés par l’OMC, laquelle l’aborde sous l’angle du commerce
international (« trade related »), la question des ressources biologiques va basculer dans le
champ économique. La problématique environnementale, le questionnement éthique pour
l’exploitation des ressources génétiques, apparaissent à la marge du système normatif mis
en place sous l’influence d’un instrument juridique beaucoup plus efficace : l’Accord sur
les aspects des droits de propriété qui touchent au commerce.
87
ii. Contenu de l’ADPIC : champ d’application et droit des brevets
L’Accord couvre presque tous les domaines de la propriété intellectuelle à
l’exception des obtentions végétales et des modèles d’utilité : droits d’auteur, droits
connexes, marques, indications d’origine, dessins et modèles, brevets, topographie,
protection des renseignements non divulgués.
D’une manière générale, les solutions adoptées correspondent aux principales
règles communes des pays développés en la matière.
Dans le domaine particulièrement délicat des brevets, des avancées importantes
sont obtenues avec l’extension des domaines de brevetabilité.
Le brevet : titre qui confère à l’auteur d’une invention industrielle le droit d’exploitation
pour un temps déterminé, vingt ans dans le cadre de l’ADPIC. Il donne le monopole de
fabriquer, de vendre, d’utiliser et d’importer cette innovation pendant cette période. Les
brevets, au départ appliqués aux matières inanimées, s’étendent à tous les organismes
vivants pluricellulaires non humains qui sont des produits de l’ingéniosité de l’homme et à
des parties extraites des organismes vivants.
« 1. (…) un brevet pourra être obtenu pour toute invention, de produit ou de
procédé, dans tous les domaines technologiques, à condition qu’elle soit nouvelle,
qu’elle implique une activité inventive et qu’elle soit susceptible d’application
industrielle »
(Article 27 § 1 ADPIC)
Les exclusions de la brevetabilité sont :


les inventions qui sont contraires à l’ordre public, à la moralité ou qui portent
atteinte à l’environnement (article 27.2) ;
les méthodes diagnostiques, thérapeutiques et chirurgicales pour le traitement
des personnes ou des animaux ; les végétaux et les animaux autres que les
micro-organismes, et les procédés essentiellement biologiques d’obtention de
végétaux ou d’animaux autres que les procédés non biologiques et micro
biologiques (article 27.3).
Il en découle que les variétés végétales doivent être protégées par des brevets ou par
un système sui generis. Par ailleurs, les inventions relatives aux produits pharmaceutiques
n’étant pas excluent, sont brevetables. Cet aspect est évidemment essentiel si l’on
considère les bénéfices énormes des industries pharmaceutiques tirés de l’exploitation des
ressources biologiques essentiellement situées dans les pays en développement.
iii. La protection de l’environnement comme dérogation au libre-échange
« 2. Les Membres pourront exclure de la brevetabilité les inventions dont il est
nécessaire d’empêcher l’exploitation commerciale sur leur territoire pour protéger
l’ordre public ou la moralité, y compris pour protéger la santé et la vie des
personnes et des animaux ou préserver les végétaux, ou pour éviter de graves
88
atteintes à l’environnement, à condition que cette exclusion ne tienne pas
uniquement au fait que l’exploitation est interdite par leur législation. »
(Article 27 § 2 ADPIC)
L’environnement apparaît une fois de plus dans une démarche dérogatoire, mais
cette fois nettement plus souple, puisque la seule condition posée est que la justification de
l’exclusion de la brevetabilité ne s’appuie pas uniquement sur l’existence d’une
réglementation nationale. Par contre, l’exception n’est possible que pour éviter de « graves
atteintes à l’environnement » et non pour des atteintes à l’environnement en général, ce qui
a un effet restrictif sur l’application de la disposition dérogatoire.
iv. Protection de l’environnement et transfert de technologie
D’autres dispositions de l’ADPIC concernant la protection de l’environnement
visent l’accès à la technologie ainsi que son transfert. L’Accord doit promouvoir le
transfert et la diffusion de la technologie, en particulier vers les pays les moins avancés
(PMA) (article 66). Il vise à stimuler la recherche et le développement par la protection des
droits de propriété intellectuelle considérant que les résultats des investissements effectués
dans la mise au point d’une technologie nouvelle respectueuse de l’environnement
pourront permettre d’offrir de nouvelles perspectives de production et de transfert de
technologie écocompatibles.
b. L’ADPIC, la Convention sur la diversité biologique et le droit des brevets
La Convention sur la diversité biologique (CDB) et l’ADPIC comportent des
dispositions convergentes de par l’acceptation commune de la brevetabilité des ressources
biologiques, et divergentes de par leurs objectifs distincts.
i. OMC et CDB : la philosophie commune de la brevetabilité
La Convention sur la diversité biologique est fondée sur un compromis entre la
reconnaissance du principe de souveraineté des États sur leurs ressources naturelles et
l’accès aux ressources génétiques pour l’ensemble des États tout en prévoyant le partage
des avantages.
Le postulat de la CDB énonce le rattachement de la biodiversité à la propriété en
général et aux droits de propriété intellectuelle en particulier ; l’idée qui sous-tend la
convention est que la propriété intellectuelle, en stimulant le commerce de la diversité
biologique, va favoriser les politiques de conservation et d’utilisation durable par les États
du Sud.
Le dispositif de la CDB a donc pour objectif de permettre aux États et à leurs
communautés de développer le marché des ressources biologiques tout en en gardant le
contrôle pour en retirer les bénéfices. Le régime applicable aux ressources biologiques
prévu par la CDB apparaît donc à bien des égards cohérent avec l’OMC. L’ADPIC, de par
son article 27, permet l’exclusion de la brevetabilité des plantes et des animaux, laissant
toute liberté aux États de légiférer dans ce domaine.
89
ii. CDB et ADPIC : divergences et limites
L’Accord est orienté vers la protection des innovations et l’application des
principes de droit commercial international alors que la CDB est fondée sur la notion de
bien commun, d’une nécessaire protection de la diversité biologique et enfin sur le
rééquilibrage des relations nord/sud.
Les nombreuses défaillances de la CDB :



la protection des droits de propriété intellectuelle des technologies et
connaissances traditionnelles (article 15) s’avère difficile. L’accès aux
ressources génétiques appartient au gouvernement et est régi par la législation
nationale. Il est conditionné par le consentement préalable de celui qui fournit
les ressources. Cependant la marge de manœuvre des fournisseurs est en fait
très réduite car ils doivent « créer les conditions propres à faciliter l’accès »
(article 15 § 2). Une fois l’accès accordé, l’accès doit être régi par « des
conditions convenues d’un commun accord » (article 15 § 4) ;
le partage des avantages (articles 8j et 15 § 7) entre pays du Nord et pays du
Sud n’est pas assuré par les dispositions de la CBD. Aucune d’elle ne permet
de garantir la participation des pays en développement aux bénéfices de
l’exploitation de produits dérivés. Le versement des redevances des contrats
de bioprospection est finalement largement conditionné par le dépôt de
brevets. Les contrats mal maîtrisés par les pays fournisseurs n’empêchent pas
la biopiraterie ;
L’accès et les transferts de technologie au bénéfice des pays en
développement (article 16) reposent sur l’adoption de législation adaptée
protégeant la propriété intellectuelle ce qui réclame des connaissances et des
compétences très particulières souvent difficiles à mobiliser efficacement. Or
il apparaît qu’il n’a été procédé, pour le moment, à aucun transfert de
technologie dans le cadre de l’article 1648.
Les contraintes de l’ADPIC et ses contradictions avec la CDB :



les États membres ne peuvent exclure de la brevetabilité les micro-organismes
ainsi que les procédés non biologiques et microbiologiques d’obtention de
végétaux ou d’animaux. Or les progrès du génie génétique font que les
différences entre micro-organismes et espèces végétales et animales n’ont
plus beaucoup de sens ;
les États membres doivent accorder un système de protection aux variétés
végétales, soit par brevet, soit par un système sui generis ou encore par une
combinaison des deux ;
il n’est fait aucune référence au principe du consentement préalable pour
l’accès aux ressources. En ne réglementant pas la question, l’Accord peut
favoriser la biopiraterie. Par ailleurs, le respect du principe de souveraineté
des États sur leurs ressources est compromis dans la mesure où l’État
Rapport du groupe d’experts sur l’accès et le partage des avantages, Convention sur la diversité biologique,
UNEP/CBD/COP/5/4, 9 juillet 1999.
48
90

détenteur de ressources doit appliquer l’ADPIC et donner accès à ses
ressources ;
il n’y a pas de référence au principe de partage des bénéfices. L’Accord ne
reconnaît aucun droit de propriété intellectuelle à l’égard des connaissances
autochtones et locales. Les connaissances traditionnelles, qui sont le plus
souvent des connaissances collectives, ne peuvent jouir d’aucune protection
dans le cadre de l’Accord.
c. Les systèmes sui generis
Face aux lacunes de l’ADPIC et aux insuffisances de la CDB, des pays en
développement ont tenté de réagir craignant les effets désastreux pour leur économie de
l’application de l’Accord OMC : augmentation du prix des denrées alimentaires (car il
faudrait payer des royalties sur les semences par exemple), du prix des médicaments, etc.
i. Le modèle de législation de l’OUA
Les pays du continent africain, dont un grand nombre sont des pays moins avancés,
ont dû trouver un système sui generis panafricain efficace pour la protection des ressources
génétiques. C’est ainsi que l’Organisation de l’unité africaine (OUA) a souhaité se doter
d’un « Modèle de législation sur les droits des communautés et l’accès aux ressources
génétiques »49. Ce modèle refuse d’admettre la brevetabilité du vivant et ne fait pas
obstacle au privilège de l’agriculteur. Il affirme la nécessité, non seulement du
consentement préalable de l’État, mais aussi des communautés locales et autochtones. En
cas d’absence d’un système garantissant un partage équitable des bénéfices, les États
doivent prendre des mesures visant à développer un système collectif/communautaire des
droits de propriété intellectuelle en s’appuyant sur la consultation et la participation des
communautés locales. Ce Modèle, qui s’appuie sur les principaux principes de la CDB en
opposition avec l’ADPIC, exclut le secteur privé du débat sur l’accès aux ressources
génétiques, ce qui est contraire à la position dominante des pays industrialisés. Pour
maintenir le contenu du Modèle, le groupe africain doit résister à la pression des pays
développés qui souhaitent que la Convention UPOV soit appliquée comme seul système
sui generis conforme à l’ADPIC.
ii. Un régime commun d’accès aux ressources génétiques pour la Communauté
andine
Le « Système commun sur l’accès aux ressources génétiques » a été adopté en 1996
par les membres du Pacte andin (Bolivie, Colombie, Équateur, Pérou et Vénézuela). Ce
système proclame les droits souverains des États sur leurs ressources génétiques et leur
droit d’en déterminer les conditions d’accès. La Décision n° 391 du Pacte andin étend le
droit souverain de l’État aux produits dérivés des ressources, c’est-à-dire à toute molécule
– assemblage ou composition de molécules naturelles y compris les extraits d’organismes
vivants ou morts d’origine biologique – dérivée du métabolisme des organismes vivants.
Ne sont pas seulement visés les produits ayant subi une transformation ou manipulation,
mais des bio-composants peuvent également faire l’objet d’un recours de la part de la
49
Modèle ayant reçu l’accord du Conseil des ministres de l’OUA, Ouagadougou (Burkina Faso), juin 1998.
91
Communauté andine. La Décision reconnaît également la contribution des communautés
traditionnelles à la conservation et à l’utilisation durable de la diversité biologique.
d. Les moyens de la mise en œuvre de l’ADPIC
Selon l’Accord, les États membres doivent faire en sorte que leur législation
nationale comporte des procédures susceptibles de faire respecter les droits de propriété
intellectuelle dans leur ordre juridique (article 41). Les caractéristiques de ces procédures
sont précisées : elles doivent être équitables, contradictoires, ne pas être inutilement
complexes, ne pas comporter de délais déraisonnables et les décisions doivent être
motivées et susceptibles de révision judiciaire.
Les articles 42 à 46 prévoient une longue liste de mesures législatives,
administratives et judiciaires que les États membres sont invités à prendre pour assure le
respect des droits de propriété intellectuelle.
Par ailleurs, le Conseil ADPIC se voit accorder différentes compétences :



