Février 1943 Kirkenes et Mer de Barents : batailles dans l`Arctique

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Février 1943
14 – Europe du Nord
Kirkenes et Mer de Barents : batailles dans l’Arctique
1er au 3 février
4 février
Le Grand Cirque
Allemagne – La gare de triage de Hamm est visée par 86 bombardiers, mais le mauvais
temps les obligé à se détourner vers Emden. La Luftflotte Reich (Lf 7) lance tous les
chasseurs monomoteurs disponibles dans le secteur et, en l’absence d’escorteurs, fait même
appel à des chasseurs de nuit bimoteurs. C’est pourquoi 36 Bf 110 et 44 Ju 88C sont jetés
dans la bataille par petits paquets.
L’action qui s’ensuit est très confuse, d’autant que les tactiques de la Lf Reich sont toujours
fautives. Cependant, la puissance de feu des bimoteurs se manifeste, leur permettant
d’abattre cinq B-17 (contre aucun pour les monomoteurs).
Il faudra du temps et l’aide de pilotes expérimentés de la Lf 3 pour que la Lf 7 commence à
appliquer des tactiques plus efficaces.
5 au 14 février
15 février
Le Grand Cirque
Saint-Nazaire – Les silos à U-boots sont attaqués par 89 bombardiers. Entre la flak et
l’intervention de 46 Fw 190 du JG 2, huit bombardiers sont abattus, ajoutant à la mauvaise
réputation du port à la 9th Air Force. L’attaque est un semi-échec : les installations portuaires
sont gravement touchées, mais les silos sont intacts. Pire encore, de nombreuses bombes
touchent les quartiers résidentiels de la ville, faisant 250 morts parmi les civils.
16 février
Opération Serp
Des SS dans le Grand Nord
Kirkenes (Norvège occupée) – En ce mois de février 1943, les troupes allemandes qui
occupent l’extrême nord de la Norvège se sentent bien oubliées (quoique certains de leurs
hommes soient plutôt heureux de cette inaction). Un an plus tôt, l’OKW avait préparé une
offensive vers Mourmansk avec l’aide des Finlandais, mais au dernier moment, ces derniers
avaient préféré la neutralité (et l’or américain, dit-on à Berlin). Cette neutralité jouant dans
les deux sens, un lopin de terre finlandaise autour de la ville de Petsamo – et surtout, peutêtre, les 16 000 hommes de la 11e Division du général Kaarlo Heiskanen – empêche à
présent l’Ours rouge de s’intéresser de trop près à la Norvège occupée, s’il souhaite éviter de
jeter la Finlande dans le camp de l’Axe. Mais la perfidie bolchevique est bien connue, et
c’est pourquoi des SS montent la garde aux abords du Cap Nord [voir appendice 1].
Il s’agit de la Gebirgs-Division SS Nord, commandée par l’Obergruppenführer Matthias
Kleinheisterkamp (qui a pris la suite du Brigadeführer Karl-Maria Dernelhuber). Elle est
déployée à Kirkenes et aux abords de la frontière finlandaise.
Si les Soviétiques violaient la neutralité finlandaise, bien sûr, le reste du XXXVIe CA de
Montagne, soit la 2. Gebirgs Division du General-Major Ernst Schlemmer (QG à
Lakselv/Banak) et si besoin la 169. ID du général Tittel (QG à Hammerfest), se hâteraient de
venir au secours des SS.
Cependant, depuis le début de l’opération Barbarossa, neuf mois plus tôt, seule la Luftwaffe
a vu le feu dans la région. Certains des éléments déployés dans la perspective de l’opération
Platinfuchs ont été envoyés ailleurs, mais le colonel Andreas Nielsen commande toujours
des forces chargées d’interdire le ciel norvégien aux avions russes, de bombarder
Mourmansk… et d’attaquer les navires alliés à destination du port soviétique. En effet, si la
plupart des matériels envoyés par les Américains à l’Armée Rouge depuis le début de
l’opération Barbarossa ont pris le chemin de la Mer Noire, une demi-douzaine de convois
sont passés par le Grand Nord, et les Allemands s’en sont aperçus.
La plus grande partie du Groupe Platinfuchs (Nielsen n’a pas jugé utile de changer son nom)
est basée à Kirkenes (Bf 109 et Fw 190 Jabos) et à Banak (Ju 88 et Bf 110). Il est prévu de
renforcer ces appareils par des He 111 torpilleurs, voire par des Do 217 lance-engins, mais la
situation en Méditerranée ne l’a pour le moment pas permis.
La Luftwaffe entretient aussi des aérodromes à Bardufoss et Bodö, quoique leurs
installations soient moins développées que celles de Kirkenes et de Banak. Il existe de
simples pistes destinées à des atterrissages d’urgence à Kautokeino et à Alta, et deux autres
terrains sont en construction à Svartness et Berlevåg [voir appendice 1].
