K. Stucki
S. Harbarth
M. Nendaz
introduction
Les entérocoques sont des bactéries Gram positif qui se pré-
sentent sous forme de diplocoques ou de coques en chaînet-
tes. Ils sont anaérobes facultatifs, immobiles et dépourvus de
capsule. Cette famille englobe une trentaine d’espèces qui ont
longtemps été classées dans le genre des streptocoques au
vu de leurs similitudes avec les streptocoques du groupe D. Les deux principales
espèces importantes en clinique sont l’
enterococcus faecalis
et l’
enterococcus faecium
, le
premier se retrouvant plus fréquemment que le second (90% vs 10% environ).
Ces germes sont peu exigeants et peuvent survivre dans des conditions hos-
tiles, tels que des milieux très alcalins ou riches en sel (par exemple, sels biliai-
res), ou des températures extrêmes (10 °C à 60 °C). Ils peuvent également survi vre
longtemps sur toutes sortes de surfaces. Par contre, ils ne sont pas très virulents
de nature par rapport à d’autres bactéries Gram positif puisque la dose létale,
c’est-à-dire la quantité de bactéries qui tue 50% des animaux, est nettement plus
élevée. Ils font tous deux partie de la flore commensale de nos intestins et se
comportent comme des germes opportunistes. Les infections les plus souvent
causées par ces germes sont des infections urinaires, des péritonites, des abcès
intra-abdominaux, des bactériémies nosocomiales ou des endocardites. La porte
d’entrée la plus souvent retrouvée est digestive mais les cathéters peuvent éga-
lement représenter une source d’infection en milieu médical.1,2 Leur nature leur
confère un certain nombre de capacités de résistance et de tolérance natives à
différentes classes d’antibiotiques, ce qui conditionne la prise en charge théra-
peutique (tableau 1).1,3 A l’aide d’un cas clinique rencontré en pratique hospita-
lière, nous allons explorer divers scénarios possibles.
cas clinique
Mme R., 45 ans, est hospitalisée aux soins intensifs de médecine en raison
d’une décompensation diabétique acido-cétosique sévère qui s’est développée
Enterococcal infections : from simple
to most complex…
Enterococci are microorganisms with a remar-
kable ability to adapt to their environment.
Two species have a significant clinical impli-
cation, Enterococcus faecalis and Enterococcus
faecium. The risk factors for colonization and
infection must be recognized, including prior
treatment with antibiotics such as cephalo-
sporins or quinolones. Because of their native
resistance to several classes of antibiotics and
the increase of acquired resistance to penicil-
lins, the initial empiric treatment of a severe
infection in a patient at risk of enterococcal
infection often includes a glycopeptide. A res-
triction in the empirical use of cephalosporins
or quinolones and a targeted antibiotic the-
rapy following receipt of the antibiogram are
essential to prevent the emergence of ente-
rococcal strains and especially vancomycin-
resistant enterococci.
Rev Med Suisse 2014 ; 10 : 1918-23
Les entérocoques sont des micro-organismes qui ont une re-
marquable capacité à s’adapter à leur environnement. Deux
espèces ont une implication clinique notable, l’
enterococcus
faecalis
et l’
enterococcus faecium
. Les facteurs de risque de
colonisation et d’infection doivent être reconnus, notamment
un traitement préalable par des antibiotiques tels que les cé-
phalosporines ou les quinolones. En raison de leur résistance
naturelle à plusieurs classes d’antibiotiques et de l’augmenta-
tion des résistances acquises aux pénicillines, un traitement ini-
tial empirique d’une infection sévère chez un patient avec fac-
teurs de risque inclura souvent un glycopeptide. Une restriction
dans l’utilisation empirique de céphalosporines ou de quino-
lones et une antibiothérapie ciblée selon l’antibiogram me sont
des mesures indispensables pour prévenir l’apparition de sou-
ches d’entérocoques résistantes, en particulier résistant à la
vancomycine.