examiner les législations nationales de mise en œuvre de l’Accord ;
étudier les notifications relatives aux droits exclusifs de commercialisation
relatifs aux brevets portant sur les brevets pharmaceutiques et les produits
chimiques agricoles (article 70) ;
assurer le suivi de l’Accord et procéder à des consultations selon les besoins
exprimés.
On notera enfin que Mémorandum d’accord sur le règlement des différends est
applicable aux litiges relatifs à l’ADPIC.
C. La prise en compte institutionnalisée de l’environnement
La Conférence de Marrakech marque un tournant dans la relation souvent difficile
entre le système commercial multilatéral et la problématique environnementale, d’une part
en adoptant une décision particulière sur la question, et d’autre part en créant un organe
spécial de statut équivalent au Comité sur les services et au Comité pour la propriété
intellectuelle.
Un autre facteur vient renforcer la prise en compte de plus en plus précise de la
protection de l’environnement : la jurisprudence des organes de l’OMC en charge du
règlement des conflits qui, de plus en plus, sont amenés à apporter des réponses quant à la
compatibilité entre mesures environnementales et système du GATT/OMC.
1. Le Comité du commerce et de l’environnement (CCE)
La Décision sur le commerce et l’environnement, adoptée à Marrakech en 1994,
consacre l’instauration d’un Comité du commerce et de l’environnement.
92
Son statut est celui d’un organe subsidiaire du Conseil général. Il est chargé de
mettre en application le mandat qui lui a été confié par la Décision sur le commerce et
l’environnement du 15 avril 1994.
a. Mandat du CCE


identifier les relations entre les mesures commerciales et les mesures
environnementales de manière à promouvoir le développement durable ;
faire des recommandations appropriées pour déterminer s’il y a lieu de
modifier les dispositions du système commercial multilatéral, en en respectant
le caractère ouvert, équitable et non discriminatoire.
Le CCE peut faire des recommandations pour ce qui concerne notamment :



la nécessité d’élaborer des règles pour accroître les interactions positives des
mesures commerciales et environnementales afin de promouvoir le
développement durable en tenant spécialement en compte des besoins des pays
en développement ;
la prévention des mesures commerciales protectionnistes ;
la surveillance des mesures commerciales appliquées à des fins de protection de
l’environnement ainsi que des aspects des mesures environnementales qui
touchent au commerce.
Le CCE a pour mandat de traiter au départ :






les rapports entre le système commercial multilatéral et les accords
multilatéraux environnementaux ;
les rapports entre les dispositions du système OMC et les impositions et taxes
appliquées à des fins de protection de l’environnement, ainsi que les rapports
du système avec les prescriptions établies à des fins environnementales
relatives aux produits, normes et règlements techniques et les prescriptions en
matière d’emballage, d’étiquetage et de recyclage ;
des dispositions du système commercial concernant la transparence des
mesures commerciales appliquées à l’environnement et des mesures
environnementales ayant des effets notables sur l’environnement ;
des rapports entre les mécanismes de règlement des différends du système
commercial multilatéral et ceux prévus par les AME ;
des effets des mesures environnementales sur l’accès aux marchés ;
de la question des exportations de produits interdits.
b. Travaux du CCE
Les travaux du CCE, tels qu’ils sont présentés dans son rapport adopté le 8
novembre 1996, se fondent sur la considération selon laquelle le maintien d’un système
commercial ouvert et la préservation de l’environnement ne sont pas incompatibles. Les
93
limites des fonctions et des objectifs de l’OMC bornent les compétences du CCE, celui-ci
ne devant s’intéresser à l’environnement que dans la mesure où les politiques
environnementales ont un effet sur le commerce et les échanges de ces membres. Les
travaux ont eu tendance à montrer que le système commercial multilatéral avait la capacité
d’intégrer les considérations environnementales et d’améliorer sa contribution à la
promotion du développement durable.
Par ailleurs, ces travaux soulignent que les États membres doivent conserver leurs
normes et politiques environnementales et qu’il serait peu opportun de relâcher ces
réglementations pour soutenir les échanges commerciaux.
Principales conclusions des travaux du CCE (1996) sur la base des points visés par la
Décision sur le commerce et l’environnement :





sur les relations OMC/AME (points 1 et 5) : il n’est pas nécessaire de
modifier les dispositions de l’OMC pour éviter les incompatibilités avec les
AME. Pour améliorer les relations entre le système commercial multilatéral et
les AME, il faut renforcer la coopération multilatérale. En cas de différends
entres les Parties sur une mesure commerciale, l’affaire doit être portée
d’abord devant l’institution en charge du règlement des différends de l’AME.
Les groupes spéciaux doivent se doter des compétences nécessaires en
matière de protection de l’environnement ;
sur les relations entre les politiques environnementales qui intéressent le
commerce et les mesures environnementales ayant des effets notables sur le
commerce et le système commercial (points 2 et 3) : les permis négociables,
les instruments fiscaux, les systèmes de consignes, les subventions ont été
examinés. Les États sont libres de poursuivre leur politique fiscale. Il faut
surtout améliorer la transparence de ces mesures à la fois dans la préparation,
l’adoption et l’application des programmes. Cela apparaît surtout pour les
éco-labels et les programmes de certification ou encore pour l’éco-étiquetage.
Il est important de respecter l’Accord sur les obstacles techniques au
commerce ;
La transparence des mesures commerciales appliquées à des fins de
protection de l’environnement (point 4) : les dispositions en vigueur sur la
transparence ne doivent pas être remises en cause. Le secrétariat de l’OMC
doit gérer une base de données disponible pour tous les États membres
regroupant toutes les notifications de mesures environnementales liées au
commerce ;
L’effet des mesures environnementales sur l’accès aux marchés (point 6) :
l’élimination des restrictions aux échanges doit permettre une utilisation plus
efficace des ressources et favoriser ainsi le développement durable. Il faut
renforcer les possibilités d’accéder au marché pour les pays en développement
en soutenant des politiques de développement adéquates et en favorisant la
diversification de leur économie. Dans différents secteurs – agricole, textile,
pêche, produits forestiers – l’adoption de mesures environnementales ne
constituent pas des restrictions commerciales déguisées ;
La question des exportations de produits interdits sur le marché intérieur
(point 7) : les pays en développement étant particulièrement vulnérables dans
94



la mesure où ils ne disposent pas des informations nécessaires, il faut
renforcer l’assistance technique et le transfert de technologie ;
Les dispositions pertinentes de l’Accord sur les aspects des droits de
propriété intellectuelle qui touchent au commerce (point 8) : l’AGCS pourrait
favoriser la mise au point de techniques et de produits écologiques, devrait
faciliter l’accès à ces techniques et produits ; il faut connaître les techniques et
produits dangereux pour l’environnement et promouvoir la création
d’incitations à la conservation de la diversité biologique. Un échange
d’informations entre les secrétariats de la CDB et de l’OMC est recommandé ;
Programme de travail envisagé dans la Décision sur le commerce des
services et l’environnement (point 9) : travaux encore insuffisants pour
émettre des recommandations, notamment sur le caractère adapté de l’article
XIV ;
Sur les relations avec les organisations intergouvernementales et non
gouvernementales visées à l’article V de l’OMC (point 10) : il faut augmenter
la coopération avec les ONG. Le public doit pouvoir accéder dans de
meilleures conditions aux informations de l’OMC concernant
l’environnement. Les documents du CCE doivent être accessibles.
Les travaux du CCE se sont poursuivis après la Conférence de Singapour sur un
certain nombre de points, en les regroupant par thème :




Sur la question de l’accès au marché : les membres du Comité ont souhaité
dégager une analyse environnementale des accords commerciaux. Les effets
des programmes d’éco-labellisation sur l’accès au marché et leur interaction
avec les règles de l’OMC ainsi que l’application des règles OMC aux taxes et
redevances environnementales sont discutés. Le Comité examine les bénéfices
potentiels sous l’angle économique et écologique de la disparition de certaines
restrictions aux échanges (subventions, droits de douane, etc.) dans des
secteurs spécifiques (agriculture, pêche, textile, cuir, etc.)50 ;
Concernant les interactions entre système commercial multilatéral et AME :
le CCE organise des réunions informelles avec les secrétariats d’un certain
nombre d’Accords environnementaux afin de mieux comprendre et
coordonner les activités de l’OMC avec les objectifs des AME disposant de
mesures commerciales, notamment la Convention sur la diversité biologique
et son Protocole ;
La libéralisation des services environnementaux fait l’objet de discussions
afin de déterminer ses avantages en termes environnementaux et
commerciaux ;
Enfin, l’amélioration de la transparence du travail du CCE pour favoriser ses
relations avec la société civile apparaît comme un point de plus en plus
crucial. Dans cette perspective, plusieurs ONG ont obtenu le statut
d’observateur.
50
Le Secrétariat a apporté une contribution dans ce domaine. Note du Secrétariat OMC, WT/CTE/67, 7
novembre 1997.
95
Tous les points énoncés continuent de faire l’objet de discussions au sein du Comité
avec des préoccupations affinées sur certains aspects comme ceux des évaluations
environnementales de la libéralisation des échanges, ou encore sur les effets des mesures
environnementales sur l’accès aux marchés, avec des débats particuliers sur les secteurs de
la pêche, de l’énergie et de l’agriculture. Le principe de précaution est également
particulièrement débattu considérant les divergences des différentes délégations tant sur la
définition que sur l’utilisation du principe.
Les travaux du CCE font observer qu’en s’entendant sur « des principes de
précaution communs », les Membres pourraient garantir que ces principes ne servent pas
de « prétexte » à des mesures protectionnistes51.
2. Évolution de la « jurisprudence » : des rapports des groupes spéciaux aux
décisions de l’Organe de règlement des différends (ORD)
Depuis 1994, on observe une volonté de mieux concilier règles commerciales et
impératifs environnementaux dans les rapports de groupes spéciaux et dans les
interprétations des décisions de l’ORD.
Ainsi, deux avancées notables dans l’application des règles du système
GATT/OMC apparaissent dans des affaires relatives à des questions environnementales :


