Ulrich Beck, Non à l’Europe allemande, vers un printemps européen ? Autrement, 2013,
156 pages
Ulrich Beck
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poursuit son étude de l’avenir de l’Union européenne. Il y a quelques années, ce
sociologue allemand, spécialiste de la société du risque, avec Edgar Grande, analysait avec
beaucoup de finesse l’avènement d’un empire européen dont il souhaitait qu’il évolue vers un
empire européen démocratique
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. Cette fois, il décrypte l’évolution actuelle de l’Union
européenne face à crise économique et financière. Son étude est encore remarquable et très
convaincante Elle est précédée d’une préface de Daniel Cohn Bendit qui en partage très
largement les analyses.
Pour l’auteur, l’Europe, du fait de la crise de l’Euro et surtout de la dette dans plusieurs Etats
membres de la zone Euro, serait devenue une Europe allemande. Cette évolution se serait faite
grâce au rôle déterminant de la puissance économique allemande utilisée très habilement par
la chancelière Angela Merkel. Cette dernière qualifiée de « Merkaviel » aurait habilement
jouée de la puissance allemande pour changer le rapport de force en Europe et permis de
passer d’une Allemagne européenne à une Europe allemande. La crise, y compris grâce à sa
tactique politique de l’hésitation devant les décisions difficiles, aurait permis à la chancelière
de devenir incontournable pour les Etats en difficulté de la zone Euro, mais aussi
indispensable à son propre pays. Sa récente réélection la confirme dans sa position politique
hégémonique, même si elle est oblie de concéder la création d’une coalition dont elle
gardera la maîtrise. L’auteur analyse avec une grande précision les piliers du merkiavélisme.
Ainsi, l’Europe construite en grande partie pour limiter définitivement la puissance guerrière
allemande par « un plus jamais ça » a permis à l’Allemagne de redevenir une puissance civile
démocratique de premier rang qui considère son modèle de développement économique
comme le seul possible pour les autres Etats européens. La crise lui permet d’imposer un
modèle d’austérité, de rigueur et d’économie, comme un impératif catégorique. Elle vise une
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Ulrich Beck est aussi membre du Groupe Spinelli
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Ulrich Beck, Edgar Grande, Pour un empire européen, Flammarion, 2007
forme de rééducation en matière de gestion des Etats en difficulté. Mais le paradoxe est que
cette exigence, en échange d’aide, se traduit par des transformations si excessives des modes
de gestion et de fonctionnement, notamment des Etats européens du Sud, Grèce, Portugal
Espagne ou Italie, qu’elle entraîne un rejet de l’Europe de la seule rigueur, mais aussi de
l’Allemagne.
Ainsi pour Ulrich Beck, cette Europe allemande est une impasse, pour l’Europe, mais aussi
pour l’Allemagne. Il faut inventer un modèle démocratique d’Europe justement pour prendre
la mesure des nouveaux enjeux qui ne se sument pas à la rigueur et à l’austérité. Il prône un
Non à l’Europe allemande. Il appelle de ses vœux l’émergence d’un nouveau contrat social
européen pour le XXIe siècle par l’avènement d’une démocratie transnationale à l’échelle du
continent européen. Cette démocratie européenne doit être fondée sur la solidarité réelle et la
compréhension réciproque entre les Etats, mais aussi entre les peuples. L’Europe ne sera, pour
lui démocratique que si l’européanisation verticale créée par les institutions européennes se
double d’une européanisation horizontale créée par les citoyens européens. Cela passe, par
exemple par une campagne d’alphabétisation interculturelle à l’échelle de l’Europe. La
démocratie européenne doit aussi croître par le bas.
Ce petit livre est très stimulant par son réalisme, mais aussi par sa quête d’un printemps
européen pour le XXIe siècle.
Henri Oberdorff
Professeur des Universités
Président de l’UPEG
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