1
ETUDES SUR LES CLASSES ET COUCHES SOCIALES EN ALGERIE
I-L'évolution de l'économie et de la société algériennes.
Il s'agit de faire un exposé qui a pour but de préparer et d'ouvrir un débat sur
l'économie et la société algériennes depuis 1962 à nos jours. Le temps limité
réservé à cet exposé, fait que nous mettons l'accent sur la méthode d'approche et
de réflexion sur les différentes parties du sujet.
I. Le sens des termes utilisés.
D'abord celui d'économie. Un terme très souvent utilisé par les médias. Mais
aussi un terme dont la définition soulève ou peut soulever des désaccords d'une
Ecole de pensée économique à une autre. Sans aller dans le sens de ces
divergences ou de ces différences de définitions, l'économie ou l'activité
économique serait le résultat matériel de l'activité de la société dans les
différents domaines de la production, de l'échange, de la répartition et de la
consommation. La définition est généralisable à l'ensemble d'un système
économique et social ou aussi à l'ensemble de la planète, si nous n'oublions pas
la présence et le poids sans cesse grandissants des processus économiques de
plus en plus mondialisés dans lesquels interfèrent des entreprises, des
institutions, des régions, des continents.
Mais malgré la complexité et l'enchevêtrement apparents et sans cesse
grandissants de ces activités économiques, de ces économies, il y a toujours un
facteur permanent qui détermine ces activités à n'importe quel moment, à
n'importe quel niveau où se trouve, où se situe le processus économique.
Ce facteur permanent est le travail social dans tous ses aspects. Il s'agit du
travail créateur de richesses matérielles, culturelles, scientifiques et autres. Et
dans ce processus complexe de l'activité économique sont engagées des classes
sociales, des couches, des catégories, des groupes sociaux..... Ces forces sociales
entrent en relations multiformes entre elles pour créer, produire, pour échanger,
répartir, et consommer les résultats de leurs activités économiques..
Vous conviendrez avec moi que cette activité économique évolue, elle
augmente, elle diminue et se transforme dans et par la société qui la met en
mouvement, grâce au travail de cette même société humaine.
Nous aboutissons alors à un premier résultat:
2
Les relations entre les hommes( Hx, ou Hy ), au sein d'une société qui active, se
font, s'établissent dans et par les produits (p), les richesses (r), les
marchandises (m).Ces produits sont échangés, répartis et consommés au sein de
cette société, ou avec d'autres sociétés (Sx)...(Sy), ou d'autres continents(Cx)..
(Cy).... Pour résumer, nous obtenons les formules qui résument ce que nous
avons examiné ci-dessus:
Hx-------------- p ---------------Hy ;
Vous pouvez développer ces mêmes relations en faisant intervenir les richesses
(r), les marchandises (m)...Comme vous pouvez reprendre le même
raisonnement, en faisant intervenir les relations entre sociétés différentes ou
continents différents. Pour se convaincre de l'existence de cette relation de nos
jours, il suffit de réfléchir sur les productions délocalisées des pays capitalistes
développés et qui pour des raisons de rentabilité recherchée par les
transnationales s'installent dans d'autres pays surtout dans ceux dits du tiers-
monde.
Passons à l'examen brièvement du terme société. C'est l'ensemble des classes
sociales, couches, groupes sociaux qui s'organisent autour et en fonction des
activités , lesquelles sont régies par des institutions, par un pouvoir, un Etat qui
représente les intérêts des forces sociales dominantes pendant une étape
historique donnée. Il s'agit surtout là d'un ensemble de points qui situent le terme
de société.
Chaque société évolue ou régresse à des moments déterminés de son histoire. Et
il ne s'agit pas pour nous de faire le bilan économique et social de cette société
dont nous voulons saisir les profils d'évolution pendant les quarante dernières
années.
2.Notre méthode d'approche.
