1
Diapo 4, 5 et 6 : Qu'est-ce qu'une tonne abattue?
A chaque politique est associé un flux de réduction des émissions. La méthode choisie
pour traduire ce flux de réductions en un scalaire auquel on rapportera les coûts calculés
influe considérablement sur la valeur trouvée du coût par tonne. Trois métriques physiques
coexistent dans la littérature : la métrique de sommation des flux, la métrique des stocks
moyens et la métrique des flux actualisés.
La métrique de sommation des flux, de durée T est définie mathématiquement par :
 
T
sf 0
m f f t dt
f(t)
représente le flux d'abattement à la période t. L'unité de cette métrique est la tonne de
carbone. Cette métrique associe au projet le cumul des tonnes séquestrées à l'horizon T du
projet. Avec cette métrique, on évalue donc le coût actualisé du stock constitué à la fin de la
période. Ce stock est donné par
 
T
0
f t dt
. Dans le cas des flux constants,
f(t) f
, on retrouve
une méthode utilisée par la plupart des études bottom-up d'évaluation des coût d'abattement.
On appelle métrique des stocks moyens, de durée T, la métrique ainsi définie :
 
Tt
sm 00
1
m f f s ds dt
T

L'unité de cette métrique est la tonne de carbone. Cette métrique associe au projet la
moyenne du stock d'abattement. Cette métrique permet de transcrire partiellement la structure
temporelle des flux d'abattement : en l'utilisant, on évalue le coût actualisé du stock
additionnel moyen de carbone lié au projet. Un tel stock additionnel, à un instant t est égal à
 
t
0
f s ds
, où
f(s)
est le flux d'abattement annuel net. L'intérêt de cette méthode est de
permettre une rémunération différenciée du carbone en fonction de la dynamique temporelle
de stockage, même dans les cas les flux nets cumulés sont identiques : les projets
entraînant un abattement tardif sont pénalisés. Comparons par exemple deux projets réduisant
les émissions de dioxyde de carbone (CO2) de X tonnes par rapport au scénario de référence
sur la période considérée (d'une durée de 10 ans). Supposons que soit associé à ces projets un
coût actualisé identique Ctot mais que les flux temporels d'abattement diffèrent : le premier
projet se traduit par un abattement des X tonnes au bout de la première année, tandis que le
second ne se traduit par un abattement des X tonnes qu'au bout de neuf ans. Le tableau
présente le calcul des tonnes abattues selon la métrique du stock moyen pour les deux projets.
2
Comparaison des deux projets à l'aide de la métrique des stocks moyens
1
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
Moyenne
Flux
d'abattement
X
0
0
0
0
0
0
0
0
0
X
10
Stock
d'abattement
0
X
X
X
X
X
X
X
X
X
9X
10
Flux
d'abattement
0
0
0
0
0
0
0
0
X
0
X
10
Stock
d'abattement
0
0
0
0
0
0
0
0
0
X
X
10
Le coût de la tonne de carbone dans le premier cas est alors égal à :
tot tot tot
C 10 C C
1,1
9X 9 X X
10

et dans le second :
tot tot
CC
10
XX
10
L'application de la métrique des stocks moyens conduit donc à des coûts inférieurs
pour le projet qui réalise les abattements le plus tôt alors que la métrique des flux cumulés
aurait conduit à des coûts similaires.
Enfin, la métrique des flux actualisés, de durée T, est définie par :
 