Infections à entérocoques :
du plus simple au plus complexe…
le point sur…
1918 Revue Médicale Suisse
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15 octobre 2014
Dr Katia Stucki
Pr Mathieu Nendaz
Service de médecine interne générale
Département de médecine interne,
réhabilitation et gériatrie
Pr Stephan Harbarth
Service des maladies infectieuses
Département des spécialités
de médecine
HUG, 1211 Genève 14
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dans le contexte d’une infection pulmonaire traitée par
céfuroxime, 2 x 500 mg par jour depuis trois jours. Elle
est connue pour un diabète de type 1 évoluant depuis
30 ans.
Après stabilisation de son état, elle est transférée cinq
jours plus tard dans un service de médecine interne.
Vingt-quatre heures après son transfert, elle présente
un état fébrile à 39°C associé à un épisode de frissons
solennels. Il n’y a pas de foyer infectieux clair mais il
existe un souffle systolique au foyer mitral non décrit
auparavant. Après hémocultures, culture d’urine, abla-
tion et culture des cathéters, un traitement empirique de
pipéracilline-tazobactam est débuté, dans le contexte
d’une probable infection nosocomiale. Deux paires d’hé-
mocultures effectuées reviennent positives pour un en-
térocoque. Une échocardiographie est demandée et le
traitement antibiotique est ajusté en fonction des scé-
narios ci-après.
premier scénario : il sagit dun entero-
coccus faecalis «sensible»
Les entérocoques se caractérisent par une résistance
native aux céphalosporines médiée par une protéine de
liaison à la pénicilline (PLP). La concentration minimale in-
hibitrice (CMI) des pénicillines et carbapénèmes est 10 à
100 fois plus élevée pour les entérocoques que pour les
autres streptocoques en raison d’une plus faible affinité de
la PLP pour ces bêtalactamines. De plus, les entérocoques
sont considérés comme tolérants aux bêtalactamines, car
ces germes ne sont tués que par des concentrations mini-
males bactéricides (CMB) d’antibiotiques nettement supé-
rieures à la CMI (CMB/CMI L 32). Ainsi, alors qu’ils sont
considérés comme sensibles aux pénicillines ou carbapé-
nèmes sur l’antibiogramme (tableau 2), cela ne signifie pas
que ces antibiotiques seront bactéricides. Si un effet bac-
téricide est nécessaire, comme dans un cas d’infection sé-
vère, il est dès lors recommandé d’associer un aminoglyco-
side à une pénicilline afin de bénéficier d’un effet syner-
gique.3-5
Les aminoglycosides ne sont pas efficaces contre les en-
térocoques aux doses utilisées contre d’autres germes en
raison d’une moins grande perméabilité de la paroi, mais
leur utilisation en association avec un agent bloquant la
synthèse des peptidoglycanes (une bêtalactamine ou un
glycopeptide) permet une meilleure pénétration des ami-
noglycosides et restaure leur pleine efficacité. Les deux
aminoglycosides qui sont recommandés pour exercer cet
effet synergique sont la gentamycine et, plus rarement, la
streptomycine. Ces dernières années, de plus en plus de
souches d’entérocoques ayant acquis un haut niveau de
résistance aux aminoglycosides ont été observées. D’autre
part, leurs effets secondaires, notamment leurs néphro-
toxicité et ototoxicité peuvent poser des difficultés d’utili-
sation chez des patients fragilisés et âgés.3-5
Pour en revenir à notre cas, vu le résultat microbiolo-
gique et la possibilité d’une endocardite, les médecins en
charge ont réduit le spectre de l’antibiothérapie et prescrit
de l’amoxicilline intraveineuse (6 × 2 à 4 × 2 g/j) associée à
de la gentamicine intraveineuse (3 mg/kg/j répartis en trois
doses égales). L’amoxicilline est en effet la bêtalactamine
qui a la CMI la plus basse. Le choix de la pénicilline intra-
veineuse 6 × 2 ou 4 × 3 mio d’UI/j aurait également été pos-
sible.
La patiente décrite dans notre situation clinique avait
reçu de la céfuroxime pour traiter une infection pulmonaire.