le droit de tout État de définir librement le niveau de protection de la santé et
de l’environnement, qui lui paraît approprié, est reconnu ;
le principe d’autonomie de l’État en matière de protection de la santé.
a. États-Unis, Normes concernant l’essence, nouvelle et ancienne formule (WT/DS
2), 1996
Le Vénézuela et le Brésil dénoncent la réglementation des États-Unis concernant
les combustibles et les additifs aux combustibles ayant pour objet la limitation de la
pollution imputable à la combustion d’essence. L’Agence fédérale de protection de
l’environnement (EPA) est chargée de la mise en œuvre de programmes pour parvenir à
ces objectifs. Dans les directives adoptées par l’EPA, les raffineurs nationaux ayant exercé
une activité pendant moins de 6 mois ainsi que les raffineurs étrangers sont tenus d’utiliser
le nouveau niveau réglementaire de qualité de l’essence.
Dans son rapport, le Groupe spécial considère que l’essence nationale et l’essence
importée sont des produits similaires. Il considère que le refus pour les raffineurs étrangers
de la possibilité de fixer un niveau de base individuel implique que l’essence importée jouit
d’un traitement moins favorable que l’essence national. D’où la violation de l’article III.4
de l’Accord général et l’analyse de l’exception de l’article XX g) car le Groupe spécial
précise que l’air fait partie des ressources naturelles épuisables.
Le Groupe spécial rejette cependant l’application de cette exception. Les États-Unis
font appel et c’est donc l’Organe d’appel qui se penche sur la compatibilité de la mesure
51
CCE – Réunion des 13-14 février 2001.
96
américaine au regard de l’article XX. Il admet que les restrictions imposées pour la
protection de l’air pur sont imposées avec impartialité, dès lors que les règles s’imposent
effectivement tant aux raffineurs nationaux qu’étrangers. C’est donc l’Organe d’appel qui
se penche sur la compatibilité de la mesure américaine au regard de l’article XX. Il
examine dans un premier temps si la mesure entre dans le champ d’application de l’article
XXg, puis dans un second temps si elle respecte le texte. Il en découle que l’Organe
d’appel relève les éléments suivants :
– les mesures de protection de l’environnement invoquées doivent être en rapport avec
l’objectif poursuivi. L’Organe d’appel estime que c’est le cas en l’espèce ;
– les mesures imposées par les autorités américaines visant à protéger la qualité de l’air
doivent s’appliquer de manière impartiale. Or les importateurs sont soumis à une
réglementation plus sévère entraînant une augmentation des coûts pour les raffineurs
étrangers. Cette difficulté aurait pu être surmontée par la mise en place d’une coopération
avec les gouvernements brésilien et vénézuélien. Par conséquent, les conditions
d’application de l’article XX ne sont pas toutes remplies et la réglementation américaine
est condamnée.
« Conformément à l’Accord général, les membres de l’OMC étaient libres d’établir
leurs propres objectifs écologiques (…)
La tâche [du groupe] ne consistait pas à examiner d’une façon générale
l’opportunité ou la nécessité des objectifs écologiques de la Loi sur la lutte contre
la pollution atmosphérique ou de la Réglementation sur l’essence ».
(Extraits du rapport du Groupe spécial du 17 janvier 1996)
b. États-Unis, Prohibition à l’importation de certaines crevettes et de certains
produits à base de crevettes, (WT/DS58), 199852
La position adoptée par les organes de l’OMC dans l’affaire Essence de 1996 a été
confirmée par le rapport de l’affaire Crevettes. Dans cette affaire, la réglementation
américaine, adoptée en juin 1987 en application de la loi sur les espèces menacées
d’extinction, était mise en cause par différents pays (l’Inde, la Malaisie, le Pakistan, la
Thaïlande). Selon la réglementation américaine, l’importation de crevettes pêchées avec
des techniques de pêche susceptibles de nuire aux tortues marines est interdite ; les pays de
pêche certifiés, c’est-à-dire appliquant des dispositifs d’exclusion des tortues marines, ne
sont pas soumis à cette interdiction. Les directives généralisant l’interdiction d’importation
à tous les pays étrangers non certifiés sont attaquées.
Le Groupe spécial conclut que l’interdiction d’importer des crevettes et produits
dérivés n’est pas compatible avec l’article XI.1 du GATT de 1994 et ne peut être justifiée
au regard de son article XX. Les États-Unis déposent une demande auprès de l’Organe
d’appel lequel marque son ouverture à la protection de l’environnement. L’Organe d’appel
réaffirme l’importance de suivre les étapes pouvant conduire à admettre la dérogation :
« Premièrement, justification provisoire de la mesure au motif qu’elle relève de
l’article XX g) ; deuxièmement, nouvelle évaluation de la mesure au regard des
clauses introductives de l’article XX. »
52
Rapport du Groupe spécial du 15 mai 1998, rapport de l’organe d’appel du 6 novembre 1998.
97
Dans sa vérification des différents critères, il apparaît que l’Organe d’appel fait une
interprétation plus souple des « ressources naturelles épuisables » en considérant que
l’expression doit être analysée « à la lumière des préoccupations actuelles de la
communauté des nations en matière de protection et de conservation de l’environnement ».
Il fait référence au préambule de l’Accord sur l’OMC et s’appuie sur l’effet utile dans
l’interprétation des traités. L’organe considère que les espèces de tortues marines font
partie des ressources épuisables et admet que les mesures de protection contestées ont pour
objectif leur protection. Par ailleurs les crevetiers américains sont soumis à des règles
similaires.
Par contre, il considère que les conditions du chapeau de l’article XX ne sont pas
remplies car les mesures constituent une discrimination injustifiable entre les pays. En
effet, l’Organe d’appel a relevé que pour éviter l’interdiction d’importation, les autres États
devaient se plier à la réglementation américaine de protection des tortues, les États-Unis ne
prenant pas en considération les mesures adoptées par les autres pays. Par ailleurs, les
États-Unis ont créé un régime différencié en concluant une convention interaméricaine
privilégiant certains pays. Enfin, la procédure de certification exigée n’est ni prévisible ni
transparente. Les décisions de rejet de la certification ne sont pas notifiées aux demandeurs
ni motivées. Elles ne peuvent faire l’objet d’un appel.
L’Organe d’appel, s’il finit par rejeter la requête américaine, fait référence à
l’autonomie des États pour mener leur politique environnementale et s’appuie notamment
sur la Décision sur le commerce et l’environnement :
« (…) dans le Préambule de l’Accord sur l’OMC et dans la décision sur le
commerce et l’environnement (…), il est spécifiquement reconnu qu’il importe de
coordonner les politiques relatives au commerce et à l’environnement. Les
membres de l’OMC disposent d’une large autonomie pour déterminer leurs
propres politiques en matière d’environnement (y compris la relation entre
l’environnement et le commerce), leurs objectifs environnementaux et la législation
environnementale qu’ils adoptent et mettent en œuvre. »
(Extraits, Rapport de l’Organe d’appel du 8 novembre 1998)
c. Communauté européenne, Amiante (WT/DS 135), 2000
C’est dans le rapport de l’Amiante, première affaire dans laquelle l’ORD admet le
jeu de l’article XX b), que le principe d’autonomie de l’État en matière de santé est
reconnu53 quelques temps après l’affaire Viandes et produits carnés (hormones). L’Organe
d’appel décide non seulement que les conditions d’application de l’article XX sont réunies,
mais apporte également un élément nouveau à l’interprétation de la question de la
similarité des produits au sens de l’article III.2
La question posée au Groupe spécial puis à l’Organe d’appel est de savoir si les
fibres d’amiante et les produits dérivés de l’amiante sont des produits similaires aux
produits de substitution utilisés en remplacement de l’amiante (fibres de verre et de
53
Rapport du Groupe spécial du 1er septembre 2000, rapport de l’Organe d’appel du 12 mars 2001.
98
cellulose, fibres APV). Le Canada considère que oui, la Communauté européenne répond
par la négative en se prévalant de leur dangerosité, notamment de leur cancérogénicité.
L’organe d’appel a rejeté l’interprétation exclusivement économique de l’article III
faite par le Groupe spécial fondé exclusivement sur la garantie des conditions de
concurrence. Il prend en considération la dangerosité du produit concerné par la mesure :
« Nous sommes très nettement d’avis…que les effets sur la santé sont des éléments de
preuve pertinents dans un examen de la similarité ».
Il en déduit que les produits de substitution à l’amiante ne sont pas des produits
« similaires ».
Sur la question de la « nécessité de la mesure » (en l’occurrence l’interdiction par la
France d’utiliser ces produits à base de fibres d’amiante ou produits dérivés ), l’Organe
d’appel va considérer que le terme de « nécessaire » ne doit pas être réduit à ce qui est
indispensable et qu’il faut tenir compte du contexte dans lequel il se trouve.
« Plus l’intérêt commun ou les valeurs communes poursuivies sont vitaux ou importants,
plus il sera facile d’admettre la nécessité des mesures conçues pour atteindre ces
objectifs ».
La décision prend en considération la proportionnalité de la mesure par rapport au
risque encouru. Ce qui signifie, en substance, que plus le risque est grave et bien établi,
plus on pourra reconnaître facilement une mesure dérogatoire au libre-échange.
Enfin l’Organe d’appel considère que la mesure contestée était la seule solution
« raisonnablement disponible ».
Il apparaît clairement, qu’à partir de 1994, avec l’appui des dispositions de l’OMC
et la mise en place du Comité sur le commerce et l’environnement, les préoccupations
environnementales et sanitaires sont mieux intégrées par les organes en charge du
contentieux dans le système commercial multilatéral. Cependant, l’équilibre entre les deux
ordres de préoccupation reste fragile, car la nécessité de la mesure continue de s’apprécier
de manière déterminante par rapport à ses effets restrictifs sur le commerce.
99
QUESTIONS
1. Quels sont les principaux accords internationaux qui organisent le commerce
international de marchandises ?
2. Quelles sont les principales obligations des Parties dans l’Accord sur l’agriculture de
l’OMC ?
3. Dans quelle mesure peut-on considérer que l’Accord sur l’application des mesures
sanitaires et phytosanitaires (SPS) participe à la mise en œuvre du principe de
précaution ?
4. Quel est le régime applicable aux aides en faveur de l’environnement dans l’Accord
SMC ?
100
RÉPONSES
1. Le GATT 1994, les accords sectoriels : l’Accord sur l’agriculture, l’Accord SPS ; les
accords portant sur certaines mesures non tarifaires : l’Accord sur les obstacles
techniques au commerce ; les accords de défense commerciale : l’Accord sur les
subventions.
2. Éviter les mesures protectionnistes et discriminatoires dans le secteur agricole : diminuer
les mesures non tarifaires, réduire les équivalents tarifaires, réduire les subventions.
3. L’article 5 § 7 de l’Accord SPS ne prévoit l’application du principe de précaution que
pour une période transitoire.
4. Les programmes de subventions doivent être notifiés par les Membres au Comité des
subventions avant leur mise en œuvre ; si le programme n’est pas accepté, demande
d’arbitrage.
101
IV. Les accords régionaux : la recherche d’un équilibre entre commerce et environnement
La régionalisation est un aspect essentiel de la configuration des échanges
commerciaux et un instrument fondamental dans la mise en place de politiques concertées
dans différents domaines qui réclament une solide coopération internationale.
Dans cette perspective, la plupart des nouvelles conventions internationales ont intégré
des clauses relatives à la protection commune de l’environnement. L’approche régionale
permet à la fois d’appréhender l’environnement de manière plus précise par des
décisions adaptées au contexte de la région et donc plus proches des réalités et
impératifs écologiques des États, et de dégager une réflexion plus fine sur la relation
entre système commercial multilatéral et problématique environnementale.
A. L’Europe
Avec la Communauté européenne, son développement institutionnel, ses perspectives
d’élargissement, notamment vers les pays d’Europe centrale et orientale (PECO) et ses
relations privilégiées avec les pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP),
l’Europe est devenue un pôle d’expériences régionales particulièrement intéressant dans
le domaine de l’intégration de l’objectif de protection de l’environnement dans un ordre
économique libéral reposant sur la liberté du commerce et de la concurrence.
1. L’Union européenne
L’Union européenne représente actuellement l’organisation internationale la plus
aboutie et l’intégration régionale la plus développée sur les plans institutionnel et
fonctionnel. En l’espace d’un demi siècle (depuis la signature du Traité sur la Communauté
économique européenne du charbon et de l’acier en 1951, et des Traités sur la
Communauté économique européenne et l’EURATOM en 1957), les Communautés
européennes ont développé une expérience unique dans le domaine de la libéralisation des
échanges. Elles ont ainsi été confrontées aux mesures de protection de l’environnement,
susceptibles de constituer des obstacles au commerce, cependant que parallèlement, la
construction de l’Union intégrait les exigences de l’environnement dans les politiques
communautaires.
a. L’intégration de l’environnement dans les politiques communautaires
De 1957 à 1986, les traités communautaires ne prévoient pas de dispositions
relatives à l’environnement, l’objectif étant clairement la mise en place d’un espace
économique unifié. Cependant, dans cette période, de nombreux textes sont adoptés par les
institutions communautaires, marquant la préoccupation de développer une politique
environnementale communautaire. Dès le début des année soixante-dix, la relation
d’interdépendance entre croissance économique et environnement est reconnue.
En 1986, l’Acte unique mentionne l’environnement pour la première fois dans un
traité constitutif communautaire. L’environnement devient une « composante des autres
politiques de la Communauté ». Dès lors, deux bases juridiques vont coexister dans l’ordre
juridique communautaire entraînant des choix quant au fondement juridique pour traiter
102
des éventuels conflits et contradictions entre droit du commerce et protection de
l’environnement.
Six programmes d’action :
– Premier programme 1973-1976 54 : Le Conseil établit un lien entre expansion
économique et amélioration de la qualité et du niveau de vie. Les thèmes visés sont : la
réduction des pollutions et nuisances, le maintien d’un équilibre écologique, la protection
de la biosphère, l’aménagement du territoire en lien avec environnement ;
– Deuxième programme 1977-198155 : continuité du 1er programme, accent sur l’action
préventive dans les domaines de la pollution, de l’aménagement de l’espace et de la
formation des déchets ; procédure d’évaluation des incidences sur l’environnement ;
coopération internationale ;
– Troisième programme 1982-1986 56 : la résolution du Conseil prévoit non plus d’éviter
les distorsions de concurrence mais d’assurer la bonne gestion des ressources naturelles. La
politique commune de l’environnement devient un élément indissociable des politiques
communautaires.
18 février 1986, signature de l’Acte unique européen : l’environnement devient une action
communautaire.
– Quatrième programme 1987-199257 : consécration des principes environnementaux ;
reconnaissance de l’environnement comme « facteur fondamental au moment des prises de
décisions économiques » ;
7 février 1997, signature du Traité de Maastricht : l’environnement devient une politique
communautaire.
– Cinquième programme 1993-2000 58 : mise en place d’une nouvelle stratégie associant
tous les acteurs notamment le secteur privé et la société civile. Sont pris en compte les
principaux secteurs économiques avec pour objectif de parvenir à un développement
durable et respectueux de l’environnement. Des instruments économiques et des
mécanismes de soutien financier doivent permettre une nouvelle approche des mesures
environnementales. L’action de l’Union européenne s’exerce dans le cadre des objectifs
internationaux fixés au Sommet de Rio.
2 octobre 1997, signature du Traité d’Amsterdam : la protection de l’environnement est
considérée comme un principe de la Communauté européenne avec comme objectif le
développement durable.
54
JOCE n° C 112 du 20 décembre 1973.
JOCE n° C 139 du 13 juin 1977.
56
JOCE n° C 46 du 17 février 1983.
57
JOCE n° C 328 du 7 décembre 1987.
58
Résolution du Conseil et des représentants de gouvernements des États membres, réunis au sein du Conseil
du 1er février 1993 concernant un programme communautaire de politique et d’action en matière
d’environnement et de développement durable, JOCE n° C 138 du 17 mai 1993.
55
103
– Sixième programme, 2000 : nécessité d’améliorer et d’intensifier l’intégration.
L’intégration de l’environnement fait partie des autres politiques comme axe prioritaire.
i. Le principe d’intégration
Le Traité de Maastricht de 1992 inscrit le principe d’intégration de l’environnement
dans les autres politiques communautaires à l’article 130 R 2 dans un titre consacré à
l’environnement. Il prévoit simplement que « les exigences en matière de protection de
l’environnement doivent être intégrées dans la mise en œuvre des autres politiques de la
Communauté ». Par la suite, le Traité d’Amsterdam, en vigueur le 1er mai 1999, opère une
évolution importante en faisant référence au développement durable, concept développé
par le rapport Brundtland de 1987. Les institutions communautaires prennent en compte ce
nouvel objectif dans l’élaboration d’une stratégie européenne en faveur du développement
durable, consacrée par le Conseil européen de Göteborg en juin 2001.
« Les exigences de la protection de l’environnement doivent être intégrées dans la
définition et la mise en œuvre des politiques et actions de la Communauté visées à l’article
3, en particulier afin de promouvoir le développement durable. »
(Article 6, Traité Communauté européenne (Traité d’Amsterdam))
L’article 3 vise
« un marché intérieur caractérisé par l’abolition entre les États membres, des
obstacles à la libre circulation des marchandises, des personnes, des services et
des capitaux » et « un régime assurant que la concurrence n’est pas faussée dans le
marché intérieur ».
L’affirmation du principe d’intégration, exprimée dans l’article 6 du Traité CE, est
complétée par l’article 2 relatif aux objectifs de la Communauté européenne lequel précise
que la Communauté a pour mission de promouvoir « la croissance durable non
inflationniste respectant l’environnement » par la mise en œuvre d’actions ou de politiques
communes.
Le lien explicite établi entre les exigences environnementales et un marché intérieur
permettant la liberté des échanges marque l’applicabilité du principe d’intégration aux
mesures destinées à assurer la libre circulation des marchandises et la concurrence comme
à celles destinées à protéger l’environnement.
ii. Le respect des engagements internationaux environnementaux
Les engagements internationaux en matière d’environnement jouent un rôle
important dans le développement des politiques communautaires et notamment dans les
domaines de la protection de l’environnement, du commerce et de la concurrence. La
Communauté, qui dispose d’une personnalité morale reconnue pour négocier des accords
internationaux, est un acteur important du système commercial multilatéral et participe
activement à la mise en œuvre des conventions internationales environnementales.
104
« 1. La politique de la Communauté dans le domaine de l’environnement contribue
à la poursuite des objectifs suivants :
(…) - la promotion, sur le plan international, de mesures destinées à faire face aux
problèmes régionaux ou planétaires de l’environnement.
2. La politique de la Communauté vise un niveau de protection élevé, en tenant
compte de la diversité des situations dans les différentes régions de la
Communauté.(…) »
(Article 174 du Traité CE)
Les engagements internationaux conclus par les Communautés font partie de
l’ordre juridique communautaire. Dans la hiérarchie des normes communautaires, ils
priment sur le droit dérivé, comme l’a réaffirmé à plusieurs reprises la Cour de justice des
Communautés européennes (CJCE, 10 septembre 1996, Commission/Allemagne, Affaire
C-61/94).
À de nombreuses reprises, la CJCE a fait prévaloir une interprétation conforme au
droit communautaire quant à ses engagements internationaux :


