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aux débats nationaux dans les années
1996-2002.
Dans ces débats, notre modèle
laïque est mis à l’épreuve, la nation
française, dans la diversité de ses
composantes, est questionnée sur ses
capacités réelles d’intégrer les nou-
veaux venus dans le respect de leur
identité culturelle et/ou cultuelle.
De leur côté les citoyens français de
confession musulmane sont appelés à
s’expliquer, leur volonté d’intégration
est mise en doute, l’islam est ques-
tionné sur sa « compatibilité » avec
un État laïque… Tout au long de ces
trente dernières années le débat est
récurrent, s’intensiant chaque fois
qu’un fait nouveau défraye l’actua-
lité. Et ces faits n’ont pas manqué !
(voiles, djihad, attentats, agressions,
construction de mosquées, prières
dans les rues, imams intégristes,
etc.). Ce débat est devenu un enjeu
électoral en nourrissant les xénopho-
bies les plus haïssables. Durant ce
même laps de temps les radicalités
musulmanes et les intégrismes les
plus obtus se sont fortement dévelop-
pés, donnant apparemment raison à
ceux qui pensent que de toute façon il
n’y a pas compatibilité entre l’islam et
la démocratie mais suscitant le déses-
poir de ceux qui pensent au contraire
que notre modèle laïque, bien com-
pris et bien appliqué, devrait per-
mettre l’intégration du culte musul-
man dans la société française, de la
même façon que celle-ci a intégré le
culte catholique longtemps hostile à
la République et à la démocratie.
Une trÈs opportUne
convention
C’est dans ce contexte historique
que la Convention citoyenne du
CFCM prend toute son importance.
Précédée d’un préambule principiel,
elle comprend 19 articles regroupés
en deux chapitres : 1) les Musulmans
au sein de la société française et 2) le
CFCM et les attentes des Musulmans
de France.
Dans le préambule le CFCM assure
que « la communauté musulmane »,
tout en afrmant son identité, sa
culture et sa religion, « aspire à pré-
ciser sa place, son rôle et sa contribu-
tion dans la société française. […] Si
l’islam est unique en sa doctrine, il
est multiple dans ses expériences […]
et il adopte comme principe fonda-
teur2 le respect des règles et des lois
républicaines. […] Les Musulmans de
France considèrent la laïcité comme
un acquis majeur du vivre-ensemble
et de la non-discrimination des ci-
toyens ». Quelques lignes plus loin, la
Convention afrme que « l’islam est
parfaitement compatible avec les lois
de la République « et qu’il n’y a nul
besoin de textes nouveaux, d’adap-
tation législatives ou d’évolutions
jurisprudentielles : l’islam trouve ses
repères dans le droit commun ».
Revenant sur l’un des aspects les
plus controversés des débats récur-
rents évoqués plus haut, le CFCM
afrme ainsi que les lois républicaines
et la laïcité constituent la loi commune,
qu’elles garantissent le libre exercice
des cultes et qu’elles sont opposables
aux pratiques sociales et religieuses
qui ne respecteraient pas la liberté de
conscience, la dignité et l’intégrité des
personnes. Cette reconnaissance expli-
cite du caractère « universel » de la loi
commune, en quelque sorte en sur-
plomb des prescriptions religieuses, est
aussi un appel à protection par elle. Il y
a là une incontestable évolution si l’on
se réfère aux discussions des années 90.
2
On notera la force de
l’expression employée :
principe fondateur !