En plus du Groupe Platinfuchs, la Luftwaffe dispose dans la région d’une trentaine
d’hydravions assurant une tâche capitale : la reconnaissance. Ces gros appareils doivent
notamment renseigner les U-boots que l’amiral Dönitz a pu distraire de leurs croisières en
Atlantique.
La Kriegsmarine a aussi son rôle à jouer dans la défense du secteur nord de la Forteresse
Europe. Ses unités de surface les plus proches sont relativement près du Cap Nord, dans
l’Altafjord. En effet, le croiseur de bataille Scharnhorst et la 8e Flottille de Destroyers du
Kptn z.See Pönitz sont venus de Trondheim en janvier, quand l’OKW a pris conscience que
des convois alliés passaient régulièrement par l’Arctique pour acheminer du matériel de
guerre jusqu’en URSS.
De plus, le cuirassé Tirpitz (vice-amiral Otto Ciliax) et la 6e Flottille de Destroyers du Kptn
z.See Schulze-Hinrichs, venus de Bergen, ont pris le relais du Scharnhorst et de son escorte à
Trondheim 1.
Enfin, les U-boots de type VIIC de la 11e Flottille patrouillent dans l’Arctique.
17 février
Opération Serp
Dieppe du Grand Nord ?
« La bataille de Kirkenes, dite opération Serp (C!"#) ou opération amphibie de Kirkenes
($%"&!'!( )!(*'+'*, -#!"*.%,), est le nom donné à l’attaque soviétique des 24 et 25
février 1943 contre le port de l’extrême nord de la Norvège occupé par les Allemands. A
cette période de l’année, dans la région du Cap Nord, le jour se lève à partir de 07h00 et la
nuit commence à tomber à partir de 16h00, c’est pourquoi il fut décidé d’étaler l’opération
sur deux jours. L’attaque principale devait commencer à 06h30 le 24 et à 16h00 le
lendemain, le dernier fusilier marin devait être évacué.
1
La 3e Flottille de S-Boots, également déployée à Trondheim, doit être renvoyée en Mer Baltique au
printemps. La 2e Flottille de torpilleurs (T-3, T-9, T-15 et T-16) est restée à Bergen.
L’opération fut vite baptisée « Dieppe du Grand Nord » par la presse. En fait, l’objectif
principal des Soviétiques était de faire croire à l’OKW qu’un débarquement allié en Norvège
était imminent et de pousser les Allemands à concentrer des forces dans la région, soulageant
d’autant les autres fronts et surtout le front russe.
Cependant, contrairement à Rutter (le raid sur Dieppe), Serp avait aussi une raison d’être
régionale. Kirkenes abritait le QG du Fliegerführer NordOst, responsable de la région
Finnmark, ce qui en faisait un rouage essentiel dans la défense aérienne de la partie nord de
la Norvège (et dans l’organisation des raids aériens contre les convois alliés dans l’Arctique).
Depuis le début de Barbarossa, la ville avait subi de nombreux bombardements aériens
soviétiques, mais ceux-ci s’étaient révélés peu efficaces. Les bombardiers à l’étoile rouge ne
se montraient pas d’une grande précision et la défense allemande ne leur facilitait pas la
tâche. De plus, entre les bases soviétiques et Kirkenes se trouvait la région finlandaise de
Petsamo. Quoique les Allemands comme les Soviétiques eussent fréquemment violé l’espace
aérien finlandais, il restait préférable pour les deux camps de ne pas ignorer
systématiquement son existence, ce qui gênait les raids aériens. La Stavka avait fini par
conclure que l’infanterie ferait mieux que l’aviation. Les cibles visées étaient les installations
portuaires de Kirkenes, son aérodrome et d’autres installations stratégiques du secteur.
C’est pourquoi l’Armée et la Flotte Rouges allaient engager dans Serp plus de 4 500
fusiliers, appuyés par de nombreux avions et par toute la flotte soviétique du Grand Nord.
Les fusiliers marins soviétiques étaient des vétérans spécialement entraînés pour des
opérations amphibies. En revanche, si les éléments de la division SS Nord défendant
Kirkenes et sa région étaient d’une fidélité certaine au dogme nazi, leurs vertus militaires
étaient très inférieures à celles des troupes de la Wehrmacht. En fait, la plupart des soldats de
cette division étaient d’anciens gardiens de camp de concentration et n’avaient aucune
expérience du combat.