Tt
fa 0
m f f t e dt

est la taux d'actualisation. L'unité de cette métrique est appelée équivalent tonnes nettes
présentes. Elle associe au projet la somme actualisée des flux d'abattement.
Normalement, seules des considérations physico-climatiques devraient permettre
d'évaluer le taux auquel il convient d'actualiser les tonnes abattues en fournissant le
coefficient d'équivalence entre deux tonnes. Mais lorsque le marché intervient, cette
équivalence implique que le prix de la tonne de carbone va croître au taux d'actualisation.
Aussi, pour réaliser une courbe de coût dans un cadre bottom-up, il convient de définir des
hypothèses sur l'évolution du prix du carbone et la courbe trouvée dépend alors
fondamentalement de ces hypothèses.
1
Cet exemple est issu de la thèse de V. Gitz (2004).
3
Afin de clarifier l'impact de cette métrique sur l'évaluation des coûts, étudions un
projet permettant de réduire les émissions de X tonnes sur 10 ans au rythme constant de X/10
tonnes par an :
X
f(t) 10
. Le coût actualisé de ce projet est égal à Ctot. On actualisera les
tonnes abattues à un taux de 5% par an. Le tableau suivant illustre que la métrique de
sommation de flux aboutit au coût par tonne le plus faible tandis que la métrique du stock
moyen aboutit au coût d'abattement le plus élevé.
Comparaison des coûts en fonction de la métrique choisie
Métrique
Sommation des flux
Stock moyen
Flux actualisés
Tonnes ou tonnes actualisées
X
5X
10
0,77X
Coût par tonne
tot
C
X
tot
C
2X
tot tot
CC
1,295
0,77X X
4
Diapo 7 et 8 : Coût technique
Concrètement, il existe au moins trois méthodes pour construire une courbe de coût
technique :
Approche partielle : chaque option technologique est évaluée séparément et les
résultats sont comparés projet par projet soit à un projet de référence soit à un scénario
de référence. L'absence de prise en compte des interdépendances entre les actions offre
une technique d'évaluation simple mais insatisfaisante.
Approche rétrospective : on compare un scénario d'abattement à un cas de référence
que l'on a construit préalablement. Le premier incorpore un cadre d'analyse des usages
énergétiques qui autorise la prise en compte des interdépendances dans le système
énergétique. L'approche partielle constitue une première étape à cette méthode puis les
options sont inclues de manière incrémentale par ordre d'efficacité croissant dans
des exécutions successives d'un modèle qui permet la prise en compte de ces options
entre elles. Cette approche ne permet cependant pas d'évaluer les coûts d'une option en
tenant compte des options moins efficaces qu'elle, ce qui n'est pas forcément cohérent
avec la réalité.
Approche intégrée : chaque point de la courbe de coût est la solution minimisant les
coûts du système énergétique total en intégrant à la fois l'offre et la demande.
L'ensemble des options technologiques sont classées comme précédemment, puis des
paniers de technologies sont construits pour simuler un grand nombre de scénarios
d'émission et calculer les coûts associés. Enfin, le scénario à moindre coût est retenu
pour chaque niveau d'abattement et une courbe enveloppe des coûts d'abattement est
ainsi construite. Cette approche peut aboutir à la conclusion qu'il existe plusieurs
systèmes énergétiques permettant un même niveau d'abattement à des coûts similaires
mais en présentant des différences techniques importantes, notamment en termes de
source énergétique dominante. Cela génère la nécessité d'introduire d'autres critères de
jugement pour effectuer les décisions d'investissement.
On peut cependant s'interroger sur la pertinence d'une démarche consistant à classer
les coûts uniquement en fonction de leur valeur actualisée nette (VAN) qui ne fait pas
intervenir la plus ou moins grande échéance du projet. Or, l'incertitude croissant avec
l'échéance, à aversion du risque donnée et pour une même VAN, on préférera le projet dont le
terme est le plus court. L'utilisation courante par les industriels de la durée de cupération
(DR) comme critère de sélection de projets d'investissement alternatifs, notamment en avenir
incertain (Babusiaux, 1990) illustre le caractère incomplet de la VAN pour construire une
courbe de coût technique.
5
Weingartner (1969) cherche à déterminer les données du problème de choix qui
restitueraient la rationalité de ce critère a priori irrationnel au regard d'un cadre standard. Il
met en évidence que la combinaison d'hypothèses requises devrait comprendre :
- l'incertitude sur la taille et l'échéancier des résultats ;
- l'irréversibilité de l'investissement financier ;
- une contrainte de financement.
Il conclut que pour toutes ces raisons "un certain type d'information revêt une importance
extrême pour le décideur. Il s'agit du taux de résolution escomptée de l'incertitude relative à
un projet. Même si aucun indice unique ne peut synthétiser l'information nécessaire, la DR
fournit une certaine idée des données pertinentes." Richard (1982) complète cet argumentaire
en mettant en évidence qu'en avenir incertain, les lacunes du critère de la VAN peuvent être
totalement corrigées par la prise en compte de l'effet d'irréversibilité. Autrement dit, précise
Favereau (1989), le critère de la DR peut être rationalisé en supposant une très forte valeur
d'option
2
en faveur des projets à rotation rapide.
2
Lorsque l'on doit effectuer un choix sur plusieurs périodes entre une décision irréversible et une décision
flexible, la valeur d'option représente le surplus maximum moyen supplémentaire que l'on peut espérer retirer
d'une décision initiale versible lié au fait que la flexibilité permettra d'exploiter les gains ultérieurs
d'information. Elle s'ajoute au prix d'option, qui est le surplus maximum moyen que l'on peut espérer retirer
d'une décision initiale réversible par rapport à une stratégie de référence totalement rigide, pour mesurer
l'authentique coût d'opportunité de la non flexibilité (Henry, 1974).
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