Un traitement antibiotique préalable est un facteur de ris-
que établi de développer une infection à entérocoques et
particulièrement s’il s’agit d’une céphalosporine de troi-
sième génération telle la ceftriaxone ou d’une quinolone
(par exemple, la ciprofloxacine) contre lesquelles les enté-
rocoques sont naturellement résistants. De tels traitements
favorisent une sélection positive et une prolifération de ces
entérocoques. En milieu hospitalier, les céphalosporines et
quinolones sont fréquemment utilisées comme traitement
empirique, surtout en chirurgie digestive et urologi que.6
Cependant, chez des personnes à risque de développer
une infection à entérocoques, telle que décrite ci-après
(tableau 3), il conviendrait d’éviter ces antibiotiques en
particulier et d’utiliser une antibiothérapie d’emblée effi-
cace contre les entérocoques avant que les résultats des
hémocultures ne soient disponibles.7,8 Un avis spécialisé
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Enterococcus Enterococcus
faecalis faecium
Oxacilline, céphalosporines R R
Aminosides Résistance de bas Résistance de bas
niveau : niveau pour genta-
CMI = 4-256 mg/l mycine ; de haut
(donc effet syner- niveau pour les
gique possible) autres aminosides
Clindamycine R R
Cotrimoxazole R R
Fluoroquinolones R* R
Pénicilline G, A ; amoxicilline S R
Glycopeptides (par exemple S S
vancomycine, téicoplanine)
Linézolide S S
Daptomycine S S
Tigécycline S S
CMI : concentration minimale inhibitrice ; R : résistance native ; S : sensi-
bilité à l’antibiotique testé.
* exception pour la moxifloxacine et la lévofloxacine qui auraient une
activité acceptable pour les infections urinaires à E. faecalis.
Tableau 1. Sensibilité et résistance des entéro-
coques à certains antibiotiques
2011 2012 2013
Pénicilline 3910 cas 3416 cas 3605 cas
(95,5%) (94,4%) (95,7%)
Amoxicilline 6500 cas 8213 cas 8885 cas
(98,5%) (99,1%) (99,2%)
Tableau 2. Taux de sensibilité de l’Enterococcus
faecalis à la pénicilline et à l’amoxicilline de 2011
à 2013 en Suisse
Selon la base de données ANRESIS (www.anresis.ch).
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d’infectiologie peut être utile dans cette situation.
En ce qui concerne les infections urinaires simples, une
étude récente a démontré que des cultures réalisées sur
des urines récoltées à mi-jet revenant positives pour un
enté rocoque ne reflètent que très rarement la présence
d’une infection urinaire à ce germe. Il s’agit en grande majo-
rité de cas d’une contamination et cela même si la concen-
tration retrouvée est supérieure à 105 CFU/ml, une concen-
tration qui signe l’infection pour d’autres germes, notamment
E. coli
. Ces cas ne devraient donc pas être traités en l’ab-
sence de signes de sévérité.9
deuxième scénario : il sagit dun entero-
coccus faecalis résistant aux pénicillines
En Suisse, selon le système de surveillance national
ANRESIS (www.anresis.ch), le taux d’
enterococcus faecalis
-
sistant à la pénicilline s’élève à environ 5% au cours des
trois dernières années (tableau 2). Aux Hôpitaux universi-
taires de Genève (HUG), ce taux était d’environ 9% en 2013.
Ce taux de résistances est en progression ces dernières an-
nées, ce qui pose un problème considérable de santé hos-
pitalière au vu du nombre important d’infections causées
par les entérocoques en milieu hospitalier (par exemple,
aux HUG en 2013 : 1088 cultures d’échantillons cliniques ou
dépistages positifs à
enterococcus faecalis
et 344 à
enterococcus
faecium
).
Les mécanismes de ces résistances sont de deux types,
soit l’acquisition d’une bêtalactamase, soit une mutation de
la PLP. Cette dernière est une enzyme (transpeptidase) de
la membrane cytoplasmique nécessaire à la formation des
peptidoglycans, éléments principaux de la paroi bacté-
rienne. L’antibioti que se fixe sur cette protéine et l’inhibe,
bloquant ainsi la formation de la paroi bactérienne.4 En cas
de mutation de cette protéine, les pénicillines ne pourront
ainsi pas agir correctement.
