théâtre
dès 13 ans
45 minutes
L’INTERVENTION
CIE THÉÂTRE DU MANTOIS
DOSSIER D’ACCOMPAGNEMENT
SPECTACLE VIVANT
FESTIVAL
JEUNE PUBLIC ET FAMILLES
19E ÉDITION
15 MARS < 1ER AVRIL 2017
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L’INTERVENTION
CIE THÉÂTRE DU MANTOIS
Théâtre
Dès 13 ans
Durée 45 minutes
Mise en scène
Eudes Labrusse et Jérôme Imard
Jeu
Claire Fretel et Philipp Weissert
Costumes, éléments scénographiques et accessoires
Cécile Pelletier
Le taudis d’un couple d’ouvriers : Marcinelle et Edmond sont
jeunes et courageux mais la pauvreté et les privations leur
pèsent. Ils nont à se partager qu’un morceau de pain et le
souvenir douloureux de leur petite fille, morte à l’âge de deux
ans parce que le médecin nest pas arrivé à temps. Et c’est cette
même pauvreté qui met leur amour à rude épreuve.
La pièce s’ouvre ainsi sur une scène de jalousie mutuelle : il lui
reproche de regarder avec un peu trop d’attention les beaux
hommes riches ; elle a peur qu’il ne cède au charme des belles
toilettes d’une de ces dames…
La rupture de leur couple est déjà proche quand font irruption
dans leur vie une demi-mondaine et son baron du moment, le
riche excentrique M. Gerpivrac.
Marcinelle et Edmond sont alors tiraillés entre la fidélité à
leurs origines modestes faites de bonheurs simples, et l’attrait
éblouissant d’une vie luxueuse, que leur fait entrevoir cette
nouvelle rencontre…
C’est la question de l’injustice et des cloisonnements
sociaux que pose l’auteur, avec humour et tendresse,
dans cette «comédie» aussi grinçante que virulente.
Le Théâtre du Mantois en propose une forme
itinérante et autonome, avec un dispositif particulier
en bi-frontal et un «jeu de rôles» virtuose des
comédiens qui interprètent à deux chacun des deux
couples…
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AUTOUR DU SPECTACLE
Une forme itinérante de proximité
Le projet est conçu comme une forme itinérante et
autonome, destinée à être jouée dans des lieux alternatifs :
salles d’établissements scolaires, médiathèques, locaux
associatifs, petites salles... Il permet ainsi de faire
découvrir en toute proximité un aspect méconnu du
théâtre hugolien.
Un quatuor en duo : le grand théâtre (social) du
monde
C'est la particularité du travail que nous menons autour
de la pièce d'Hugo : dans cette dernière, deux couples
sont présents sur scène, la distribution concernant donc
quatre acteurs ; notre traitement propose une "réduction"
avec seulement deux comédiens dont chacun interprète
les deux hommes ou les deux femmes de chacun des
couples. Naturellement, ce choix d'un "quatuor en duo"
est orienté par la forme même du spectacle – qui se veut
donc légère et itinérante : il est plus adapté de jouer à
deux dans une salle de classe qu'à quatre, aussi bien en
termes d'espace que de réalité économique.
Mais ce choix est avant tout porteur de sens, aussi bien
dramaturgique et théâtral que social, et nous semble
approfondir l'essence même des intentions de la pièce.
Qu'un même acteur joue alternativement le rôle d'une
personne pauvre ou riche nous semble renforcer l'idée
que les injustices ne reposent sur aucune valeur autre
qu'un déterminisme social malheureux : comme dit la
chanson, on ne choisit pas de naître dans la misère – et
le hasard aurait très bien pu faire que telle personne
opulente aurait pu vivre dans l'indigence, et vice-versa.
Ce "double jeu" met en relief le poids des contraintes
sociales. Il renvoie implicitement aussi, sur scène, au
"grand théâtre du monde" caldéronien : la vie est une
comédie dans laquelle chacun joue un "rôle" sans
l'avoir choisi, que Dieu (ou le hasard donc) nous a assigné
de façon tout à fait arbitraire – et qui aurait donc pu être
tout autre.
