L'endométriose : une pathologie abdomino pelvienne N Moumen, M Mahi, S Akjouj, S Semlali, T Amil, S Chaouir, A Hanine Service de radiologie.Hopital Mohammed V. Rabat Introduction • L’endométriose est définie par la présence du tissu endométrial ectopique en dehors de la cavité utérine à l’exception de myomètre ou le tissu ectopique prend le nom d’adénomyose. • L'endométriose est une pathologie dont le diagnostic clinique est souvent difficile et retardé. • Même si le diagnostic formel est histologique, il est possible aujourd'hui de détecter des lésions d'endométriose par l'imagerie. • L'amélioration des techniques d'imagerie, comme l'échographie et l'IRM, permet le plus souvent de préciser les localisations et l'extension des lésions d'endométriose de façon moins invasive que la cœlioscopie. • Les médecins cliniciens doivent savoir quels examens d'imagerie préscrire, afin d'optimiser le diagnostic. Principaux sites d’implants endométriosiques • En pratique, beaucoup d'organes peuvent être atteints mais il faut distinguer les localisations préférentielles : • l'endométriose externe pelvienne intrapéritonéale ((ovarienne,, péritonéale p ou tubaire)) ; • l'endométriose externe pelvienne sous-péritonéale (endométriose profonde) : cloison rectovaginale, culde-sac de Douglas, ligaments utéro-sacrés, cul-de-sac vésico-utérin ou atteinte digestive ; • l'atteinte utérine qui correspond à l'adénomyose, auparavant décrite comme endométriose «interne». Pathogénie • Reste controversée, deux principales théories: • Théorie métastatique: menstruation rétrograde, implantation post-opératoire, dissémination hématogène ou lymphatique • Théorie metaplasique: implique la stimulation des résidus mûlleriens de situation ectopique Aspects cliniques • Douleurs pelviennes et infertilité constituent les symptômes majeurs de l’endométriose • Les résultats de l’examen clinique sont variables selon la localisation de l’endométriose • Signes non spécifiques: masse annexielle, utérus et ovaires non mobilisables, infiltration de cul de sac de douglas et de la cloison rectovaginale Cœlioscopie • Un diagnostic définitif de l’endométriose et le bilan d’extension sont classiquement effectués par la cœlioscopie au mieux associée à une analyse histologique des zones pathologiques • La cœlioscopie permet également la résection des lésions observées sans avoir recours à la laparotomie • Limites: nécessité d’ une anesthésie générale ignorer certaines lésions surtout sous péritonéales, les implants ovariens, lésions masquées par les adhérences Moyens d’imagerie • Les limites de la clinique et de la cœlioscopie imposent la réalisation des examens complémentaires pour effectuer le diagnostic ainsi qu’une cartographie précise des lésions d’endométriose : • L’échographie suspubienne et surtout endovaginale : l examen de première intension parfaitement adaptée pour le l’examen diagnostic des localisations ovariennes et suggérer des localisation profondes antérieures • L’IRM est considérée comme l’examen de référence pour évaluer l’endométriose abdomino-pelvienne, elle permet d’effectuer un bilan complet des atteintes ovariennes et profondes antérieures et postérieures • L’hystérosalpingographie est le seul examen pour détecter les lésions endométriosiques tubaires L'atteinte ovarienne • Localisation la plus fréquente de l'endométriose. • Présence des endométriomes ovariens bilatéraux dans 42% des cas. • L'échographie pelvienne par voie sus-pubienne complétée par voie endovaginale : * Dans sa forme typique typique, ll'endométriome endométriome = formation ovalaire de contours réguliers à contenu finement échogène et homogène, à la différence des kystes