Journal spécial sur la démocratie participative, des militants s’expriment librement sur ce sujet D Dééccllaarraattiioonn U Unniivveerrsseellllee ddeess D Drrooiittss ddee ll’’H Hoom mm mee ddee 11994488,, aarrttiiccllee 2211 :: Toute personne a le droit de prendre part à la direction des affaires publiques de son pays, soit directement, soit par l'intermédiaire de représentants librement choisis. L LA AD DE EM MO OC CR RA AT TIIE E PPA AR RT TIIC CIIPPA AT TIIV VE E Comment démocratiser radicalement la démocratie? La question semble d'actualité, mais elle est permanente depuis fort longtemps. Les sociétés changent et les individus qui la composent changent aussi. D'abord on a vénéré l'individu égoïste et ne défendant que ses propres intérêts, libre de ses choix ( surtout de consommateurs), mais cet individu, sans solidarité reste impuissant dans la société dont il dépend, dont il est le produit. La situation d'individu non solidaire ne peut convenir qu'à celui qui détient le pouvoir. Comment trouver des mécanismes permettant de répondre aux intérêts de l'immense majorité de la population? Comment inventer de nouvelles institutions à travers des réformes et des ruptures qui fassent que les décisions engageant l'avenir soient des décisions partagées par tous? Il faut faire participer les citoyens à la décision politique, mais une participation qui ne se borne pas à une consultation ou à une concertation sur des aspects mineurs sans jamais atteindre réellement le partage des décisions. Il ne s'agit pas de simplement "huiler" les mécanismes de la démocratie formelle. Les décentralisations de la politique au travers des élus locaux doit donc se doubler, si l'on veut qu'elle ait un sens, de l'engagement des citoyens dans la Démocratie Participative. Les politiques sociales efficaces doivent partir du local représenté par l'ensemble des citoyens, véritable centre des décisions. La démocratie participative fait naître un nouveau type de citoyenneté: une citoyenneté active, participative, critique, qui se différencie de la citoyenneté traditionnelle, celle des demandes individuelles, des récoltes isolées et vaines. Parce qu'elle s'adresse aux citoyens, elle intéresse les citoyens et les forme à la chose publique, elle crée du temps social, temps d'échanges, de débats d'où émerge l'intérêt général. La démocratie participative doit s'articuler entre la transformation personnelle et le changement collectif. L'individu se grandit dans la solidarité, fondement de la société. La représentation ne peut plus prétendre être la forme unique de démocratie, les solutions imposées d' en haut semblent de moins en moins opérantes, il est nécessaire de construire une démocratie plurielle qui ne prétend pas la perfection, qui serait alors l'expression d'un autoritarisme, mais qui prétend d'une pratique démocratique différente, ouverte à tous les citoyens, pratique de construction qui ne trouve son intérêt que dans les diminutions des inégalités sociales. *Patrick Viveret oppose à juste titre pouvoir et domination ("pouvoir sur") et pouvoir de création ("pouvoir de") A quoi sert de conquérir le premier si cela n'augmente pas le second ? *Conseiller à la cour des comptes, auteur du rapport sur " les nouveaux facteurs de richesse". A.D SSU UR RL LA AD DE EM MO OC CR RA AT TIIE E PPA AR RT TIIC CIIPPA AT TIIV VE E Démocratie directe, démocratie représentative, démocratie locale, démocratie participative... Tous ces vocables ont pour point commun un concept apparemment simple : la démocratie. On en trouve une excellente définition à l'article 2 de notre actuelle Constitution: "gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ". En ce sens, la démocratie s'oppose aux régimes de type monarchique ou aristocratique, dans lesquelles le pouvoir politique est concentré dans les mains d'une caste de dirigeants autoproclamés (voire d'un seul dans le cas d'une monarchie absolue), dont la seule légitimité repose sur l'autorité supposée naturelle que leur confère leur statut social. La démocratie se distingue, en effet, de ces régimes fondés sur l'autorité arbitraire exercée par une