Cette manière originale d'aborder la pièce suppose une
adaptation énergique du texte original – puisque dans
ce dernier, il arrive que les deux femmes notamment se
croisent : une adaptation qui en respecte donc totalement
l'esprit, mais peut permettre au fond de le rendre
plus ludique et à même d'offrir une dynamique de jeu
réjouissante aux acteurs – qui devront s'engager dans une
sorte de "jeu de rôles" virtuose.
NOTE D’INTENTION
L’Intervention
fait partie d’une série de courtes
pièces, relativement méconnues, du «Théâtre
en liberté» que Hugo compose durant son exil à
Jersey et Guernesey : le recueil a été publié à titre
posthume en 1886 et les pièces qui le composent
n’ont jamais été jouées de son vivant.
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Une représentation en bi-frontal
Lautre particularité du projet sera scénique : la
représentation se développe dans une configuration bi-
frontale, avec des rangs de spectateurs en longueur de
chaque côté de la scène improvisée dans la salle.
Après avoir travaillé avec ce dispositif dans notre dernier
spectacle (Jeanne Barré, la Voyageuse invisible - et avec
les mêmes comédiens d’ailleurs, qui y sont donc rompus),
nous savons combien il renforce une grande intimité
avec les comédiens – même dans une forme qui est déjà
à la base conçue comme de proximité.
Ce choix est lui aussi lié aux contraintes de la forme
itinérante : le bi-frontal permet une configuration
immédiatement originale et simplement «spectaculaire»
quand on investit une salle de classe ou de médiathèque
– dans lesquelles le rapport frontal est toujours complexe
et peu satisfaisant.
Mais là encore, ce choix nous semble faire sens pour
jouer des rapports binaires que suppose la pièce
(homme / femme, couple riche / pauvre etc.) et que nous
renforcerons avec notre distribution en duo.
Une modernité du propos – et de la mise en scène
Ladaptation, qui est donc d’abord formelle (il fallait
redécouper certains passages pour pouvoir jouer à deux
au lieu de quatre), et la mise en scène, devaient aussi se
pencher sur une possible actualisation du texte.
Le propos, fondamentalement, demeure moderne : en
ce qui concerne bien sûr les cloisonnements sociaux,
le poids des inégalités ; mais aussi dans les rapports
psychologiques, ambigus, malsains même, dans le regard
des riches sur les pauvres et vice-versa.
Le contexte (le milieu du XIXe) est toutefois évidemment
daté et le texte sans doute peu parlant pour certains de ses
aspects (et notamment le cadre social) pour les plus jeunes
à qui le spectacle est destiné : certaines modernisations
ont été envisagées pour inscrire le spectacle, par les
costumes, les accessoires, la musique surtout – qui jouera
entre rock et rap, dans une forme de contemporanéité.
Le miroir des apparences
Cette modernité du propos est fortement présente à
travers la fascination pour les apparences. Avec cette
courte pièce, Hugo explore et tourne en ridicule la façon
dont l’être humain a tendance à toujours trouver l’herbe
plus verte dans le pré du voisin. Marcinelle et Edmond ne
sont pas les seuls envieux : Eurydice aspire à retrouver la
simplicité d’une vie sans mondanité et le cœur d’artichaut
du baron s’éprend de Marcinelle. Une thématique qui
renvoie bien sûr à notre société de séduction et de
consommation qui encourage à vouloir toujours plus de
possessions, de beauté, de richesse... Au mépris de ce que
la vie a déjà offert à chacun.
Scènographie de
Jeanne Barré, la voyageuse invisible
,
création 2014, compagnie Théâtre du Mantois
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POUR ALLER PLUS LOIN
LE TITRE : UN «THÉÂTRE D’INTERVENTION» ?
La raison pour laquelle Victor Hugo a choisi ce titre nest
pas évidente au premier abord.
On voit bien sûr qu’Eurydice et Gerpivrac «interviennen
dans la vie de Marcinelle et Edmond, à la fois pour leur
proposer le rêve qu’ils croient caresser et pour leur en
montrer l’inanité. La connotation du mot de ce point de
vue renvoie du reste à la Providence, donnant à la pièce
un faux air de conte.
On peut penser aussi au rôle que joue la robe de l’enfant à
la fin de la pièce : elle «intervient» en quelque sorte pour
empêcher le couple de se briser.