hémorragiques non endométriosiques où les échos sont plus grossiers. Il n'y a pas de signal Doppler au sein de l'endométriome. * Formes atypiques : kyste à paroi épaisse, contenant des zones hyperéchogènes déclives comparables aux kystes dermoïdes Ou bien kyste à contenu très peu échogène. L'atteinte ovarienne • En pratique, l'échographie par voie vaginale est suffisante pour poser le diagnostic de kyste endométriosique • En cas de doute, l'IRM: * Excellent contraste :différencier facilement les kystes dermoïdes des endométriomes. * Les endométriomes = formations hyperintenses en T1 et en T2. L'hypersignal persiste sur les séquences réalisées après saturation du signal de la graisse car lié au contenu hématique * Dans les kystes dermoïdes, le signal élevé est lié à la présence de graisse. Echographie: formation homogène contenant un fin piqueté échogène= Endometriome IRM axiale en SPT1: hypersignal droit ne s’effaçant pas après Saturation de graisse = endométriome ovarien IRM axialeSPT2 : kystes endometriaux ovariens(KEO) bilatéraux IRM axialeSPT1 : KEO bilatéraux, les ovaires attirés dans le douglas étirant le rectosigmoide L'atteinte tubaire • Cette atteinte est asymptomatique et le plus souvent découverte au cours d'un bilan de stérilité ou après une grossesse extra-utérine. • L'hystérographie est le seul examen d'imagerie permettant de préciser l'existence d'une atteinte tubaire proximale: l * Sténose tubaire complète ou incomplète *Irrégularités tubaires, des diverticules ou polypes tubaires. * Des signes indirects : liés à des adhérences pelviennes responsables d'un étirement du trajet normal de la trompe. • Le diagnostic est affirmé par la cœlioscopie L'adénomyose • Anatomiquement: Présence de glandes endométriales au sein du myomètre. On distingue: * la forme focale, qui correspond à une atteinte limitée ; * l'atteinte diffuse, la plus fréquente, caractérisée par la présence de multiples cryptes glandulaires kystiques infiltrant le myomètre. • Cliniquement: Méno-métrorragies plus ou moins douloureuses. L'adénomyose L'examen de première intention est l'échographie: • Utérus augmenté de taille, parfois globuleux avec un myomètre d‘échostructure hétérogène qui peut prendre un aspect tacheté. • Parfois, les cryptes glandulaires sont visualisées sous la f forme d de petites tit iimages liliquidiennes, idi confluentes, fl t à lla jonction entre l'endomètre et le myomètre (fig. 3). • L'atteinte postérieure du myomètre est la plus fréquente. • Les lésions d‘adénomyose, dans plus de 50% des cas, sont méconnues en échographie. • L'échographie peut être une bonne technique de dépistage de l‘adénomyose, à condition d'y penser et de la rechercher. Ecographie endovaginale: 2 formations anéchogènes sous endométriales post+ Plage hyperéchogène du myomètre antérieur Echo endovaginale : volumineuse masse hétérogène accolée à la face ant de l’utérus Echo sus pubienne: volumineuse masse infiltrant la face post de la vessie L'adénomyose L'IRM: Technique fiable dans le diagnostic de l'adénomyose. L'adénomyose en IRM se traduit par : * Augmentation globale du volume utérin ; * Epaississement diffus ou localisé de la zone jonctionnelle, située it é à l'interface l'i t f entre t l'l'endomètre d èt ett lle myomètre, èt d de plus l de 5 mm ; * Des lésions nodulaires hyperintenses en T1 et en T2 à l'interface endomètre-myomètre, qui correspondent aux cryptes glandulaires endométriosiques à contenu hématique, conférant un aspect moucheté au myomètre. • Des études comparatives récentes confirment que l'IRM est plus sensible (88%) et plus spécifique (90%) que l'échographie pour caractériser l'adénomyose. IRM sagittale médiane