Les résistances peuvent se transmettre entre bactéries,
et ce de différentes manières (figure 1). La
transformation
consiste en l’ingestion par une bactérie dite compétente
d’un ADN étranger depuis son environnement qui peut,
par transfert passif, lui prodiguer de nouveaux caractères
génétiques stables et transmissibles. La
transduction
est un
transfert d’ADN bactérien d’une bactérie à l’autre par l’in-
termédiaire de bactériophages, sortes de virus bactériens.
Enfin, la
conjugaison
est un transfert actif d’ADN entre deux
bactéries sous forme chromosomique ou extra-chromoso-
mique (par exemple, plasmides ou transposons). Ce phé-
nomène est favorisé par les changements dans la flore bac-
térienne du système digestif qui permet aux entérocoques
de coloniser le tractus gastro-intestinal humain durant de
longues périodes et augmente ainsi les chances de trans-
mission. Ceci explique notamment que la trop grande uti-
lisation d’antibiotiques et particulièrement de céphalo-
sporines en est un facteur de risque majeur d’infection à
entérocoques.4,5,8
En cas de résistance aux bêtalactamines, un traitement
par un antibiotique de la classe des glycopeptides, par
exemple la vancomycine (1 g 2 x/j IV si la fonction rénale
est conservée), est indiqué. Ce traitement doit également
être associé à un aminoglycoside s’il s’agit d’une infection
sévère, comme dans le cas de notre patiente.
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Facteurs de risque Facteurs de risque
de colonisation d’infection
Long séjour hospitalier Insuffisance rénale, hémodialyse
Contact avec patient porteur Immunosuppression
Traitement antibiotique préalable Néoplasie
(surtout céphalosporines) Séjour en milieu de soins
intensifs
Intervention chirurgicale
Colonisation préalable
Traitement antibiotique préalable
Tableau 3. Facteurs de risque de colonisation ou
d’infection par un entérocoque
Figure 1. Illustration simplifiée de certains méca-
nismes de transmission de résistance bactérienne
Bactérie
receveuse
Fragments
d’ADN
de cellules
donneuses
Recombinaison entre ADN
bactérie donneuse et ADN
bactérie receveuse,
transformation génétique
ADN
chromosomique
Chromosome
bactérien
Recombinaison
possible
Réplication et
transfert du
plasmide dans la
bactérie receveuse
Pili sexuels
Plasmide
ADN
chromosomique
A
Phage
Phage infecte la bactérie donneuse
Une recombinaison peut avoir lieu
Destruction ADN bactérien, réplication de l’ADN
du phage et production de ses protéines
La bactérie receveuse est infectée
par un phage porteur d’un fragment d’ADN
de la bactérie donneuse
Insertion d’ADN bactérien dans les nouveaux
phages qui sont libérés par la bactérie
A
A
B
B
C
C
1
1
1
2
2
2
Transformation
Transduction
Conjugaison
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troisième scénario : il sagit dun
enterococcus faecium résistant
à la vancomycine (vre)
L’
enterococcus faecium
est naturellement plus résistant aux
bêtalactamines et aux aminoglycosides que l’
enterococcus
faecalis
(tableau 1).1,3 Ces antibiotiques ne font donc pas
partie du traitement empirique recommandé pour ces ger-
mes, qui doit inclure ainsi d’emblée le recours à un glyco-
peptide comme la vancomycine.