Nous n'allons pas faire un bilan de l'économie et de la société algériennes. Ceci
est le travail soit des groupes de recherches spécialisées, soit celui des
institutions chargées de cette tâche. Mais encore une fois, c'est le choix d'une
méthode d'approche qui va nous aider à répondre à l'essentiel des questions et
des interrogations qui peuvent nous préoccuper.
Nous pensons qu'une société - la société algérienne ne faisant pas exception- est
formée d'un ensemble de déterminants organisés. C'est à dire un ensemble de
facteurs actifs et permanents qui organisent le mouvement de cette société. Ce
mouvement pouvant être qualifié de mouvement progressif, c'est à dire porteur
3
de progrès, quand il contribue à faire progresser, faire avancer cette société.
Comme il peut être régressif, c'est à dire organiser des reculs pour une période,
une étape donnée. Comme il peut y avoir un mouvement appelé de stationnaire,
quand, en apparence seulement, ce mouvement nous semble n'être ni progressif,
ni régressif.
Ces facteurs actifs permanents, ces déterminants sont d'une part, les forces
productives dont dispose cette société, c'est à dire les forces matérielles et
humaines, scientifiques, techniques, technologiques de production pour que
cette société puisse s'organiser et activer dans les différents domaines de la
société à l'intérieur et à l'extérieur. Ces forces productives de la société forment
la base matérielle et humaine de la société. Ces forces n'agissent pas d'une façon
autonome; elles sont déterminées par les rapports sociaux de la société.
Donnons des exemples pour faire saisir ces points un peu difficiles: L'Algérie,
au sortir de la domination coloniale, a ressenti à travers le mouvement social très
large des masses, un profond besoin de se développer. Les pressions pour le
développement qui s'exerçaient sur le pouvoir d'alors étaient intenses. Le
mouvement des masses a rempli pendant cette conjoncture nationale et
internationale favorable - à peu près une décennie - la fonction des rapports
sociaux de production qui ont conduit à la nécessité de créer des forces
productives nouvelles. D' où, nous avons constaté l'existence d' une forte
poussée vers l'industrialisation. C'est dire que pendant cette décennie, les intérêts
immédiats des classes régnantes qui étaient encore à la recherche d'une
clarification et d'une vision de leurs intérêts propres, n'avaient pas encore occupé
le domaine propre à l'industrie et à l'industrialisation. Ceci pour dire qu'il n'y a
jamais de mouvement neutre ou solitaire des forces productives.
L'industrialisation n'a jamais été un assemblage d'unités industrielles dans un
espace économique donné. Et ce mouvement d'industrialisation poursuit
l'objectif de créer une structure économique nouvelle. Et il n'est possible que s'il
y a une convergence et une cohérence de facteurs politiques, techniques,
sociologiques .... Sans oublier l'importance et l'influence parfois décisive des
facteurs externes liés au marché capitaliste international qui voit toujours d'un
mauvais oeil les menaces possibles du rétrécissement de ses forces
d'exportation.
D'où, une première question qui peut être examinée dans la partie qui suit:
Qu'est ce qui explique que le pouvoir des années soixante dix ait décidé
d'industrialiser l'Algérie et celui des années quatre vingt et quatre vingt dix ait
pratiquement arrêté le processus d'industrialisation? En entendant par
industrialisation - et sans aller dans les détails de l'explication - à savoir, la
volonté du pouvoir qui caractérise une politique de développement et de création
de forces productives nouvelles; celles qui cherchent à intégrer les forces
4
économiques nationales, à créer le marché national et à remettre en cause les
formes de dépendance coloniale.
Un autre point de méthode peut nous aider à voir plus clair dans le mouvement
économique d'ensemble pendant ces quatre décennies:
Est-il indispensable de faire la différence entre politique de développement et
politique économique?
Une réponse à cette question peut nous aider à savoir si oui ou non l'économie
du pays est sortie des rapports de production coloniaux? Et qu'est-ce qui
caractérise le rapport colonial de production? Ou encore , un peu plus
simplement, est- ce que le mouvement de libération, représenté par les
différentes équipes politiques qui ont eu la responsabilité du pays pendant ces
quatre décennies, a réalisé les tâches que s'était fixé ce mouvement de
libération?