Par ailleurs, l’opération Serp présente l’originalité d’avoir été conçue dès le départ avec la
collaboration de la Royal Navy. En effet, celle-ci devait intervenir pour parer au danger
représenté par les grandes unités navales allemandes déployées dans la région pour s’attaquer
aux convois en route vers Mourmansk. De fait, il est aujourd’hui difficile d’évoquer la
bataille de Kirkenes sans parles des engagements navals des 25 et 26 février connus sous le
nom de bataille de la Mer de Barents. » (M. Nagler, La Guerre dans l’Arctique, 1940-1944)
Les plans des Soviétiques
Moscou – L’hiver a jusqu’ici été très favorable à l’Armée Rouge, et la Stavka espère que le
printemps sera encore meilleur. Mais il ne faudrait pas que les troupes allemandes de bonne
qualité déployées dans certaines régions d’Europe, comme la Norvège, puissent venir
renforcer le front de l’Axe en ne laissant que quelques unités de second ordre contrôler les
territoires occupés. En ce qui concerne la Norvège, séparée du Grand Nord soviétique par le
corridor finlandais de Petsamo, l’état-major soviétique a élaboré un plan pour fixer les forces
allemandes sans porter atteinte à la neutralité finlandaise. Ce plan repose sur la 7e Brigade
d’Infanterie de Marine (7e MPB) de la 14e Armée du général V.A. Frolov, et sur les navires
de la Flotte du Nord, commandée par le vice-amiral Arseni G. Golovko [voir appendice 2].
L’idée est de débarquer la 7e MPB dans le Bøkfjorden, de prendre Kirkenes et de détruire les
installations allemandes – le port et surtout l’aérodrome. Bien entendu, une forte couverture
aérienne est prévue.
Il ne s’agit pas d’ouvrir un second front, mais d’accomplir une opération semblable à Rutter,
que les Alliés ont menée à Dieppe : un aller-retour en quelque sorte. L’impact d’un tel coup
de main devrait, espère-t-on à Moscou, empêcher l’OKW de prélever des unités stationnées
en Norvège pour les envoyer sur le front russe.
C’est pourquoi, afin d’accroître les chances de réussite du raid, la Stavka a prévu deux
opérations spéciales.
Le 181e Détachement de Reconnaissance Spéciale
Les SR soviétiques ont acquis une connaissance très précise de la géographie du Finnmark
avant même l’invasion allemande de 1942. Bien que cette connaissance soit due en grande
partie au dense réseau d’espionnage communiste qui couvre toute l’Europe (et notamment
l’Europe occupée par l’Allemagne), elle est aussi le résultat d’une clause spécifique et
obscure du traité de paix de Moscou signé en 1940 : celle qui garantit la libre circulation des
civils soviétiques d’URSS en Norvège à travers le secteur de Petsamo. Les civils en question
étant plus souvent qu’à leur tour des agents du GRU, en 1942, la topographie de la région n’a
plus de secret pour les Soviétiques.
Ces derniers n’ont pas été longs à remarquer que Kirkenes (comme tout ce qui se trouve à
l’est de la ville) n’est reliée par voie de terre au reste de la Norvège que par la Route 50
(aujourd’hui E6). En effet, Kirkenes est située à l’extrémité d’une péninsule qui pointe dans
le Bökfjord, lequel est lui-même un bras du grand Varangerfjord. La Route 50 part de
Kirkenes, traverse le Bökfjord par le pont de Strömmen et longe l’aérodrome de Kirkenes
avant de se prolonger vers l’ouest. Au sud du pont, la péninsule n’est reliée à l’autre rive du
fjord que par une passerelle en bois pour piétons à trois kilomètres du pont de Strömmen et
par un autre ouvrage, à peine plus solide, sept à huit km plus loin. Ces deux ponts ne sont
destinés qu’à un usage civil et ne sont de toute façon pas reliés à la Route 50 à l’ouest du
Bökfjord. En un mot, qui contrôle le pont de Strömmen peut couper toute la péninsule du
reste de la Norvège, au moins par voie de terre.
Dans les jours tragiques de Barbarossa, cette particularité géographique n’a guère attiré
l’attention du commandement soviétique. Cependant, au bout de quelques mois, la situation
un peu stabilisée, la Stavka s’est demandé comment détourner des forces allemandes du front
principal ou empêcher la Heer d’y envoyer des renforts. C’est alors que l’on a commencé à
penser à Kirkenes et au pont de Strömmen.
L’obsession de Hitler pour la Forteresse Norvège est bien connue du haut commandement
soviétique et sa réaction violente au raid britannique sur les Lofoten de mars 1941
(l’opération Claymore) n’est pas passée inaperçue à Moscou. En novembre 1942, la Stavka a
donc décidé de lancer un raid de diversion contre les positions allemandes à Kirkenes. Lors
de la phase de planification, il est apparu que le contrôle du pont de Strömmen serait
essentiel au succès de l’opération. Il faudra donc envoyer en pointe une unité capable de
s’emparer du pont et de le tenir assez longtemps pour repousser les renforts allemands venant
de l’ouest ou les unités du génie chargées de faire sauter l’ouvrage, jusqu’à ce que la force
principale, après avoir pris le contrôle de la ville, plus à l’est, arrive et passe le pont pour
aller détruire l’aérodrome.
Après mûre réflexion, le choix s’est porté sur le 181e Détachement de Reconnaissance
Spéciale (Osobogo Razvedyvatel’nogo Otryada) de la Flotte du Nord, commandé par le déjà
fameux capitaine Viktor Nikolayevitch Leonov. L’unité ne compte qu’une centaine
d’hommes seulement, mais elle a déjà livré de multiples combats depuis le 17 mai, souvent
en infériorité numérique, et son palmarès exemplaire a été un facteur important dans le choix
de la Stavka 2. Le Détachement doit être transporté par les cinq sous-marins de la 1ère
Division (capitaine de 2e rang Magomet Gadjiyev), les K-21, K-23, K-51, K-52 et K-53.