la Communauté a adhéré à la Convention de Vienne du 22 mars 1985 et au
Protocole de Montréal du 16 septembre 1987 relatifs à la protection de la
couche d’ozone. À la suite de ces adhésions, la Communauté a adopté
différents textes destinés à réglementer l’importation de substances qui
appauvrissent la couche d’ozone ainsi qu’à prévoir le contrôle de leur
production en les soumettant notamment à des restrictions quantitatives. Dans
l’Arrêt Safety High-Tech (CJCE, 14 juillet 1998, Affaire C-284/95)59, la
Cour, saisie d’un renvoi préjudiciel, a été amenée à apprécier la validité du
règlement communautaire interdisant les HCFC. Pour cela, elle se réfère à la
Convention de Vienne et au Protocole de Montréal. L’interprétation que
donne la Cour des textes communautaires est conforme aux accords
internationaux et permet d’assurer la cohérence de l’ordre juridique
communautaire avec l’application des règles internationales.
La Cour a accepté l’argument de « l’objectif de protection de la diversité
biologique » telle que prévue par la Convention de Rio pour admettre la
conformité d’une mesure environnementale du gouvernement danois visant à
interdire l’importation d’abeilles (Affaire Bluhme, CJCE, 3 décembre 1998,
Affaire C-67/97).
Répercussions de la jurisprudence communautaire :
 le recours aux instruments internationaux, notamment aux AME, conforte
l’approche communautaire de protection de l’environnement ;
 l’interprétation conforme du droit communautaire aux AME favorise
l’effectivité des accords internationaux ;
 la référence aux AME est le vecteur d’une application harmonisée au sein de la
Communauté, grâce aux voies de recours prévues par le Traité à l’encontre des
institutions communautaires telles que les États.
59
CJCE, 14 juillet 1998, Aff. C-284/95 ; Gianni Bettati contre Safety Hi-Tech Srl., Aff. C-341/95, Rec. I, p.
4355.
105
b. L’environnement comme dérogation à la liberté du commerce et de la
concurrence
Si la Communauté européenne a cherché à développer des actions communes dans
le domaine de la protection de l’environnement, se fixant des objectifs ambitieux en termes
de développement durable, elle a également consolidé les principes de libre concurrence et
de libre commerce en s’appuyant sur le principe d’intégration. Toute mesure fondée sur
des considérations environnementales entraînant des restrictions au commerce et à la
concurrence doivent être justifiées selon des critères précis.
i. Le principe d’interdiction des atteintes à la liberté du commerce et à la
concurrence
Des règles spécifiques sont posées par le Traité dans les trois domaines d’atteinte à
la liberté des échanges. Sont prévues :



l’interdiction des restrictions quantitatives à l’importation ainsi que de toute
mesure ayant un effet équivalant à une restriction quantitative (article 28
Traité CE) ;
l’incompatibilité avec le marché commun de toute entente et de tout abus de
position dominante (articles 81 et 82) ;
l’incompatibilité avec le marché commun des aides d’État sous quelque forme
que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en
favorisant certaines entreprises ou certaines productions (article 87).
ii. Les dérogations fondées sur la protection de l’environnement
– Dérogations aux restrictions d’importation, d’exportation ou de transit :


si elle sont « justifiées par des raisons de moralité publique, d’ordre public,
de sécurité publique, de protection de la santé et de la vie des personnes et
des animaux ou de préservation des végétaux, de protection des trésors
nationaux ayant une valeur artistique, historique ou archéologique, ou de la
propriété industrielle et commerciale » (article 30 Traité CE, ancien article
36) ;
parallèlement à cette dérogation prévue par le Traité, la Cour de justice a
dégagé une catégorie de dérogations jurisprudentielles (Affaire Cassis de
Dijon, CJCE, 20 février 1979, n° 120/78) : les exigences impératives d’intérêt
général. Or cette catégorie intègre la protection de l’environnement. La
jurisprudence communautaire a été conduite à articuler ces deux fondements
(Affaire des « bouteilles danoises », CJCE 20, septembre 198860 ; Affaire
Dusseldorp, CJCE, 25 juin 1998, C-203/96)61.
60
CJCE, Commission c. Danemark, Aff. 302/86, 20 septembre 1988.
Dans cette affaire la Cour conclut qu’il n’est pas possible d’invoquer l’article 130 T (article 176 du Traité
CE après Traité d’Amsterdam) pour justifier l’adoption de mesures visant à restreindre l’exportation de
déchets destinés à la valorisation sans une exigence impérative de protection de l’environnement ou sans le
61
106
– Dérogations aux règles de concurrence :