Mais il est possible de deviner peut-être une autre
intention encore d’Hugo : il s’agit là, en effet, de l’un des
premiers exemples de ce qu’on a pu appeler par la suite
précisément le «théâtre d’intervention», un théâtre
politique s’essayant à regarder la réalité en face pour
éperonner la conscience des spectateurs.
C’est, avec
Mille francs de récompense
et
La Forêt
mouillée
, que l’on trouve aussi dans le
Théâtre en liber
,
une des rares pièces de Hugo dont l’action se déroule
au XIXe siècle. Elle est même la plus contemporaine de
toutes, puisque, écrite entre le 7 et le 14 mai 1866, la pièce
se passe exactement l’un de ces jours-la, Hugo s’étant
amusé à glisser des allusions puisées «en direct» dans les
journaux de la semaine.
Au-delà de l’anecdote, cette tentative d’un «théâtre du
quotidien» bien avant la lettre a incontestablement valeur
«d’intervention» de la part de son auteur, de prise de
position.
Elle est, tout en restant souvent cocasse, une dénonciation
des aliénations et des déterminations, elle expose
clairement un point de vue critique sur l’ordre social, sur
la domination des femmes par les hommes aussi. Elle
est, même, un cri de colère contre le fait que la condition
sociale a droit de vie ou de mort sur les individus : moins
pauvre en effet, la fille de Marcinelle et d’Edmond ne serait
pas morte.
Si notre contexte social n’est plus celui du Second Empire,
il n’est pas certain que tout le scandale en soit aujourd’hui
épuisé, et il est sûr en revanche que
L’Intervention
met en
œuvre l’un des ressorts les plus nécessaires du théâtre
moderne : la révolte et la critique des injustices.
La forme proposée par le Théâtre du Mantois (spectacle
«hors les murs», joué par exemple au cœur même d’un
établissement solaire, avec un rapport public très proche,
accentué par la bi-frontalité) va dans le sens de cette
notion d’un «théâtre d’intervention».
LA MORT DE LA PETITE FILLE ET CELLE DE LÉOPOLDINE
Léopoldine est la fille de Victor Hugo.
En février 1843, âgée de 19 ans, elle épouse Charles
Vacquerie. Quelques mois plus tard, les époux se rendent
chez un notaire dans la ville de Caudebec à bord d’un
canot neuf. Au retour du rendez-vous, un tourbillon de
vent renverse la barque. Léopoldine finit par se noyer et
son mari, pourtant bon nageur, se laisse mourir dans l’eau
pour accompagner sa jeune femme.
Les morts prématurées et tragiques de sa fille et de son
gendre auront une très grande influence sur l’œuvre et la
personnalité de Victor Hugo.
L’écrivain napprendra la mort de sa fille préférée que
quatre jours plus tard dans la presse. « On mapporte de
la bière et un journal, Le Siècle. J’ai lu. C’est ainsi que
j’ai appris que la moitié de ma vie et de mon cœur était
morte » écrira-t-il plus tard.
Ce drame va effectivement bouleverser la vie de Victor
Hugo. La mort de Léopoldine impressionnera aussi
beaucoup sa jeune sœur Adèle Hugo âgée de 13 ans, au
point d’ébranler la santé psychique de l’adolescente.
Mesurant la fragilité de la vie et du bonheur, l’auteur
s’abstient de toute publication pendant plusieurs années. Il
s’initie aussi au spiritisme et aux tables tournantes. Enfin,
ce pilier de l’ordre monarchique et bourgeois se mue en
héraut des humbles et de la République.
Il consacrera à la mémoire de sa fille de nombreux poèmes,
notamment le fameux «Demain, dès l’aube, à l’heure où
blanchit la campagne…» et
À Villequier
dans
Pauca Meae,
l’ensemble du quatrième livre
Les Contemplations
, ainsi
que : «Elle avait pris ce pli...»
Dans
L’intervention
, un personnage absent est essentiel
à l’intrigue : celui de la petite fille du couple Marcinelle-
Edmond, morte de maladie à deux ans (voir la fin de
l’extrait proposé) ; c’est son souvenir qui, dans la dernière
scène, permet au couple de résister à la rupture.
Il est évident que, dans la pièce, ce fantôme de la petite
fille a pour l’auteur des échos très forts avec la disparition
de sa propre fille.
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