Les résistants norvégiens
Le contrôle du pont de Strömmen est important, mais les Soviétiques ont considéré qu’on
2
L’opération Serp ne sera pas la dernière du 181e Détachement. Avec d’autres unités, ce Détachement formera
le noyau des forces qui seront, quelques années après, connues sous le nom de Spetsnaz.
pouvait faire encore davantage pour gêner la riposte allemande. C’est pourquoi il a été
décidé de tendre une embuscade au commandant de la SS-Gebirgs Division Nord,
l’Obergruppenführer Kleinheisterkamp, et à son chef d’état-major, le Sturmbannführer Heinz
Küchle. Si elle réussit, la chaîne de commandement SS sera désorganisée et la défense de
Kirkenes fragilisée.
Au départ, l’engagement d’un second Détachement Spécial a été envisagé, mais on a jugé
que la mission aurait plus de chances de succès si elle était confiée à des partisans norvégiens
natifs de la région. De plus (mais la chose n’a pas été exprimée…), le risque d’échec paraît
très élevé ; or, si les forces spéciales sont composées des meilleurs hommes des forces
armées soviétiques, qu’il faut éviter de faire tuer inconsidérément, les partisans sont
considérés comme sacrifiables… C’est pourquoi la mission de tendre une embuscade à
Kleinheisterkamp a été attribuée à Ingolf Aspås et à ses onze hommes.
Danger naval
Au total, quarante navires, de petite taille pour la plupart, moins de cinq mille hommes,
vingt-quatre chars légers ou très légers, un peu d’artillerie, deux “opérations spéciales”… Il
s’agit bien d’un coup de main et non d’une invasion ! Néanmoins, les troupes engagées sont
précieuses et il ne faudrait pas les gaspiller. Certes, l’aviation rouge a l’avantage du nombre,
et elle devrait pouvoir préserver la flottille soviétique des attaques de la Luftwaffe.
Mais comment la protéger d’une sortie de la flotte allemande ? Les services de
renseignement et la Résistance norvégienne ont signalé que, depuis fin décembre, le Tirpitz
et le Scharnhorst se sont déployés en Norvège. En janvier, le Tirpitz et son escorte se sont
installés à Trondheim, tandis que le Scharnhorst et quelques destroyers prenaient leurs
quartiers dans l’Altafjord. Kirkenes est encore assez loin (300 nautiques environ) de la plus
proche base de la Kriegsmarine, mais les transports soviétiques sont lents, et le Scharnhorst
pourrait très bien les surprendre dans le fjord de Kirkenes, ou les rattraper et les anéantir sur
le chemin du retour à Mourmansk : 150 nautiques…
C’est pourquoi les petits sous-marins de classe S de la 2e Division de la Flotte du Nord
(capitaine de 2e rang Ivan Kolyshkine) iront miner les sorties d’Altafjord les jours précédant
l’opération, tandis que les sous-marins de la 1ère Division du capitaine Gadjiyev iront se
positionner sur la route des navires allemands après avoir transporté les hommes de Viktor
Leonov. Mais cela risque de ne pas suffire.
Par bonheur, dans cette guerre, l’Union Soviétique a des alliés…
18 février
Opération Serp
Le convoi PQ-7
Londres et Scapa Flow – A l’Amirauté, Leurs Seigneuries ont été perplexes en recevant la
demande d’appui formulée par les Soviétiques. Bien sûr, il fallait répondre favorablement !
Mais alors que les Russes espéraient que le soutien demandé n’aurait pas à jouer, les Anglais
souhaitaient de tout cœur que la Kriegsmarine intervînt ! Régler le compte du Scharnhorst
serait en effet une belle victoire, ce navire avait beaucoup trop de cargos alliés sur la
conscience, sans même parler du pauvre Glorious et de ses escorteurs, et sa seule présence
en Norvège était bien gênante.
Hélas, si le croiseur de bataille va d’Altafjord à Kirkenes, il ne s’éloignera guère de la côte
norvégienne, ce qui veut dire que les grands bâtiments britanniques tentant de l’intercepter
risqueront eux-mêmes d’être la cible de la Luftwaffe… C’est pourquoi les stratèges anglais
ont élaboré un plan à plusieurs étages.
