En quoi la protection de la vie privée est-elle un enjeu important ?
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Le droit à la vie privée est fondamental. C’est la pierre
angulaire d’une société démocratique et de toutes ses
lois, qu’il s’agisse du secret du vote, de la
confidentialité des rapports entre médecin et patient ou
client et avocat, comme du principe de la propriété
privée ou de la liberté individuelle.
Alors comment se fait-il que la protection de la vie
privée soit devenue une des questions brûlantes de ce
début du XXIe siècle ?
Le développement des nouvelles technologies
d’information et de communication permet aux
gouvernements comme aux entreprises de collecter,
garder en mémoire et « exploiter » comme jamais
auparavant une quantité grandissante de
renseignements d’ordre personnel. Dès 1996, Bruce
Phillips, alors Commissaire à la protection de la vie
privée du Canada, s’inquiétait : « Une grande part des
éléments qui constituent la personnalité d’un être
humain sont désormais à vendre ou à acheter et donne
lieu à un énorme trafic. Gouvernements et entreprises
commerciales veulent tout savoir de nous ou presque. »
Depuis lors, des histoires invraisemblables ont émergées des conséquences imprévisibles de ce commerce de
l’information privée.
Un salon funéraire canadien, qui s’était procuré les noms et adresses de victimes du cancer, a
envoyé à une Montréalaise une proposition de concession funéraire et de services d’inhumation
prépayés.
Un fabricant de sucreries a envoyé par courrier des barres de chocolat aux membres d’un
programme Weight Watchers dont il avait réussi à ses procurer la liste.
Une partie des informations confidentielles du dossier de santé d’une patiente de Toronto s’est
retrouvée dans des centaines de boîtes à lettres, imprimée à l’endos d’un dépliant de promotion
immobilière.
Certains des cobayes d’une recherche sur l’anémie à cellules falciformes, qui avaient accepté de
fournir des échantillons d’ADN aux chercheurs, se sont rendu compte qu’ils avaient de plus en
plus de mal à trouver de l’emploi ou un assureur.
Selon Phone Busters National Call Centre, en 2003, plus de 13 000 Canadiens ont été victimes
d’usurpation d’identité, engendrant un coût total de plus de 21 millions de dollars. En 2002,
seulement 7 600 cas avaient été rapportés.
L’humiliation, la discrimination ou les conséquences
économiques résultant de ce genre de pratiques
soulèvent de sérieuses questions sur l’impact des
nouvelles technologies sur la liberté individuelle, les
relations sociales et la démocratie.
Selon le sociologue David Lyon, cette surveillance
omniprésente se traduit par une sorte de « tri social »
par ordinateur, une classification des individus en
groupes hiérarchisés qui ne fait que « renforcer les
divisons sociales déjà existantes ». De son côté, John
Godfrey, un député fédéral, souligne que l’atteinte à la
vie privée fragilise l’exercice d’autres droits
fondamentaux comme la liberté de parole et le droit
d’assemblée.
Alan Westin, un spécialiste reconnu dans le domaine,
affirme que le droit à la vie privée ne survivra que si
individus, groupes et institutions sont en mesure de
déterminer eux-mêmes quand, comment et jusqu’à quel
point des informations personnelles les concernant
peuvent être communiquées à des tierces parties.
Après le 11 septembre, face à la lutte que doivent
maintenant mener les tribunaux pour équilibrer
exigences de sécurité et libertés civiles, la protection de
la vie privée apparaît de plus en plus importante au
niveau social aussi bien que politique.