Médecine et éthique - Conseil de l`Ordre des Médecins de la Haute

{{ {{{MEDECINE ET ETHIQUE}}} }}
Le Conseil Départemental de l'Ordre des Médecins de la Haute Garonne a organisé le Mardi 14
octobre 2003 au grand amphithéâtre de la Faculté de médecine de Rangueil une soirée débat sur le
thème « Médecine et éthique aux deux pôles de la vie » thème oh ! combien d'actualité.
Un public de 200 personnes rassemblait médecins, pharmaciens, dentistes, infirmières, patients ou
personnes intéressées. Présentée par le Président du Conseil Départemental de l'Ordre des Médecins
de la Haute Garonne, le Docteur Alain GLEISES, modérée par le Professeur Pierre CARLES, la soirée
s'est déroulée en deux parties en présence d'experts, les Docteurs:
J. MONTAGUT, généticien, B. GRANDJEAN, obstétricien, J. THEVENOT, obstétricien, P. IZARD,
anesthésiste, J. CLAVERIE, pédiatre, E. CARLES, généticienne, T. MARMET, médecin en soins palliatifs,
M.F. THIERCELLIN, médecin en hospitalisation à domicile, P.A. DELPLA, psychiatre, le Professeur D.
ROUGÉ, médecin légiste, le Professeur G. ROUJOU DE BOUBEE, Professeur à la Faculté de Droit.
Une seule méthode pédagogique interactive a été suivie, centrée sur des situations cliniques
déclinées en questions. Elles ont été exposées par les médecins traitants et analysées point par point
par les experts. Un débat a été ouvert autour de trois interrogations en conclusion de chaque partie.
La première partie, animée par les Docteurs J-J. ORMIERES et S. OUSTRIC, s'interrogeait sur les
problèmes d'éthique en périnatalité.
Le groupe de travail a fait part « du témoignage d'un vécu professionnel qui pose plus de problèmes
qu'il n'en résout ».
Réuni au préalable pendant 18 mois, il a exprimé la solitude du thérapeute qui, dans sa démarche
décisionnelle, agit :
- soit selon une éthique de conviction,
- soit selon une éthique de responsabilité.
Il a senti la nécessité de modéliser cette démarche ETHIQUE AU QUOTIDIEN, illustrée dans quatre
SITUATIONS CLINIQUES.
Le témoignage de ce vécu professionnel a abouti à l'expression de PROBLEMES ETHIQUES».
Ces cas cliniques mentionnaient le diagnostic dans le dépistage de la trisomie 21, d'un handicap in
utero d'une part, l'accompagnement lors de la grande prématurité et lors du deuil périnatal d'autre
part.
{{{ {{1ERE SITUATION}} }}}
Marie P, 20 ans, primipare, en début de grossesse, souhaite bénéficier d'un dépistage de la trisomie
21.
{{ {{{Quelle est la vraie demande des parents ?}}} }}
« Les parents sont demandeurs d'un enfant « beau et en bonne santé ».
Ils souhaitent dans le cadre de cette démarche la détection la plus précoce « du handicap », avec la
possibilité d'une interruption médicale de grossesse qui est quasi-toujours décidée si la trisomie 21
est confirmée ».
{{ {{{Que peut la médecine ?}}} }}
« Avant l'époque du dépistage, 1 enfant sur 700 naissait trisomique 21.
Les deux moyens de dépistage, l'échographie et les marqueurs sériques concernent toutes les
grossesses et indiquent des éléments ou un niveau de risque de Trisomie 21.
Un seul moyen de diagnostic, le caryotype réalisé le plus souvent par amniocentèse, ne concerne que
les femmes à risque et peut entraîner des complications.
Depuis qu'existe le dépistage, 1 enfant sur 1500 naît trisomique 21 ».
{{ {{{Que dit la loi ?}}} }}
« Le dépistage par le dosage des marqueurs sériques maternels doit être proposé à toutes les
femmes. (Arrêté ministériel de mai 1997).
Paradoxe : le dépistage échographique n'est pas régi par la loi bien qu'étant nettement plus
performant ».
{{ {{{Quel est le coût pour la collectivité ?}}} }}
« Les examens de dépistage sont pris en charge quel que soit l'âge des femmes.
Le caryotype fœtal est totalement pris en charge quand le dépistage a placé la patiente dans un
groupe à risque ».