………
Ce 18 février, un convoi pour Mourmansk, le PQ-7, quitte l’Ecosse. Un convoi plutôt
légèrement escorté en apparence – un appât pour le Scharnhorst. On peut espérer que le
corsaire cèdera à la tentation et sortira de sa tanière de l’Altafjord. S’il néglige les nouvelles
de Kirkenes pour s’en prendre au convoi, tant mieux – celui-ci est couvert par une puissante
escadre, commandée par le vice-amiral Bruce A. Fraser. Cette escadre est constituée du tout
récent cuirassé HMS Howe et du porte-avions HMS Furious, avec les Sqn 807 (14 Seafire),
821 (10 Albacore) et 835 (12 Albacore), escortés par les deux croiseurs anti-aériens HMS
Scylla et Sirius et par dix destroyers (les HMS Imperial, Inglefield, Kipling, Lookout, Loyal,
Marne, Martin, Matchless, Meteor et Milne). L’Amirauté britannique va pouvoir affirmer
aux Soviétiques : « Nous attirons l’Allemand avec un de nos convois pour l’éloigner de votre
flottille, ne sommes-nous pas généreux ? ».
Mais il est possible que le Scharnhorst préfère se diriger vers Kirkenes, soit que l’affaire
apparaisse prioritaire aux yeux du commandement allemand, soit que les reconnaissances de
la Luftwaffe aient repéré le groupe du Howe. C’est pourquoi un groupe de chasse va prendre
de l’avance sur le convoi et se positionner plus à l’est, dans l’espoir d’échapper aux
reconnaissances. Il sera chargé de détourner l’Allemand du convoi soviétique, puis de le
pister et de le harceler en tentant de le ralentir à la torpille afin que l’escadre principale
puisse l’attaquer si les conditions sont favorables.
Le groupe qui reçoit cette difficile mission sera commandé par le contre-amiral Robert L.
Burnett. Celui-ci aura sous ses ordres le croiseur lourd Norfolk (classe County), les grands
croiseurs légers HMS Belfast, Edinburgh et Sheffield (classe Town) et six destroyers récents,
les HMS Onslow, Offa, Oribi et Orwell (classe O) et les ORP [polonais] Orkan (classe M) et
Piorun (classe N).
19 février
Opération Serp
Mauvaise humeur
Océan Arctique, convoi PQ-7 – Le gros cargo Empire Byron, chargé de près de 3 000
tonnes de matériel à destination de l’URSS, se fraie péniblement un chemin dans les eaux
glacées de l’Arctique. Sur la passerelle, le capitaine George Baxter se renfrogne un peu plus.
Hier, il a vu les quatre croiseurs et les six destroyers censés leur servir de couverture
rapprochée filer vers l’est en signalant en guise d’adieu : « Nous prenons un peu d’avance, à
bientôt ». Aujourd’hui, il a le sentiment très net qu’il ne les reverra pas de sitôt. Ce qui veut
dire que les transports du PQ-7 ne sont plus protégés que par onze petits escorteurs : le vieux
destroyer HMS Witherington (un classe Admiralty), les destroyers d’escorte HMS Ledbury
et Melbreak, trois corvettes (HMS Loosestrife, Sunflower et Pink), trois chalutiers armés
(HMT Ayrshire, Lord Austin et Northern Gem) et deux dragueurs de mines (HMS Britomart
et Salamander). Tous sont bien utiles contre les sous-marins, mais ne pourraient que couler
dans la grande tradition de la Navy si jamais ils rencontraient un grand bâtiment allemand. Et
puis, cette histoire de prendre un peu d’avance cache sûrement quelque chose, comme un
plan génial de Leurs Seigneuries. Mais si ce plan foire, qui en subira les conséquences ? Lui,
bien sûr, George Baxter, avec ses collègues des autres cargos.
Il faut dire que, vingt-cinq ans plus tôt, George Baxter était aux Dardanelles, ce qui l’a
vacciné contre les plans géniaux de Leurs Seigneuries. De plus, l’idée de se faire tuer en
allant livrer du matériel aux Commies lui est profondément désagréable – il a toujours voté
Tory. On comprendra qu’il soit d’humeur sombre…
20 février
Opération Serp
Maskirovka
Frontière finno-soviétique, près de Petsamo – Alerte ! L’Armée Rouge masse des troupes
au sud-est de Petsamo, sur la rivière Tuloma (là où se trouve aujourd’hui la localité de
Verkhnetulomsky). Les surveillances radio des Finlandais comme des Allemands repèrent
vite les indices des mouvements de troupes, éveillant l’inquiétude en Finlande comme en
Norvège occupée. Les Finlandais envoient des éléments de la 11e Division sur la frontière
russe, tandis que les Allemands lancent des patrouilles et des reconnaissances aériennes au
sud de Kirkenes, sur la frontière de la Finlande.
En réalité, il s’agit d’une opération de maskirovka classique des Soviétiques. Elle atteint son
but en dispersant l’attention allemande et en dissimulant la concentration navale soviétique et
l’embarquement des troupes à Mourmansk.
Entre le marteau et l’enclume
« La Finlande avait reconnu depuis des années qu’elle n’avait tout simplement pas assez
d’avions ou d’autres ressources pour une défense de tout l’espace aérien du pays. De ce fait,
durant la Guerre d’Hiver, la priorité avait été donnée à la défense aérienne du sud de la
Finlande et celle de la Laponie avait été laissée aux volontaires suédois du 19e Régiment
Aérien, opérant de Kemi. De même, aucune unité de DCA n’avait été déployée au nord de la
ligne Turku-Tampere-Jyväskylä-Joensuu.