pour les accords ou pratiques concertées qui contribuent à améliorer la
production ou la distribution des produits ou à promouvoir le progrès
technique ou économique, tout en réservant aux utilisateurs une partie
équitable du profit qui en résulte (article 81§ 3).
La Commission européenne admet que le progrès technique peut viser le
progrès environnemental. La jurisprudence communautaire a eu l’occasion de
se prononcer sur la validité d’une décision de la Commission autorisant des
aides d’État pour des projets de développements technologiques profitables à
l’environnement (Arrêt BP Chemical du 27 septembre 200062).
pour les entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique
général ou présentant le caractère d’un monopole fiscal si l’accomplissement
des règles de concurrence fait échec à la mission particulière qui leur a été
impartie (article 86 § 2 Traité CE, ancien article 90 § 2).
À titre d’illustration, la jurisprudence communautaire a reconnu que la gestion
de certains déchets pouvait faire l’objet d’un service économique général,
notamment lorsque ce service a pour but de faire face à un problème
environnemental (Arrêt Sydhavnens du 25 juin 1998, C-203/96).
iii. Les mesures nationales de protection de l’environnement renforcées
À ces dérogations il est possible d’ajouter les aménagements particuliers du Traité
concernant l’application de normes écologiques plus contraignantes que celles prévues par
les normes communautaires.
Les mesures nationales de protection de l’environnement renforcées peuvent être
maintenues après harmonisation des législations au sein de la Communauté, dès lors
qu’elles sont justifiées par des « exigences importantes visées à l’article 30 ou relatives à la
protection de l’environnement » (article 95 § 4, ancien article 100 A). À titre d’exemple,
l’Allemagne a pu maintenir son système de label écologique malgré l’adoption du système
européen d’éco-label63.
Par ailleurs, les États peuvent adopter des mesures de protection renforcées si ces
mesures sont compatibles avec le Traité, c’est-à-dire si elles ne sont pas incompatibles
avec l’établissement d’un marché commun et si elles entrent dans le cadre des dérogations
prévues par le Traité (article 176, ancien article 130 S).
iv. Le contrôle de la mesure restrictive par le juge
souci de protection de la santé et de la vie des personnes en application de l’article 36 (article 30 Traité CE
après Traité d’Amsterdam).
62
T-184/97, Rec. II, p. 3149. Dans cette affaire, le tribunal de première instance n’a pas accepté une
exonération à un régime d’aide aux biocarburants octroyé par la France, faisant une application stricte du
principe de proportionnalité. On a pu considérer que le Tribunal a fait prévaloir le respect de la concurrence
sur l’objectif prioritaire du régime d’aide.
63
Règlement 880/92 du 23 mars 1992, concernant un système communautaire d’attribution de label, JOCE L
99/1, du 11 avril 1992.
107
Deux critères sont utilisés par la CJCE pour contrôler la mesure dérogatoire à la
concurrence et au commerce :


la nécessité : cela implique l’existence d’un lien de causalité entre la
réglementation et l’intérêt général ;
la proportionnalité : les atteintes au commerce et à la concurrence ne doivent
pas être excessives par rapport à l’objectif recherché.
La jurisprudence apprécie ces deux critères en se basant sur les engagements
internationaux et en s’appuyant sur l’état des connaissances scientifiques et techniques.
2. La coopération économique internationale et la protection de l’environnement
a. Les conventions de coopération entre la Communauté européenne et les États de
l’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP)
L’Union européenne a toujours accordé une attention particulière à la coopération
régionale avec les pays avec lesquels elle a conservé, pour des raisons historiques, des
relations privilégiées. Les accords de Lomé, dont le premier a été signé entre la
Communauté économique européenne et quarante-six États d’Afrique, des Caraïbes et du
Pacifique le 28 février 1975, ont pour but de réglementer les échanges de produits de base
entre l’Union européenne et les pays ACP64.
Ces accords constituent une initiative de coopération nord-sud mettant en place des
conditions d’échanges spécifiques par rapport au système commercial multilatéral, dans la
mesure où il s’agit d’accords préférentiels dérogatoires à l’OMC.
i. Convention de Lomé IV, 15 décembre 1989
La quatrième Convention de Lomé, du 15 décembre 1989 (en vigueur le 1er mars
1990, regroupant 22 États ACP supplémentaires), met l’accent sur la promotion de
l’intégration économique régionale et reconnaît la protection de l’environnement comme
une priorité :
« Les Parties contractantes reconnaissent la priorité à accorder à la protection de
l’environnement et à la conservation des ressources naturelles, conditions
essentielles pour un développement durable et équilibré tant au plan économique
qu’au plan humain. »
(Article 6.2, Convention de Lomé, 15 décembre1989)
Cet accord marque la prise en compte de l’environnement dans les relations
économiques développées entre les États Parties, consacrant un titre entier à cette question.
La Communauté souhaite donner son appui aux politiques de protection et de mises en
valeur de l’environnement. L’accord prévoit ainsi la mise en place d’instruments de
64
Les Conventions de Yaoundé de 1963 et 1969 rapprocheront la Communauté européenne et les États
africains et malgache associés (EAMA), puis ce sont les Conventions de Lomé de 1975, 1979, 1984 et 1989.
108
coopération adaptés à la problématique environnementale dans le cadre d’un « effort de
solidarité internationale ».
« Dans le cadre de la présente Convention, la protection et la mise en valeur de
l’environnement et des ressources naturelles, l’arrêt de la dégradation du capital
foncier et forestier, le rétablissement des équilibres écologiques, la sauvegarde des
ressources naturelles ainsi que leur exploitation rationnelle sont des objectifs
fondamentaux que les États ACP concernés s’efforcent d’atteindre avec l’appui de
la Communauté, en vue d’améliorer dans l’immédiat les conditions de vie de leurs
population et de sauvegarder celles des générations à venir. »
(Article 33, Convention de Lomé, 15 décembre1989)
L’orientation des accords de coopération entre les pays ACP et l’Union européenne
marque un engagement pour le développement durable cependant que ces accords
présentent une dimension plus étendue que leurs objectifs économiques d’origine. La
Convention de Lomé IV participe de la politique de développement de l’Union
européenne. Cependant cet accord prévu pour une période de dix ans ne pouvait se
maintenir dans la mesure où il constitue une dérogation à l’Accord de l’OMC. La
Commission de Bruxelles, constatant l’insuffisance des préférences commerciales
consenties par l’Europe, la désintégration du tissu social dans les États ACP, la
multiplication des conflits, la nécessité d’une meilleure intégration des États ACP dans les
échanges internationaux avec l’application des règles de l’OMC, propose un nouveau
partenariat (Livre vert sur les relations entre l’Union européenne et les pays ACP à l’aube
du XXIe siècle – Défis et options pour un nouveau partenariat, 1996).
ii. L’Accord de Cotonou, 23 juin 2000
L’Accord de Cotonou résulte de la nécessité d’une adaptation aux développements
internationaux et plus particulièrement aux règles de l’OMC. L’objectif du développement
durable est réaffirmé dans le Préambule (§ 2). La coopération doit contribuer au
développement économique, social et culturel et doit permettre de relever les « défis de la
mondialisation » dans un effort « visant à donner au processus de mondialisation une
dimension sociale plus forte »65.
Buts de l’Accord de Cotonou :

permettre une plus grande intégration régionale avec la constitution de blocs
commerciaux ;

rendre compatible avec l’OMC le commerce entre l’UE et les États ACP en
mettant fin au partenariat asymétrique et paritaire des Conventions de Lomé et
de Yaoundé ;

favoriser l’investissement par une meilleure confiance donnée aux
investisseurs ;

insérer davantage les États ACP dans l’économie mondiale.
Dans la perspective d’une mise en compatibilité de l’Accord de Cotonou avec
l’OMC, diverses dispositions renvoient aux accords du GATS pour les services ou de
65
Accord de Cotonou, Préambule § 3.
109
l’ADPIC pour les droits de propriété intellectuelle (article 46). Une disposition spécifique
prévoit que la promotion du développement du commerce doit s’effectuer de manière à
assurer une « gestion durable de l’environnement » (article 49).
« Commerce et environnement
1. Les parties réaffirment leur engagement à promouvoir le développement du
commerce international de manière à assurer une gestion durable et saine de
l’environnement, conformément aux conventions et engagements internationaux en la
matière et en tenant dûment compte de leurs niveaux respectifs de développement. Elles
conviennent que les exigences et besoins particuliers des États ACP devraient être pris en
considération dans la conception et la mise en œuvre des mesures environnementales.
2. Compte tenu des principes de Rio et en vue de faire en sorte que les politiques
commerciales et environnementales se complètent, les parties conviennent de
renforcer leur coopération dans ce domaine. La coopération visera notamment à
mettre en place des politiques nationales, régionales et internationales cohérentes,
à renforcer les contrôles de qualité des biens et des services sous l’angle de la
protection de l’environnement et à améliorer les méthodes de production
respectueuses de l’environnement dans des secteurs appropriés. »
(Article 49, Accord entre les membres du groupe des États ACP et la Communauté
européenne et ses États membres, Cotonou, 23 juin 2000)
L’article sur « commerce et environnement de l’Accord » insiste donc sur :
 le respect des conventions internationales en matière d’environnement ;
 la prise en compte de la spécificité des États en fonction de leur niveau de
développement ;
 le renforcement de la coopération dans les domaines commercial et
environnemental ;
 la mise en place de politiques pour renforcer les contrôles de qualité
environnementale des biens et des services.
b. L’Union européenne et les pays d’Europe centrale et orientale (PECO)
i. L’appui de l’Union européenne dans la perspective d’un élargissement
Après la disparition de l’Union soviétique, l’Union européenne met en place une
politique d’aide à la reconstruction économique des PECO afin de promouvoir les
investissements. Le programme PHARE (Poland and Hungary Assistance for the
Reconstruction of the Economy), initialement prévu pour soutenir la transformation
économique et sociale de la Hongrie et de la Pologne, va s’étendre aux pays candidats à
l’adhésion à l’Union européenne : Bulgarie, République Tchèque, Slovaquie, Roumanie,
Albanie, Lettonie, Lituanie, Estonie, Slovénie.
La protection de l’environnement représente une partie importante des fonds
alloués. Le programme permet de favoriser les négociations de pré-adhésion à l’Union
européenne.
ii. L’Accord de libre-échange en Europe centrale
110
Les PECO, influencés par les impératifs liés à leur intégration dans l’Union
européenne, vont par ailleurs entreprendre un regroupement économique tenant compte
dans une certaine mesure de la problématique environnementale. L’Accord de Cracovie,
signé le 21 décembre 1992 par les États hongrois, polonais, slovaque et tchèque, crée une
zone de libre-échange en Europe centrale. Une disposition prévoit la possibilité
d’exceptions ou de restrictions au libre-échange pour assurer la conservation de ressources
naturelles non renouvelables (article 18).
B. L’Afrique
Le développement des expériences d’intégration régionale africaines s’est réalisé en
deux vagues : la première coïncide avec la période postérieure aux indépendances durant
les années 1960-1970 avec, pour l’Afrique australe, des prolongements jusqu’au début des
années 1980 ; la deuxième avec la signature du Traité d’Abuja sur la Communauté
économique panafricaine de 1991.
Les États africains sont regroupés dans plus de 200 organisations régionales ou
sous-régionales pour la plupart intergouvernementales. La pluralité constitue la
particularité du régionalisme africain qui s’est constitué pour différentes raisons comme le
dépassement des clivages coloniaux ou néocoloniaux ou en référence à une communauté
de culture (accords de la première vague) ou encore pour élaborer une stratégie
commerciale extravertie, encourager les investissements transfrontaliers et harmoniser des
politiques macroéconomiques (accords de la seconde vague ou « nouveau régionalisme »).
Les organisations régionales disposant d’un mandat multisectoriel, le plus souvent pour
promouvoir la liberté du commerce et la circulation des facteurs de production, n’ont, pour
la plupart, pas pu développer de dispositions spécifiques sur l’environnement. Seules les
organisations les plus actives dans la mise en place de politiques sectorielles envisagent
l’intégration de la problématique environnementale.
1. Le pluralisme du régionalisme africain
En Afrique de l’Ouest, les principales organisations d’intégration régionale sont :