infime partie de la population à l'encontre du reste de celle-ci, en partageant le pouvoir entre les mains du peuple entier. Aussi, avons-nous l'habitude de voir dans la Grèce du VIème siècle avant J-C, une illustration idéale d'un authentique régime démocratique. Car, certes, chaque citoyen des Cités de l'Attique, sans distinction de fortune, ou d'origine familiale, participait réellement à l'élaboration des lois et décrets de la Cité, dans le cadre des institutions politiques établies. Cependant, nous oublions trop souvent qu'Athènes, par exemple, capitale de l'Attique, ne comptait guère que 30 à 40 mille citoyens sur une population de quelque 400 000 habitants! N'étant pas considérés comme "citoyens" les femmes, les étrangers (déjà à l'époque...) et les esclaves. Enfin bon, 1/10ème de la population en charge des affaires publiques vaut toujours mieux qu'un petit cartel de despotes. Néanmoins, on peut facilement concevoir aujourd'hui les limites d'un tel régime dans le cadre de nos Etats modernes, peuplés de plusieurs dizaines de millions d’habitants, ou le degré de complexité du fonctionnement des diverses institutions politiques, judiciaires, et économiques, est tel que le niveau de connaissance requis pour prétendre administrer les affaires de l'Etat dépasse le seuil de celui du citoyen ordinaire, et nécessite par conséquent une certaine professionnalisation de la sphère politique (malgré les dérives que nous connaissons: énarchie. . . ), sans compter que notre organisation socio-économique ne laisse qu'une part mince de temps vraiment libre à la plupart d'entre nous, et ne permet donc plus aujourd'hui à n'importe qui de s'investir largement dans la politique (au sens étymologique, sans parler de militantisme). D'où l'intérêt apparent d'instaurer une démocratie de type représentative dans laquelle les citoyens choisissent librement parmi eux, par le vote, un nombre déterminé de représentants qui parlerons et décideront en leur nom. A ce titre, le terme de "mandat électif' devrait être sans équivoque ; mandat: pouvoir qu'une personne délègue à une autre pour agir en son nom ( cf. Petit Larousse ), et non carte blanche donné à quelqu'un pour qu'il fasse ce qu'il pense être le mieux pour moi! On voit donc bien également les écueils de la démocratie dite représentative. Ecueils d'abord inhérents au fondement même du système de représentation: démagogie, clientélisme, querelles de partis au détriment de l'intérêt général, dilution des revendications du peuple dans un formalisme juridicoadministratif qui les vide de toute capacité d'action réelle. . .Puis écueils liés à certaines dérives: corruption, népotisme, abus de pouvoir . . . Les records d'abstention battus à chaque nouvelle échéance électorale (mêmes les municipales, traditionnellement mobilisatrices, pâtissent désormais d'une faible participation) et dont les partis politiques ne semblent toujours pas avoir réellement pris la mesure, se contentant de les déplorer avec la solennité de circonstance qu'on leur connaît, constituent une démonstration flagrante de la crise actuelle du système représentatif. Car, si les citoyens se sentent de moins en moins concernés par le choix de leurs représentants et de leurs dirigeants, c'est qu'ils sont de plus en plus nombreux à percevoir qu'en définitive les modalités actuelles du fonctionnement démocratique ne leur permettent pas véritablement d'être acteurs de la vie publique, mais les condamnent à demeurer en retrait, tels de simples figurants auxquels, en outre, on accorde de moins en moins d'intérêt. Aussi, persuadés qu'ils sont de n'être essentiellement, pour les candidats, qu'une voix supplémentaire susceptible de leur permettre l'accession au fonctions qu'ils briguent, et non des citoyens dont ils devraient porter la parole et les aspirations au plus haut niveau de l'Etat, les abstentionnistes les privent de leur voix, à tous, comme pour leur signifier : Si nous ne sommes qu'un moyen pour vous, une simple formalité nécessaire pour vous propulser en haut de la pyramide du pouvoir, et bien tous les efforts, si louables soient-ils, que vous aurez