En 1942, la situation matérielle de la Force Aérienne finnoise s’était améliorée, mais le sud
du pays continuait d’être prioritaire et la défense aérienne de la Laponie n’avait reçu aucun
renfort substantiel. En fait, avant que la Finlande ne réaffirme sa neutralité en mai de cette
année, il avait été prévu de confier aux Allemands la responsabilité des 500 km de front au
nord du pays, y compris pour les opérations aériennes. Ce projet annulé, les Finlandais
durent très vite improviser la défense de la Laponie et en particulier de Petsamo.
Bien que la Finlande n’ait pas été entraînée dans le conflit mondial, elle restait sur le pied de
guerre. Le réalisme stratégique exigeait de conserver dans le sud du pays la grande majorité
des forces et des ressources militaires finlandaises. Néanmoins, il fallait faire quelque chose
pour la Laponie en général et pour Petsamo en particulier. La 11e Division, déjà déployée
dans ce secteur au moment où la Finlande se préparait à participer à l’opération Barbarossa,
ne fut pas retirée. Elle devait assurer l’essentiel de la défense de Petsamo, d’autant plus que
la marine finnoise était inexistante en Arctique – elle n’y possédait qu’une seule unité, le
patrouilleur Turja, qui appartenait aux Gardes-Frontières de Laponie.
Mais avec le développement de la guerre germano-soviétique et les pressions politiques et
militaires venues des deux côtés, il apparut nécessaire de renforcer les défenses de Petsamo
avec une unité aérienne. C’est pourquoi l’Escadron Indépendant n° 17 fut créé le 1er juin
1942. Une décision très controversée de l’état-major transféra à cette unité vingt chasseurs
Messerschmitt Bf 109 E des Escadrons 28 et 34 – soit près de la moitié des Bf 109
finlandais. A ce moment, beaucoup de hauts gradés critiquèrent ce choix, considérant que
c’était un affaiblissement inadmissible de la défense aérienne du cœur du pays au profit de
celle d’une région stratégiquement indéfendable dans l’extrême nord. Cependant, comme la
région de Petsamo ne faisait que 30 à 60 km de large et se trouvait située entre les forces de
deux nations en guerre, les dirigeants politiques et militaires avaient compris qu’il s’agissait
de la région finlandaise la plus exposée à des violations de son espace aérien, tant de la part
des Soviétiques que des Allemands, car les deux camps allaient chercher à bombarder les
positions et à interdire les mouvements navals adverses à Kirkenes ou à Mourmansk.
Sans une présence aérienne minimale capable de jouer un rôle dissuasif, même symbolique,
le droit de la Finlande à exercer sa souveraineté sur la région sonnerait bientôt creux. Si
l’espace aérien finlandais au-dessus de Petsamo devait être violé de façon criante par les
Allemands, les Soviétiques ou les deux, la Finlande se trouverait soumise à une pression
croissante des deux camps qui risquerait de l’entraîner dans la guerre. Une unité aérienne
pourrait, jusqu’à un certain point, limiter ces violations et aider à maintenir la neutralité du
pays.
Le gouvernement et le haut commandement ne le savaient que trop bien : si les Soviétiques
ou les Allemands décidaient sérieusement d’envahir la région de Petsamo, les soldats
finlandais ne pourraient pas faire grand-chose, sinon livrer des actions de retardement
jusqu’à ce que la population civile soit évacuée, comme cela avait été le cas durant la Guerre
d’Hiver. En pareil cas, l’Escadron 17 avait pour ordres de ne fournir qu’un appui aérien
minimal aux forces terrestres locales avant de se replier sur Rovaniemi, l’aérodrome
finlandais le plus proche. Cet escadron était considéré comme trop précieux pour être sacrifié
dans une action désespérée face à des forces très supérieures en nombre.
En fait, les forces finlandaises dans la région – la 11e Division, la Garde Civile locale, les
gardes-frontières et l’Escadron 17 – devaient servir plus de garde-fou que de ligne de
défense. Il fallait que ceux qui décideraient d’envahir Petsamo sachent qu’ils jetteraient du
même coup la Finlande dans les bras de leurs ennemis et ouvriraient un front supplémentaire
qu’ils ne pouvaient souhaiter. La valeur des défenses finnoises dans le secteur était donc plus
politique que militaire.
En plus de l’Escadron 17, la défense aérienne de Petsamo fut renforcée par le déploiement de
batteries anti-aériennes. Il n’y en avait pas eu une seule durant la Guerre d’Hiver et l’aviation
soviétique avait pu évoluer sans opposition de ce genre au-dessus de toute la Laponie. En
janvier 1943, la Laponie était défendue par quatorze canons Bofors de 40 mm – ce qui n’était
pas beaucoup, mais bien mieux que rien. Ces canons étaient répartis en sept batteries : une à
Tornio, près de la frontière suédoise, deux (dont une sur l’aérodrome) à Rovaniemi, la
capitale lapone, et quatre à Petsamo. L’une était située à Salmijärvi, où habitait un tiers de la
population de la municipalité ; une autre à Liinakhamari, pour protéger le port ; une
troisième à Kolosjoki, pour protéger les mines de nickel, et la dernière sur l’aérodrome de
Petsamo.