Enfin un dernier point de méthode qui est beaucoup plus centré sur les
problèmes économiques liés aux orientations néo-libérales et ultra-libérales
actuelles?
Quel est l'état de l'économie et de la société algériennes après presque une
décennie de mise en application des injonctions des institutions capitalistes
internationales?
Les réponses, peut-être pas exhaustives ou entières à ces questions, nous
aideront peut-être à faire ressortir la trame d'évolution de cette économie et de la
société qui la fait promouvoir.
3.Comment la société et l'économie algériennes ont évolué depuis 1962 à nos
jours?
Il y a deux grandes étapes qui semblent à la fois s'affronter et exprimer chacune
à sa façon les tendances de l'évolution de la société algérienne:
1. De 1967 à 1980.
- Du point de vue du mouvement social, c'est une étape qui est animée par trois
tendances principales:- le mouvement social plébéien formé par la plus grande
partie de notre peuple qui a vécu les affres du colonialisme. Il y a là une grande
partie de la paysannerie déracinée, une partie de la classe ouvrière qui va grandir
en nombre et ira rejoindre les noyaux de la classe ouvrière ancienne.
5
- Il y a les candidats à la petite bourgeoisie, les cadres, les couches moyennes
des villes et des villages.
- Il y a les noyaux et les futurs noyaux des pré - bourgeoisies d'affaires, à la
recherche d'organisation de liens institutionnels avec des milieux du pouvoir.
Du point de vue quantitatif, c'est la première composante - ce mouvement
plébéien - qui semble impulser le mouvement social et être à l'origine des
transformations entreprises par le pouvoir de cette période. C'est ce mouvement
qui a fonctionné comme un ensemble de rapports sociaux de production. Au
moins par l'intensité de ses pressions et de son dynamisme dont l'objectif a é
de se sortir de la situation matérielle et sociale terrible dans laquelle il a été mis
par la domination coloniale. Le résultat de cette lutte a été la généralisation de
l'enseignement, la nationalisation des biens de l'ex-puissance occupante et le
lancement d'une politique d'industrialisation. Nous retrouvons à travers les
points de méthode exposés dans la partie précédente, l'exigence de
développement des forces productives et les éléments des rapports de production
de type plébéien et populaire qui ont donné un sens ou une direction à cette
exigence.
C'est aussi cette tendance pendant cette étape relativement courte qui a fait que
c'est la politique de développement que les institutions de l'Etat ont cherché à
appliquer sur le terrain qui l'a emporté sur la politique économique. Nous
entendons par politique de développement l'ensemble des projets de création et
de transformation des structures économiques pour atteindre un autre niveau de
développement des forces productives et de la productivité du travail. Les
projets d'industrialisation, les projets de développement de l'agriculture, de la
recherche, de l'enseignement, de la formation scientifique et technique des
travailleurs sont tous des actes qui relèvent de la politique de développement.
Par contre, la politique économique se caractérise par des projets de transfert des
revenus, telles les activités d'importation de biens de consommation non
nécessaires, des activités économiques qui n'améliorent pas le potentiel
économique ou qui ne créent pas les conditions d'accroissement de la
productivité du travail; ou encore des activités économiques de spéculation ou
du commerce excessif.. .Comme aussi les actes et décisions d'arrêt de
l'industrialisation....Nous pensons que cet ensemble de mesures anti-productives
vont dans le sens de l'arrêt ou du ralentissement du processus de développement
des forces productives. Ces exemples concrets trouvent leur place dans la
deuxième étape.
2. De 1980-.....2003....
Si l'industrialisation qui a pour but de créer une base économique large et
intégrée des branches de l'économie nationale, caractérise surtout la première
1 / 135 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans l'interface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer l'interface utilisateur de StudyLib ? N'hésitez pas à envoyer vos suggestions. C'est très important pour nous!