déployés afin de nous convaincre seront systématiquement réduits à néant, puisque nous ne vous écouterons plus, nous ne ferons plus l'effort de vous comprendre pour vous élire, nous vous ignorerons, comme vous nous ignorez, en dehors des courtes périodes où vous avez besoin de nous… Or, même en cherchant des aménagements à la démocratie représentative telle qu'elle existe afin que celle-ci prenne davantage l'avis de la population en compte dans les délibérations, il me semble que c'est dans son essence même que pêche ce système. Aussi, me paraît-il plus souhaitable d'aménager une forme de démocratie directe, pour la rendre viable et efficace, plutôt que s'obstiner dans un principe de représentation, qui historiquement a démontré ses failles, et dont nous subissons un des avatars aujourd'hui sous la forme d'un abandon aux puissances financières - et même plus politiques! - du droit de disposer de vos vies. La notion de démocratie participative me semble participer dans ce sens à cette reconquête du pouvoir par les citoyens, induite dans le terme même de démo-cratie. Cette reconquête pose bien évidemment d'innombrables questions, tant le champ d'application est vaste : - Comment instaurer un véritable gouvernement du peuple sans tomber dans les travers d'un anarchisme sans issue, et d'un communisme d'Etat dont on sait vers quelles dérives il peut mener ? - Comment engager un nouveau processus de décentralisation du pouvoir, tout en maintenant une certaine cohésion autour d'un cadre législatif s'imposant à l'ensemble des citoyens ? - Quelles nouvelles articulations imaginer entre les diverses institutions municipales, départementales, régionales, nationales, européennes, voire mondiales ? - Quels modes de contrôle efficace de l'action politique: notre vieux Conseil Constitutionnel de neuf "sages "est-il adapté ou même suffisant ? - L'éducation nationale sous sa forme actuelle remplit-elle réellement son rôle de formation à la citoyenneté ? - La religion du capital, pour reprendre un titre de Paul Lafargue, et son corollaire, le dogme des vertus du travail, ne doivent-ils pas être remis en cause pour laisser place à un réenchantement du monde porté par un vrai désir de politique (au sens noble) ? F.T L LA AD DE EM MO OC CR RA AT TIIE E PPA AR RT TIIC CIIPPA AT TIIV VE E :: U UN NL LO ON NG GC CH HE EM MIIN NV VE ER RSS U UN NA AU UT TR RE EM MO ON ND DE E Force est de constater que, même si la démocratie est désormais une valeur partagée par la quasi totalité des régimes politiques, après des siècles de combats et de débats, la démocratie, les démocraties montrent leurs limites quant à la possibilité qu'ont les peuples de décider de leur destiné. Dans les démocraties modernes d'aujourd'hui, les décisions échappent de plus en plus aux gens du peuple pour se concentrer toujours davantage dans les mains de ceux qui, dans le même temps, concentrent les pouvoirs économiques. Les riches, toujours plus riches, dominent de plus en plus le monde et prennent les décisions qui façonnent la vie quotidienne de tous. La dictature mondiale n'est pas une lointaine et stupide hypothèse. Alors que le combat contre ces monstres inaccessibles paraît vain et quasiment impossible, il faut réfléchir à une stratégie de contournement. Par une pratique démocratique locale, exemplaire, même limitée aux décisions les plus élémentaires, il s'agit à la fois de confronter les idées, les propositions et de développer un contre pouvoir qui doit permettre une réelle résistance à la dictature des marchands planètaires. La pratique de la démocratie représentative montre désormais ses limites. Le vote délégataire aboutit à une professionnalisation de la fonction politique, mettant toujours de plus en plus haut les niveaux de connaissances jugées nécessaires pour prendre les bonnes décisions. Or, les problèmes des hommes ne sont compliqués que parce que les hommes les ont compliqués. L'économie, l'organisation de la société, l'établissement des rapports sociaux sont d'abord et avant tout des questions de bon sens et de volonté. Si les règles de fonctionnement de l'économie, du droit social, du