SPT2: corps utérin siége d’adenomyose floride avec endométriose de cul de sac vesico-uterin etendue à la vessie IRM coronale SPT2: Images liquidiennes à l’interface endomètre-myomètre L'atteinte externe sous-péritonéale (endométriose profonde) • Invasion du péritoine par les glandes endométriales accompagnée d'une fibrose sur une profondeur de plus de 5 mm. • Atteinte du Douglas, des ligaments utéro-sacrés et de la cloison recto-vaginale recto vaginale • L’atteinte du cul-de-sac de Douglas est associée aux autres localisations de l'endométriose dans 61% des cas, et celle des ligaments utéro-sacrés dans 35% des cas. • L'atteinte de l'étage postérieur du pelvis se manifeste en général par des douleurs pelviennes diffuses, à recrudescence menstruelle, à irradiation postérieure, parfois accompagnées de signes digestifs ou de douleurs à la défécation. L'atteinte externe sous-péritonéale (endométriose profonde) • L'échographie n'a que peu d'intérêt dans ce cas, si ce n'est pour rechercher une autre localisation de l'endométriose. • L'IRM: • Examen intéressant pour le diagnostic de ces lésions souspéritonéales grâce à la multiplicité des plans de coupes et excellente ll t résolution é l ti ti tissulaire l i • L'analyse des clichés est difficile : lésions sont le plus souvent anciennes et fibreuses, car longtemps méconnues. • Le signal des lésions est donc peu intense en T1 ou en T2. • L'atteinte des ligaments utérosacrés peut être révélée indirectement par une rétroversion utérine fixée. • La lésion peut être directement visible par un épaississement nodulaire de l'origine du ligament utéro-sacré, infiltrant également la graisse adjacente. IRM axiale SPT2: lésion endometriosique du torus utérin et des ligaments utérosacrés IRM sagittale SPT2: endometriome ovarien surmontant un nodule localisé de l’utérosacré IRM sagittale T2 TSE: endométriose touche ovaire+ utérus+ rectum IRM T2 TSE: oblitération du cul de sac de douglas et endométriose recto-sigmoidienne L'atteinte externe sous-péritonéale (endométriose profonde) • L'infiltration du cul-de-sac de Douglas peut se manifester par un comblement tissulaire en arrière du col, jusqu'au rectum. Cette lésion peut aussi être responsable d'une rétroversion utérine • Il faut pouvoir préciser le degré d'infiltration de la paroi rectale,, qui q déterminera ensuite le type yp de traitement chirurgical. • Lorsque la musculeuse rectale est envahie, seule la résection rectale peut empêcher la survenue de récidives. • Le degré d'infiltration peut être précisé par l'IRM, en utilisant parfois une antenne endocavitaire, afin d'améliorer la résolution de l'image. • En cas de doute ou d'incertitude, l'échoendoscopie rectale peut également permettre de préciser le diagnostic et l'extension des lésions. Atteinte urinaire • Localisation rare de l'endométriose profonde (1%). • Souvent : Cystites et cystalgies à recrudescence menstruelle, exceptionnellement une hématurie. • Les lésions se développent dans le cul-de-sac vésico-utérin et atteignent ensuite la paroi vésicale de dehors en dedans dedans. L'échographie : • l'existence d'un nodule tissulaire, échogène, de petite taille le plus souvent, développé à la face postérieure de la vessie ou dans le cul-de-sac vésico-utérin. • Lorsque la lésion est de petite taille, l'échographie peut être normale. Echographie: Nodule endométriosique dans le cul de sac vésico-uterin Echographie: Masse échogène de la face postérieure de la vessie Masse entre la face antérieure de l’utérus et la vessie renfermant des spots hyperintenses IRM sagittale SPT2 IRM sagittale SPT1 TSE + injection gadolinium IRM axiale SPT1 Atteinte urinaire Diagnostic différentiel : • avec une tumeur vésicale est facile ; le nodule est irrégulier et le raccordement à la paroi vésicale se fait à angle obtus ; • il est parfois plus difficile de différencier un myome isthmique antérieur. L IRM: L'IRM: • Excellent examen pour le dépistage et le bilan des lésions d'endométriose vésicale: • La lésion se traduit par un nodule hétérogène, comportant de petits foyers hyperintenses en T1 et en T2, dans le cul-de-sac vésico-utérin ou la profondeur de la paroi vésicale. • L'IRM permet en outre de rechercher des lésions associées ovariennes et surtout postérieures pelviennes, dans le cadre d'un bilan préchirurgical. Cas particulier : l'endométriose sur cicatrice • L'endométriose sur cicatrice n'est pas exceptionnelle. • Toute chirurgie pelvienne peut être le vecteur d'endométriose sur cicatrice. • Le diagnostic en est difficile, et il faut y penser lorsqu'une lorsqu une patiente présentant un antécédent de chirurgie pelvienne, décrit des douleurs pelviennes à recrudescence menstruelle, alors que l'échographie est normale. • L'IRM peut détecter des foyers hyperintenses en T1 et en T2, au niveau de la cicatrice utérine ou de la cicatrice abdominale. IRM axiale SPT2:Nodule d’endométriose de la paroi antérieure sur cicatrice de laparotomie hétérogène avec zones en hypersignal d’hémorragie ancienne Conclusion • Le diagnostic d'endométriose ovarienne est aisé et l'échographie est généralement suffisante au diagnostic. • L'IRM est intéressante pour les formes douteuses, ou encore pour rechercher des lésions postérieures pelviennes associées. • Le diagnostic d'adénomyose d adénomyose par ll'échographie échographie est difficile ; l'IRM est alors le meilleur examen diagnostique non invasif. • Le diagnostic des atteintes postérieures du pelvis est impossible à préciser par l'échographie ; l'IRM, complétée éventuellement par une échoendoscopie rectale, doit alors être proposée. • Enfin, l'IRM est le meilleur examen d'imagerie dans le cadre d'un bilan complet, préchirurgical ou préthérapeutique, de l'endométriose profonde. Bibliographie 1- Guerriero S, Ajossa S, Mais V, Benedetto Melis G. Endosonography and ovarian endometriosis. J Clin Ultrasound 1996 ; 24 : 220. 2- Ardaens Y, Decocq J. Pathologie du myomètre et infécondité. In : imagerie et infertilité du couple. Paris : Editions Masson, collection d’imagerie radiologique, 1998. 3-Reinhold C, Tafazoli F, Mehio A, et al. Uterine adenomyosis : Endovaginal US and MR imaging features with histopathologic correlation. Radiographics 1999 ; 19 : S147-60. 4- Ascher SM, Arnold LL, Patt RH, et al. Adenomyosis, prospective comparison of MR imaging and ultrasound sonography. Radiology 1994 ; 190 : 803. 5- Tran DK, Leroy JL, Dufrostel LT, Nguyen BMN. L’endométriose externe. EMC gynécologie obstétrique, 1996. 6 Kinkel 6Ki k l K, K Chapron Ch C Balleyguier C, B ll i C, C ett al.l Magnetic M ti resonance imaging i i characteristics h t i ti off deep d endometriosis. d ti i Hum Reprod 1999 ; 14 : 1080-6. 7- Aldridge KW, Burns JR, Singh B. Vesical endometriosis : A review and 2 cases report. J Urol 1985 ; 134 : 53941. 8- Sircus TE, Samt GR, Ucci AA. Bladder detrusor endometriosis mimicking interstitial cystitis. Urology 1988 ; 32 : 339-42. 9- Vercellini P, Meschia M, De Gorgi O, et al. Bladder detrusor endometriosis : Clinical and pathogenetic implications. J Urol 1996 ; 155 : 84-6. 10- Chapron C, Dubuisson JB. Laparoscopic management of bladder endometriosis. Acta Obstet Gynecol Scand 1999 ; 78 : 887-90. 11- Dell’Acqua S, Colosi E, Angiolillo MP, Rivela G, Bovenga S, Natale A. Endometriosis of the abdominal wall after ceasaran section. Minerva gynicologica 1993 ; 45 : 327-31.