Cependant, depuis quelques années, des souches multi-
résistantes d’
enterococcus faecium
se sont développées, qui
ont acquis de nouveaux facteurs de résistance, telle la ré-
sistance aux glycopeptides (tableau 4). Ce phénomène est
bien illustré par la souche d’
E. faecium
«complexe clonal 17»
(CC-17). Un complexe clonal est un groupe de bactéries gé-
notypiquement assez proches pour que leur soit attribuée
une origine commune. Cette souche CC-17 s’est par fai te-
ment adaptée au milieu hospitalier en acquérant des fac-
teurs de résistance tels que la cytolysine, molécule favorisant
le lyse cellulaire ou encore l’
Esp (Enterococcal surface protein)
qui permet une meilleure colonisation des voies urinaires
et des cathéters par la formation d’un biofilm protecteur.7
Cette souche a notamment été retrouvée dans l’épidémie
qui a frappé le CHUV et l’Hôpital de Payerne en 2011.10 A
ce jour, en fonction de critères génotypiques et phénoty-
piques leur conférant des propriétés de résistance variées
(opérons), on distingue huit types de résistance acquise à
la vancomycine (VanA, VanB, VanD, VanE, VanG, VanL,
VanM, et VanN).7 Le type de résistance VanC est intrin-
sèque et propre à certaines souches d’entérocoques. Les
isolats VanA sont en général résistants à la vancomycine et
à la téicoplanine, alors que les isolats VanB restent sen-
sibles à la téicoplanine, ce qui représente un intérêt théra-
peutique important.
La dissémination de VRE aux Etats-Unis est due à la
large utilisation des céphalosporines et de la vancomycine
dans les hôpitaux, et actuellement plus de 30% des infec-
tions nosocomiales à entérocoques y sont causées par des
VRE.11 En Europe, il n’y a pas d’utilisation de vancomycine
à large échelle mais par contre une mauvaise utilisation
continue d’antibiotiques à large spectre qui sélectionnent
les VRE.12 Actuellement, environ 3% des infections nosoco-
miales à entérocoques sont dues à des VRE et la très
grande majorité sont des
enterococcus faecium
. La proportion
des VRE isolés est très inégale dans les différents pays
d’Europe ; elle varie de moins de 1% à plus de 25% dans
certains pays comme l’Irlande, selon les chiffres de l’EARS-
Net (Système européen de surveillance de la résistance
antimicrobienne, www.ecdc.europa.eu). On assiste égale-
ment à une augmentation inquiétante d’infections nosoco-
miales à VRE en Allemagne, avec un taux atteignant plus
de 10% en 2012.13
Le traitement de ces germes se base sur le linézolide
600 mg/12 h ou la téicoplanine 400 mg/12-24 h (en cas de
sensibilité et VRE de type VanB). En présence d’une endo-
cardite, l’utilisation de daptomycine 6-9 mg/kg/24 h est pro-
posée au vu de son effet bactéricide non retrouvé avec le
linézolide. Son utilisation se base cependant sur des étu-
des rétrospectives et des rapports de cas cliniques14,15 et
ne fait pas partie des recommandations officielles. L’avis
d’un spécialiste en infectiologie est nécessaire.
prévention de transmission dentéro-
coques, et dentérocoques résistant
à la vancomycine en particulier
De manière à mettre en place des mesures préventives
et thérapeutiques adéquates, plusieurs sources peuvent
être consultées : le site suisse de prévention des maladies
nosocomiales (www.swissnoso.ch), les sites des services de
prévention de l’infection des hôpitaux genevois (http://
vigi germe.hug-ge.ch) ou vaudois(www.hpci.ch), ou encore
le site de l’Institut de veille sanitaire français (www.invs.