la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO,
1975 révisée en 1993) ;
l’union monétaire de l’Afrique de l’Ouest (1974) qui s’est transformée en
Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA, 1994).
Les principales institutions d’Afrique centrale sont :



la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC, 1983) ;
l’Union douanière et économique des États de l’Afrique centrale (UDEAC,
1964 abolie en 1994), mise en place de la Communauté économique et
monétaire d’Afrique centrale (CEMAC) ;
la Communauté économique des pays des grands lacs (CEPGL, 1976). Les
pays d’Afrique centrale, qui sont membres de la zone franc, ont établi la
Banque des États d’Afrique centrale (BEAC).
111
En Afrique orientale, australe et dans l’océan Indien, les principales
organisations sont :





l’Union douanière de l’Afrique australe (SACU, 1969) ;
la Zone d’échanges préférentiels de l’Afrique orientale et australe (ZEP,
1981) qui a approuvé la création d’un Marché commun de l’Afrique orientale
et australe (COMESA, 1993) ;
la Conférence pour la coordination du développement de l’Afrique australe
(SAADC, 1980) puis sa transformation en Communauté de développement de
l’Afrique australe (SADC, 1992) ;
l’Union monétaire commune (CMA ou zone Rand) ;
la Commission de l’océan Indien (COI).
En Afrique du nord , l’Union du Maghreb arabe (UMA) est née de la décision des
chefs d’États du Maghreb, prise lors de la réunion de Marrakech du 1er février 1989, avec
pour objectifs de renforcer les liens qui unissent les États en vue d’assurer une stabilité
régionale et de réaliser la libre circulation des personnes, des biens et des capitaux.
2. Le Traité d’Abuja : un régionalisme continental
La signature du Traité d’Abuja, le 3 juin 1991, instituant la Communauté
économique africaine (CEA, en vigueur le 12 mai 1994), place l’Afrique dans un processus
d’intégration autonome dans le système commercial international et offre la perspective
d’un régionalisme actif dans les négociations internationales.
Le Traité d’Abuja a comme projet novateur de construire une communauté
économique qui englobera tous les États d’un même continent et prévoit six étapes, étalées
sur une période de trente-quatre ans pour y parvenir, à partir de 1994. La première étape
vise le renforcement du cadre institutionnel des communautés économiques régionales
existantes et la création de nouvelles communautés si l’une des cinq régions africaines
(article 1er alinéa d) n’est pas représentée.
Les articles 42 et 94 du Traité imposent aux États membres de la Communauté
l’obligation d’adopter des positions communes pendant les négociations internationales. La
CEA a compétence pour participer à l’OMC et s’engager en tant que groupe aux
négociations internationales ce qui, pour les discussions relatives au commerce et à
l'environnement au sein du système commercial multilatéral, pourrait permettre
d’influencer les décisions.
3. Les organisations régionales tenant compte de l’environnement
– Le Marché commun de l’Afrique orientale et australe (COMESA), créé par le
Traité de Kampala du 5 novembre 1993, prévoit un principe de coopération dans le
domaine de la gestion des ressources naturelles et de l’environnement (article 4, al. 6 h). Le
chapitre XVI est consacré à cette coopération en établissant une distinction entre gestion de
l’environnement (article 124) et gestion des ressources naturelles (article 125).
112
– La Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), mise en
place par le Traité de Windhoeck du 17 août 1992, énonce comme objectif l’utilisation
durable des ressources naturelles et la protection efficace de l’environnement (article 5 al.
g). La SADC représente un cadre particulier pour le développement d’actions sousrégionales pour l’environnement. Différents protocoles sont destinés à régler des questions
liées à la gestion commune des ressources, comme la faune et la flore sauvages, les cours
d’eau ou encore les forêts.
– L’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) prévoit, dans le
Protocole additionnel n° II relatif aux politiques sectorielles de l’UEMOA, un chapitre
consacré à l’amélioration de l’environnement (chapitre IV, articles 9 à 12). La Conférence
des chefs d’État et de gouvernement veille à la prise en compte de la lutte contre la
désertification, de la protection des ressources naturelles et de la biodiversité, de
l’amélioration de l’environnement en milieu rural et urbain, de l’exploitation des énergies
renouvelables et de la lutte contre l’érosion côtière (article 10).
4. Le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD)
La conjonction de deux plans d’action – le Millenium African Plan (MAP) et le
plan OMEGA – consacrés à la relance des économies africaines et visant à promouvoir le
développement du continent africain ont conduit à l’élaboration d’un texte présentant une
politique générale de développement nommée « Nouvelle initiative africaine » puis
rebaptisée « Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique » (NEPAD) lors du
Sommet des chefs d’États de Lusaka (Zambie) en octobre 2001.
Dans la perspective de placer les pays africains sur la voie de la croissance et du
développement durable, le NEPAD évoque l’environnement (§ 138 à 143) comme une
condition préalable de la réalisation de ses objectifs. Il ne s’agit cependant pas d’un
domaine prioritaire66.
Le texte du NEPAD, qui ne prend pas la forme d’un accord juridiquement
contraignant pour les Etats africains qui souhaiteraient y participer mais d’un document
donnant les orientations d’une politique de développement africaine concertée, a rencontré
un accueil favorable lors du Sommet de Johannesburg conduisant à une reconnaissance
internationale de cette nouvelle initiative africaine. Le NEPAD a en effet été perçu comme
un partenariat susceptible de favoriser la participation des pays africains à la croissance
économique mondiale et au développement durable (§ 62 du Plan d’application, Sommet
de Johannesburg, 2002).
« Nous saluons et appuyons la formation d’alliances et de groupements régionaux
plus puissants, tels que le Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique,
visant à promouvoir la coopération régionale, à améliorer la coopération
internationale et à soutenir le développement durable. »
(Déclaration de Johannesburg, 2002, § 21)
66
Les 7 domaines donnés comme prioritaires par le NEPAD sont : les infrastructures, les ressources
humaines, la santé, les technologies de l’information et de la communication, l’agriculture, l’énergie et
l’accès des exportations aux marchés des pays développés.
113
C. Les Amériques
L’Amérique du Nord a développé avec l’ALENA une intégration régionale, une
coopération dans les domaines de l’économie, de l’environnement et de la main-d’œuvre,
cependant que le MERCOSUR (Marché commun du Sud), ayant pour objectif la création
d’un marché commun, établit des règles et met en place des structures pour aborder la
problématique environnementale en lien avec la liberté des échanges et de la concurrence.
Une dynamique nouvelle se développe avec la régionalisation sur le continent
américain. Le projet de créer une Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA) a été
proposé par les Chefs d’État et de gouvernement durant le Sommet de Miami en 1994 et a
été relancé par la Déclaration ministérielle de San José du 19 mars 1998. Cette déclaration
implique la réalisation d’un projet régional de libéralisation par trente-quatre pays. Au
cours des différentes négociations, qui ont conduit à l’adoption de ces différents textes, la
problématique environnementale a été prise en compte. La première réunion des ministres
de l’environnement des Amériques s’est tenue à Montréal du 17 au 19 avril 2001 lors d’un
Symposium sur le commerce et le développement durable. La coopération
environnementale a été renforcée par cette rencontre et un accord environnemental des
Amériques pourrait être adopté.
1. L’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA)
Faisant suite à l’accord bilatéral entre le Canada et les États-Unis de 1988,
l’ALENA intègre le Mexique le 7 octobre 1992. Face à l’opposition des industriels sur
l’intégration, dans l’Accord, de dispositions supplémentaires concernant la protection de
l’environnement, des négociations pour un Traité annexe sur l’environnement se déroulent
quelques temps plus tard, en mars 1993. Elles aboutissent à l’Accord nord-américain de
coopération et de développement sur l’environnement (ANACDE). Les gouvernements
procèdent à la ratification du Traité de l’ALENA et de l’ANACDE en même temps et les
deux accords entrent en vigueur le 1er janvier 1994.
a. Le Traité ALENA : tentative de conciliation entre libéralisation des échanges et
environnement
Le Traité a pour objectif de régir les activités économiques et commerciales des
trois pays signataires. Il introduit des règles portant sur la réduction et l’élimination des
droits de douane, l’investissement international, les normes sanitaires et phytosanitaires, la
propriété intellectuelle, les secteurs de l’énergie, de la pétrochimie et de l’agriculture.
La libéralisation des échanges s’accompagne de la volonté de tenir compte de
l’environnement. Ainsi, dès le préambule, les États s’engagent à :



s’acquitter de leurs responsabilités en matière d’activités économiques d’une
manière compatible avec la protection et la conservation de l’environnement ;
promouvoir le développement durable ;
renforcer l’élaboration et l’application des lois et règlements en matière
d’environnement.
114
i. Les dispositions liant commerce et environnement
– Les mesures sanitaires et phytosanitaires (chapitre 7 B)
Les États parties peuvent prendre des mesures plus strictes en matière
environnementale que celles établies au niveau international. Afin d’éviter les abus, il est
prévu que ces mesures :






ne doivent pas être discriminatoires entre biens semblables ;
doivent être établies sur des principes scientifiques ;
être annulées ou abandonnées quand cette justification n’existe pas ;
être basées sur une étude de risque, selon les circonstances ;
être appliquées seulement dans le but d’atteindre le niveau de protection
voulu ;
ne doivent pas représenter une restriction déguisée aux échanges.
Considérant les difficultés d’application du Traité dans ce domaine, celui-ci prévoit
une procédure de règlement spécifique. La charge de la preuve repose sur celui qui
conteste la mesure.
– Les obstacles techniques au commerce (chapitre 9)
Les États peuvent choisir les niveaux de protection environnementale considérés
comme appropriés et prendre les mesures nécessaires à partir du moment où ces mesures
ne sont pas discriminatoires et ne créent pas des obstacles non nécessaires au commerce.
– L’harmonisation des normes concernant la santé, la sécurité et l’environnement
 l’article 905 impose aux Parties d’utiliser les normes internationales lors de la
mise au point de mesures normatives nationales ayant des effets sur le
commerce ;
 l’article 906 encourage les États à harmoniser leurs mesures normatives sans
abaisser leur niveau de protection en matière de santé, de sécurité et de
l’environnement ;
 l’article 904 affirme le droit inaliénable de chaque État de maintenir et
d’appliquer ses propres normes de protection de la santé, de l’environnement
et de sécurité.
– Le régime juridique des investissements (chapitre 11)
Aucun des États ne doit nationaliser ou exproprier l’investissement d’un
investisseur étranger sur son territoire, ou ne doit prendre une mesure équivalente à la
nationalisation ou à l’expropriation, sauf dans l’intérêt général, et en tout cas d’une façon
non discriminatoire, en respectant les procédures judiciaires et les principes du droit
international et avec une contrepartie financière égale à l’investissement réalisé.
L’article 1114 prévoit :
«1. Le présent chapitre ne pourra être interprété comme empêchant une Partie
d’adopter, de maintenir ou d’appliquer une mesure par ailleurs conforme au
présent chapitre, qu’elle considère comme nécessaire pour que l’activité de
l’investissement effectué sur son territoire soit entreprise d’une manière conforme
à la protection de l’environnement.
115
2. Les Parties reconnaissent qu’il n’est pas bon d’encourager l’investissement en
assouplissant les mesures nationales qui se rapportent à la santé, à la sécurité ou à
l’environnement. En conséquence, une Partie ne doit pas renoncer ni déroger, ou
offrir de renoncer ou de déroger, à de telles mesures dans le dessein d’encourager
l’établissement, l’acquisition, l’expansion ou le maintien sur son territoire d’un
investissement effectué par un investisseur. ( …) ».
Il s’agit d’une disposition unique dans un accord commercial : pour la première fois
l’environnement est pris en compte dans un chapitre relatif à l’investissement. Cependant,
tel que formulé, l’article 1114 n’a aucune force obligatoire, les Parties ne pouvant procéder
qu’à des consultations pour éviter que l’encouragement ne soit donné.
ii. Les rapports entre l’ALENA et les accords environnementaux multilatéraux
En général, en cas de conflit de normes conventionnelles, les dispositions de l’ALENA
sont considérées comme prioritaires par le Traité. L’article 104 visant les
incompatibilités avec des accords environnementaux constitue donc une exception dans
la mesure où il prévoit de faire prévaloir les obligations prévues en matière de
commerce dans les conventions suivantes :