{{ {{{Quelle est la place du médecin ?}}} }}
« Le médecin se doit d'accepter la demande de dépistage, mais il doit en expliquer les conséquences
éventuelles:
- Les faux positifs nécessitent un prélèvement fœtal (amniocentèse, cordocentèse...) avec risque de
fausse couches ;
- Les faux négatifs qui aboutissent à la naissance d'un enfant Trisomique 21
La décision conduira à l'acceptation ou au rejet d'un enfant trisomique 21 ».
{{ {{{Que devient le foetus ?}}} }}
« Le diagnostic anténatal de T21 débouche habituellement sur une demande d'interruption médicale
de grossesse.
Le corollaire est que la naissance d'un enfant trisomique tend à apparaître comme une erreur
(faute?) médicale, conduisant avec une grande fréquence à des actions en justice.
Nous pensons que, tout en respectant les choix des parents, il est impératif de s'interroger sur la
place faite aux handicapés dans une société qui organise leur élimination en cours de grossesse ».
{{ {{{2EME SITUATION}}} }}
Mme X, 22 ans, accompagnée de son mari, 24 ans, vous amène les résultats de l'échographie
morphologique de la 22 SA :
- « ...morphologie globale normale
- ...en dehors d'une absence d'avant-bras et de main à droite »
« Cette situation est toujours vécue de manière dramatique par les parents, qui, tout au bonheur
d'un déroulement jusque là normal de la grossesse, ne se sont, en fait, pas préparés à être
confrontés :
- d'une part à une anomalie qu'ils ne peuvent pas voir directement, quoiqu'ils en aient perçu les
images échographiques
- d'autre part à un devenir qui leur paraît complètement incertain et globalement plutôt noir que
rose.
Pour pouvoir les aider dans leur démarche, le médecin doit connaître les limites de son intervention
».
{{{ {{Que dit la loi}} }}} ?
« La loi dit qu'en cas de découverte d'une anomalie en cours de grossesse, le dossier peut être
soumis à un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal. Il existe un centre dans chaque grande
ville de France, regroupant en son sein des échographistes, des généticiens, des pédiatres, des
obstétriciens et différents spécialistes d'organes.
Le centre pluridisciplinaire peut être sollicité :
- soit par les parents,
- soit par le médecin traitant avec l'accord des parents bien sûr.
Le centre pluridisciplinaire n'est pas un tribunal : il ne va donner qu'un avis consultatif, d'abord sur
les possibilités évolutives et curatives en disant par exemple, en cas d'anomalies d'un membre, quel
appareillage, quelle technique chirurgicale, quel traitement médical permettra à cet enfant, plus tard
à cet adulte de mener une vie aussi normale que possible.
Le centre pluridisciplinaire donnera également un avis sur une éventuelle interruption de grossesse si
les parents la demandent. Cet avis est consultatif. La loi précise que si les parents demandent une
interruption de grossesse, il faut qu'un accord soit donné par écrit, signé par deux médecins dont l'un
faisant partie d'un centre pluridisciplinaire. On voit donc que, même si cet avis n'est que consultatif,
il sera malgré tout difficile aux médecins faisant partie d'un centre d'aller contre l'avis de leur groupe
».
{{ {{{Que peut le médecin}}} }} ?
« Dans la discussion qu'il a avec la famille, le médecin ne doit pas se substituer aux parents.
Ce n'est pas moi, médecin, qui vais avoir à prendre en charge au quotidien cet enfant plus tard et à
l'élever.
Le milieu familial social et culturel dans lequel il va vivre, n'est pas le mien, mais celui des parents.
Il ne faut donc pas transposer nos opinions et nos options personnelles dans les conseils et les avis
que nous donnerons au couple qui vient nous voir.
Notre rôle de médecin est au contraire d'organiser l'accès au diagnostic et à l'information la plus
large et la plus éclairée possible. Tout cela nécessite de permettre aux parents de rencontrer des
soignants qui les conseilleront, en l'occurrence pour une anomalie de membre : des chirurgiens
orthopédistes, des pédiatres, des rééducateurs fonctionnels, voire des familles confrontées aux
mêmes problèmes...sans oublier l'assistance de psychologues.
Tout au long des démarches des parents, démarches qui se feront dans la douleur, le rôle du
médecin n'est pas de donner un simple avis technique froid, mais aussi d'être toujours présent pour
les accueillir et les entendre sans a priori, et sans se substituer à eux dans la prise de décision.
Cette démarche, aussi humaniste que technique, constitue, à mon sens, l'éthique du soignant en
diagnostic prénatal ».
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