La DCA de la région était complétée par le détachement anti-aérien de la 11e Division,
baptisé 267e Compagnie de Mitrailleuses Anti-Aériennes. Celle-ci disposait de six canons de
20 mm et de six mitrailleuses Maxim. Ces armes étaient déployées sur diverses positions de
la 11e Division, près des points stratégiques. De plus, pour tenir compte des longues nuits
arctiques, une unité de projecteurs avait été implantée au voisinage de Liinakhamari, et des
projecteurs isolés pouvaient être déployés à d’autres endroits.
Si, selon les standards finnois, Petsamo jouissait d’une défense aérienne importante pour sa
taille, selon les standards des grandes puissances de l’époque, cette défense était pleine de
trous béants. Elle était en effet concentrée autour des zones peuplées, laissant la plus grande
partie de la région totalement démunie. Pour cette raison, les Soviétiques purent se dire
qu’elle ne représentait pas une menace susceptible de les empêcher de lancer une puissante
attaque aérienne à travers la région en direction de Kirkenes. »
(M. Nagler, La Guerre dans l’Arctique, 1940-1944)
21 février
Opération Serp
Maskirovka
Helsinki – Le gouvernement finlandais proteste officiellement contre la concentration de
troupes soviétiques à proximité de Petsamo.
Repérage
Océan Arctique, loin au sud-est de l’île Jan Mayen – Deux douzaines de cibles, transports
et escorteurs, qui se traînent sur l’eau glacée ! « C’est mon jour de chance » pense Albert
Fuchs, aux commandes du BV 138 n°5 du Küstenstaffel 3/406. Le “sabot volant” de Blohm
& Voss a décollé de Tromsö plusieurs heures avant malgré le temps bouché et son
obstination a été récompensée : un beau convoi allant visiblement d’Ecosse en URSS. Juste
au moment où son hydravion allait prendre le chemin du retour !
………
« Vous croyez qu’il nous a vus, Sir ? » Sur le River Afton, le commodore John Dowding,
patron du convoi PQ-7, fait la grimace. Bien sûr qu’il nous a vus ! se dit-il. Mais il se
contente de répondre : « Peut-être pas. Et puis, on n’est plus qu’à cinq jours de Mourmansk,
pas vrai ? » Il garde aussi pour lui son agacement – quel bureaucrate idiot a composé un
convoi de treize transports ? D’accord, l’un d’eux, l’Empire Tide, est un CAM-ship, porteur
d’un Hurricane sur catapulte, mais cela n’en fait pas un escorteur…
22 février
Opération Serp
Maskirovka
Moscou – Le gouvernement soviétique répond à la protestation finlandaise de la veille. Il
explique que les troupes russes ne font que des manœuvres « sans aucune intention hostile ».
Réponse qui, bien entendu, ne fait qu’accroître l’inquiétude des Finlandais !
Ce n’est que le 26 février, après la fin de l’opération Serp, que les forces russes du Grand
Nord rentreront dans leurs casernes.
Grands moyens
Berlin, 11h30 – Le Führer est d’humeur badine, aujourd’hui. Un convoi ? De nombreux gros
transports ? Un premier raid aérien n’a pu les retrouver, et seul un avion de reconnaissance a
réussi à reprendre le contact ? Parfait, parfait ! Nous allons voir si les grands bâtiments
qu’aime tant l’amiral Raeder, ex-grand patron de la Kriegsmarine, valent le prix, en argent et
en acier, qu’ils ont coûté. Penché sur une carte de l’Arctique, Hitler se frotte les mains. Pas
sûr que le Scharnhorst suffise à la tâche, ces marins de surface sont si timorés ! Comme
l’interception est prévue pour le 25, on a le temps de faire appareiller le Tirpitz, à
Trondheim. Lui aussi a le droit de s’entraîner au tir, ha ha !
………
Trondheim, 17h30 – Le vice-amiral Ciliax s’apprête à obéir aux ordres du Führer. Le
Tirpitz et son escorte de trois destroyers vont appareiller. Vers 22h00, ils se glisseront dans
l’Arctique. Il est prévu qu’au début de la nuit du 24 au 25, ils rejoignent le Scharnhorst au
large d’Altafjord et que la flotte réunie aille donner une bonne leçon au convoi que Churchill
ose envoyer à Staline…
23 février
Alerte !
Trondheim, 07h55 – Le skieur vêtu de blanc se redresse, laissant dans la neige l’empreinte
de son corps étendu. Il range en hâte ses jumelles avant de s’élancer dans la pente – il n’avait
pas déchaussé. Plus d’une heure d’efforts plus tard, haletant, barbe et sourcils couverts de
givre, il atteint une cabane enneigée, à peine visible sous les sapins. Alors qu’il se penche
pour retirer ses skis, la porte s’ouvre sur un deuxième homme, lui aussi vêtu de blanc :
« Mats ! Tout va bien ? ».