la CITES ;
le Protocole de Montréal relatif aux substances qui appauvrissent la couche
d’ozone ;
la Convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de
déchets dangereux et leur élimination.
Les Parties doivent cependant choisir les moyens qui contreviennent le moins à
leurs obligations conventionnelles parmi ceux qui sont « également efficaces et
raisonnablement accessibles ».
L’article 104.2 prévoit la possibilité de rajouter de nouvelles exceptions
conventionnelles et donc d’y inclure tout autre accord relatif à l’environnement.
b. L’ANACDE
L’Accord a pour objectif de promouvoir le développement durable en Amérique du
Nord grâce à la coopération, à l’adoption de politiques économiques et environnementales
complémentaires et au soutien de la réalisation des objectifs environnementaux de
l’ALENA.
L’Accord s’appuie sur deux principes :


la recherche d’un équilibre entre les objectifs de protection de
l’environnement d’une part et la souveraineté étatique et la libéralisation du
commerce d’autre part ;
la concertation entre les États Parties pour résoudre les problèmes
environnementaux communs.
116
Les obligations des Parties sont multiples : présentation de rapports sur l’état de
l’environnement, amélioration des lois et règlements en matière d’environnement,
application sévère des lois environnementales, publication et diffusion d’informations sur
l’environnement.
La mission de l’ANACDE est de promouvoir l’application efficace des textes sur
l’environnement considérant que les trois pays partagent le même environnement régional,
de permettre d’atteindre les objectifs environnementaux et de prévenir d’éventuels conflits.
Dans cette perspective, l’Accord a créé trois institutions :



la Commission de coopération environnementale (CCE) chargée d’examiner
les répercussions de l’ALENA sur l’environnement ;
la Banque nord-américaine de développement (BanqueNAD) chargée de
financer des projets d’infrastructure environnementale seulement pour le
Mexique et les États-Unis ;
la Commission de coopération environnementale transfrontière (CCEF)
chargée de donner la certification pour mener jusqu’à son terme des projets
frontaliers susceptibles d’être financés par la BanqueNAD.
La CCE travaille conjointement avec la Commission de libre-échange créée par
l’ALENA pour prévenir les effets négatifs du commerce sur l’environnement et établir des
formes de développement moins dommageables pour le milieu naturel. La CCE est la seule
organisation internationale ayant pour objet l’étude des effets environnementaux du libreéchange par le biais de l’évaluation et de la coopération avec une participation active des
citoyens.
2. Le MERCOSUR
Le Marché commun du Sud (Mercosul en portugais ou Traité d’Asunción) naît de
l’Accord conclu le 26 mars 1991 à Asunción entre l’Argentine, le Brésil, le Paraguay et
l’Uruguay. Le Protocole d’Ouro, du 19 décembre 1994, lui donne des institutions.
L’appellation de « marché commun » exprime la volonté d’une parenté avec la démarche
européenne.
La structure du MERCOSUR est toujours évolutive, particulièrement sur le thème
commerce-environnement qu’elle aborde dans différents textes et par la mise en place de
divers mécanismes.
Le Protocole d’Ouro permet de mettre en place des mécanismes de participation
publique à travers un Forum économique et social (Foro Consultivo Economico y Social)
mis en place de manière institutionnelle par le MERCOSUR. Ce conseil ou forum reçoit
des informations de la part des représentants des salariés, des consommateurs et des chefs
d’entreprise ; à titre d’experts, ils peuvent participer aux réunions des sous-comités
techniques. Rapidement après le Traité d’Asunción, est créée la Réunion spécialisée sur
l’environnement (Reunión Especializada de Medio Ambiente ou REMA, juillet 1992)
chargée de traiter les questions liées à l’environnement.
117
La REMA a cherché les mesures politiques et juridiques qui pouvaient affecter la
libre concurrence. Pour cela, elle a travaillé avec les différents sous-groupes de travail du
Groupe du marché commun (Grupe Mercado Comùn – GMC).
Par le biais d’une résolution MERCOSUR/GMC/38/95 sur les orientations des
sous-groupes de travail, la REMA se transforme en « sous-groupe 6 sur l’environnement »
(subgrupo 6 medio ambiente) lequel est en charge d’étudier :






les restrictions non tarifaires ;
la relation concurrence et environnement ;
les normes internationales ISO 14.000 ;
un projet d’instrument juridique sur l’environnement pour le MERCOSUR ;
les systèmes d’information environnementale ;
le contrôle « vert » (Sello verde Mercosur) permettant d’avoir des garanties
sur les produits qui circulent sur le marché.
Les nouveaux thèmes abordés de manière prioritaire par le MERCOSUR, en dehors
des droits de propriété intellectuelle, concernent le management environnemental y
compris les normes de qualité, les méthodes d’évaluation d’impacts environnementaux, les
procédures de certification mais aussi la protection de la santé et de la qualité de la vie, la
participation du public aux décisions et le renforcement de la coopération régionale.
D. L’Asie
1. L’APEC
Créé en 1989 à l’initiative de l’Australie, le Forum de coopération économique
Asie-Pacifique a été relancé par le États-Unis en 1993. L’APEC rassemble les grandes
économies riveraines ou proches du Pacifique : les pays de l’ALENA, de l’ASEAN, le
Japon, la Chine, la Corée, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, le Chili, le Pérou et la Russie.
Ce Forum, fortement soutenu par les Etats-Unis, pourrait être le cadre du
rapprochement des politiques d’harmonisation des réglementations commerciales touchant
à l’environnement, considérant notamment le modèle déjà mis en place avec l’ALENA.
2. L’ASEAN
L’Association des nations du Sud-Est asiatique, créée le 8 août 1967 à Bangkok,
regroupe à présent les dix États de la région : Birmanie, Brunei, Cambodge, Indonésie,
Laos, Malaisie, Philippines, Singapour, Thaïlande et Vietnam. Il s’agit d’un simple accord
économique qui vise à une meilleure coordination des politiques suivies par les pays
membres sans ambition politique.
La plupart des instruments adoptés par l’ASEAN n’ont pas de force contraignante :


le consensus sur la foresterie tropicale (Jakarta, 12-14 août 1981) ;
la Déclaration sur les parcs et réserves (Bangkok, 29 novembre 1984) ;
118