sante.fr). Il est tout d’abord important de reconnaître les
patients à risque d’être colonisés ou infectés par un enté-
rocoque (tableau 3) : une durée d’hospitalisation longue, le
contact avec une personne porteuse, un traitement anti-
biotique récent, comme facteurs de risque de colonisation ;
un état d’immunodéficience, la dialyse, une intervention
chirurgicale, un séjour dans un service de soins intensifs,
un portage du germe et un traitement antibiotique récent,
comme facteurs de risque d’infection.8,16
Le dépistage est la première mesure importante. Il doit
se faire chez toute personne transférée d’un établissement
médical étranger ou ayant eu un contact médical à l’étran-
ger récemment, chez les patients transférés d’une clinique
ou d’un hôpital suisse, notamment de cantons dans les-
quels le taux de VRE est important, et chez les individus
ayant eu un contact avec une personne porteuse ou infec-
tée par un VRE. Il faut ensuite renforcer les mesures de
base afin d’éviter les transmissions, comme la désinfection
des mains avec une solution hydro-alcoolique, et mettre en
place des mesures spécifiques (isolement, port de gants et
blouses, et nettoyage des surfaces avec un détergent/dé-
sinfectant actif, comme le Dismozon pur, par exemple). Ces
mesures ont fait leurs preuves pour contrôler les épidé-
mies.10,17-19
Les traitements antibiotiques avec des antibiotiques à
large spectre (notamment les céphalosporines de troisième
génération) permettent aux entérocoques de se multiplier
et d’atteindre un taux critique mesurable dans les selles,
ce qui augmente de façon significative les risques d’infec-
tion et de colonisation de l’environnement (peau, cathéter,
surfaces mobilières, sols, points d’eau, sanitaires).20-22 La
décolonisation du tube digestif a été proposée comme
mesure préventive, mais elle ne semble pas être une alter-
native efficace pour éviter les infections, même si elle pour-
rait être utile pour diminuer ce taux critique et éviter la
contamination de l’environnement.23
Les bactériémies à entérocoques résistant à la vanco-
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2011 2012 2013
Enterococcus 3279 cas 3922 cas 3627 cas
faecalis (99,9%) (99,9%) (99,9%)
Enterococcus 944 cas 1017 cas 941 cas
faecium (96,6%) (98,4%) (98,4%)
Tableau 4. Taux de sensibilité des entérocoques
à la vancomycine de 2011 à 2013 en Suisse
Selon la base de données ANRESIS (www.anresis.ch).
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mycine sont associées à un surcroît de mortalité, de coûts
et de récidives par rapport aux bactériémies sensibles à la
vancomycine (VSE).23-25 Elles représentent donc un pro-
blème de santé publique majeur dont le monde médical
doit se préoccuper. De plus, une crainte justifiée est de voir
ces VRE transmettre leur résistance au MRSA
(meticillin re-
sistant Staphylococcus aureus)
qui deviendrait alors un VRSA
(vancomycin resistant S. aureus)
, avec les implications que l’on
peut imaginer.26,27
conclusion
En Suisse, la majorité des infections à entérocoques sont
provoquées par un
enterococcus faecalis
, qui répond à un trai-
tement simple de pénicillines. Cependant, ces germes ont
su profiter de facteurs favorisants qui leur ont permis de
développer des résistances et des propriétés les rendant
extrêmement bien adaptés à l’environnement de nos hô-
pitaux et leur permettant de coloniser et infecter nos pa-
tients, tout en devenant difficiles à éradiquer. La lutte con-
tre l’émergence et la diffusion de ces résistances passe par
la diminution du recours à des traitements antibiotiques
non justifiés, la détection de la présence de tels germes et
la mise en place de mesures prévenant leur dissémination.
En cas d’infection, un établissement du profil de résistance
par des cultures et le choix d’une antibiothérapie ciblée
sont à recommander.
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* à lire
** à lire absolument
Bibliographie
Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts en relation avec
cet article.
Implications pratiques
Un traitement empirique de céphalosporines ou de quino-
lones sera intrinsèquement inefficace contre les entéroco-
ques et augmente le risque d’infection par ces germes. En cas
de facteurs de risque d’infection par un entérocoque, ces anti-
biotiques devraient être évités
Un entérocoque «sensible» à la pénicilline selon l’antibio-
gramme ne sera en général que «tolérant» aux pénicillines.
Pour un effet bactéricide, en cas de suspicion d’endocardite,
l’association avec un aminoglycoside sera nécessaire
L’émergence de souches d’entérocoques résistant aux péni-
cillines est de plus en plus fréquente. En attendant les cul tu res
avec antibiogramme, un traitement incluant un glycopeptide
doit être envisagé en cas d’infection grave
L’augmentation de souches d’entérocoques résistant à la van-
comycine (VRE) renforce la nécessité d’une application stricte
des règles d’hygiène de base, comme la désinfection des mains
avec des solutions hydro-alcooliques, et la mise en place de
mesures spécifiques de screening et de prévention
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