Le skieur lève la tête et souffle : « La radio, vite ! Le Tirpitz ! Il n’est plus là ! ».
Le PQ-7 attaqué
Océan Arctique, 14h10 – Le mauvais temps a jusqu’alors servi le PQ-7 : les raids aériens
lancés contre lui par la Luftwaffe l’ont pour la plupart manqué. Seuls, à la mi-journée, trois
Ju 88 peuvent mener un bombardement efficace. Le pétrolier soviétique Azerbaïdjan est
touché, mais continue sa route.
Opération Serp
Mourmansk, 18h00 – La force Serp appareille, couverte par deux douzaines de chasseurs en
quête du moindre avion de reconnaissance allemand. Mais les Allemands sont plus intéressés
par les préparatifs terrestres soviétiques, bien plus au sud, ou par le convoi PQ-7, bien plus
au nord !
Alerte !
Amirauté britannique, Londres, 16h30 – Sir Dudley Pound, Premier Lord de la Mer,
semble avoir été frappé par la foudre au milieu de son état-major. Le Tirpitz a pris la mer !
Va-t-il rejoindre le Scharnhorst ? L’escadre anglaise devrait donc faire face aux deux grands
bâtiments réunis.
– Nous aurions dû envoyer deux cuirassés et non un seul, gémit le vieil homme. Mais nous
étions si sûrs qu’à Trondheim, le Tirpitz ne tenterait pas d’intervenir…
– Il ne se dirige peut-être pas de ce côté, observe un des officiers présents. Il va peut-être
chercher à passer dans l’Atlantique ! Avec tous ces convois de troupes américains…
Après tout, c’est bien possible ! Le Tirpitz pourrait-il réussir là où le Bismarck a échoué ? Ce
serait plus catastrophique encore que de le voir ravager l’Arctique. Il faut multiplier les
reconnaissances aériennes et envoyer des croiseurs dans le Détroit du Danemark et entre
Islande et îles Féroé, tandis que les King George V et Duke of York vont prendre la mer afin
de pouvoir intervenir plus vite.
Première perte et premier sang pour le PQ-7
Océan Arctique, 22h30 – Il y a quarante-huit heures, l’état-major de l’U-bootwaffe a
constitué la meute Nordwind et lancé les U-255, U-302, U-622, U-625, U-629 et U-601 sur
les traces du PQ-7. L’U-601, le premier arrivé sur le trajet probable du convoi, a eu de la
chance : il a très vite repéré les navires alliés. En pareil cas, la consigne est d’attendre
l’arrivée d’autres sous-marins, mais les congénères de l’U-601 tardent et son commandant,
l’Oberleutnant z.S. Peter-Ottmar Grau, s’impatiente. C’est alors qu’un léger changement de
cap du convoi semble lui offrir un transport sur un plateau. Profitant de l’obscurité de la nuit
arctique, Grau décide de passer à l’attaque et lance deux torpilles sur cette belle cible. Peu
après, le Hartlebury, touché de plein fouet, sombre avec les 2 500 tonnes de matériel de son
chargement. C’est le premier navire perdu par le PQ-7.
Grau exulte sans doute – bien à tort. Avant même que ses torpilles frappent leur but, son
sous-marin, en surface, a été repéré malgré la nuit par le chalutier Northern Gem. Alors que
le Hartlebury coule, le destroyer Melbreak, appelé à la rescousse, se met à arroser l’U-boot
d’obus de 4 pouces. L’U-601 plonge en catastrophe, mais juste sous le nez de la corvette
Pink, accourue à toute vitesse et qui largue un chapelet de grenades alors que le sous-marin
vient à peine de disparaître. Il ne remontera plus.
En marge… ou presque
Copenhague – Le garde-côte cuirassé Niels Juel [ou Niels Iuel] et le poseur de mines Lossen
appareillent pour Iserfjorden, seul endroit où les Allemands, qui contrôlent le Danemark
depuis avril 1940, autorisent encore la marine danoise à s’entraîner. Les deux bâtiments ont
eu droit pour ce bref trajet à très peu de combustible (mazout pour le Niels Juel, charbon
pour le Lossen) : juste assez pour faire l’aller-retour et quelques manœuvres à 8 nœuds.
Les Allemands ont contrôlé le niveau des soutes des deux Danois avec beaucoup d’attention.
En effet, depuis plus d’un mois, la tension monte entre les occupants et le gouvernement
d’Erik Scavenius, au fur et à mesure que croissent les exigences politiques et économiques
allemandes, stimulées par leurs déboires en URSS. Il est évident pour tous les Danois qu’un
coup de force est imminent, et si la plupart des sujets du roi Christian X n’y peuvent pas
grand-chose, certains marins de la petite flotte de guerre danoise ne sont pas prêts à se laisser
faire.
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