la Déclaration sur l’environnement de l’ASEAN (Bangkok, 29 novembre
1984) ;
la Résolution de Jakarta sur le développement durable (30 octobre 1987) ;
La Déclaration de Manille (15 décembre 1987) ;
la Résolution sur l’environnement et le développement (Bandar Seri
Begawan, 26 avril 1994) ;
la Réunion ministérielle informelle sur l’environnement (Kuching Sarawak,
21 octobre 1994).
– L’Accord sur la conservation de la nature et des ressources naturelles (non
en vigueur) a été adopté à Kuala Lumpur le 9 juillet 1985. Cet Accord aborde dès son
préambule l’interrelation entre la conservation et le développement socio-économique,
considérant que la conservation est nécessaire pour assurer la durabilité du développement
et inversement, que le développement socio-économique est nécessaire à la conservation.
L’article 5 de l’Accord de Kuala Lumpur prévoit de réguler le commerce des espèces et
des produits des espèces, les pays ayant la responsabilité de maintenir les populations
des espèces endémiques au niveau le plus élevé possible. Le principe du respect des
législations nationales et de la responsabilité des États qui en découle, ainsi que le
principe de coopération pour le partage des ressources (article 19) constituent les
fondements de cet accord précurseur à bien des égards de la prise en compte de
l’environnement dans les politiques d’exploitation économique des ressources.
– Le Plan stratégique pour l’environnement et l’Accord de libre-échange
(Singapour, 1992)
Le Plan stratégique pour l’environnement, adopté en 1994, marque le
positionnement de l’ASEAN sur la relation entre commerce et environnement. Le plan se
réfère à la Conférence de Stockholm de 1972, au PNUE puis à la CNUCED et à l’Agenda
21. L’un des objectifs est d’étudier les effets de l’AFTA (ASEAN Free Trade Agreement,
Singapour, janvier 1992) sur l’environnement et de prévoir les étapes pour intégrer des
politiques commerciales saines dans le développement de politiques environnementales.
En dehors des textes spécifiques qui envisagent l’implication de l’ASEAN dans
l’élaboration ou la mise en œuvre de politiques environnementales, les différents
sommets67 ont été l’occasion de prendre position sur le rôle de l’organisation régionale sur
certains domaines en lien avec l’environnement mais toujours dans la perspective
principale de réaliser dans les meilleures conditions le développement économique.
– le 5e sommet, Bangkok (Thaïlande), 1995
Ce sommet est l’occasion pour l’ASEAN d’adopter un Accord-cadre de
coopération sur la propriété intellectuelle68.
– le 6e sommet, Hanoï (Vietnam), 1998
67
Nous évoquerons les derniers sommets depuis 1995 dont les résultats touchent à la problématique
environnementale. Le 7e sommet, Begawan, 5-6 novembre 2001 ayant abordé d’autres priorités (terrorisme,
lutte contre le virus HIV, etc.) ne sera pas évoqué.
68
ASEAN, Framework Agreement on Intellectual Property Cooperation, Bangkok, 15 décembre 1995.
119
La Déclaration de Hanoï du 16 décembre 1998 (§ 25) précise que la protection de
l’environnement est une base essentielle pour les activités économiques.
Le plan d’action adopté à Hanoï prévoit, quant à lui, d’améliorer les possibilités de
commercialisation des produits alimentaires, agricoles et forestiers par l’application de
standards de qualité certifiant du respect des normes environnementales et d’une
diversification des produits forestiers (§ 2.4.3 du Plan). Il prévoit également d’assurer une
durabilité de l’approvisionnement en énergie en tenant compte de l’environnement. Une
partie spécifique est consacrée au thème « Protection de l’environnement et promotion du
développement durable » (partie VI). Dans ce cadre, des résolutions sont prises dans
différents domaines avec des échéances pour leur réalisation : adopter un programme
régional de l’eau d’ici 2001, conclure un Protocole ASEAN sur l’accès aux ressources
génétiques d’ici 2004, mettre en œuvre un Plan de coopération sur les pollutions
transfrontières à l’horizon 2001, créer un Centre météorologique spécialisé pour prévenir
les pollutions transfrontières pour 2001, etc.
– le 8e sommet, Phnom Penh (Cambodge), 2002
Un Accord sur le tourisme est conclu le 4 novembre, faisant référence à
l’importance de conserver le patrimoine naturel et culturel de la région (article 5), de
développer l’éco-tourisme et la coopération pour promouvoir l’activité touristique.
Par ailleurs, une Déclaration sur la conduite de Parties dans la mer de Chine
méridionale énonce l’obligation de coopération entre les Parties, notamment dans la
perspective de protéger le milieu marin (article 6 a).
L’approche régionale est souvent révélatrice des choix faits dans les politiques
commerciales pour intégrer la dimension environnementale comme facteur de
développement des échanges. Elle marque aussi la complexité des relations entre
commerce et environnement et la difficulté de plus en plus grande d’envisager la
protection de l’environnement indépendamment de tout objectif économique de
développement.
120
QUESTIONS
1. Quelles sont les dérogations à la liberté du commerce et de la concurrence fondées sur
la protection de l’environnement acceptées par le Traité de la Communauté
européenne ?
2. Quel est l’apport de l’Accord de Cotonou par rapport à Lomé IV dans la coopération
entre la Communauté européenne et les pays ACP ?
3. Quels sont les enjeux et les apports d’un régionalisme continental pour l’Afrique dans
les négociations internationales ?
4. Quelles sont les dispositions qui lient commerce et environnement dans le Traité de
l’ALENA ?
121
RÉPONSES
1. Les dérogations aux restrictions d’importation, d’exportation ou de transit doivent être
justifiées par des raisons de (…) protection de la santé et de la vie des personnes et des
animaux ou de préservation des végétaux (…) (art. 30, Traité CE). La notion de l’intérêt
général, y compris les impératifs de l’environnement, ont été dégagés par la
jurisprudence. Quant aux dérogations aux règles de concurrence, le progrès technique et
l’impossibilité d’exécuter la mission impartie dans le cas des entreprises chargées de la
gestion de services d’intérêt économique général ou ayant le caractère d’un monopole
fiscal sont les deux exceptions prévues par le Traité.
2. Adaptation aux développements internationaux (compatibilité avec l’OMC – pas de
dispositions asymétriques et paritaires), dimension sociale plus forte de la
mondialisation.
3. Enjeux : divers pays aux intérêts différents et difficulté de les rassembler dans une seule
organisation. Par conséquent, les voix individuelles se perdent dans les négociations
internationales. Apports : Unifier le continent africain pourrait exercer plus de pression
au niveau international.
4. Mesures sanitaires et phytosanitaires, les obstacles techniques au commerce (concernant
le niveau de protection environnementale), harmonisation des normes concernant la
santé, la sécurité et l’environnement, régime juridique des investissements (nouveauté).
122
BIBLIOGRAPHIE
ABDELMALKI Lahsen, MUNDLER Patrick, Économie de l’environnement, Hachette,
Collection Les Fondamentaux, Paris, 1997.
ANDERSON Kym, BLACKHURS Richard, Commerce mondial et environnement,
Economica, Paris, 1992.
BOSSELMANN K., RICHARDSON B.J. et autres, Environmental Justice and Market
Mechanisms, Kluwer, 1999.
CAMERON J., DEMARET P., GERADIN D. (eds), Trade and the environment : the
search for balance, London, Cameron May, 1994.
DUTFIELD Graham, Intellectual property rights, trade and biodiversity. London :
Earthscan/IUCN, 1999.
ECONOMIC AND SOCIAL COMMISSION FOR WESTERN ASIA, Trade Policy
aspects of environmental measures in the ESCWA member countries, United Nations, New
York, 1997.
KERGOAT Michelle, Libéralisme et protection de l’environnement, L’Harmattan, Paris,
1999.
LETHONEN Markku, Criteria in environmental labelling : A comparative analysis of
environmental criteria in select labelling schemes (environment and trade series n° 13).
Geneva, UNEP,1997.
LONDON Caroline, Commerce et environnement, PUF, Que sais-je ? n° 3592, Paris, 2001.
MALJEAN-DUBOIS Sandrine (sous la dir.), L’outil économique en droit international et
européen de l’environnement, La Documentation française, Paris, 2002.
OCDE, Les mesures commerciales dans les accords multilatéraux sur l’environnement,
OCDE Editions, 1999.
OCDE, Marchés publics et environnement – problèmes et solutions pratiques, OCDE
Editions, 2000.
RAFFENSPERGER, Carolyn, TICKNER Joel, (eds.), Protecting public health and the
environment : Implementing the precautionary principle. Wahshington, D.C., Island Press,
1999.
UNEP and INTERNATIONAL INSTITUTE FOR SUSTAINABLE DEVELOPMENT ,
Environment and Trade – A handbook, IISD, 2000.
123
Van DYKE, ARDEN-CLARKE Brennan and Charles, ISO eco-labelling standards, the
WTO and MAEs : A legal briefing examinating element of DIS 14020, Gland,
Switzerland :WWF International 1997.
WARD, Halina, DUNCAN Brack, (eds.), Trade, investment and the environment, London,
Royal Institue of International Affairs/Earthscan, 1999.
WTO-Trade and Environment Division, Trade and the environment – High level
symposium march 1999, Washington, 1999.
ZARILLI Simonetta, JHA Veena, VOSSENAAR René, Eco labelling and international
trade. New York, St. Martin’s Press, 1997.
ZIEGLER Andreas R., Trade and Environmental Law in the European Community,
Clarendon, Press, Oxford, 1996.
Sites internet
http://www.oecd.org/env.
http://www.unep.ch/trade.html
http://www.worldbank.org
http://wwwiisd.ca/subsidywatch/defaut.htm, IISDnet, Subsidy Watch. ISDD.
Documents consultables sur internet :
http://www.ciir.org/ipd/fs.html. MURPHY Sophia, Trade and food security : An
Assessment of the Uruguay Round Agreement on Agriculture, London : Catholic Institute
for international Relations, 1999.
http://www.panda.org/ressources/publications/sustainability/wto-papers/wtosard.html, WWF International. Directing WTO negotiations towards sustainable
agriculture and rural development. Gland :WWF International, 1999.
http://www.iisd.ca/trade :trips.htm. COSBEY, Aaron. Sustainable development
effects of the WTO TRIPS Agreement : A focus on developing countries. Winnipeg : IISD,
1996.
http://www.southcentre.org/publication/trips/trips, The TRIPS Agreement : A guide
for the South. Geneva, South Center, 1997.
124
http://www.unep.ch/trade.html. UNEP, The use of trade measures in selected MEAs
(environment and trade series n° 10). Geneva, 1996.
125
EXAMEN FINAL
Prière d’utiliser des feuilles de papier séparées pour répondre à ces questions aussi
succinctement que possible.
Renvoyez vos réponses en indiquant clairement votre nom et adresse, et le Cours auquel
l’examen se rapporte à :
UNITAR
Programme Droit de l’environnement
Palais des Nations
CH-1211 Genève 10
Suisse
Cour 9
Environnement et commerce
126
Cours 9
Environnement et commerce
Agnès Michelot
Examen Final
I. Commerce et environnement dans l’ordre juridique international
1. Dans quelle mesure la mondialisation influence-t-elle les relations et les
échanges internationaux sur le plan économique comme sous l’angle de la protection de
l’environnement ? Replacez votre réponse dans le cadre du débat idéologique sur les
implications de l’approche néo-libérale dans la mise en place de politiques
environnementales.
2. Cas pratique : Pays X est membre de l’OMC et Partie contractante de la CITES.
Pays Y est membre de l’OMC mais il ne fait pas partie de la CITES. Pays Z est une des
Parties de la CITES mais pas du système de traités OMC. Pays X et Z refusent d’exporter
un produit provenant d’une espèce de l’Annexe I de la Convention de Washington à pays
Y car ce dernier ne figure pas parmi les États Parties. L’habitat de cette espèce rare et
menacée d’extinction se trouve dans une réserve partagée et gérée conjointement par les
pays X et Z. Cependant, ce produit étant indispensable pour l’industrie du pays Y, il
conteste cette mesure auprès de l’OMC. Analysez la situation.
II. Le droit international de l’environnement face au régime du commerce international
1. Comparez les mesures commerciales dans le cadre de la CITES et de la
Convention de Bâle.
2. Quelles sont les procédures similaires de la Convention de Rotterdam de 1998 et
du Protocole de Cartagena de 2000 ? En quoi se ressemblent-t-elles ?
3. Comment les mesures d’appui à la protection de l’environnement peuvent-t-elles
conduire à des pratiques discriminatoires ?
III. L’environnement : une lacune dans le système du commercial international
1. Si un pays décide de ne pas importer certains produits provenant de certains États
afin de mieux protéger une ressource naturelle, quelles sont les conditions que cette
restriction doit remplir afin d’être acceptée par l’OMC ? Utilisez des exemples pour
illustrer les conditions en vertu des accords pertinents (GATT 1994, l’Accord sur
l’agriculture, l’Accord SPS, l’Accord sur les obstacles techniques au commerce).
127
2. Comment le concept du transfert de technologie est-il en contradiction avec le
système actuel de la protection de la propriété intellectuelle ? Quelles sont les possibles
solutions offertes par les accords internationaux ou régionaux ?
IV. Les accords régionaux : la recherche d’un équilibre entre commerce et environnement
Comment les groupements régionaux de libre-échange peuvent-ils menacer la mise
en œuvre des principes de l’OMS ?
128
Institut des Nations Unies pour la formation et la recherce (UNITAR)
Adresse :
UNITAR
11-13, chemin des Anémones
CH-1209 Châtelaine
Genève
Suisse
Adresse postale :
UNITAR
Palais des Nations
CH-1211 Genève 10
Suisse
Tél : +41 (0)22 917 1234
Fax : +41 (0)22 917 8047
Telex : 412962 (UNO CH)
Câble: UNITAR/UNNATIONS
Genève
Site Web:
http://www.unitar.org
E-Mail:
[email protected]
129
UNITAR
L’institut des Nations Unies pour la formation et la recherche (UNITAR) a été créé en
1965 en tant qu’instrument autonome au sein de l’Organisation des Nations Unies afin
d’aider celle-ci à atteindre ses objectifs au moyen de la formation et de la recherche.
L’UNITAR est administré par un Conseil d’administration et dirigé par un Directeur
général. Les ressources financières proviennent des contributions volontaires octroyées par
les gouvernements, les organisations intergouvernementales, les fondations et par d’autres
donateurs non gouvernementaux.
L’UNITAR a les fonctions suivantes :
 Concevoir et organiser des programmes de formation à la diplomatie multilatérale et à
la coopération internationale pour les diplomates accrédités auprès des Nations Unies et
les responsables gouvernementaux nationaux qui, de par leurs fonctions, sont appelés à
participer aux activités des Nations Unies.
 Préparer et mener une gamme étendue de programmes de formation dans le domaine du
développement économique et social (le domaine de la gestion de l’environnement est
devenu le secteur dans lequel l’UNITAR offre le plus de formations).
 Effectuer des recherches en vue d’améliorer les résultats obtenus en matière de
formation pratique et plus particulièrement des recherches sur et pour la formation ;
concevoir les outils pédagogiques y compris les outils de formation pour l’enseignement
par correspondance, les manuels de formation, les logiciels et les vidéos.
 Etablir et renforcer la coopération avec les universités et autres instituts d’enseignement,
en particulier pour le développement de la recherche et de la formation.
130
Téléchargement