À la suite de l’annexion de Metz et de
Strasbourg, Nancy devient la capitale
de la France de l’Est. C’est une ville en
pleine croissance démographique. En
une quarantaine d’années, sa population
a doublé pour atteindre 121 000 habi-
tants au recensement de 1911 (un chiffre
supérieur à celui d’aujourd’hui). Cette
croissance s’explique par l’arrivée mas-
sive des Alsaciens et des Lorrains qui
ont quitté les territoires annexés parce
qu’ils refusaient de devenir allemands.
Ils arrivent à Nancy surtout en sep-
tembre 1872, avant l’expiration du droit
d’option prévu par le traité de Francfort.
Même s’ils se fondent dans la population
de la ville, ils n’en conservent pas moins
un patriotisme exacerbé. Parmi ces fa-
milles notons les Daum, originaires du
pays de Bitche qui vont transformer une
verrerie en une industrie d’art mondia-
lement célèbre. À la suite de cette im-
migration, l’espace urbain va se trans-
former. De nouveaux quartiers vont se
développer et de nouveaux bâtiments
vont être construits : l’hôpital central
(1882) près duquel s’installe la faculté de
médecine, la faculté des sciences (près
de la porte de la Craffe), les casernes
de l’ouest de la ville (à l’emplacement
actuel du projet ARTEM). Cette urbani-
sation s’est faite sans plan directeur,
contrairement à Metz que l’empereur
Guillaume II transforme en vitrine d’un
urbanisme allemand ambitieux.
Nancy commande un bassin industriel :
métallurgie (usines de Pompey, Frouard,
Neuves-Maisons et Pont-à-Mousson qui
n’est pas loin), chimie du sel (Dombasle,
Laneuveville). Cette présence de l’indus-
trie favorise l’activité des banques dont
la Société nancéienne de Crédit indus-
triel et la Banque Renauld. L’Exposition
internationale du Nord-Est de la France
de l’Est qui a lieu au parc Sainte-Marie
en 1909 est la vitrine de cette réussite
économique de la ville. Nancy possède
également une université fondée pen-
dant le Second Empire où enseignent
des professeurs aux noms prestigieux :
Hyppolite Bernheim (un des maîtres de
Sigmund Freud, lequel séjournera un
temps à Nancy), Christian Pfister (auteur
d’une monumentale
Histoire de Nancy
qui reste encore aujourd’hui une réfé-
rence) ou Ernest Bichat, un des élèves
de Pasteur.
Nancy est surtout le foyer de l’Art Nou-
veau. Ses artistes qui se sont réunis dans
une association baptisée
« l’École de Nan-
cy »
(présidée par Émile Gallé, puis à par-
tir de 1904 par Victor Prouvé) entendent
réaliser un art à la portée de tous fondé
sur la fabrication industrielle et des prix
raisonnables. Les créations des artistes
de l’École de Nancy sont distinguées et
récompensées dans les expositions na-
tionales et internationales.
Vers l’est, en direction de Château-
Salins, la frontière est à moins de 30 km
de la ville. Au nord, elle se trouve au-
dessus de Pont-à-Mousson. Les Nan-
céiens peuvent la franchir facilement.
Signalée par une simple borne, elle
n’est pas verrouillée. Pourtant, les sou-
venirs de l’invasion des Prussiens en
1870 restent encore présents dans tous
les esprits. Nombreux sont ceux qui si-
gnalent la vulnérabilité de Nancy, proté-
gée par le seul fort de Frouard construit
en avant de la ville. La fortification de
Nancy, vue comme un acte d’hostilité par
les Allemands après la guerre de 1870,
est effectivement sensible. Ce n’est qu’à
partir de 1913 qu’on décide la mise en
état du Grand Couronné. Les travaux, ré-
alisés sous l’égide de Foch, ne sont pas
terminés quand la guerre éclate.
Avec les élèves :
Identifier les différents
motifs des œuvres de l’Art
Nouveau présentées
dans l’exposition, leur thème
et leur source d’inspiration
(chaise aux ombelles,
vase « ce n’est pas pour
toujours », assiette à l’effigie
de Jeanne d’Arc).
1870-1914 :
UNE GUERRE ATTENDUE ?
4
Émile Gallé,
Chaise aux ombelles,
1902
© musée de l’École de Nancy (cliché C. Philippot).
¬ Nancy, capitale de la France de l’Est
Ce siège de style Art Nouveau a une
ligne très dépouillée : les pieds et les
traverses latérales sont d’un seul te-
nant, le dossier contient un motif qui
imite l’ombelle ou la berce, d’inspira-
tion japonaise.