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LA SOCIÉTÉ PROVANCHER D’HISTOIRE NATURELLE DU CANADA
LA FAUNE AVIAIRE
0
2
4
8
10
12
Pré-industriel Industriel Naturel
Nombre moyen d’espèces
6
A
B
C
0
20
40
60
80
100
Pré-industriel Industriel Naturel
mixtes
feuillus
résineux
Peuplements
Proportion des peuplements (%)
B)
A)
Figure 1.
A. Nombre moyen d’espèces d’oiseaux associées aux forêts matures dans
les trois paysages de la forêt boréale mixte des cantons d’Hébécourt et de
Roquemaure en Abitibi. Les lettres différentes indiquent une différence
significative (P < 0,05) entre les paysages.
A. Proportions des peuplements qui sont dominés par des essences
feuillues, mixtes et résineuses dans les trois paysages de la forêt boréale
mixte des cantons d’Hébécourt et de Roquemaure en Abitibi.
forêts surannées et anciennes. Enfin, les pratiques forestières
actuelles laissent très peu d’arbres morts après coupe (Spies
et al., 1994). La matière ligneuse morte ou sénescente repré-
sente un attribut-clé d’habitat pour le maintien de la diversité
biologique des écosystèmes boréaux (Harmon et al., 1986 ;
Bull et al., 1997). La diminution considérable de la disponi-
bilité en matière ligneuse morte est présentement considérée
comme l’une des principales causes de perte de diversité
biologique en forêt fenno-scandinave. Dans la liste des espè-
ces menacées en Suède et en Finlande, le quart de celles-ci
sont associées aux arbres morts (Virkalla et Toivonen, 1999).
Parmi ces espèces, le pic tridactyle est présentement classé
vulnérable.
Les effets sur l’avifaune forestière
Au Québec, les forêts boréales mixtes sont aménagées
depuis plus longtemps que les forêts résineuses d’épinettes
noires. Les effets de la coupe sur la régénération du couvert
forestier ainsi que les courtes révolutions forestières (Spies et
al., 1994 ; Gauthier et al., 1996) ont provoqué
des changements à grande échelle favorisant
la conversion du couvert forestier mature
de mixte à feuillu. Drapeau et al., (2000)
ont montré que les communautés d’oiseaux
répondent fortement à ces changements
régionaux du couvert forestier. Par rapport
aux mosaïques forestières issues de perturba-
tions naturelles, les forêts matures aménagées
comptaient un moins grand nombre d’espè-
ces d’oiseaux (figure 1a). La diminution subs-
tantielle de forêts mixtes dans les paysages
aménagés a contribué à faire chuter les effec-
tifs de nombreuses espèces associées aux coni-
fères (figure 1b). Ce fut le cas de la paruline à
gorge orangée, du roitelet à couronne dorée,
du roitelet à couronne rubis et de la sittelle
à poitrine rousse. À l’opposé, certaines espè-
ces comme le moucherolle tchébec et la grive
fauve ont été favorisées par cet accroissement
régional du couvert forestier en peuplements
feuillus. À l’échelle des paysages, ces transfor-
mations de la matrice forestière peuvent donc
avoir des conséquences importantes sur l’in-
tégrité écologique de l’avifaune.
En zone de pessière à mousses, la com-
position du couvert forestier est plus simple
et risque moins d’être affectée par l’aména-
gement forestier. Les enjeux liés au rajeunis-
sement des mosaïques forestières renvoient
plutôt à une perte de diversité structurale des
mosaïques forestières (Bergeron et al., 1999a).
La diversité structurale des peuplements issus
de perturbations naturelles a été documentée
dans les forêts d’épinette noire de l’Abitibi et
des basses-terres de la baie James au moyen
d’une vaste étude sur la reconstitution historique des feux en
Abitibi (Bergeron et al., 1999b). Au cours des trois dernières
années, nous avons mesuré dans ces forêts la répartition et
l’abondance de divers indicateurs de diversité biologique,
dont les oiseaux (Drapeau et al., 1999). Cette étude couvrait
un gradient de paysages forestiers sous régime naturel de
perturbations s’étendant des brûlis récents (moins de 5 ans)
aux forêts anciennes (plus de 200 ans). Nos travaux ont
montré que la composition des assemblages d’oiseaux était
étroitement associée aux changements de structure (hauteur
et recouvrement du couvert forestier) des forêts. Ainsi, les
habitats en régénération et les jeunes forêts comportaient un
cortège d’espèces associées aux milieux ouverts telles que la
paruline masquée, la paruline à calotte noire, le moucherolle
des aulnes, le bruant de Lincoln et l’omniprésent bruant à
gorge blanche.
Par ailleurs, la maturation du couvert forestier et
la fermeture des forêts ont vu les effectifs d’espèces typi-
quement propres aux forêts fermées, comme la grive à dos