droit des salariés est inaccessible aux gens pour qui ces règles sont censés être faites, c'est qu'elles sont mauvaises, inappropriées, c'est qu'elles n'ont pas été faites, justement, par ceux là même qui auraient dû les écrire. La complexité du monde économique et social prouve par lui-même qu'il est anti démocratique. On ne peut donc dissocier la volonté de reconquérir les espaces démocratiques de la volonté de changer les règles qui régissent ces espaces. Plutôt que d'élire un représentant qui, une fois élu, se trouve seul pour décider de son attitude face à un événement, il s'agit de prendre une décision collective à partir de l'énoncé d'un problème. La collectivité se réunit, donne son avis, échange et prend la décision. Cependant, la mise en pratique de la démocratie participative présente quelques pièges . Sans formation à la pratique démocratique, toute tentative est un leurre : formation ou information sur les domaines à traiter, formation sur les pratiques d'expression, formation sur les méthodes de prise de décision. La pratique elle-même suppose la mise en œuvre et le respect de quelques règles de fonctionnement qui permettent au débat d'être constructif . La formalisation du processus est indispensable à la reconnaissance par tous de l'état d'avancement des idées, du débat et donc du chemin parcouru vers la décision. La pratique suppose aussi une réflexion sur l'attitude de chacun face aux arguments des autres. Le débat n'a d'intérêt que s'il permet un enrichissement mutuel d'une part et l'émergence d'un avis construit sur la base de réflexions diverses d'autre part. Ainsi l'avis collectif n'est pas simplement la juxtaposition des avis individuels, mais bien un avis différent, résultat de la confrontation. La prise de décision, ensuite pose la question des règles qui la régissent : obtention du consensus ou décision majoritaire ? ou d’autres solutions (la majorité a-t-elle toujours raison ?). Enfin, sans contrôle démocratique de sa mise en œuvre, le processus de prise de décision démocratique n'a pas de sens. La collectivité qui a pris la décision doit être en mesure de vérifier son application et prendre alors de nouvelles décisions. De nombreux obstacles sont bien sûr à surmonter. Le nombre immense de sujets de préoccupation, les délais ou la périodicité des débats, la crainte de l'assemblée générale permanente risquent d'amener des restrictions en matière d'organisation et de pratique démocratique. Il faut savoir qu'il y a un prix à payer à cette pratique : une partie de l'activité de la collectivité doit y être consacrée. Il s'agit ici d'un autre mode de vie et peutêtre, par ces questions touchons-nous du doigt le fait que la démocratie participative est incompatible avec un monde ou la rentabilité financière est le seul moteur de la société. Changer le mode de prise de décision, c'est donc déjà commencer à changer le monde. Pour passer à l'acte, il faut trouver des lieux d'expérimentation, en faire des exemples et ainsi participer à une prise de conscience. Ces expériences doivent nous permettre de confronter les idées aux réalités, de chercher les méthodes qui permettent de motiver les "citoyens" à participer sans que ces méthodes soient en contradiction avec la liberté et…la démocratie (comment décider démocratiquement de mettre en place des structures démocratiques si les gens concernés n'y sont pas prêts spontanément ?) Avec d'autres partenaires, il est possible d'ouvrir ce grand chantier, les milieux professionnel, associatif et syndical, et les collectivités locales sont autant de lieux propices à l’expérimentation. Ceci étant, si la démocratie participative se limitait à des actions locales, il resterait à ne pas oublier le nécessaire combat pour enrayer la concentration toujours plus forte des pouvoirs entre les mains des marchands planétaires. Il ne faudrait pas qu'un pouvoir partagé localement devienne un os à ronger pour oublier une réalité bien plus oppressante, bien plus dangereuse. La difficulté de trouver les armes du combat contre la mondialisation libérale ne doit pas nous le faire abandonner pour autant. M.G